Antananarivo est la capitale malgache, elle se situe au centre de l’île, sur les Hauts Plateaux dans la plaine du Betsimatatatra. Son passé rizicole est très ancien et les Hauts Plateaux ont toujours constitué les régions dominantes en terme de techniques culturales et d’irrigation. Malgré son altitude, la province est la première productrice de riz sur l’île cela pour une raison simple, la population y est plus nombreuse ici qu’ailleurs. La population malgache, de par leurs origines asiatiques, est une civilisation du riz, sa consommation est importante et sa culture impérative.
Antananarivo comprend aujourd’hui plus d’un million d’habitants, avec une consommation annuelle individuelle de 125 kilos, la consommation urbaine est estimée à 480 tonnes de riz par jour ; l’approvisionnement en riz est donc un enjeu considérable. Actuellement le riz provient de zones de production de plus en plus éloignées ; depuis longtemps la plaine du Betsimatatatra ne suffit plus à alimenter la population de la capitale ; les Hauts Plateaux non plus ne s’autosuffisent plus. Avec le temps la culture rizicole s’est alors étendue ; on met en valeur de nouvelles terres, on exporte les techniques culturales performantes, on spécialise des régions dans la riziculture. Mais la production n’arrive pas à suivre la progression de la population, désormais le pays doit se procurer du riz à l’extérieur même de l’île ; depuis une trentaine d’année le pays importe régulièrement pour compléter la production nationale.
La commercialisation du riz demande donc une organisation de plus en plus performante et cela est d’autant plus vrai dans les zones urbaines où la demande est par définition forte et la production rizicole très faible. Antananarivo, en tant que capitale de Madagascar est la plus grande ville et donc la plus difficile à satisfaire. De plus, le riz, bien qu’il puisse apparaître comme une simple céréale, n’est pas un produit standard, la demande est diversifiée, il devient donc plus complexe pour les opérateurs de la filière riz de satisfaire la demande urbaine.
La filière riz se complexifie donc avec le temps, les rapports entre producteurs et consommateurs deviennent inexistants alors que les exigences de ces derniers sont de plus en plus nombreuses. La filière constitue donc une organisation d’acteurs sollicités par un marché, qui tentent de le structurer, corriger les écarts de l’offre et satisfaire une demande en mutation permanente. La filière elle-même est donc modulable, changeant de sources d’approvisionnement, de circuits de commercialisation ; elle se présente sous une multitude de forme, s’adaptant sans cesse aux conditions dans lesquelles elle évolue. Une filière c’est avant tout un produit avec des caractéristiques particulières et pouvant se différencier en plusieurs catégories. Le riz ne fait pas exception, produit dans des régions différentes, avec des techniques différentes, le riz est un aliment diversifié qu’il faut savoir appréhender pour satisfaire réellement la demande. La filière c’est également des acteurs, un ensemble d’opérateurs qui se complémentent ou se concurrencent, formant ainsi des chaînes reliant les producteurs aux consommateurs. La toile ainsi formée on s’aperçoit que la filière riz n’est pas un, mais une multitude de sous-filières qui emprunteront alors des circuits de commercialisation différents.
Les acteurs de la filière
De la production à la collecte
La production
Le riz étant l’aliment principal de la consommation malgache, toutes les provinces sont productrices de riz, dans ce cas précis, celles qui nous intéressent sont les régions qui alimentent la capitale, soit par leurs excédents, soit par leur proximité, et la capitale elle-même .
Les Hauts Plateaux
a) Situation géographique
Cette région constitue les alentours proches de la capitale, c’est à dire le Faritany d’Antananarivo. Elle fait partie du grand bloc montagneux central, partie Nord des « Hauts Plateaux » malagasy. La région présente un relief accidenté avec des types de sols variés et un alluvionnement intense. L’altitude des vallées et des plaines varie de 1000-1200 mètres en Imerina à 1500-1800 mètres au Vakinankaratra.
Le climat est de type tropical d’altitude avec des apparitions possibles de gelées durant la période de juin-août qui est cependant relativement sèche. Le Faritany d’Antananarivo comprend trois régions :
• L’Imerina et sa riche plaine du Betsimitatatra irriguée par l’Ikopa et ses affluents.
• L’Itasy à l’Ouest, contrée plus sèche et plus ensoleillée avec d’intéressantes possibilités d’extension rizicole sur les zones volcaniques des marais d’Ifanja et de Fitandambo.
• Le Vakinankaratra au Sud, région surtout volcanique, très montagneuse, d’altitude plus élevée et de climat plus rigoureux pour les plantes tropicales. Ici le riz atteint ses limites de cultures avec la culture de variétés résistantes au froid. Le Vakinankaratra présente également quelques plaines de grandes potentialités rizicoles : Ambohibary-Sambaina, Antsirabe, Manandona et Iandratsay-Betafo.
b) Riz et saisonnalité
Dans la région des Hauts Plateaux, on considère qu’il n’y a pas de microproducteurs, c’est à dire des exploitants ayant une stratégie rizicole de subsistance, car ils disposent de bons moyens pour tirer le meilleur parti de leur parcelle. Mais on peut parler de micro-exploitations, la taille moyenne des parcelles étant de 64 ares, sur lesquelles ils réalisent les meilleurs rendements du pays. En 1999, la production des Hauts Plateaux représentait 1.01 millions de tonnes de paddy , sur un total national de 2.78 millions de tonne, soit 36.3%. Les exploitations sont au nombre de 501 965 sur un total de 1 721 000, soit 29.2% et cultivent sur une superficie de 319 180 hectares sur un total de 1 450 000, soit 22% ; le rendement y est donc de 3160 Kg/Ha pour une moyenne nationale de 1917 Kg/Ha.
Mais les Hauts Plateaux dépassent le Faritany d’Antananarivo pour descendre jusqu’en pays Betsileo, ce qui explique ces bons résultats. Si l’on regarde les données concernant juste la province , on obtient pour la même année une production de 523 070 tonnes de paddy pour une superficie rizicole de 194 310 hectares, soit un rendement qui reste tout de même supérieur à la moyenne nationale avec 2692 Kg/Ha. Malgré cela la province reste déficitaire net en riz, en effet elle produit 22.6% de la production nationale alors que les habitants représentent 29.2% de la population. Les Hauts Plateaux constituent la grande zone de production du Vary Gasy, c’est à dire du riz ordinaire local. La culture de riz de table et de riz de luxe y est très rare. Le riz sera souvent distingué selon son lieu de culture tel que le Mangamila, produit dans les alentours de la commune de Mangamila, au nord de la capitale, ou encore le Mangakely. La distinction entre les riz se fera également souvent par le travail d’usinage, il s’agit souvent de riz rouge qui le restera ou deviendra plus ou moins blanc selon l’effort effectué au décorticage.
Si la région est fortement rizicole, les excédents commercialisables sur la capitale sont très faibles, ainsi le plus gros du riz provient de la plaine du Betsimitatatra où se situe la capitale. On trouve quelques excédents au nord et à l’Ouest de la province, ravitaillant la ville durant les récoltes. Le Vakinankaratra alimentera également un peu la capitale mais reste une région déficitaire ; elle profitera de sa proximité pour commercialiser du riz durant les récoltes mais importera de grandes quantités durant la période de soudure. En ce qui concerne les saisons, il y en a trois sur les Hauts Plateaux. La première saison est le Vary Aloha dont la récolte a lieu entre fin décembre et début février, avant les fortes pluies. Cette culture est pratiquée sur 5 à 15 % des surfaces rizicoles (13% en Imerina, 20% au Vakinankaratra). La durée en pépinière y est particulièrement longue ce qui fait dire à certain qu’il s’agit d’une culture contrenature. La deuxième saison est le Vary Vakiambaty pratiqué sur 85 à 95 % des rizières. Sa culture est plus rapide que la précédente, 7-8 mois contre 9-10 mois, et la récolte a lieu en avril-mai, à la fin des pluies. Enfin il existe une saison intermédiaire, le Vary Siha, avec une récolte courant mars, mais cette pratique reste assez peu développée. Il est à noter qu’on enregistre des pluies de plus en plus tardives, perturbant les calendriers agricoles et repoussant ainsi le moment des récoltes.
c) Antananarivo et son agglomération
Située dans la plaine du Betsimitatatra, zone depuis longtemps mise en valeur pour la riziculture à l’aide de multiples barrages et canaux et alimentée par l’Ikopa, Antananarivo et son agglomération est également producteur de riz. Toujours d’après les données de l’Instat, en l’an 2000, la commune aurait produit 57 310 tonnes de paddy sur 20 470 hectares de rizière, soit un rendement de 2800 Kg/Ha. Cependant là encore les données varient entre les différentes sources, si l’on prend les données fournies par la Minagri, il y a une certaine entente sur les superficies mais les rendements sont revus à la baisse, jusqu’à plus de la moitié pour certaines années. La plaine ainsi irriguée constitue l’essentiel de la production de la capitale sur laquelle on pratique essentiellement du Vary Aloha. Cependant à l’Est de la ville, le relief plus accidenté laisse place à une riziculture de bas fond et de tanety sur lesquels le Vakiambaty est plus approprié. Le Sud de la ville laisse place également à de nombreuses plaines sur lesquelles le Vakiambaty est également pratiqué. La riziculture sera présente également jusque dans la ville elle-même (riziculture intramuros), en concurrence direct avec les aménagements urbains. Beaucoup de rizières vont aussi servir à la fabrication de briques pour les constructions urbaines.
Les exploitants d’Antananarivo sont caractérisés par une assez bonne maîtrise de leur culture, mais sur des parcelles très réduites ne permettant pas de satisfaire la consommation de la majorité des ménages paysans. Cependant quelques exploitations de la plaine de Betsimitatatra possèdent plus de deux hectares de rizière et arrivent ainsi à produire des excédents qui seront commercialisés sur la capitale. Le riz étant de première saison, précédent la période de soudure, ces exploitations ont l’avantage de tirer un bon prix de leur production sur les marchés. A l’Est de la ville, les exploitations sont très réduites, la production y est plus faible et sont toutes déficitaires en riz.
Le gros de la production de la capitale est donc réalisé dans la plaine du Betsimitatatra, en Vary Aloha, dont les rendements varient de 1.6 à 3.3 T/Ha selon les secteurs hydrauliques . Les zones où sont cultivées du Vary Vakiambaty donnent quant à elles des rendements moyens inférieurs dus à un plus mauvais contrôle de l’irrigation. La riziculture urbaine et péri-urbaine semble être en déclin mais contribue toujours à subvenir à une partie non négligeable de la consommation urbaine, notamment par l’autoconsommation.
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Table des matières
Introduction
1ère partie : Les acteurs de la filière
I/ De la production à la collecte
A/ La production
B/ La collecte
C/ Le cas du Lac Alaotra
II/ Du lieu de production à Antananarivo
A/ La transformation du paddy
B/ Le transport
C/ Le cas du Lac Alaotra
III/ De la distribution à la consommation
A/ Les grossistes/semi-grossistes
B/ Les détaillants et autres intervenants
C/ Les consommateurs
2ème partie : Les sous-filières riz dans l’approvisionnement d’Antananarivo
I/ Les sous-filières riz
A/ Les différentes variétés et qualités de riz
B/ Les différents circuits de commercialisation
II/ La couverture des besoins
A/ Estimation de la demande urbaine
B/ Zones d’approvisionnement et flux vers la capitale
C/ La saisonnalité de l’approvisionnement
III/ La concurrence entre les sous-filières
A/ La concurrence entre les riz
B/ La concurrence entre les circuits commerciaux
C/ Le cas du Lac Alaotra
Suggestions pour une meilleure performance de la filière
Conclusion
Bibliographie
Liste des tableaux et graphiques
Annexes