Appropriation d’un outil numérique auprès des enfants avec autisme en IME

Le contexte politique et législatif

             L’autisme, confidentiel dans le grand public jusque dans les années 1980, s’est imposé progressivement dans les médias et dans les textes officiels. En 1996, un article modifie la loi d’orientation sur le handicap du 30 juin 1975 « relative aux institutions sociales et médicosociales et tendant à assurer une prise en charge adaptée de l’autisme » et reconnait officiellement l’autisme comme un handicap spécifique. La France se mobilise depuis plusieurs années dans ce domaine quels que soient les gouvernements. Après le premier plan autisme (2005/2007) sous la présidence de Jacques Chirac, puis le second en 2008/2010, c’est en 2012 que l’autisme est institué « Grande cause nationale »8 en France. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées puis la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République du 8 juillet 2013 en faveur d’une école inclusive, ont permis des avancées majeures dans la politique de scolarisation des élèves en situation de handicap (Lesain-Delabarre, 2016). Le site de l’éducation nationale9 présente les résultats de cette avancée en 2016, et précise que « depuis 2006, le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire a plus que doublé avec plus de 260 000 à la rentrée 2015. Leministère chargé de l’Éducation nationale a fait des efforts sans précédent pour améliorer la scolarisation en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap. L’objectif est d’aller vers une école toujours plus inclusive sachant s’adapter aux besoins spécifiques. Les différents dispositifs de scolarisation, les parcours de formation individualisés et les aménagements personnalisés en fonction des besoins des élèves sont autant de mesures participant à l’inclusion scolaire ». Le rapport de la HAS de 2010 dresse un état de connaissance sur les TED et déclare que la participation des familles dans la prise en charge des personnes avec autisme est essentielle et complémentaire au travail des professionnels. Rappelons que le Plan Autisme est un programme de niveau national et un ensemble de mesures déterminées par les différents gouvernements français dans le but d’améliorer la prise en charge des personnes avec autisme. Le troisième Plan Autisme (2013-2017) a été présenté en mai 2013 et propose des changements fondamentaux au niveau de la scolarisation de ces personnes. Il suggère de déployer « pour les enfants, un panel de structures adaptées à la scolarisation des élèves avec autisme ou autres TED pour permettre une graduation de la prise en charge et une continuité des parcours dans un fonctionnement rénové en conformité avec les recommandations (scolarisation individuelle, CLIS ou ULIS, unité d’enseignement). Ainsi, sera poursuivi le développement des SESSAD, en soutien à l’inclusion scolaire des enfants comme en accompagnement de l’avancée en âge des jeunes adultes et afin d’éviter ainsi les ruptures de parcours. De plus, l’accompagnement des autistes Asperger10 sera pris en compte dans le cadre de la création de ces nouveaux services vu la spécificité de leurs besoins » (Carlotti, 2013). C’est donc un véritable plan d’action qui se met en œuvre. Pourtant, malgré cette mobilisation de l’État, le 5 février 2014, la France a été pour la cinquième fois condamnée par le Conseil de l’Europe pour la piètre qualité de sa prise en charge des personnes avec autisme. « (…) le Comité observe que, s’agissant des enfants et adultes autistes, la France n’a pas, en dépit d’un débat national vieux de plus de vingt ans sur l’importance du groupe concerné et les stratégies pertinentes de prise en charge, marqué des avancées suffisantes, même après la promulgation de la loi du 30 juin 1975 d’orientation des personnes handicapées, dans la prise en charge de l’éducation des personnes autistes. Il observe également que la définition de l’autisme retenue par la plupart des documents officiels français, en particulier ceux produits dans le cadre de la présente réclamation, est toujours restrictive par rapport à celle de l’Organisation Mondiale de la Santé, et que nombre de statistiques nécessaires à l’évaluation rationnelle des progrès réalisés au fil du temps font toujours défaut. Il considère (…) comme établi que la proportion d’enfants autistes par rapport à l’effectif total du groupe – conçu extensivement ou restrictivement – scolarisée dans les établissements de droit commun ou spécialisés demeure, ainsi que les autorités elles-mêmes l’admettent, extrêmement faible et significativement inférieur à la proportion constatée pour les autres enfants, handicapés ou non ; il est également établi et non contesté par les mêmes autorités qu’il existe une insuffisance chronique de structures d’accueil ou d’appui pour autistes adultes » (para.54 ; propos rapportés dans le rapport de Langloys, 2014). Par la suite, la secrétaire d’état auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées, et de la lutte contre l’exclusion (2015) rappelle les ambitions du projet quant à son implication pour le soutien aux aidants dans un discours à l’occasion du Comité National Autisme et reconnait l’importance de l’implication des familles dans la prise en charge des personnes avec des TED : « je veillerais à ce que les représentants des personnes autistes et les familles y tiennent une large place ». En outre, la Ministre des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville de l’époque souligne, dans une circulaire ministérielle11, la nécessité d’évaluer les besoins sur le plan national et remarque les insuffisances qualitatives et quantitatives des prises en charge pour les personnes avec autisme. Plus récemment en 2016, Sophie Le Callenec (anthropologue et historienne de formation) et Florent Chapel (porte-parole et ancien président du Collectif Autisme qui est le père d’un enfant avec autisme âgé de 10 ans) dressent, dans une enquête, un état des lieux sur la situation des personnes avec des TED. Ils font un « constat accablant pour notre pays » et soulignent « qu’aucun combat sanitaire n’est plus urgent que celui de l’autisme ». Ainsi, le constat fait au sujet de la prise en charge des personnes avec autisme en France mobilise un grand nombre de personnes d’horizons différents. Le rapport du Conseil de l’Europe amène le gouvernement français à se pencher davantage sur des solutions pérennes permettant de favoriser l’accès aux apprentissages de l’ensemble des personnes avec autisme au sens large. Le statut particulier de la cause pour l’autisme permet de faire évoluer progressivement la situation éducative des personnes avec des TED. Cependant, cette évolution reste assez lente et infime pour les associations et les parents de personnes avec autisme.

Définition de chaque notion en fonction des classifications nosographiques

            Le pédopsychiatre Léo Kanner fut le premier à définir le tableau clinique de l’autisme dans son article « Autistic Disturbances of Affective Contact » en 1943. « L’article inaugural de 1943 présente une première cohorte de onze enfants : huit garçons et trois filles, tous d’un âge inférieur à 11 ans. Trois sont mutiques, mais les huit qui parlent n’utilisent pas le langage pour converser, inversent les pronoms et réagissent en écho. Ils s’absorbent dans des questionnements incessants, sans attendre de réponses, ou répètent des litanies. » (Hochmann, 2009, p.247). Dans ses travaux, Kanner souligne que les multiples troubles repérés chez ces jeunes sont en réalité la manifestation d’une seule et même « maladie ». D’abord appelé « autisme de Kanner », le tableau clinique prend ensuite le nom « d’autisme infantile précoce » appartenant aux psychoses de la petite enfance. Kanner (1949) retrouve chez ces enfants une forme de solitude extrême (aloneness) et une volonté à maintenir une certaine permanence des objets (sameness). L’auteur explique le trouble à l’aide de l’expression suivante : « mère réfrigérateur » qui traduit une attitude de manque de chaleur affective attribuée aux parents (souvent la mère) d’enfants autistes. Plus tard, Bettelheim (1967) détourne cette approche et s’appuie sur le rapport mère-enfant pour proposer une explication des causes de l’autisme. Le psychanalyste fait un parallèle entre l’état autistique et la sidération qu’il observe dans les camps de concentration, faisant l’hypothèse qu’une « situation extrême » peut pousser les jeunes autistes à se doter d’un rempart affectif. Cette approche a longtemps mis en difficulté et stigmatisé les mères d’enfants avec autisme et a amené un sentiment de culpabilité quant à l’origine du trouble de leur descendance. Olivia Cattan (2014, p. 252) témoigne dans son ouvrage de son expérience de mère et refuse que l’on puisse lui attribuer la cause de l’autisme de son fils : « Je n’étais pas la seule maman incriminée, je lisais de nombreux témoignages de femmes qui racontaient la même chose. Les mamans étaient coupables de tout, même du handicap de leur enfant et cela était la pire chose qu’une mère pouvait entendre. […] Mais les mères n’avaient pas besoin de toutes ces théories pour se sentir coupables. Depuis notre grossesse, nous étions culpabilisées par notre gynécologue de ne pas manger de façon équilibrée, de trop grossir ou pas assez, de ne pasarrêter de fumer, d’être trop stressées… Et lorsque l’enfant naissait, le chemin de la culpabilité suivait son cours. Cependant, lorsque l’enfant était autiste, tous ces doutes et ces angoisses de mère s’intensifiaient. Qu’avons-nous mal fait ? Et si les souffrances de notre enfant venaient de nous ? ». L’idée que la mère est à l’origine du trouble de ces enfants, comme l’a fortement développé Bettelheim (1967)15 dans ses ouvrages et son approche psychanalytique de l’autisme, a progressivement disparu des descriptifs épidémiologiques de l’autisme dans les années 80. De plus, Bartak, Rutter, et Cox (1975) concluent dans leur étude qu’il est peu probable que l’autisme soit la conséquence de la façon dont les parents se comportent. Les recherches épidémiologiques se sont orientées progressivement vers des causes d’ordre génétiques, neurobiologiques ou environnementales. Ainsi, « le terme autisme a défini l’ensemble des psychoses qui était considéré comme trop vague dans leur description et favorisait l’option psychanalytique qui aboutissait à culpabiliser les parents. De ce mouvement est née l’idée que l’autisme est un handicap et non pas une maladie mentale, ses causes sont avant tout génétiques, et les parents ne sont pas responsables de son apparition. » (Gayda, 2000, p. 15). En 2010, la HAS, dans son rapport, reconnait l’autisme comme un handicap qui est, selon l’OMS16, l’interaction entre des sujets présentant une affection médicale (paralysie cérébrale, syndrome de Down ou dépression) et des facteurs personnels et environnementaux (par exemple attitudes négatives, moyens de transport et bâtiments publics inaccessibles, et soutiens sociaux limités). La 10ème révision de la Classification Internationale des Maladies publiée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 1994 propose une nouvelle classification nosographique du trouble autistique. Cette classification catégorielle apporte à l’autisme un autre sens nosologique et le rend indépendant de la schizophrénie. L’autisme entre dans le groupe des troubles du développement psychologique (section F80 à F89) qui comprend le groupe des Troubles Envahissants du Développement (F84). Ce dernier est composé en partie (10 items au total) de l’autisme infantile (F84.0), de l’autisme atypique (F84.1) et du syndrome d’Asperger (F84.5). L’autisme atypique se divise en trois catégories : atypicité due à l’âge de survenue (F84.10), atypicité due à la symptomatologie (F84.11) et atypicité due à l’âge de survenue et à la symptomatologie (F84.12). Ainsi, les troubles envahissants du développement « sont un groupe de troubles caractérisés par des altérations qualitatives des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, ainsi que par un répertoire d’intérêts et d’activités restreint, stéréotypé et répétitif. Ces anomalies qualitatives constituent une caractéristique envahissante du fonctionnement du sujet, en toutes situations » (HAS, 2010, p. 2). Les premiers signes sont visibles rapidement dans la vie de l’enfant, parce que comme le souligne Baghdadli et Brisot-Dubois (2011, p. 6), « l’autisme est présent dès les premières années de la vie, envahit tous les aspects du développement de l’enfant et dure toute la vie ». Une majorité de spécialistes se basent sur la CIM-10 pour évaluer et établir le diagnostic des troubles envahissants du développement (TED) chez les individus. La HAS recommande d’utiliser, en France, l’appellation de TED pour toutes procédures de diagnostic et il est donc courant de retrouver la définition précédente dans les études et recherches françaises, puisque « cette classification faite par l’O.M.S. est une classification officielle, pour les gouvernements, pour l’épidémiologie mondiale et nous nous battons beaucoup pour l’utilisation de cette classification, car c’est un engagement international et nous savons que dans le domaine mental il existe plusieurs classifications dans différents domaines, mais il faut trouver un langage commun, comme nous avons pour les autres maladies. » (Gayda, 2000, p. 19). Un autre type de classification apporte un éclairage sur les différents troubles mentaux existants comme la 4ème version du Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux (DSM-IV) publiée en 1994. En l’an 2000, cette version est révisée et porte le nom de DSM-IVTR (Association American Psychiatric, 2004) afin de maintenir une cohérence avec la CIM-10 et on retrouve, dans cette classification dimensionnelle, les différentes formes d’autisme dans le groupe des Troubles Envahissants du Développement. Ce dernier est composé en partie (5 items au total) du trouble autistique (299.0), du trouble envahissant du développement non spécifié – dont autisme atypique – (299.80) et du syndrome d’Asperger (299.80). Les critères diagnostiques du trouble autistique sont, selon le DSM-IV-TR, les suivants : (1) altération qualitative desinteractions sociales, (2) altération qualitative de la communication et (3) caractère restreint, répétitif et stéréotypé des comportements, des intérêts et des activités. De plus, le retard ou le caractère anormal du fonctionnement doivent débuter avant l’âge de trois ans, dans au moins undes domaines cités ci-dessus. Les deux tableaux cliniques proposés par la CIM-10 et le DSM-IV-TR font écho avec la recherche clinique et statistique menée par Wing et Gould (1979) qui démontre la présence d’une triade autistique (« triad of impairments ») chez des jeunes avec autisme de moins de 15 ans. Les auteurs soulignent qu’il existe une association de trois catégories de symptômes et qu’il s’agit bien d’un syndrome17 composé de troubles de la communication verbale et non verbale, de troubles des relations sociales, et de la présence de centres d’intérêts restreints et/ou des conduites répétitives. Cette notion de triade a rapidement été reprise par les spécialistes du domaine pour définir plus largement les TED : « cette triade autistique constitue un bon critère pour le diagnostic de l’autisme, car elle regroupe les signes qui constituent ce que l’on peut appeler le noyau dur de l’autisme » (Rogé, 2008, p. 22). Cependant, aucun de ces deux manuels ne se positionne quant aux causes possibles de l’apparition de l’autisme chez un individu. « Lorsqu’en 1980 les termes ‘Troubles Envahissant du Développement’ TED – en anglais Pervasive Developmental Disorders (PDD) – ont surgi dans les classifications américaines, un débat international sur la nature de l’autisme s’est ouvert donnant corps aux hypothèses sur les relations entre les troubles du comportement et du développement cérébral, à l’instar d’ailleurs des discussions animées concernant la psychopathologie des ‘enfants-loups’ comme Victor l’enfant sauvage de l’Aveyron que le Dr Jean Itard (1977-1838), directeur de l’institut des enfants sourds et muets, avait recueilli à Paris et rééduqué (Itard, 1801, 1806) » (Berthoz, 2005). Or, plusieurs causes sont proposées en fonction du domaine scientifique des auteurs. Il est nécessaire de rester prudent avant de se positionner définitivement sur une cause épidémiologique de ce handicap, car il n’y a, pour le moment, aucun consensus scientifique quant aux possibles causes de l’autisme.

Les supports papier existant pour la planification

         Les éléments précédents nous permettent de souligner que « les autistes sont souvent des penseurs visuels » (Peytavy, 2011, p. 111). Pour accompagner les personnes avec autisme au niveau de leur développement cognitif et communicatif, étudié dans le précédent chapitre, il est d’usage de découper la journée (planification dans un emploi du temps) de l’enfant afin qu’il puisse en visualiser les différentes étapes. Les difficultés rencontrées dans la perception et la construction temporelle au cours du développement de l’enfant avec des TED demandent un certain aménagement de l’accompagnement pédagogique, et ce, quel que soit l’environnement. En conséquence, « pour cela, il est indispensable de structurer le temps en utilisant des outils visuels. L’enfant avec autisme doit pouvoir anticiper les événements au risque de le voir développer des comportements inadaptés liés à l’anxiété générée par cette situation imprévisible. Il est donc important de réaliser un emploi du temps visuel des activités à venir en ayant le souci de la régularité (même jour, même heure, même lieu…) du rythme des activités. Celui-ci sera réalisé en fonction de son niveau de représentation, à l’aide d’objet, de photos, voire de pictogrammes ou de mots écrits. Pour certains, l’inscription au jour le jour sur un support effaçable (tableau noir ou Velleda) est suffisante » (Leroy et Lenfant, 2011, p. 54). Ainsi, les supports de gestion de temps doivent être conçus en prenant en compte les ressources et les besoins de l’enfant, car il est important de pouvoir apporter un support adapté aux personnes avec des difficultés d’apprentissage afin qu’ils puissent bénéficier d’un ensemble d’informations utiles dans leur quotidien (Rodgers et Namaganda, 2005). Les pictogrammes utilisés sur la frise chronologique doivent également répondre de façon adaptée aux besoins en termes d’organisation et de représentation de ses activités. Il est important de ne pas faire régresser l’apprenant dans l’usage des pictogrammes et s’il est capable de lire le mot « manger », il ne faut pas se précipiter sur le pictogramme « manger » pour concevoir l’agenda quotidien. De plus, le support papier propose une infinité de possibilités quant à l’utilisation des pictogrammes et il est possible de faire évoluer l’agenda papier au fil du temps en fonction des nouvelles connaissances du jeune avec des TED. En effet, Beiger et Jean (2011, p. 134) reprennent cette idée au travers de ces propos : « même si les enfants autistes apprécient la routine, le but n’est pas de les renforcer à l’intérieur de celle-ci, mais de leur permettre de s’adapter au fur et à mesure en travaillant la même chose, mais avec des ateliers différents, ou en incorporant des nouveautés ». Alors, Pry (2013, p 51) souligne que « l’utilisation de ces outils obéit à une hiérarchie développementale qui va de l’élément le plus concret au plus abstrait (objet, objet miniature, photo, dessin, icône, texte). Il est important d’adapter ce support visuel aux caractéristiques de l’enfant, à la complexité de la tâche et à la lisibilité du symbole utilisé ». À travers ces éléments, nous retrouvons la notion d’évolution des pictogrammes utilisés en fonction des ressources et capacités de l’enfant avec des TED qu’il est nécessaire de respecter. L’application çATED prévoit cette possibilité. Certains publics avec autisme utilisent l’agenda papier (le calendrier ou l’emploi du temps ; en format papier, tableau ou classeur… etc.) qui se présente comme une frise chronologique reprenant tous les événements ou activités de la journée. « Ils [les emplois du temps] sont des signaux visuels qui indiquent quelles activités sont à faire et dans l’ordre. Ils doivent être compréhensibles pour votre enfant, accessibles et détaillés » (Ouss-Ryngaert, 2008, p. 125). La décomposition de la journée dépend encore une fois des ressources et des besoins de l’enfant accompagné. Chaque tâche est représentée par un pictogramme photo, image ou mot écrit et chaque pictogramme est ensuite assemblé de façon juxtaposée sur un socle fixé au mur d’une des pièces du lieu de vie. Les pictogrammes, plastifiés, sont apposés sur le socle à l’aide d’une bande de Velcro®. Ce système permet de réutiliser le système plusieurs fois et d’initier l’enfant dans la création de l’agenda quotidien, avec l’aide du professionnel quand c’est possible. L’apprenant peut également être impliqué dans le travail de mise à jour du support papier au fil de la journée. En effet, quand une activité est terminée, il peut lui être demandé d’agir sur le pictogramme représentant l’activité qu’il vient de réaliser avec le professionnel. Pour notre étude, nous proposons deux exemples d’emploi du temps qui se rapproche le plus de l’application numérique utilisée pour nos observations. Le premier exemple (image 1) correspond à un emploi du temps journalier avec une chronologie horizontale (mais peut être aussi présentée de façon verticale) imagée et relayée par des pictogrammes ou des mots (Louis et Ramond, 2010, p. 117). Le second exemple (image 2) correspond à un emploi du temps hebdomadaire (Valkenborg et Vermeulen, 2013, p. 99) regroupant les différents découpages journaliers de la semaine. L’application que nous utilisons permet aux enfants de visualiser leur semaine (horizontalement ou verticalement), mais également un accès pour tous les jours de la semaine quand ceux-ci sont préprogrammés par l’encadrant ou l’enfant lui-même quand c’est possible.

Des propriétés physiques propres au support papier

            Les caractéristiques des supports de planification varient d’un outil à un autre et il est pertinent de soulever les besoins des enfants dans l’utilisation d’un tel support.
– La variété des emplois du temps d’une sphère à une autre : Selon Bintz (2015, p. 23), l’enfant avec autisme éprouve des difficultés pour réinvestir dans un autre contexte les acquis précédemment assimilés dans un contexte défini. De plus, elle ajoute qu’il est « de ce fait nécessaire de lui permettre de conserver des repères communs d’une activité à l’autre, d’un contexte à l’autre : (…), son timer pour visualiser le temps dont il dispose, pour manger à la cantine des pictogrammes identiques à ceux qu’il utilise à la maison ». L’auteur conclut que cet accompagnement permet, à l’enfant avec autisme, d’intégrer les procédures simples du quotidien grâce à de nombreuses répétitions dans un contexte identique dans un premier temps. Par conséquent, l’utilisation de pictogrammes identiques dans les différentes sphères de l’enfant lui permettra l’accès à de nouveaux apprentissages et à la généralisation des situations. Dans son témoignage36, Maude Dubé, éducatrice spécialisée, préconise d’utiliser les mêmes pictogrammes entre les différentes sphères (ex. : institution, maison et internat) ce qui demande donc une certaine collaboration entre les professionnels d’une même ou de différentes structures, mais également entre les professionnels et les parents (Yvon, 2014, p. 164).
– Disponibilité et permanence des informations liées à la planification : « Lorsque les informations sont présentées oralement, elles restent très peu de temps disponibles pour l’élève, contrairement aux informations visuelles qui peuvent rester présentes autant de temps qu’il en aura besoin. L’enfant va donc pouvoir tirer le profit maximum de ce type de présentation, et cela d’autant plus que les informations seront facilement reconnaissables » (Pry, 2013, p. 51). L’enfant avec autisme a besoin de pouvoir accéder à tout moment à l’information liée au découpage de sa journée, nous l’avons vu. De plus, ce besoin peut se traduire par le déficit existant au niveau de l’indice de mémoire de travail (Baddeley et Hitch, 1974) qui est faible chez les personnes avec autisme typique et atypique (Grimm, Assouline, et Piero, 2015). En outre, l’existence d’un Désordre du Traitement Temporo-Spatial (DTTS) des informations sensorielles chez les personnes avec des TED (Gepner et al., 2002) entraine un besoin de s’adapter au rythme de l’enfant afin qu’il puisse prendre connaissance des différentes informations. De ce fait, les informations en lien avec l’emploi du temps doivent être en permanence accessible (Sarfaty, 2015) pour que l’enfant puisse le consulter à tous moments et ainsi éviter des situations anxiogènes (Leroy et Lenfant, 2011, p. 54).
– Particularités du découpage des activités ou des tâches : « On notera qu’il est nécessaire d’ajuster ces emplois du temps séquentiels au niveau de développement des personnes » (Constant, 2013, p. 110). La précision du découpage des séquences de l’agenda papier dépendra des besoins et des ressources de l’enfant et donc d’un accompagnement individuel par les professionnels (Clerq, 2003, p. 68). Le faible niveau de flexibilité cognitive de l’enfant avec autisme ne lui permet pas de passer d’une tâche cognitive à une autre sans difficulté et donc également d’effectuer des transitions (Belhassen et Chaverneff, 2006, p. 147) entre les différentes pièces, comme évoqué précédemment. C’est en ce sens que multiplier les sources d’informations peut être contraignant pour l’enfant jusqu’à l’amener à ne pas être capable de retourner à un son support originel en cas de besoin. L’agenda devrait centraliser l’ensemble des informations détaillées de l’apprenant afin de lui proposer un seul et même outil capable de lui donner les renseignements nécessaires à un instant précis.
– Indications d’activité ou de tâche dissociées de la notion de durée : Le découpage de la temporalité ne se suffit pas à lui-même et doit être accompagné d’une mesure concrète du temps nécessaire à une activité (Philip, Magerotte, et Adrien, 2012; Tardif, 2010). De plus, Jacques Constant (2013) rappelle dans son ouvrage, que « la matérialisation de la durée est un élément rassurant, contenant et calmant, permettant aux personnes autistes les plus déficitaires de mieux moduler leur régulation émotionnelle, et donc de prévenir, au moins en partie, la survenue de crises comportementales » (p. 110). Pour répondre favorablement aux difficultés de perception et de construction temporelle, vu précédemment, un Time Timer® doit être associé à chaque tâche afin de permettre à l’enfant de gérer l’écoulement du temps pour acquérir une meilleure perception de l’enchainement des étapes de la journée (Philip, Magerotte, et Adrien, 2012, p. 9). Ainsi, l’emploi du temps ne peut être complet sans l’apport de repères temporels qu’apporte un outil de mesure du temps dans le but de lui permettre de « visualiser le temps qui passe » (Leroy et Lenfant, 2011, p. 55). Cette revue de la littérature, en lien avec l’élaboration d’un support papier, nous permet de préciser les conditions d’utilisation favorisant l’accompagnement des personnes avec des TED et respectant les particularités de chacun. L’adaptation est primordiale sur l’organisation du temps et de l’espace afin de permettre à l’apprenant de se repérer dans tous les lieux de vie. Dans leur article, Maillart, Grevesse, et Martinez Perez (2015) ont interrogé dix-neuf orthophonistes travaillant avec des patients avec des TED et soulèvent que « le développement des technologies numériques comme soutien à la prise en charge orthophonique est une piste importante » (p. 141). Au travers de leurs résultats, ils soulignent l’importance de pouvoir disposer d’applications ouvertes, personnalisables, et permettant l’élaboration d’une progression individuelle avec « l’utilisation de supports visuels et, plus particulièrement, de moyens de communication augmentée et alternative (pas seulement pour communiquer, mais aussi pour progresser sur d’autres objectifs personnels) » (p. 149). Dans leur conclusion, les auteurs recommandent de « réaliser des analyses de besoins tant pour les professionnels que pour les patients concernés » (p. 150) afin de proposer des supports numériques adaptés à l’accompagnement des personnes avec des TED.

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Table des matières

Introduction générale
Partie 1 : Cadre théorique
Chapitre 1. Le contexte socio-politique dans lequel s’inscrit cette étude
1.1.1. Le contexte politique et législatif
1.1.2. Le contexte associatif et accompagnement scolaire ou spécifique
Chapitre 2. L’autisme, les Troubles Envahissants du Développement (TED) ou Trouble du Spectre Autistique (TSA) ?
1.2.1. Définition de chaque notion en fonction des classifications nosographiques
1.2.2. L’évolution de la prévalence au cours du temps
1.2.3. Causes actuelles de l’autisme
a. L’approche génétique
b. L’approche neurobiologique
c. L’approche environnementale
Chapitre 3. La particularité du développement des personnes avec des TED sur les apprentissages
1.3.1. La perception du temps et la construction temporelle chez les enfants avec autisme
1.3.2. Le fonctionnement cognitif et communicatif des personnes avec des TED
a. Le traitement de l’information perceptive
b. Les fonctions exécutives
c. La cognition sociale
d. Le fonctionnement communicatif
Chapitre 4. Des outils papier de communication/planification vers des outils numériques
1.4.1. Les supports papier existants pour l’aide à la communication
1.4.2. Les supports papier existant pour la planification
a. La pratique professionnelle
b. Les personnes avec autisme
c. Des propriétés physiques propres au support papier
1.4.3. L’intérêt du support numérique dans les accompagnements pédagogiques pour les personnes à besoins spécifiques
Chapitre 5. Accompagnement pédagogique des personnes avec des TED et introduction de TICE dans la pratique des professionnels
1.5.1. Méthodes pédagogiques et effets sur les apprentissages
a. Programmes d’interventions à référence comportementale
b. Programmes d’interventions à référence développementale
1.5.2. Accompagner vers une forme d’inclusion en milieu scolaire ordinaire partielle ou totale
1.5.3. Rôle des parents et de la collaboration
1.5.4. Genèse instrumentale dans la pratique des professionnels autour des TICE
Chapitre 6. Problématique de recherche et hypothèses
Partie 2 : Expérimentation 
2.1. Approche méthodologique
2.1.1. Présentation du contexte local de l’étude
2.1.2. Population Cible
2.1.3. L’outil numérique de planification utilisé
a. Application numérique sélectionnée sur la tablette : çATED
2.1.4. Procédure expérimentale
2.1.5. Recueil des données
a. Les entretiens
b. Les données filmées
2.1.6. Place du chercheur sur le terrain
Partie 3 : Résultats
3.1. Enquête et analyse préliminaire sur l’intérêt de l’usage d’une application numérique de planification d’activité au regard des pratiques des éducateurs et des familles
3.1.1. Objectif pédagogique définit par les utilisateurs prescripteurs dans le cadre de l’utilisation de l’application çATED
3.1.2. Besoins éducatifs particuliers des enfants avec des TED dans la perception du temps et la construction temporelle
A. Compétences et difficultés des enfants avec des TED à se repérer dans le temps et dans l’espace selon les utilisateurs prescripteurs
B. Utiliser les situations imprévues et les changements de programme comme des éléments pédagogiques favorisant de nouveaux apprentissages
C. Analyse des outils de planification précédemment utilisés par les utilisateurs prescripteurs
3.2. Analyse de la pratique des encadrants au regard du processus d’appropriation
3.2.1. Processus d’appropriation du support numérique et usages de l’application çATED par les utilisateurs prescripteurs pour les enfants avec autisme
A. Niveau d’expertise des utilisateurs prescripteurs autour des outils numériques en début d’expérimentation
B. L’évolution de la programmation dans les différentes sphères de l’enfant : entre points de résistance et facteurs motivationnels
C. Renouvellement des pratiques pédagogiques d’accompagnement
3.3. Analyse des données qualitatives et quantitatives en lien avec le développement des enfants en situation d’apprentissage au travers de l’utilisation de l’application çATED
3.3.1. Les observations relatives aux enfants avec des TED
A. Analyse qualitative
B. Analyse quantitative
3.4. Croisement des observations par les utilisateurs-prescripteurs et les observations recueillies à partir des bandes vidéo
3.4.1. La communication verbale et non verbale
3.4.2. Les comportements-défis
3.4.3. La disponibilité cognitive
3.4.4. Les interactions multiples
Partie 4 : discussion et perspectives 
4.1. Argumentation autour des principaux résultats et hypothèses
4.1.1. Construction et évolution du processus d’appropriation des utilisateurs prescripteurs utilisant un support numérique de planification
A. Les freins et les leviers intervenant sur le processus d’appropriation d’un outil numérique des utilisateurs prescripteurs en situation d’apprentissage
B. L’application çATED : un outil de médiation traversant et favorisant les échanges entre les différentes sphères de l’apprenant tout en assurant un suivi identique et continu
C. L’évolution des représentations techno-imaginaires des utilisateurs prescripteurs au cours de l’utilisation de l’application numérique
D. Un renouvellement des pratiques des utilisateurs experts permettant de favoriser les comportements de communication non-verbale et anticipatoires des enfants avec des TED
4.1.2. Les effets de l’utilisation d’un support de planification numérique sur le développement sociocognitif des enfants avec des TED
A. Maintien de la disponibilité cognitive et diminution de la fréquence d’apparition des comportements-défis chez les enfants avec des TED
B. L’application çATED : un outil numérique de médiatisation favorisant la communication non-verbale et les interactions multiples auprès de la dyade professionnel-enfant
4.2. Forces et faiblesse du travail de recherche
A. L’implication et la présence régulière du chercheur référent sur le terrain d’expérimentation
B. Comment différencier « l’effet tablette » de « l’effet numérique » ?
C. Pertinence du cadre théorique
D. Développement du travail de recherche dans un contexte pluridisciplinaire
Conclusion
Bibliographie
Table des figures et tableaux
Index Auteurs
Glossaire

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