Les facteurs externes à l’école
L’un des premiers facteurs externes qui est évoqué dans les recherches mais également par les différentes équipes des MATAS est celui de la famille. La quasi totalité des élèves en rupture scolaire présenterait des difficultés d’ordre familial. Les problèmes rencontrés peuvent être de différentes natures telles qu’un soutien faible voire inexistant, une famille de type monoparentale, des parents avec un niveau d’étude faible, un niveau socio-économique bas ou encore un milieu social défavorable. La famille joue un rôle crucial dans les apprentissages de l’élève car elle va venir appuyer et consolider ce qui est vu en classe. Ainsi, une famille qui n’est pas en adéquation avec le modèle scolaire proposé va participer à la rupture. D’autres facteurs sociaux peuvent avoir leur impacte dans le décrochage tels que l’âge de l’élève. Chez les jeunes élèves, nous avons observé qu’il n’y avait pas de décrocheurs mais bien des potentiels décrocheurs puisque la rupture définitive se produit en général chez les plus grands. Ceux-ci peuvent décider de mettre fin à leurs études ou n’ont, tout simplement, pas de perspective d’avenir professionnel.
Des recherches ont également démontré que les garçons auraient une prédisposition plus élevée au décrochage que les filles. Ce phénomène a, du reste, été observé dans les différents MATAS du canton, la population masculine y étant en effet beaucoup plus importante. En second lieu, nous avons les problèmes individuels. Chaque individu est différent et présente une résilience aux événements propres à lui-même. Deux élèves présentant divers facteurs à risque ne vont pas réagir de la même manière suivant leur profil psychologique. Ainsi, un élève doté d’une bonne estime de soi va probablement pouvoir échapper au décrochage alors que celui qui en est dépourvu pourrait y sombrer. Ces différents facteurs peuvent être de l’ordre de l’estime de soi, la motivation, le niveau de dépression, les difficultés cognitives, les troubles de fonctionnement.
Les facteurs internes à l’école : Cette seconde catégorie comprend, premièrement, des facteurs liés à l’organisation et aux structures des écoles. Le manque d’organisation au sein de l’établissement et de la classe peut contribuer au décrochage de l’élève, au même titre que la politique de l’établissement face à l’orientation des élèves et à la pratique du redoublement (Crahay,2004). Enfin, les facteurs liés à la pédagogie pratiquée par l’enseignant auraient aussi une influence sur le processus de décrochage scolaire. « …un climat de classe négatif peut contribuer à augmenter les déficits d’attention, les troubles oppositionnels et les troubles du comportement des élèves7 ». Or nous savons que l’enseignant va en grande partie contribuer à la mise en place du climat de travail, c’est lui qui décide des interactions qu’il va mettre en place avec ses élèves en se basant sur les contraintes du terrain telles que le nombre d’élèves, les difficultés de certains et les aides à disposition.
Si nous reprenons la deuxième définition du décrochage « Le décrochage est la conséquence de la détérioration du lien entre le jeune, l’école et la société » (Favresse & Piette, 2004), nous constatons que les interactions mises en place entre l’élève et l’enseignant sont des facteurs importants dans le décrochage ou l’accrochage scolaire. (Gilles, Je., Potvin, Pi., Tièche, Ch.) Certains des facteurs cités ci-dessus ont une influence plus importante que d’autres sur le décrochage mais c’est bien la coexistence de différents facteurs qui va mener l’élève à devenir un potentiel décrocheur. Or, nous ne décrochons pas tous de la même manière. A partir de cette identification des facteurs de risque, nous observons que les élèves potentiellement décrocheurs présentent des profils différents (Fortin, Marcotte, Potvin, Royer et Joly, 2006).
La population MATAS : Les élèves des MATAS sont des enfants qui ont posé un problème à l’école. Le problème n’est pas de l’ordre des apprentissages, il réside dans le fait qu’ils perturbent le bon fonctionnement de la classe. Ils présentent, pour la majorité, des problèmes de comportement tels que de la violence comportementale et/ou verbale auprès des camarades, de l’enseignante et d’euxmêmes. Dans la typologie de Janosz, ce profil d’élèves « inadaptés » correspond à 40% de la population des décrocheurs. Le dispositif des MATAS n’est donc pas une réponse au décrochage scolaire puisqu’il n’est premièrement pas prévu pour tous les types de décrocheurs. Ainsi, les élèves de type « discret » ne sont pas envoyés dans les MATAS car ils ne posent pas de problème à l’école. Ces élèves, représentant 40% des décrocheurs, suivent un parcours scolaire qui est bien en dessous de leur potentiel et sont susceptibles de décrocher à la fin de l’école.
Le MATAS s’adresse donc à une catégorie précise de décrocheurs, ceux qui perturbent. Certains professionnels travaillant dans ces dispositifs, nous ont expliqué qu’ils étaient bien sûr ouverts à accompagner d’autres types d’élèves, mais qu’en pratique un élève présentant des troubles du comportement avait la priorité car il représente un plus grand danger et donc une urgence plus importante. En outre, les demandes concernant ce type d’élèves sont très rares car les enseignants ne sont pas dérangés dans leur gestion de classe ou ne sont pas attentifs à ce type de signaux. Il est important de souligner que les MATAS se chargent également des élèves avec des problèmes « lourds » qui doivent être réorientés dans d’autres institutions. Ces élèves ne sont pas des élèves en décrochage puisqu’ils ne sont tout simplement pas aptes à suivre une scolarité normale.
Approche d’un MATAS : la Ferme de Démoret
La Ferme de Démoret est un précurseur en matière de MATAS, il est en réalité le premier à avoir vu le jour et sert encore aujourd’hui de modèle aux nouvelles structures. Il faut remonter plus de dix ans en arrière pour voir naître ce qui à la base était un « projet pilote » entre deux directeurs qui souhaitaient mettre en place une structure pouvant accompagner les élèves qui n’étaient plus aptes à suivre le cursus scolaire. Le directeur d’établissement scolaire ainsi que le directeur du foyer Petitmaître à Yverdon, souhaitaient offrir à ces élèves une activité parallèle à l’école, l’idée de la ferme leur est apparue comme idéale pour des élèves du primaire. Ce projet nécessitait une collaboration étroite avec un agriculteur de la région qui devait mettre à disposition des locaux, les animaux mais également son temps aux service des élèves. La recherche d’un agriculteur n’était pas chose facile puisque les intérêts financiers étaient inexistants à l’époque et que l’investissement en terme de temps était très important au vue des obligations professionnelles des agriculteurs. Finalement, le choix s’est porté sur une ferme de la commune de Démoret, un petit village situé à vingt minutes de la ville d’Yverdon-les-Bains.
Monsieur Jean-Marc Bovay, le propriétaire de la ferme, a depuis toujours montré un fort intérêt dans le domaine de l’éducation et un tel projet représentait une magnifique opportunité pour allier cette passion à son métier. Bien que conscient de l’ampleur et de la nouveauté que représentait un tel projet, il a décidé de s’y investir en développant sa basse-cour et en construisant un pavillon destiné à accueillir les élèves. De plus, la classe du village qui était inoccupée à l’époque a pu être aménagée pour les besoins du projet. Ce « projet pilote » a rencontré un succès inattendu, débouchant sur la visite de la Cheffe du département de la formation de la jeunesse et de la culture, Madame Anne-Catherine Lyon qui n’a pu que constater le bon fonctionnement de la Ferme et les bienfaits que de telles activités pouvaient avoir sur les élèves en difficulté. Sur ce modèle, une vingtaine de MATAS ont vu le jour dans le canton de Vaud mais celui de Démoret reste une exception car il est le seul qui ait débouché sur un partenariat aussi fort avec un agriculteur, l’implication de Monsieur Bovay y étant évidemment pour beaucoup. Mais le MATAS de Démoret doit également sa réussite à une bonne triangulation entre les principaux intervenants de la Ferme :
Monsieur Jean-Marc Bovay, agriculteur et propriétaire de la Ferme
Madame Sylvie Bonneau, enseignante
Monsieur Sébastien Jeckelmann, éducateur spécialisé .
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Table des matières
1. INTRODUCTION
1.1 PREAMBULE
1.2 CHOIX ET MOTIVATION
1.3 OBJECTIFS DU MEMOIRE PROFESSIONNEL
2. PROBLEMATIQUE
2.1 QUESTION DE RECHERCHE
2.2 HYPOTHESE DE RECHERCHE
3. CADRE THEORIQUE
3.1 LE DECROCHAGE SCOLAIRE
3.2 LES MATAS
3.3 APPROCHE D’UN MATAS : LA FERME DE DEMORET
4. DEMARCHE METHODOLOGIQUE
4.1 LES PERSONNES RENCONTREES
4.2 LA DEMARCHE
4.3 L’ANALYSE DES DONNEES
5. ANALYSE ET RESULTATS DES DISCUSSIONS
5.1 TEMOIGNAGE DE L’ENSEIGNANTE GENERALISTE
5.2 LE PROFIL DES ELEVES MATAS
5.3 LES FACTEURS ACCELERANT OU RALENTISSANT
5.4 SYNTHESE
6. CONCLUSION
7. BIBLIOGRAPHIE
8. ANNEXES
8.1 LE PLANNING DE LA SEMAINE
8.2 LE BRUITOMETRE
8.3 LE BOUGEOMETRE
8.4 GRILLE D’ENTRETIEN POUR L’ENSEIGNANTE DE LA FERME DE DEMORET
8.5 GRILLE D’ENTRETIEN POUR L’EDUCATEUR DE LA FERME DE DEMORET
8.6 GRILLE D’ENTRETIEN POUR LE PROPRIETAIRE DE LA FERME DE DEMORET
8.7 GRILLE D’ENTRETIEN POUR L’ENSEIGNANTE GENERALISTE
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