Le transport de marchandises et la ville
ย ย ย La perception du transport de marchandises en ville (TMV) est souvent restreinte ร sa seule manifestation physique la plus รฉvidente : le poids lourd. Dans un sens plus large, le TMV renvoie plutรดt ร un ยซ circuit ยป impliquant lโensemble des activitรฉs permettant la circulation des flux matรฉriels dans la ville. On peut ainsi prendre en compte ยซ la sphรจre productrice de biens de consommation (lโindustrie lourde puis lโindustrie de biens de consommation et intermรฉdiaires), qui alimente les diffรฉrents รฉtages du systรจme de distribution (plateformes logistiques [โฆ], le commerce de gros, puis, plus prรจs des populations, le commerce de dรฉtail. Le circuit se poursuit, dโautre part, jusquโau consommateur sur son lieu dโhabitat (les dรฉplacements dโachat [auxquels il faut ajouter les livraisons ร domicile]), sans oublier les flux qui alimentent le systรจme de gestion de la ville (entretien des rรฉseaux urbains, chantiers, colis postaux, etc.). Le cycle sโachรจve par diffรฉrents circuits dโรฉlimination des dรฉchets ยป (Routhier, et al., 2002). Cette dรฉfinition permet de considรฉrer le TMV comme un systรจme, ces diffรฉrents composants รฉtant interdรฉpendants les uns des autres. La Figure 0.1.1 illustre la complexitรฉ du TMV, lorsque lโon prend en compte lโensemble des flux de matรฉriaux qui circulent dans une agglomรฉration. Dโaprรจs des estimations proposรฉes ร la fin des annรฉes 1990 (Patier & Routhier, 2009a), les flux inter-รฉtablissements reprรฉsenteraient environ 40% de lโensemble des vkms gรฉnรฉrรฉs par le TMV en agglomรฉration, les dรฉplacements dโachats motorisรฉs des mรฉnages environ 50%, et les ยซ flux urbains divers ยป (dรฉchets, chantiers, dรฉmรฉnagements, courriers) environ 10%. Ces chiffres ne prennent pas en compte les changements rรฉcents du secteur du TMV, notamment la croissance consรฉquente des livraisons ร domicile liรฉes au e-commerce. Cette dรฉfinition, รฉtant donnรฉe la vision systรฉmique du phรฉnomรจne quโelle suppose, est trรจs large. Elle prend en considรฉration des secteurs รฉconomiques trรจs diffรฉrents et des activitรฉs trรจs variรฉes : transport, mais aussi opรฉrations logistiques comme le stockage facilitant, voire permettant, la circulation des biens. Dans le cadre de cette thรจse, nous adoptons une dรฉfinition plus restreinte du TMV, justifiรฉe par notre objet dโรฉtude : les caractรฉristiques opรฉrationnelles de lโactivitรฉ des vรฉhicules de marchandises, et leurs impacts en termes de congestion routiรจre. Plusieurs considรฉrations contribuent ร dรฉlimiter notre dรฉfinition de cet objet. Laetitia Dablanc propose de dรฉfinir le TMV comme ยซ lโorganisation, par ou pour des professionnels, du dรฉplacement des produits dans un territoire urbain ยป (Dablanc, 1997). Cette dรฉfinition privilรฉgie les activitรฉs qui impliquent des professionnels (comme chargeurs, transporteurs ou destinataires) et exclut de ce fait les dรฉplacements dโachat des mรฉnages, qui rรฉpondent ร dโautres logiques et ร dโautres formes dโorganisation. Derriรจre le dรฉplacement des marchandises entre les รฉtablissements รฉconomiques dโune ville, il y a des entreprises, avec leur main dโลuvre. Leur activitรฉ de transport fait partie dโun processus industriel (Savy, 2011). Ce processus industriel, selon ses caractรฉristiques, peut รชtre proposรฉ comme un service ร dโautres entreprises qui y auront recours selon leurs besoins. Les entreprises qui proposent ces services forment le secteur dโactivitรฉ du transport de marchandises.4 Parfois aucune entreprise ne propose le ยซ juste ยป service recherchรฉe par lโentreprise consommatrice . Dans ces cas-lร , le processus peut aussi รชtre assurรฉ par lโentreprise elle-mรชme : on parle dans ce cas-lร de transport en compte propre. Nous considรฉrons donc le transport de marchandises comme un processus industriel, avec ses caractรฉristiques, et son organisation, ses logiques รฉconomiques et ses rรฉglementations (Savy, 2011). Il nรฉcessite donc dโรชtre distinguรฉ dโautres formes de dรฉplacements de biens physiques comme les chantiers, la distribution du courrier, la collecte des dรฉchets ou les dรฉmรฉnagements, qui rรฉpondent ร de processus de production distincts. Pour notre part, nous ne prenons pas en compte les livraisons ร domicile et nous nous concentrons sur le TMV inter-รฉtablissement. La distinction entre les deux formes de dรฉplacements de marchandises se justifie principalement de deux faรงons. La premiรจre considรฉration est dโordre mรฉthodologique : nous nโavons en effet pas de moyen de mesurer ces livraisons ร domicile, lโenquรชte que nous exploitons se concentrant sur les รฉtablissements รฉconomiques de la ville (voir chapitre 2 en particulier). La deuxiรจme raison est liรฉe ร des considรฉrations plus thรฉoriques et reprend les arguments รฉvoquรฉs jusquโici : la livraison ร domicile est un sous-secteur รฉconomique du TMV aux processus de production de lโoffre de transport trรจs particuliers et spรฉcifiques. Les processus du TMV inter-รฉtablissement sont relativement plus homogรจnes au niveau des pratiques (mรชme si lโun de nos objectifs, au cours de cette thรจse, est justement de montrer leur hรฉtรฉrogรฉnรฉitรฉ interne). Enfin, nous nous concentrons sur les caractรฉristiques de lโopรฉration du transport, c’est-ร -dire que nous excluons de fait lโanalyse des opรฉrations rรฉalisรฉes au sein dโinfrastructures ponctuelles des rรฉseaux de TMV. Ces opรฉrations ยซ nodales ยป peuvent se dรฉrouler ร lโintรฉrieur des entrepรดts et des plateformes, dans les lieux de dรฉpart (de production) ou dans les lieux de destination (de distribution) : stockage, manutention, packaging, transbordementโฆ Nous nous focalisons sur les activitรฉs se dรฉroulant hors des รฉtablissements, qui concernent les caractรฉristiques de lโopรฉration rรฉalisรฉe par les chauffeurs : circulation et stationnement des vรฉhicules, et livraison des marchandises jusquโร lโรฉtablissement. Gardant ร lโesprit la complexitรฉ du dรฉplacement des flux de matรฉriaux et de biens qui constituent le TMV au sens large, nous choisissons donc de nous concentrer sur les opรฉrations de transport qui concernent les รฉtablissements รฉconomiques de la ville.
La congestion routiรจre, ร la croisรฉe des approches disciplinaires
ย ย ย Le terme de congestion apparaรฎt au 19รจme siรจcle. Dโabord utilisรฉ dans le registre de la mรฉdecine, il dรฉsigne ensuite une circulation trop dense de personnes et de vรฉhicules, remplaรงant les termes ยซ dโembarras ยป et ยซ dโencombrement ยป utilisรฉs respectivement ร partir du 16รจme et 18รจme siรจcle (Lesteven, 2012). Ce rappel historique permet de souligner que le phรฉnomรจne de congestion est antรฉrieur ร lโinvention de lโautomobile, et dรฉcrit ร la base une ville trop ยซ pleine ยป. Les ingรฉnieurs du trafic dรฉcrivent plus spรฉcifiquement la congestion routiรจre comme la gรชne que les usagers de la voirie sโimposent les uns aux autres sur les routes, occasionnant des ralentissements et des pertes de temps. Pour le formuler autrement, la congestion apparaรฎt lorsque la demande des utilisateurs dโune route est supรฉrieure ร la capacitรฉ de lโinfrastructure, entraรฎnant une baisse de la qualitรฉ de service pour les usagers (Buisson & Lesort, 2010). Pour les ingรฉnieurs du trafic, il existe deux formes de congestion (Buisson, 2014) : la congestion de demande, gรฉnรฉrรฉe par lโaugmentation de la demande, comme cโest le cas en heure de pointe ; et la congestion de lโoffre, gรฉnรฉrรฉe par la diminution de la capacitรฉ de lโinfrastructure, comme cโest le cas par exemple ร cause dโun accident. On parle aussi de congestion rรฉcurrente ou nonrรฉcurrente. Pour lโanalyse du trafic routier, trois variables principales sont prises en compte : le dรฉbit (le flux de vรฉhicules), la concentration (le nombre de vรฉhicule par portion de route) et la vitesse. Les trois variables (dรฉbit, concentration, et vitesse) sont liรฉes par les diffรฉrentes reprรฉsentations du diagramme fondamental de la congestion (Figure 0.3.1). Prenons le cas dโune infrastructure hypothรฉtique, peu empruntรฉ ร un moment donnรฉ. Au fur et ร mesure que le flux de vรฉhicule (le dรฉbit) augmente, la concentration augmente. Dans la phase de trafic fluide, la relation entre dรฉbit et concentration est positive. Lโรฉcoulement du trafic est libre, et les vรฉhicules peuvent circuler ร une vitesse quasiment รฉgale ร la vitesse maximum autorisรฉe. La vitesse reste donc plus ou moins constante. Cette relation reste possible jusquโร ce que le point critique, correspondant ร la capacitรฉ thรฉorique de la voirie, soit atteint. Cโest le point oรน lโรฉcoulement libre du trafic nโest plus possible et oรน lโon passe en phase de congestion : les vรฉhicules se gรชnent les uns les autres et un goulot dโรฉtranglement se forme. Le dรฉbit diminue, la vitesse baisse, alors que la concentration des vรฉhicules sur lโinfrastructure continue dโaugmenter. La vitesse et le dรฉbit peuvent chuter jusquโร lโimmobilisation des vรฉhicules. Lโapprรฉhension de la congestion des ingรฉnieurs du trafic est donc avant tout physique : elle est liรฉe aux capacitรฉs dโune infrastructure et ร une demande ร un moment donnรฉ. Les รฉconomistes, eux, considรจrent la congestion comme une des externalitรฉs nรฉgatives principales liรฉes au transport routier. Cela signifie que lโutilitรฉ quโun individu retire de la consommation de lโinfrastructure routiรจre peut รชtre affectรฉe nรฉgativement par dโautres consommations effectuรฉes par dโautres individus, sans intรฉgration dans un processus de marchรฉ (Small & Verhoef, 2007). Dit autrement, les capacitรฉs limitรฉes des infrastructures routiรจres sont la source dโune importante destruction de bien-รชtre รฉconomique, notamment dans les zones proches des centres-villes oรน se concentrent la demande, et durant les heures de pointe. Sโil ne prend en compte que le coรปt privรฉ (ou gรฉnรฉralisรฉ) de son dรฉplacement, lโautomobiliste empruntant une route augmente la congestion de celle-ci. Il rรฉduit la vitesse de circulation proposรฉe par lโinfrastructure, c’est-ร -dire sa qualitรฉ de service, imposant un coรปt (social) ร tous les autres voyageurs prรฉsents : il y a donc des automobilistes ยซ en trop ยป sur la route (Koning, 2011). Les รฉconomistes considรจrent ainsi le coรปt gรฉnรฉralisรฉ du transport, qui inclue lโensemble des coรปts du dรฉplacement (prenant gรฉnรฉralement en compte les frais de transport, le temps du trajet et les coรปts liรฉs ร lโinconfort). Dans la thรฉorique รฉconomique, cette perte de temps peut รชtre รฉvaluรฉe et monรฉtarisรฉe : le temps est analysรฉ comme une ressource intermรฉdiaire indispensable ร la rรฉalisation des activitรฉs humaines (Becker, 1965). Le temps consommรฉ reprรฉsente un coรปt dโopportunitรฉ pour les voyageurs, dont la valeur dรฉpend de lโutilitรฉ que ceux-ci pourraient obtenir en substituant ร ce temps de trajet une autre activitรฉ. Les รฉconomistes sโappuient sur lโapproche technique des ingรฉnieurs du trafic, quโils enrichissent en introduisant la demande dโutilisation de la route (Prud’homme, 1999a), ร distinguer de la demande effective de la route (le dรฉbit). Sur la Figure 0.3.2, la quantitรฉ dโutilisation de la route (q, exprimรฉe en vkm) est reprรฉsentรฉe en abscisse, et le coรปt unitaire de cette utilisation (en โฌ / vkm) en ordonnรฉe. D(q) est la courbe de demande inverse qui reprรฉsente lโutilisation de la route en fonction du bรฉnรฉfice marginal que retirent les voyageurs de cette utilisation. La courbe I(q) reprรฉsente le coรปt supportรฉ par un automobiliste. Quand l’automobiliste est seul sur la route (q=0), ce coรปt est J. Quand le nombre de vรฉhicules sur la route augmente, la vitesse se rรฉduit, en raison du phรฉnomรจne de congestion. Le temps nรฉcessaire pour parcourir 1 km va donc augmenter, impliquant une hausse de I(q). Lโรฉquilibre est atteint en A, lร oรน I(q) coรปte D(q), avec un coรปt unitaire รฉgal ร L et une quantitรฉ dโutilisation des routes X. A ce point, l’automobiliste marginal supporte un coรปt รฉgal au bรฉnรฉfice marginal qu’il tire de l’utilisation de la route. Au-delร , il supporterait un coรปt plus grand que le bรฉnรฉfice qu’il retirerait, et ne voudrait donc pas utiliser la route. Cet รฉquilibre nโest pas ยซ optimal ยป au sens รฉconomique puisquโil implique une perte de bienรชtre collectif. On le voit lorsque l’on considรจre S(q), le coรปt social crรฉรฉ par un vรฉhicule en fonction de l’utilisation de la route. Ce coรปt social est รฉgal au coรปt individuel I(q) supportรฉ par le conducteur, augmentรฉ du coรปt que le vรฉhicule fait perdre ร tous les autres en les ralentissant. Cet automobiliste marginal inflige ร chacun des autres utilisateurs un surcoรปt, quโon peut appeler le coรปt social marginal de la congestion (Pigou, 1912), qui correspond ร CA sur le graphique. Cette approche sera ยซ empruntรฉe ยป aux รฉconomistes dans le cadre de ce travail de thรจse. Lโรฉquilibre optimal pour la sociรฉtรฉ est obtenu au point B, oรน S(q) croise D(q), qui correspond au coรปt unitaire M et ร la quantitรฉ dโutilisation Y. Au-delร de Y vรฉhicules, un vรฉhicule supplรฉmentaire engendre un coรปt social plus grand que le bรฉnรฉfice social qu’il crรฉe. Ainsi, la ยซ perte sรจche ยป liรฉe ร la surutilisation des routes, par rapport ร lโoptimum, รฉquivaut ร BCA.9 Ce type dโanalyse est relativement courant en รฉconomie des transports. La plus ou moins grande demande de route des poids lourd modifie la forme de la fonction du coรปt gรฉnรฉralisรฉ et social, puisquโon considรจre gรฉnรฉralement que les poids lourds รฉquivalent ร plusieurs vรฉhicules passagers, en raison de leur taille, leur relative lenteur et leur manque de maniabilitรฉ. Des ยซ coefficients dโรฉquivalence ยป entre poids lourd et vรฉhicules de passagers sont souvent calculรฉs pour lโanalyse du trafic routier (SETRA, 2001; LET, 2000). De mรชme, un chauffeur-livreur stationnant en double-file va รฉgalement avoir une incidence sur la forme de cette fonction, qui est estimรฉe pour une offre ร capacitรฉ donnรฉe : puisquโil ยซ capte ยป une partie de la capacitรฉ viaire, il influe sur la qualitรฉ de service de lโinfrastructure, et donc sur le temps de parcours des autres utilisateurs (ร demande constante) et, au final, sur le coรปt gรฉnรฉralisรฉ des trajets. Bien quโune littรฉrature existe sur le lien entre transport de marchandises et congestion (nous lโanalyserons dans les chapitres 7 et 8), les connaissances sur le sujet sont perfectibles. Dans cette thรจse, nous proposons une analyse de la congestion routiรจre en Ile-de-France prenant en compte les opรฉrations de TMV dans la forme des fonctions de congestion.
Formes urbaines : polysรฉmie et multiplicitรฉ des cadres thรฉoriques
ย ย ย Nous choisissons de caractรฉriser le concept de ยซ formes urbaines ยป par deux catรฉgories de dรฉfinitions. La premiรจre concerne les formes urbaines physiques, prenant en compte diffรฉrents รฉlรฉments, comme les rues, le parcellaire et le bรขti. La seconde concerne les formes urbaines socioรฉconomiques, concernant la rรฉpartition des activitรฉs humaines dans lโespace. Cette distinction est relativement courante. Rodrigue et al. (2017) parlent par exemple de formal land use et de functional land use. On retrouve aussi dans la littรฉrature des distinctions des formes urbaines basรฉes sur des considรฉrations mรฉthodologiques. Dans un article de recensement des indicateurs de formes urbaines de plusieurs villes europรฉennes, Schwarz (2010) diffรฉrencie les indicateurs physiques liรฉs aux ยซ paysages ยป urbains (landscape metrics) des indicateurs socioรฉconomiques (socio-economic indicators). Lโapproche physique de la ville recouvre plusieurs acceptations (Lรฉvy, 2005). La ville sโรฉtudie par ses tracรฉs qui forment le rรฉseau de voiries, la forme gรฉomรฉtrique de son plan. La situation du plan de ville ร un instant t correspond ร plusieurs processus : elle est ร la fois rรฉponse ร des contraintes spatiales naturelles, rรฉmanence de structures sociales et politiques plus ou moins anciennes, et consรฉquences dโune action dโamรฉnagement en cours (Viala, 2005; Hillier, 1996). Le dessin de la voirie en rรฉsultant va dรฉterminer son maillage gรฉnรฉral (les grandes artรจres dโune ville), et son maillage de dรฉtail (Allain, 2004), souvent plus complexe, qui sโobserve ร lโรฉchelle du ยซ morceau ยป de ville, dans les vides laissรฉs par les mailles du rรฉseau gรฉnรฉral. On peut aborder la question des formes urbaines physiques par lโรฉtude du tissu urbain qui concerne le parcellaire et le bรขti (Pinon, 1988). Lโespace formรฉ par les mailles du rรฉseau de voirie est communรฉment appelรฉ รฎlot, qui est lui-mรชme constituรฉ de parcelles. Les parcelles sont elles-mรชmes occupรฉes sur une plus ou moins grande portion de leur surface par des ouvrages bรขtis, qui peuvent aussi รชtre caractรฉrisรฉs par leur hauteur, leur faรงade, leur accessibilitรฉ par rapport ร la rue, ou leur contenu. Ensemble, ils forment le ยซ paysage ยป urbain (Allain, 2004). Cet espace physique est ร la fois le rรฉsultat de lโhistoire, permettant lโanalyse de processus sociaux gouvernant les activitรฉs humaines et leur localisation (donc une variable dรฉpendante de ces processus sociaux). Mais cโest aussi un ensemble dโobjets physiques conditionnant la configuration des mouvements de ces activitรฉs (donc une variable indรฉpendante de ces processus). ยซ In other words, buildings can both receive information from society through spatial configuration, and also transmit effects back to society through configuration ยป (Hillier, 1996). Lโapproche des formes urbaines peut aussi passer par lโรฉtude de ses formes fonctionnelles et sociales, c’est-ร -dire lโoccupation de lโespace urbain par ses habitants et ses activitรฉs : leur nombre, leur rรฉpartition au sein de groupes variรฉs, ainsi que leur localisation et leurs dรฉplacements (Halbwachs, 1938; Ledrut, 1968; Roncayolo, 2002). Cette analyse sociale est par ailleurs indissociable dโune approche fonctionnelle prenant en compte la rรฉpartition des activitรฉs รฉconomiques (Park & Burgess, 1921; Conzen, 1960) dans les villes. Lโรฉtude des formes urbaines concerne donc aussi lโรฉtude des usages de lโespace et de leur plus ou moins grande spรฉcialisation. Mรฉthodologiquement, les indicateurs de bรขti permettent dโobserver la continuitรฉ du tissu urbain, sa rรฉgularitรฉ, sa porositรฉ ou encore sa densitรฉ sur un espace donnรฉ (Schwarz, 2010; Huang, et al., 2007). Les indicateurs socioรฉconomiques permettent de rendre compte de la rรฉpartition des activitรฉs humaines sur un territoire donnรฉ. Les patterns reprรฉsentรฉs permettent de visualiser la localisation des activitรฉs humaines ร lโรฉchelle de lโagglomรฉration : leur densitรฉ, leur centralitรฉ, leur compacitรฉ, ou leur complexitรฉ (Tsai, 2005). Cette approche complexifie notre analyse mais permet dโexaminer lโobjet ยซ ville ยป ร partir de ces composantes รฉlรฉmentaires. Chaque dimension en encapsule une autre : le plan de ville et les voiries, les รฎlots dans les mailles du rรฉseau, les parcelles qui composent ces รฎlots, les bรขtiments construits sur ces parcelles, et les activitรฉs humaines occupant lโensemble. Comprendre cette premiรจre distinction permet dโexplorer et de comprendre les deux facettes dโun systรจme de transport : la demande et lโoffre. Cโest bien la localisation des agents รฉconomiques dans lโespace les uns par rapport aux autres, et lโabsence ou lโinsuffisance locale de certaines ressources, qui engendrent les dรฉplacements de personnes et de biens (Bavoux, et al., 2010). Dโun autre cรดtรฉ, les formes urbaines dans leur dimension physique et bรขtie permettent dโexpliquer et dโanalyser en partie la disponibilitรฉ et le dimensionnement des infrastructures de transport et de stationnement, et donc certaines caractรฉristiques de lโoffre.
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Table des matiรจres
Introduction Gรฉnรฉrale
Le transport de marchandises et la ville
Les enjeux du transport de marchandises en ville
La congestion routiรจre, ร la croisรฉe des approches disciplinaires
Analyse de la congestion provoquรฉe par le TMV : double entrรฉe par lโamรฉnagement urbain et lโanalyse spatiale
Problรฉmatique de recherche : lโanalyse de lโimpact du TMV sur la congestion, et vice-versa
Hypothรจse de recherche
Contexte du travail de thรจse
Organisation gรฉnรฉrale de la thรจse
Partie 1 โ Formes urbaines et mouvements de marchandises dans la rรฉgion Ile-de-France
Introduction de la Partie 1
Chapitre I โ Interactions entre transport de marchandises en ville et formes urbaines : dรฉfinitions et enjeux thรฉoriques
Introduction
1.1 Formes urbaines et systรจmes de transport de marchandises : dรฉfinitions
1.1.1 Formes urbaines : polysรฉmie et multiplicitรฉ des cadres thรฉoriques
1.1.2 Les systรจmes de transport de marchandises, ร apprรฉhender au sein des processus logistiques, productifs et distributifs
1.2 Formes urbaines et systรจmes de transport : revue des littรฉratures pour les marchandises (et les passagers)
1.2.1 Des systรจmes de transport aux formes urbaines
1.2.2 Des formes urbaines aux pratiques de dรฉplacements
1.3 Lien formes urbaines โ transport : le cas de la rรฉgion parisienne
1.3.1 La rรฉgion parisienne : formes urbaines typiques dโune ville europรฉenne
1.3.2 Activitรฉs รฉconomiques et demande de transport de la rรฉgion francilienne
1.3.3 Offre en infrastructures : la relation tumultueuse entre Paris et la circulation automobile
Conclusion
Bibliographie du chapitre 1
Chapitre II โ Mesurer la demande pour le TMV : aspects mรฉthodologiques, approche critiqueย
Introduction
2.1 Mesure des mouvements et des flux de marchandises pour lโIle-de-France : revue de littรฉrature
2.1.1 Lโenquรชte Transport de Marchandises en Ville : mรฉthode
2.1.2 Lโenquรชte TMV : spรฉcificitรฉs franciliennes
2.1.3 Principaux rรฉsultats de lโenquรชte TMV-IDF
2.2 Au-delร des grands indicateurs statistiques : prรฉsentation des modรจles de demande et de Freturb
2.2.1 La modรฉlisation de la demande du TMV dans la littรฉrature
2.2.2 Le modรจle Freturb : mรฉthodologie
2.2.3 Mesurer lโactivitรฉ รฉconomique dโune zone : enjeux et application mรฉthodologique
2.2.4 La dรฉmarche TMV-Freturb : approche critique
Conclusion
Bibliographie du chapitre 2
Chapitre III โ Cartographier la gรฉographie des flux de marchandises : analyse de la demande de TMV
Introduction
3.1 Structure รฉconomique mรฉtropolitaine : analyse dรฉtaillรฉe des grands types dโactivitรฉ en Ile-de-France
3.2 Mesurer et caractรฉriser la demande de marchandises en Ile-de-France
3.2.1 Mesurer la demande ร partir des activitรฉs รฉconomiques
3.2.2 Caractรฉriser la demande de marchandises : taille des vรฉhicules
3.2.3 Caractรฉriser la demande de marchandises : distance parcourue par les vรฉhicules
3.3 Structure รฉconomique, localisation des รฉtablissements, et gรฉnรฉration des mouvements de marchandises en Ile-de-France
3.3.1 Structure รฉconomique, fonctionnement logistique et gรฉnรฉration des mouvements et de leurs caractรฉristiques en Ile-de-France
3.3.2 Rรฉpartition spatiale des mouvements en Ile-de-France : hyper-concentration et co-localisation dโactivitรฉs humaines
Conclusion
Bibliographie du chapitre 3
Conclusions de la partie 1
Partie 2 โ Analyse des dรฉterminants de lโoccupation de la voirie : circulation et stationnement des vรฉhicules de TMV
Introduction de la Partie 2
Chapitre IV โ Etude de la forme des parcours : organisations logistiques, contraintes spatiales et temporelles
Introduction
4.1 Parcours des marchandises en ville et connaissances empiriques : revue de littรฉrature
4.1.1 Formes des parcours urbains et connaissances qualitatives
4.1.2 Formes des parcours urbains et connaissances quantitatives
4.2 Construction dโune typologie des parcours en fonction de leur organisation logistique
4.2.1 Typologie des parcours : donnรฉes, dรฉmarche, critรจres
4.2.2 Construction de la typologie des tournรฉes en fonction du service de transport proposรฉ
4.3 Analyse des formes de parcours des vรฉhicules de marchandises en fonction de leur organisation logistique
4.3.1 Etude de la forme spatiale des parcours et de lโoccupation de la voirie en fonction de leurs organisation logistique
4.3.2 Reprรฉsentation temporelle des parcours : approche par les formes urbaines et lโorganisation logistique
4.3.3 Comprendre les organisations logistiques : implications et limites pour la recherche
Conclusion
Bibliographie du chapitre 4
Chapitre V โ Les ยซ derniers mรจtres ยป de la logistique : analyse du stationnement des chauffeurs-livreurs en milieu urbain
Introduction
5.1 Les dรฉterminants du choix du mode de stationnement pour le transport de marchandises en ville : revue de littรฉrature
5.1.1 Les choix de stationnement dans la littรฉrature : enjeux et dรฉmarches de modรฉlisation
5.1.2 Choix de stationnement et dimensions spรฉcifiques pour les vรฉhicules de transport de marchandises en ville
5.2 Observation empirique de lโimpact des diffรฉrentes dimensions du mode de stationnement
5.2.1 Donnรฉes et dรฉmarche mobilisรฉes pour apprรฉhender ces diffรฉrentes dimensions
5.2.2 Observations empiriques : comprendre la durรฉe du stationnement
5.2.3 Observations empiriques : stationnement privรฉ des vรฉhicules de marchandises
5.2.4 Observations empiriques : stationnement public des vรฉhicules de marchandises
5.2.5 Observations empiriques : stationnement gรชnant des vรฉhicules de marchandises
5.2.6 Observations empiriques : stationnement sur voirie des vรฉhicules de marchandises
Conclusion
Bibliographie du chapitre 5
Conclusion de la Partie 2
Partie 3 โ Occupation de la voirie par les vรฉhicules de marchandises et formation de la congestion
Introduction de la Partie 3
Chapitre VI โ Evaluation de la politique dโaires de livraisons dans la ville de Paris
Introduction
6.1 Comparaison de lโoffre et de la demande en aires de livraison : contexte parisien, dรฉmarche et limites
6.1.1 Politique dโaires de livraisons : contexte parisien
6.1.2 Comparaison entre lโoffre et la demande : revue de littรฉrature et dรฉmarche empirique
6.1.3 Limites de lโรฉtude : une offre surestimรฉe, une demande sous-estimรฉe ?
6.2 Analyse de lโoffre en stationnement et en aires de livraisons dans la ville de Paris
6.2.1 Lโoffre en aires de livraisons ร Paris : analyse quantitative et transformation en une unitรฉ commune avec la demande
6.3 Estimation de la demande dโaires de livraisons ร Paris
6.3.1 Estimation de la demande totale dans le temps et dans lโespace
6.3.2 Caractรฉrisation des mouvements et transformation en ยซ Equivalents Vรฉhicules Lรฉgers ยป
6.4 Comparaison de lโoffre et de la demande en aires de livraisons ร Paris
Conclusion
Bibliographie du chapitre 6
Chapitre VII โ Mesure de la congestion provoquรฉe par le stationnement en double-file ร Parisย
Introduction
7.1 Mesure de la congestion provoquรฉe par le stationnement ร Paris : dรฉmarche empirique
7.1.1 Le diagramme fondamental de la congestion
7.1.2 Stratรฉgie empirique pour estimer lโimpact du stationnement en double-file sur la relation entre le dรฉbit et le taux dโoccupation
7.2 Bases de donnรฉes pour lโobservation du stationnement et pour la mesure du trafic dans une sรฉlection de rues parisiennes
7.2.1 Dรฉmarche de lโenquรชte de terrain : agrรฉger des donnรฉes sur le stationnement avec des donnรฉes de trafic
7.2.2 Enquรชte de terrain : observation de lโoccupation de la voirie par les chauffeurs-livreurs stationnรฉs en double-file
7.2.3 Couplage des donnรฉes de stationnement avec les donnรฉes de trafic
7.3 Mesure de lโimpact du stationnement en double-file sur la formation de la congestion
7.3.1 Rรฉsultats du modรจle รฉconomรฉtrique : impact du stationnement en double-file sur la relation flux โ taux dโoccupation
7.3.2 Limites statistiques et risques de biais de simultanรฉitรฉ
7.3.3 Pertes de temps et coรปts marginaux provoquรฉs par le stationnement en double-file
Conclusion
Bibliographie du chapitre 7
Chapitre VIII โ Mesure macroscopique de la congestion provoquรฉe par les vรฉhicules de livraisons sur les vรฉhicules particuliers, et vice-versa
Introduction
8.1 Mesure macroscopique de la congestion en Ile-de-France : dรฉmarche empirique
8.1.1 Fonction ยซ BPR ยป et prise en compte des grands vรฉhicules
8.1.2 Stratรฉgie empirique : mesure macroscopique de la congestion routiรจre
8.2 Bases de donnรฉes mobilisรฉes et reconstitution de lโoffre et de la demande de routes rencontrรฉes par des individus en Ile-de-France
8.2.1 Mesure de lโoffre en infrastructure dans le cadre dโun modรจle macroscopique
8.2.2 La demande en infrastructures : matrices OD pour les voyageurs et les marchandises
8.2.3 Donnรฉes pour les observations individuelles et caractรฉrisation en fonction de lโoffre et de la demande rencontrรฉes
8.3 Mesure de lโeffet des poids lourds sur la durรฉe des trajets des petits vรฉhicules, et vice-versa
8.3.1 Rรฉsultats du modรจle รฉconomรฉtrique : des fonctions de congestion diffรฉrenciรฉes selon le type de vรฉhicule
8.3.2 Des rรฉsultats รฉconomรฉtriques ร la dรฉfinition de fonctions de durรฉe des trajets
8.3.3 Les pertes de temps marginales : causรฉes par qui, ร qui ?
8.4 Coรปts marginaux de congestion
Conclusion
Bibliographie du chapitre 8
Conclusion de la Partie
Conclusion Gรฉnรฉrale
Les organisations logistiques des opรฉrateurs de transport comme adaptation aux spรฉcificitรฉs urbaines
Liens entre formes urbaines et TMV
Occupation de la voirie des vรฉhicules de marchandises et phรฉnomรจnes de congestion en Ile-de-France
Discussion des rรฉsultats
Recherches futures
Bibliographie Gรฉnรฉrale
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