Le jeu dans lโenseignement est prรฉsent surtout dans les classes de maternelle, oรน il est indispensable dans lโapprentissage pour apporter des compรฉtences propres ร ce cycle ; ร savoir le dรฉveloppement sensoriel et moteur, celui de la personnalitรฉ, la confiance en soi, la sociabilisation, la communication et dans une moindre mesure le dรฉveloppement de compรฉtences disciplinaires. Une partie de ces objectifs devrait รชtre transposรฉe dans les cycles supรฉrieurs. Pourtant, le changement est remarquable dans lโutilisation du jeu ร lโentrรฉe du cycle 2, notamment le jeu pรฉdagogique, puisque lโรฉcole ne symbolise plus le jeu mais le travail. Toutefois, une partie ludique subsiste dans certaines classes avec la prรฉsence de mรฉcanismes de rรฉcompense pour fรฉliciter les รฉlรจves, principe analogue ร celui du jeu. Nous allons tenter dโaller plus loin en รฉtudiant lโutilisation du jeu en classe de premiรจre dans le cadre de lโenseignement de lโinformatique.
Cadre thรฉoriqueย
Pour tenter de dรฉfinir ce quโest le jeu, on peut explorer les points communs de ceux usuels : jeux de sociรฉtรฉ, jeux de carte, jeu de rรดle, jeux-vidรฉo, escape-game (trad. Jeu dโรฉvasion). ร voir la diversitรฉ des types de jeux, on peut facilement comprendre que les capacitรฉs dรฉveloppรฉes varient : Par exemple, des jeux-vidรฉo dโaction permettent un dรฉveloppement de la concentration et des rรฉflexes ; alors quโun jeu de sociรฉtรฉ stratรฉgique dรฉveloppera plutรดt les capacitรฉs dโadaptation et de rรฉflexion . Les stimulations variant selon le type de jeux, on peut se demander si un type de jeu est plus favorable ร lโapprentissage de lโinformatique ou est-il prรฉfรฉrable dโadapter le type de jeu ร ceux qui lโutilisent pour rendre lโinformatique plus accessible ? Lors des stages de M1 en lycรฉe, lโutilisation de diffรฉrents types dโactivitรฉs ludiques, a รฉtรฉ observรฉe de deux maniรจres : la premiรจre par du game design (trad, crรฉation de jeu) en ISN , les รฉlรจves choisissant cette option justement pour en pratiquer, car peu se sont renseignรฉs sur les รฉlรฉments prรฉsents dans cette matiรจre et ceci mรชme si seul deux des 4 piliers de lโinformatique (G. Dowek) sont prรฉsents (algorithme et langage ; pas de partie machine ou information). Dโailleurs, on peut se demander sโil est possible de ludifier tous les piliers de lโinformatique ?
Dรฉfinition
Quโest-ce que le jeu ?
Nous nous intรฉressons ici ร la dรฉfinition donnรฉe par Gilles Brougรจre[5] en 5 critรจres :
โช la fiction ยซ rรฉelle ยป (le second degrรฉ) : le jeu prend place dans un cadre spatiotemporel donnรฉ. Le joueur sโy investit avec autant de sรฉrieux que dans la rรฉalitรฉ.
โช la dรฉcision du joueur : il nโy a jeu que si le joueur le dรฉcide, ce qui renvoie ร la fois ร sa dรฉcision dโentrer dans le jeu et aux dรฉcisions quโil prendra durant le dรฉroulement de celui-ci.
โช la rรจgle : elle structure le jeu et fait lโobjet dโune acceptation collective.
โช la frivolitรฉ : il nโy a aucune consรฉquence sur la rรฉalitรฉ, il invite ร de nouvelles expรฉriences dans lesquelles on nโa pas besoin de mesurer les risques qui freinent. On est force de proposition, plus crรฉatif.
โช lโincertitude : cโest le moteur du jeu. Le jeu nโest jamais deux fois pareil. On ne sait jamais ร lโavance comment il va se dรฉrouler et finir.
G. Brougรจre dรฉfinit รฉgalement le jeu par deux composantes : ยซLe jeu est une rรฉalitรฉ double qui articule une structure ludique (game) et une attitude ludique (play) ยป . Ces deux composantes du jeu permettent de diffรฉrencier la maniรจre dont on utilise le jeu dans lโapprentissage : la gamification ou ludification (ludus = jeu+ facere = faire) consiste ร concevoir un jeu et de lui inclure de lโapprentissage. Cette maniรจre de faire nโinclut souvent que la partie ยซ game ยป . On conรงoit un artefact proche du jeu, qui peut selon lโรฉlรจve, รชtre pris pour du jeu ou du non-jeu. ยซ Elle utilise des รฉlรฉments du jeu plutรดt que les interactions qui se mettent en place lorsquโon accepte de jouer (Genvo 2013), le jeu est alors dรฉpendant de lโattitude ludique (Henriot 1969) ยป. Contrairement ร la ludicisation qui se concentre sur la partie ยซ play ยป, ce qui donne plus dโintรฉrรชt ร lโรฉlรจve ร rentrer dans le jeu.
Les thรฉories utilisรฉesย
La Thรฉorie des situations didactique de Brousseau propose une modรฉlisation du savoir, des situations dโenseignement ainsi que des rรดles du maรฎtre et des รฉlรจves en classe. Dans une situation adidactique, le maรฎtre se refuse ร intervenir comme possesseur des connaissances quโil veut voir apparaรฎtre. ยซ Lโรฉlรจve sait bien que le problรจme a รฉtรฉ choisi pour lui faire acquรฉrir une connaissance nouvelle, mais il doit savoir aussi que cette connaissance est entiรจrement justifiรฉe par la logique interne de la situation ยป . Puisque ยซ les interactions des รฉlรจves avec le milieu sont supposรฉes suffisamment ยซ prรฉgnantes et adรฉquates ยป pour quโils puissent construire des connaissances, formuler des stratรฉgies en utilisant les rรฉtroactions de ces milieux sans que leur activitรฉ ne soit orientรฉe par la nรฉcessitรฉ de satisfaire aux intentions supposรฉes du professeur ยป (G. Sensevy). Ce qui est le plus intรฉressant pour lโรฉtude dans cette thรฉorie est la partie dรฉvolution, cโest-ร -dire le processus par lequel le professeur fait en sorte que les รฉlรจves assument leur part de responsabilitรฉ dans lโapprentissage. Ce processus et celui de lโinstitutionnalisation (processus oรน lโenseignant montre les savoirs attendus de lโapprentissage) forment le contrat didactique.
Le contrat didactique et ludique[9] est dรฉveloppรฉ par N. Pelay en croisant le concept de contrat didactique (Brousseau, 1998) et celui de contrat ludique de Colas Duflo (1997). ยซ Le contrat ludique est lโacte par lequel le joueur abandonne sa libertรฉ individuelle pour se soumettre ร une lรฉgalitรฉ arbitraire qui produit sa libertรฉ ludique ยป . ยซ Il y a dans tout jeu un contrat tacite, sur les rรจgles, que lโon se sent tenu de respecter [โฆ] le contrat ludique instaure le monde du jeu ยป. ยซ Le contrat didactique et ludique est lโensemble des rรจgles et comportements, implicites et explicites, entre un โรฉducateurโ et un des ยซ participants ยป dans un projet qui lie, de faรงon explicite ou implicite, jeu et apprentissage dans un contexte donnรฉ. ยป. ยซ Ce concept est crรฉรฉ pour rendre compte de la dynamique des interactions didactiques et ludiques en situationยป . Dans ce cas ยซ le jeu doit รชtre tel que la connaissance apparaisse sous la forme choisie, comme la solution ou comme le moyen dโรฉtablir la relation optimale. ยป Si la dรฉvolution sโopรจre, lโรฉlรจve entre dans le jeu, et sโil finit par gagner, lโapprentissage peut sโopรฉrer.
LโIngรฉnierie didactique[6] est une mรฉthode pour concevoir et rรฉaliser un objet dโapprentissage (jeu/ leรงon/ activitรฉ โฆ). Cette conception est accompagnรฉe de lโรฉtude des diverses possibilitรฉs entre lesquelles il est fait un choix, et de lโexplication des raisons de ces choix. On peut objectiver le ludique et ainsi concevoir des ingรฉnieries sur le jeu en intรฉgrant les apprentissages dans le jeu, dans le matรฉriel et les rรจgles, pour que se produisent des stratรฉgies/ comportement prรฉdits par la didactique. Elle peut se faire en suivant plusieurs points qui sont :
1. Repรฉrer ou choisir lโapproche
2. Identifier les prรฉ-requis
3. Choisir/ Organiser le dispositif pรฉdagogique
4. รlaborer lโรฉvaluation
5. Planifier et communiquer.
Contextualisation
les diffรฉrents types de jeux
On traitera ici, des articles concernant le serious-game (trad. Les ยซ jeux sรฉrieux ยป), le jeu de rรดle et le jeu de sociรฉtรฉ ; les types de jeux qui sont ร mon sens les plus connus. Prenons dโabord le type de jeux qui nous paraรฎt le plus propice ร lโapprentissage de lโinformatique, cโest-ร -dire le serious-game. Deux articles ont รฉtรฉ lus sur ce sujet : Le jeu peut-il รชtre sรฉrieux ? Rรฉviser Jouer/Apprendre en temps de serious-game[4] et Les faiblesses ludiques et pรฉdagogique des serious-game[7]. Ces deux articles montrent que la plupart des serious-game existant pour lโinstant nโont pas beaucoup de caractรฉristiques liรฉes aux jeux. Plus particuliรจrement sur le systรจme de dรฉcision, puisque le jeu va directement vers une direction, vers le sujet pรฉdagogique, il nโy a pas de choix possible ; mais aussi, sur lโincertitude, puisque la fin est prรฉvu en avance, et la minimisation des consรฉquences, car lโactivitรฉ perd la partie apprentissage. Les crรฉateurs de serious game se sont appuyรฉs sur la partie mรฉcanique du jeu (la partie game) et y ont transfรฉrรฉ des objectifs dโapprentissages sans prendre en compte lโattitude ludique (le play). On pourrait en plus rajouter que les mรฉcanismes de jeu peuvent limiter lโapprentissage par le seriousgame, puisque les รฉlรจves nโont pas forcรฉment tous connaissance de la maniรจre de jouer aux jeux vidรฉo (sur ordinateur), les รฉlรจves vont devoir mobiliser une part importante du temps allouรฉ pour apprendre le mรฉcanisme de jeu au dรฉtriment de la partie apprentissage.
Lโรฉlรจve pourrait aussi abandonner lโactivitรฉ, selon la zone proximale de dรฉveloppement de lโรฉlรจve (Vygotski) . Lorsque lโapprentissage est dans la zone proximale de dรฉveloppement, lโactivitรฉ est perรงue comme un dรฉfi engageant et accessible, sโil est dans la zone de confort ou dโennui les รฉlรจves ou sโil est dans la zone d โinconfort ou de panique, lโactivitรฉ est peu attrayante trop simple ou trop dure pour l โรฉlรจve. Le jeu peut agir en tant que facilitateur, afin dโaugmenter la zone proximale de dรฉveloppement. Mais si le game est dedans ou la dรฉpasse beaucoup, lโactivitรฉ est vue comme impossible ร faire et si les deux sont dans la zone proximale de dรฉveloppement, il ne pourrait y avoir quโun apprentissage (le game). Les รฉlรจves, lors dโun serious-game, sโappuient sur quelque chose quโils maรฎtrisent et ont lโhabitude dโutiliser pour faire passer plus facilement lโapprentissage. Le serious-game est alors vecteur dโapprentissage. Cependant la gรฉnรฉration Z (1996-2010), mรชme si elle a grandi en prรฉsence de lโinformatique et dโInternet, ne les a pas forcรฉment utilisรฉs pour jouer ร des jeux-vidรฉo, contrairement ร la gรฉnรฉration y. La partie de la gรฉnรฉration Y(1984-1996) รฉtudiรฉe utilise majoritairement leur tรฉlรฉphone portable pour de multiples activitรฉs (jeu, recherche, etc.) et pas dโordinateur. Ce type de jeu a รฉtรฉ dรฉveloppรฉ avec le plan informatique pour tous dans les annรฉes 80.
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Table des matiรจres
I. Introduction
II. Cadre thรฉorique
A. Dรฉfinition
A.1. Quโest-ce que le jeu ?
A.2. Les thรฉories utilisรฉes
B. Contextualisation
C. Problรฉmatisation
D. Dรฉmarche
II. Le jeu du plus ou moins
A. Analyse a priori
B. Analyse a posteriori
C. Aller plus loin
IV. Discussion
V. Conclusion
Bibliographie
Annexe
4แต de couverture