Apport du doppler des artères temporales

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Spectres cliniques

L’artérite à cellules géantes fait état à l’heure actuelle de nombreux bouleversements de son cadre nosologique qui ne se limite plus à l’atteinte céphalique pure décrite jusqu’alors(65). Plusieurs auteurs distinguent désormais le phénotype « céphalique pur » (cranial giant cell arteritis), défini par l’atteinte clinique ou histologique des artères à destinée céphalique et l’absence d’aortite, et le phénotype « aorto-artéritique » (large vessel GCA), regroupant l’atteinte de l’aorte et de ses branches, isolée ou combinée aux signes céphaliques(3,4). Par ailleurs les formes de PPR typiques associées à une atteinte de l’aorte et de ses branches pourraient également être intégrées dans le spectre de l’artérite à cellules géantes(66).

Diagnostic différentiel

Les céphalées peuvent correspondre à un état migraineux ou des céphalées de tension, qui ne s’associent ni à des signes systémiques ni à un syndrome inflammatoire biologique. Les manifestations ischémiques cérébrales ou des membres peuvent être d’origine athéromateuse, par argument de fréquence, sans inflammation systémique majeure. La maladie de Takayasu, vascularite qui concerne également les gros et moyens vaisseaux, peut présenter des éléments histologiques et d’imagerie proches de l’artérite à cellules géantes, mais concerne principalement les femmes jeunes (âge moyen : 26 ans), et l’atteinte histologique implique l’adventice plutôt que la média. Il est également nécessaire de rechercher les signes d’une autre vascularite, des moyens (périartérite noueuse) ou des petits vaisseaux (vascularites à ANCA), qui peuvent être à l’origine de céphalées, avec cependant de très rares atteintes temporales(61).

Critères de classification

Les critères actuels de classification de la maladie ont été définis par l’American College of Rheumatology en 1990 à partir d’une comparaison entre 214 patients atteints d’artérite à cellules géantes et 593 patients porteurs d’autres vascularites. Ils sont au nombre de 5 et comprennent : un âge ≥ 50 ans au moment du diagnostic, l’apparition de céphalées localisées, une sensibilité des artères temporales et/ou une abolition/diminution d’un pouls temporal, une vitesse de sédimentation > 50 mm et l’existence d’une artérite nécrosante caractérisée par un infiltrat à prédominance de cellules mononuclées et/ou existence d’un granulome à cellules géantes sur le prélèvement d’artère temporale. La présence de 3 ou plus de ces critères est associée à une sensibilité de 93.5 % et à une spécificité de 91.2 %(1).

Signes biologiques

L’ensemble des marqueurs inflammatoires classiques sont élevés dans l’artérite à cellule géante : vitesse de sédimentation (VS), C-Réactive Protéine (CRP), haptoglobine, orosomucoïde et fibrinogène. Une anémie inflammatoire associée à une thrombocytose est également très fréquente. Des perturbations du bilan hépatique à type de cholestase anictérique sont également possible(67).
Aucun marqueur biologique spécifique de la maladie n’a été validé. Kermani et al, dans une cohorte de 764 patients dont 177 avec artérite confirmée ont mis en évidence une sensibilité de 86 % pour la VS et 84 % pour la CRP, avec une spécificité médiocre de l’ordre de 30 % pour ces deux examens. Seuls 4% des patients confirmés avaient une VS et une CRP normales(68). Ces marqueurs semblent de plus peu utiles pour prédire les rechutes(15). Dans une étude prospective concernant 128 patients suivis sur 21 mois, la VS et la CRP étaient toutes deux normales dans 21% des rechutes(69).
Des taux élevés d’interleukine 6 (IL-6), l’une des principales protéines inductrices de la sécrétion de CRP, sont retrouvés chez les patients non traités. Ces taux sont réduits sous traitement, mais souvent plus élevés que chez des individus sains(70). Il n’y a pas de preuve de la supériorité du dosage d’IL-6 par rapport au dosage de la CRP pour guider la décision clinique et son dosage n’est donc pas recommandé en pratique courante.
L’évaluation des marqueurs inflammatoires est utile pour le diagnostic et le suivi à long terme, mais des niveaux élevés de ces marqueurs ne doivent pas justifier à eux seuls d’une intensification thérapeutique.
L’électrophorèse des protides peut montrer des signes inflammatoires et permet d’écarter une gammapathie monoclonale, plus fréquente dans cette tranche d’âge. En cas de justification dans la démarche diagnostique, un bilan auto immun peut être réalisé pour écarter un diagnostic différentiel de vascularite (ANCA) ou de rhumatisme (anticorps anti CCP). Un bilan bactériologique peut être utile pour écarter une infection sous-jacente dans un contexte de fièvre prolongée.

Histologie

Le diagnostic d’artérite à cellules géantes est idéalement confirmé par les données histologiques de la biopsie de l’artère temporale, qui constituent actuellement le gold-standard. La biopsie doit être réalisée avant ou le plus précocement possible après initiation de la corticothérapie générale, cependant un traitement institué depuis 30 jours ne semble pas modifier les résultats de celle-ci(71). Au vu du risque de complications ophtalmologiques définitives, la biopsie ne doit donc pas retarder l’initiation du traitement. Ce geste peut se compliquer de lésions nerveuses, hématomes, infection du site ou nécrose du scalp(72).
Les constatations histologiques typiques comprennent un infiltrat de cellules mononuclées prédominant au niveau de l’adventice et de la média, associé à la présence de cellules géantes, de lymphocytes, de macrophages et de cellules dendritiques. On observe également une rupture de la limitante élastique interne (élastophagie). Près de 50 % des biopsies compatibles avec une artérite temporale ne comprennent pas tous ces éléments, certaines ne comportant qu’un infiltrat inflammatoire péri adventitiel isolé ou une vasculite des petits vaisseaux en périphérie de l’artère(61).
Cette artérite étant segmentaire et focale, de multiples segments d’artères doivent être examinés pour optimiser le rendement d’un prélèvement donné. La longueur nécessaire du prélèvement n’est pas consensuelle, cependant une large étude menée sur 136 biopsies a démontré que la rentabilité diagnostique est meilleure pour un prélèvement d’au moins 1 cm avec plusieurs sections d’artère examinables(73). Une biopsie bilatérale pourrait augmenter la rentabilité diagnostique de près de 13%(74). Bien qu’hautement spécifique, la positivité de la BAT est très variable, de 49 à 85% des cas selon les auteurs(5-8). Cette variabilité peut s’expliquer par plusieurs facteurs : caractère segmentaire et focal de la maladie, existence de phénotypes d’aorto-artérite sans atteinte céphalique, délai tardif de réalisation après initiation du traitement, prélèvement de mauvaise qualité(75). Une BAT négative ne doit donc pas remettre en cause le diagnostic et traiter le patient si le faisceau d’arguments est suffisant à retenir le diagnostic. Hall et al, dans une cohorte prospective de 134 patients, ont montré que parmi les 88 patients avec BAT négative initiale, 44% étaient finalement diagnostiqués dans le spectre ACG-PPR (8 ACG et 31 PPR)(76). Du fait d’un certain continuum entre les deux entités, les patients atteints de PPR doivent être suivis afin de ne pas méconnaitre une évolution vers une artérite à cellules géantes(77).
Certaines données suggèrent une corrélation clinico-bio-histologique : une méta-analyse de 21 études a montré que l’existence d’une claudication de la mâchoire augmenterait la probabilité de BAT positive d’un facteur 4, et la présence d’une diplopie d’un facteur 3. Une VS normale diminuerait en revanche cette probabilité (Likelihood Ratio = 0.2)(78).

Imagerie (hors écho-doppler)

L’angioscanner permet de rechercher une aorto-artérite, caractérisée par un épaississement mural et un réhaussement pariétal au temps veineux en cas d’inflammation active. La large utilisation de cet examen dans l’artérite à cellules géantes a permis de détecter une forte et insoupçonnée prévalence de l’atteinte des gros vaisseaux, notamment de l’aorte (68 %), des troncs supra aortiques (40 %) et des artères fémorales (25 %)(63). Il permet également la recherche de complications anévrysmales ou sténosantes, ainsi que les lésions athéromateuses possiblement associées(63). Dans une cohorte de 54 patients une ectasie aortique de plus de 4 cm est mise en évidence à 5 ans dans 22 % des cas et à 10 ans dans 33% des cas(79). Les inconvénients de cet examen sont son caractère irradiant, la nécessité d’injection de produit de contraste iodé et la mauvaise résolution pour les vaisseaux de plus petit calibre. La sensibilité de l’examen diminue en cas d’imprégnation cortisonique(80).
L’IRM/ARM peut aider au diagnostic d’artérite à cellules géantes, notamment en cas d’atteinte des gros troncs. L’injection de gadolinium permet l’étude de la lumière, la mesure de l’épaississement pariétal, la présence d’un œdème mural, la recherche de dilatations ou de sténoses et d’un réhaussement de la paroi. Les territoires coronaires et les artères intracrâniennes peuvent également être étudiées. L’IRM 3T haute résolution permet l’étude des artères du scalp à la recherche d’atteinte inflammatoire. Deux essais prospectifs multicentriques étudiant cette séquence retrouvaient une sensibilité de l’ordre de 75 % et une spécificité de l’ordre de 90 %(81,82). Les limites principales sont la durée d’acquisition des séquences, les contre-indications (notamment la claustrophobie) et le coût de l’examen.
La tomographie par émission de positrons (TEP) permet l’étude de l’atteinte inflammatoire au niveau de l’aorte et ses branches. Une méta-analyse récente (57 patients) montrait une sensibilité de 89.5 % et une spécificité de 97.7 % pour le diagnostic d’artérite des gros vaisseaux(83). Cet examen est particulièrement intéressant pour les diagnostics difficiles (tableaux atypiques avec signes généraux prédominants) et pour le diagnostic différentiel de cancer(84). La fusion aux images scannographiques (PET CT-scan) permet une meilleure précision anatomique. Les inconvénients principaux sont l’irradiation, la faible résolution en deçà de 4 mm, ne permettant pas l’exploration directe des artères temporales, l’absence d’étude précise de la paroi vasculaire, et l’existence de fixation sur les zones d’athérome et les artères vieillies, posant la question du seuil pour conclure à une réelle inflammation. De plus cet examen est négativé sous corticothérapie à haute dose, et son rôle dans le suivi est incertain(85).

Traitements

La prise en charge d’un patient suspect d’artérite à cellules géantes requiert l’initiation rapide d’un traitement à visée anti-inflammatoire pour diminuer le risque de survenue de complications vasculaires et une perte visuelle irréversible, pouvant survenir dans 13 à 19 % des cas(86-90). Les recommandations nationales ont récemment été mises à jour par le Groupe d’Etude Français des Artérites des gros vaisseaux (GEFA)(91).

Corticothérapie

La corticothérapie demeure le traitement historique et le gold standard de la prise en charge thérapeutique. La plupart des auteurs s’accorde à utiliser la prednisone, sujette à moins de variations de concentrations plasmatiques interindividuelles que la prednisolone(92). La posologie initiale des formes non compliquées d’atteintes ophtalmologiques ou d’aortite est de 0.5 à 0.7 mg/kg/j(18,93-95). Le recours au bolus intraveineux de methylprednisolone à 15 mg/kg trois jours de suite avant relais per os a montré son efficacité dans la prévention des rechutes et l’épargne cortisonique dans un essai randomisé(96). La posologie initiale de corticoïdes doit être maintenue au moins 2 à 4 semaines, selon la réponse clinique et la décroissance du syndrome inflammatoire biologique(97,98). En cas de réponse satisfaisante, la décroissance de la corticothérapie peut s’effectuer par paliers pour atteindre 0.2 à 0.3 mg/kg (15 à 20 mg) en 6 à 10 semaines(99), 10 à 7.5 mg à 6 mois(18,98) et 5 mg/j à 1 an.
Les patients avec atteinte ophtalmologique doivent bénéficier d’une posologie minimale initiale de 60 mg/j ou de bolus de méthylprednisolone IV de 500 mg(86,100,101). Les formes avec aorto-artérite n’ont pas fait l’objet d’études spécifiques concernant le schéma de corticothérapie ou les traitements d’épargne. Un travail rétrospectif récent comparant les schémas de traitement entre forme classique et forme avec aorto-artérite ne retrouvait pas de différence de profil évolutif tandis que les 2 groupes étaient traités par des schémas identiques(102). Les patients présentant des signes d’ischémie de membre devraient recevoir empiriquement une corticothérapie à 1 mg/kg(103). Au moins 30 % des patients présenteront une rechute de la maladie sous corticoïdes(16,69), ce qui pose la question des traitements de seconde ligne. Aucun essai contrôlé n’a été conçu pour guider le traitement des rechutes mais plusieurs molécules ont été étudiées avec des résultats variables.
La durée optimale du traitement n’est pas consensuelle. Une durée limitée à 6 mois expose les patients à un risque de rechute de l’ordre de 77% à un an(61). Les auteurs recommandent ainsi généralement un traitement d’au moins 18 à 24 mois(91,104,105).

Méthotrexate

L’efficacité du méthotrexate a été évaluée dans 3 essais prospectifs randomisés en double aveugle au début des années 2000, avec des résultats discordants. Deux études n’ont pas montré de différence en termes de dose cumulée de corticoïdes et de durée de traitement lorsque les malades étaient randomisés pour recevoir du méthotrexate ou un placebo lors de la décroissance de la corticothérapie(97,106). Une troisième étude randomisée vs placebo montrait au contraire que les patients nouvellement diagnostiqués randomisés pour recevoir du méthotrexate en association à la corticothérapie présentaient moins de rechutes, une durée de traitement plus courte et une dose cumulée de corticoïdes moindre que dans le groupe corticoïdes + placebo(107). Une méta-analyse poolant ces principales études a montré sous méthotrexate de 7.5 à 15 mg/semaine une réduction significative de risque de rechute et une probabilité accrue de sevrage de la corticothérapie à 24 mois, sans différence d’effets indésirables vs corticoïdes seuls(108).
Les recommandations françaises proposent le recours au méthotrexate chez les patients nouvellement diagnostiqués pour qui l’épargne cortisonique est un enjeu majeur (intolérance, risque d’effets indésirables), ainsi que chez les patients rechuteurs avec cortico-dépendance à 10-15 mg d’équivalent prednisone(91). Il n’y a pas de données disponibles sur l’efficacité du méthotrexate à plus fortes doses ou sur des durées de suivi plus prolongées.

Autres traitements immunosuppresseurs et immuno-modulateurs

L’ajout d’autres traitements immunosuppresseurs ou immuno-modulateurs a également fait l’objet d’études, généralement moins robustes. L’azathioprine à 150 mg/j a été étudié en association à la corticothérapie dans un petit essai randomisé contrôlé contre placebo, montrant un effet d’épargne cortisonique à 12 mois(109). L’intérêt du mycophénolate mofetil a été évoqué dans un case report, permettant une épargne cortisonique chez des patients âgés(110), et plus récemment dans une série rétrospective, avec une épargne similaire à celle obtenue sous méthotrexate(111). L’emploi du cyclophosphamide dans les formes récidivantes a été suggéré dans un essai rétrospectif(112) ou des séries de cas(113,114), au prix d’un certain nombre d’effets indésirables majeurs. Le leflunomide semble également intéressant dans les formes réfractaires mais n’a fait l’objet que de séries de cas(115,116). L’ajout de dapsone, d’hydroxychloroquine, ou de ciclosporine n’apporte pas de bénéfice significatif dans des essais contrôlés et/ou s’associe à une mauvaise tolérance(117-119).

Biothérapies

Anti TNF-

L’infliximab et l’adalimumab ont fait l’objet d’essais randomisés sans faire preuve de bénéfice en terme de maintien de la rémission ou d’épargne cortisonique(98,120). L’etanercept n’a montré qu’un bénéfice modeste au sein d’un essai randomisé(121). Il n’y a donc pas de données suffisantes pour recommander l’emploi de ces molécules en pratique courante.

Anti IL-6R

Le tocilizumab, anticorps monoclonal humanisé dirigé contre le récepteur à l’interleukine-6 semble être l’une des molécules ciblées les plus intéressantes dans la prise en charge de l’artérite à cellules géantes réfractaire. Le rationnel de son utilisation s’appuie sur le rôle pivot de l’IL-6 dans l’induction de la réponse inflammatoire précoce au cours de la maladie(122) et ses taux semblent corrélés à l’activité inflammatoire(70). Cette molécule a fait l’objet de 2 essais randomisés récent contre placebo.
La première étude, menée par une équipe suisse, a randomisé 30 malades avec BAT positive, nouvellement diagnostiqués ou rechuteurs, pour recevoir une corticothérapie associée à du tocilizumab en perfusions mensuelles de 8 mg/kg pendant un an ou à un placebo. La survie à 1 an sans rechute était supérieure dans le groupe tocilizumab (85% vs 40%, p = 0.001) et le délai de sevrage de la corticothérapie était plus court de 12 semaines dans ce groupe (p<0.001), avec une dose cumulée de corticoïdes plus faible. Les principaux biais de ce travail étaient son analyse en intention de traiter, avec un grand nombre de perdus de vue dans le groupe corticoïdes plus placebo, et l’absence d’aveugle pour les dosages de CRP, significativement abaissés sous l’effet anti IL-6. A noter que les complications gastro intestinales et infectieuses étaient plus fréquentes dans le groupe tocilizumab(123).
L’autre étude (GiACTA) concerne 251 patients et compare 4 schémas de traitement : un groupe avec décroissance lente des corticoïdes sur 52 semaines + placebo, un groupe avec décroissance rapide sur 26 semaines + placebo, un groupe avec décroissance rapide + tocilizumab hebdomadaire sous cutané, et un groupe avec décroissance rapide + tocilizumab sous cutané une semaine sur deux. 56 % des patients sous tocilizumab hebdomadaire, et 53.1% en semaines alternées étaient en rémission à un an, contre respectivement 17.6 % et 14 % des patients sous corticoïdes seuls (p < 0.001). La dose cumulée de corticoïdes était plus faible chez les patients sou tocilizumab. La survenue d’effets indésirables était cette fois similaire dans les 4 groupes(124).
Le Groupe Français recommande le recours à cette molécule en cas de cortico-dépendance à 10-15 mg/j et d’échec du méthotrexate(91). Les effets indésirables potentiels notamment infectieux, hématologiques, hépatiques et gastro-intestinaux incitent à son utilisation réfléchie chez des patients sélectionnés.

Autres thérapies ciblées

Le rituximab (anticorps monoclonal anti CD20) n’a fait l’objet que d’un unique case report et il ne semble pas y avoir de rationnel à son utilisation au vu de l’absence d’implication majeure du lymphocyte B dans la physiopathologie de la maladie(125).
L’abatacept (protéine de fusion anti CTLA-4) a fait l’objet d’un essai randomisé contre placebo en 2017, comprenant 49 malades rechuteurs ou nouvellement diagnostiqués. La différence de survie sans rechute à un an entre les 2 groupes était plus importante dans le groupe abatacept (48 % vs 31% p=0.049) avec une durée médiane de maintien en rémission significativement plus longue dans ce groupe (9.9 mois vs 3.9 mois) après sevrage de la corticothérapie à la semaine 48(126). L’ustekinumab (anti IL-12/IL-23) s’est avéré efficace dans une étude ouverte de 12 patients réfractaires(127).
L’anakinra (anti IL-1) a été rapporté dans 3 cas d’artérite réfractaire, avec régression à un mois des symptômes et de l’inflammation vasculaire au TEP-scan(128).

Aspirine

Les patients atteints d’artérite à cellules géantes ont un risque accru de complications cardiovasculaires, cérébrales et vasculaires périphériques à court, long et moyen terme(129-131). Les données de 2 études rétrospectives suggèrent un rôle protecteur de l’aspirine en prévention primaire des complications cérébro-vasculaires et ophtalmologiques(88,132). Les données d’une méta analyse suggèrent un rôle bénéfique de l’aspirine en prévention secondaire(133). Une autre étude rétrospective a montré un rôle protecteur de l’aspirine vis-à-vis des rechutes de la maladie(134).
Les recommandations du groupe d’experts français indiquent que l’aspirine à faible dose (75-300 mg/j) devrait être proposée chez tous les patients nouvellement diagnostiqués, selon la balance bénéfices-risques, et être systématiquement introduite chez les patients avec atteinte ophtalmologique(91).

Anticoagulants, statines, antihypertenseurs

L’apport bénéfique d’un traitement anticoagulant n’a pas été établi(132).
L’effet des statines en prévention des complications cardiovasculaires dans l’artérite à cellules géantes n’a pas fait l’objet d’études. Cette classe thérapeutique n’a pas montré de bénéfice sur l’épargne cortisonique dans 3 études rétrospectives(135-137), à l’inverse d’une étude observationnelle française qui retrouvait une réduction de durée de corticothérapie(138).
L’adjonction d’antagoniste des récepteurs de l’angiotensine a été proposée, s’appuyant sur des données in vitro retrouvant un rôle pro-inflammatoire de l’angiotensine II. Une étude observationnelle de 106 malades a suggéré un rôle bénéfique des ARA II en termes de rechutes et d’épargne cortisonique(139).

Rechute et mortalité

La définition de la rechute n’est pas consensuelle, la plus employée étant la réapparition au cours du suivi de symptômes en lien avec la vascularite (signes systémiques, signes crâniens, signes de PPR, atteinte des gros vaisseaux), parfois associée à une réascencion du syndrome inflammatoire(17) et nécessitant une adaptation thérapeutique. Toutefois certains auteurs incluent également les rechutes biologiques asymptomatiques, de signification incertaine(140). Certains auteurs distinguent rechutes, survenant en cours de traitement, et récurrences, apparaissant après l’arrêt de celui-ci.
La survenue de rechutes au cours du suivi de la maladie est fréquente, entre 34 et 79%(16-18,69,140,141). Ces différences s’expliquent notamment par l’inclusion ou non des patients avec BAT négative, par les différentes définitions retenues pour la rechute, les différentes durées de suivi et l’hétérogénéité des schémas de décroissance de corticothérapie. Les manifestations les plus fréquemment retrouvées lors des rechutes sont des symptômes de PPR, des céphalées et des symptômes généraux. Les rechutes ophtalmologiques ou les atteintes artérielles de gros calibres sont plus rares(15-17). La majorité des rechutes surviennent dans l’année suivant le diagnostic(140), avec une corticothérapie rarement supérieure à 20 mg d’équivalent prednisone(69). Près de la moitié des patients présente 2 rechutes ou plus(15,140).
L’identification de facteurs pronostiques de rechutes est un enjeu majeur afin d’identifier les patients à risque, d’optimiser la durée du traitement et limiter la dose cumulée de corticoïdes, plus élevées chez les patients rechuteurs(16,17). Peu d’études ont mis en évidence des facteurs prédictifs de rechutes dans le cours évolutif de la maladie. Une étude rétrospective récente menée au sein de la Mayo Clinic a identifié que le sexe féminin, l’existence d’une HTA au diagnostic et/ou d’un diabète étaient associés à un plus grand nombre de rechutes. L’intensité de la réponse inflammatoire systémique au moment du diagnostic serait également prédictive de rechute(142). Restuccia et al ont identifié la présence d’une fièvre élevée au diagnostic comme élément prédictif de rechute, tout comme l’importance de l’infiltrat inflammatoire sur la BAT (17). Muratore et al ont retrouvé un taux de rechutes plus important chez les patients avec aorto-artérite isolée(9). Concernant le traitement initial, les patients recevant une posologie initiale de prednisone supérieure à 40 mg étaient plus rapidement sevrés de la corticothérapie dans cette cohorte. A noter cependant que seuls des patients à BAT positive étaient inclus dans cette étude(140). Au plan biologique, l’existence d’une anémie inflammatoire au moment du diagnostic semble également être un facteur de risque de rechute (Martinez-Lado et al), tout comme la présence d’une VS élevée(142,143). Au cours du suivi il a été montré qu’une élévation isolée de la vitesse de sédimentation s’accompagnait d’un risque de rechute multiplié par 4 dans un délai médian de 7 semaines(97).
L’artérite à cellules géantes ne s’accompagne pas ou peu d’une surmortalité globale par rapport à la population générale. Une méta-analyse récente montrait par rapport à la population générale un mortality-ratio de 1.03 pour l’artérite à cellules géantes. Cette différence était en revanche plus importante en population hospitalière (MR = 1.61)(144).
Par ailleurs, il existe une augmentation de la mortalité cardio-vasculaire (RR 1.32) les deux premières années suivant le diagnostic(19). Il s’agit de la première cause de mortalité chez les patients français(37). Parmi ces évènements on retrouve les complications anévrysmales qui sont associées à un taux standardisé de mortalité de 5.1(145).
On observe également un sur-risque de mortalité infectieuse, notamment chez les patients diabétiques et/ou recevant de fortes doses de corticoïdes, généralement lors de la première année suivant le diagnostic d’ACG(20). Hachulla et al ont suggéré qu’une atteinte ophtalmologique initiale était associée à une moins bonne survie, tout comme une corticothérapie supérieure à 10 mg/j à 6 mois et un traitement par prednisolone plutôt que prednisolone(143). Néanmoins ces données n’étaient pas confirmées en analyse multivariée.

Apport du doppler des artères temporales

Apport diagnostique

L’ultrasonographie est utilisée dans l’artérite à cellules géantes depuis la fin des années 1970, initialement pour localiser les artères temporales en préopératoire des biopsies(146). Les premiers éléments sémiologiques d’œdème pariétal inflammatoire dans une vascularite ont été décrits au début des années 1990 dans la maladie de Takayasu, sous forme d’image hypoéchogène définissant « le signe du macaroni »(147). En 1997 Schmidt et al ont proposé cet examen a visée diagnostique dans l’artérite à cellules géantes(12). L’atteinte de l’artère temporale superficielle se traduit à l’échographie par un épaississement hypoéchogène circonférentiel segmentaire, visible dans les plans transversaux et longitudinaux autour de la lumière artérielle, communément appelé « signe du halo ». L’épaisseur maximale du halo doit être mesurée dans le plan longitudinal, de la paroi externe du vaisseau jusqu’à la limite externe du signal couleur. L’épaisseur minimale significative est supérieure 0.3 mm, sachant qu’un épaississement de 0.7 mm est prédictif d’une BAT positive(12). Cet aspect se différencie nettement de l’épaississement hyperéchogène focal de l’athérosclérose. L’étude des artères sur l’ensemble de leur trajet permet de s’affranchir du caractère focal de la biopsie(10).
Les performances diagnostiques de cet examen ont été étudiées dans 3 méta-analyses. Karassa et al en 2004 ont retrouvé une sensibilité de 69 % et une spécificité de 82 % en comparaison avec la BAT et de 87 % et 96 % respectivement en comparaison avec les critères ACR(72). Ball et al en 2010 retrouvaient une sensibilité de 75 % et une spécificité de 83 % comparativement avec la BAT(148). Arida et al retrouvaient une sensibilité de 68 % et une spécificité de 91 % en cas de halo unilatéral(10). La spécificité était de 100 % en cas d’atteinte bilatérale. Les odds-ratios pour le diagnostic en comparaison avec les patients à doppler négatif étaient de 34 (95% CI: 8.21, 138.23) et de 65 (95% CI: 17.86, 236.82) en cas de halo bilatéral. La présence de zones de sténose (définies par un doublement localisé de la vitesse du flux) ou d’occlusion (absence de flux), témoins des dommages de l’atteinte inflammatoire artérielle sont également retrouvés, bien que moins sensibles (68%) et spécifiques (77%)(10,72,149). Certains auteurs ont décrit le recours à des manœuvres dynamiques (« incompressibilité » de l’artère temporale en mode B) comme performant et utile pour augmenter la sensibilité (79 %) et la spécificité (100%) de l’examen et réduire la variabilité inter opérateurs(150).
Il semble exister un certain degré de corrélation entre les signes échographiques et l’histologie, le signe du halo étant beaucoup moins présent en cas d’atteinte des vasa vasorum ou périadventitielle qu’en cas d’atteinte transmurale typique(151).
L’écho-doppler est examen non invasif, peu coûteux, rapide, facilement accessible, permettant par ailleurs l’étude des troncs supra aortiques, de l’aorte abdominale et des artères des membres à la recherche de signes inflammatoires sous forme d’épaississements muraux circonférentiels hypoéchogènes ou encore de sténoses et d’occlusions.
La recherche d’atteintes vasculaires extra temporales permettrait d’augmenter la sensibilité de l’examen(152). Ainsi une atteinte inflammatoire axillaire serait présente dans 48 % des cas, une atteinte sous-clavière dans 36 % et une atteinte carotidienne dans 26 %(153). L’atteinte des artères des membres inférieurs est retrouvée chez un peu plus de 50 % des patients, toujours sous forme d’épaississement pariétal avec halo hypoéchogène. Ces atteintes sont asymptomatiques dans la plupart des cas(153). L’échographie permet également l’exploration de l’aorte abdominale dès la phase initiale de la maladie, à la recherche de signes inflammatoires infracliniques (épaississement mural, halo péri aortique) ou des complications anévrysmales(154), qui seraient présentes chez un tiers des malades(155).
Certains auteurs ont validé des algorithmes diagnostiques en y incluant l’écho-doppler des artères temporales, avec une amélioration de la rentabilité de la biopsie et une diminution des biopsies non nécessaires, dans les cas où la suspicion clinique est faible et le doppler strictement normal(148,149). Des données récentes suggèrent que l’emploi précoce de l’écho-doppler dans l’algorithme diagnostique (fast track pathway) permettrait une réduction des complications ophtalmologiques en réduisant le délai diagnostique, avec une diminution des coûts liés de la durée moyenne de séjour(156,157).
Le principal écueil de cet examen est son caractère opérateur et matériel dépendant, expliquant probablement l’hétérogénéité des performances rapportées dans la littérature, allant de 35% à 86% de sensibilité et 78 à 100% de spécificité, en comparaison aux critères ACR(10). Les principaux pièges à éviter sont l’application d’une pression la plus faible possible afin de ne pas supprimer artificiellement le codage couleur. La tortuosité physiologique du trajet de l’artère temporale peut créer des fausses images de halo si le vaisseau n’est pas étudié sur l’ensemble de ses limites. La technique optimale requiert une sonde linéaire d’une fréquence supérieure à 15 MHz (correspondant à une résolution image de 0.1 mm). Le gain et la gamme dynamique doivent permettre de différentier la paroi vasculaire de la lumière. Le réglage de la fréquence de répétition des impulsions (PRF) devrait se situer entre 2 et 3.5 kHz, selon le calibre du vaisseau étudié, une PRF trop haute et un gain trop faible pouvant donner une fausse image de halo au niveau d’une zone épaissie par exemple en cas d’artériosclérose(158). Un pseudo-halo peut être visualisé en cas de faible vélocité du flux en périphérie du vaisseau, notamment en coupe transversale. Le développement des sondes haute-résolution a permis d’améliorer la sensibilité et la spécificité de cet examen(11). Enfin l’échographie est peu sensible pour l’étude de l’aorte thoracique, toutefois explorable par voie trans-œsophagienne(159). Des résultats optimaux ne peuvent être obtenus qu’avec une standardisation des techniques et de l’équipement, des préréglages optimisés, avec des utilisateurs entraînés.

Apport de l’écho-doppler des artères temporales au cours du suivi

Si les données concernant l’apport diagnostique de l’écho-doppler sont nombreuses, peu d’études se sont intéressées à cet outil au cours du suivi. Aschwanden et al ont mis une évidence au sein d’une cohorte de 12 patients atteints d’ACG une stabilité des images inflammatoires vasculaires décrites initialement au doppler chez la majorité d’entre eux, après 6 mois de traitement, et ce malgré l’absence de signe clinico-biologique d’inflammation systémique(160). Des résultats similaires ont été retrouvés au sein d’une cohorte de 18 patients, avec persistance du halo chez la moitié des patients à 6 semaines et 6 mois du diagnostic. Il n’y avait pas de différence sur les données histologiques initiales entre ceux avec halo persistant et ceux avec normalisation échographique(161). Habib et al, au sein d’une cohorte prospective de 16 patients avec doppler pathologique, ont obtenu des résultats contradictoires aux données citées précédemment, avec une disparition du halo avec un délai moyen de 21 jours après initiation de la corticothérapie(162). La normalisation des signes échographiques était corrélée à l’amendement des symptômes cliniques et du syndrome inflammatoire biologique. Des résultats similaires étaient obtenus dans l’étude de Karahaliou et al portant sur 18 patients, avec un délai médian de disparition du halo de 22 jours(149). A noter que les 4 patients rechuteurs de cette étude montraient également une récidive du signe de halo, qui disparaissait après majoration de la corticothérapie. Des négativations encore plus précoces du signe du halo, de l’ordre de quelques jours après initiation de la corticothérapie, ont été rapportées par d’autres auteurs, ce qui plaide pour une réalisation précoce de cet examen(14,163,164). Concernant l’apport pronostique, Suelves et al ont dépisté précocement 2 rechutes sur une cohorte de 10 patients en effectuant un doppler de suivi à 3 mois montrant une récidive du halo(165). Ces données n’ont pas été confirmées par des travaux de plus grande envergure.

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Table des matières

Chapitre 1 – Introduction
Chapitre 2 – Généralités sur l’artérite à cellules géantes
2.1. Définition
2.2. Historique
2.3. Epidémiologie
2.4. Physiopathologie
2.5. Manifestations cliniques classiques
2.6. Spectres cliniques
2.7. Diagnostic différentiel
2.8. Critères de classification
2.9. Signes biologiques
2.10. Histologie
2.11. Imagerie (hors écho-doppler)
2.12. Traitements
2.12.1. Corticothérapie
2.12.2. Méthotrexate
2.12.3. Autres traitements immunosuppresseurs et immuno-modulateurs
2.12.4. Biothérapies
2.12.4.1. Anti TNF-
2.12.4.2. Anti IL-6R
2.12.4.3. Autres thérapies ciblées
2.12.5. Aspirine
2.12.6. Anticoagulants, statines, antihypertenseurs
2.13. Rechute et mortalité
Chapitre 3 – Apport du doppler des artères temporales
3.1. Apport diagnostique
3.2. Apport de l’écho-doppler des artères temporales au cours du suivi
Chapitre 4 – Patients et méthodes
4.1. Patients
4.2. Données recueillies
4.2.1. Données cliniques
4.2.2. Spectres cliniques
4.2.3. Données biologiques
4.2.4. Doppler des artères temporales
4.2.5. Angioscanner de l’aorte
4.2.6. Biopsie d’artère temporale
4.2.7. Dose cumulée de corticoïdes et traitements adjuvants
4.2.8. Définition et recueil des rechutes
4.2.9. Complications des traitements
Chapitre 5. Analyse statistique
Chapitre 6 – Résultats
6.1.1. Description générale de la population
6.1.2. Manifestations cliniques
6.1.3. Données paracliniques
6.1.4. Echo-doppler et biopsie d’artère temporale
6.1.5. Traitements initiaux
6.2. Suivi et rechutes
6.2.1. Rechutes à un an en fonction de l’écho-doppler
6.2.2. Etude du lien entre les rechutes et les caractéristiques initiales des patients
6.3. Echo-doppler de contrôle à 3 mois
6.4. Complications et doses cumulées de corticoïdes à un an
Chapitre 7 – Discussion
Limites de l’étude
Chapitre 8 – Conclusion et perspective
BIBLIOGRAPHIE

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