Développement normal de la vessie et du contrôle sphinctérien
La vessie de l’enfant en bas âge est en constante adaptation et évolution, en miroir de l’enfant qui grandit. Elle se comporte de façon très différente de celle du grand enfant et de l’adulte. Elle dépend de la maturation du système nerveux central. Il existe des variations individuelles dans la maturation du système nerveux. Le développement normal de la vessie et du contrôle sphinctérien se réalise en trois étapes [10][11][12][13] :
1. Stade infantile ou automatique. Le fonctionnement vésico sphinctérien est automatique. La distension pariétale entraîne une contraction réflexe à bas volume. Pour un remplissage vésical faible, la miction survient par contraction de la vessie et relâchement du système sphinctérien. Le stimulus déclenchant la miction est la sensibilité proprioceptive de la distension vésicale, mais également la stimulation cutanée périnéale, pouvant survenir lors du changement de couche.
2. Stade immature, de 2 à 3 ans. La conscience de la réplétion vésicale se met en place. L’enfant prend conscience du besoin d’uriner et de la nécessité d’acquisition de la propreté pour satisfaire son entourage. Il contrôle son sphincter strié. Les contractions vésicales réflexes persistent mais l’enfant apprend à retarder la miction en inhibant par contraction sphinctérienne la contraction de la vessie. L’enfant acquiert la continence diurne et sa capacité vésicale augmente.
3. Stade mature ou adulte, à partir de 3 ans. Les connexions avec les centres corticaux se réalisent. L’enfant est capable d’inhiber ou de déclencher volontairement la miction. La continence nocturne est alors acquise. Le fonctionnement vésico-sphinctérien est le même qu’à l’âge adulte.
Fonctionnement vésico-sphinctérien nocturne
Même chez le nouveau-né, la miction ne se retrouve pas pendant le sommeil. Quand la vessie se remplit, la distension de ses parois est à l’origine d’une activation des régions corticales d’éveil, visibles sur l’EEG de sommeil [15]. En pratique, les nouveaux nés et les nourrissons se réveillent avant que la vessie se contracte et que la miction apparaisse. Cette période de réveil peut être tout à fait transitoire et l’enfant peut pleurer et bouger pendant un bref instant et peu après se rendormir. Cette observation montre que les mictions réflexes subissent en réalité une influence corticale.
Coordination vésico-sphinctérienne
Une autre caractéristique principale chez l’enfant en bas âge et en bonne santé est la dyscoordination de l’unité détrusor-sphincter pendant la miction. On a observé que le schéma mictionnel du nourrisson est caractérisé par une miction hachée du fait du manque de relaxation sphinctérienne pendant la miction. Ceci est accompagné en conséquence par une haute pression détrusorienne, surtout chez les garçons, et peut être accompagnée d’une vidange incomplète. Cette dyscoordination est physiologique et transitoire chez le nourrisson, et disparait progressivement quand l’enfant grandit. Dans l’étude de Jansson [17], on retrouve une dyscoordination chez 33% des enfants de 3 mois, 25% des enfants de 1 an et 3% des enfants de 2 ans. La dyscoordination est différente de la dyssynergie vésico-sphinctérienne qui se retrouve dans les vessies neurologiques.
La cystomanométrie
Il s’agit de la mesure de la pression endovésicale pendant le remplissage et pendant la miction. L’examen n’est pas considéré complet tant que n’apparait pas une miction spontanée chez l’enfant qui en est capable. La cystomanométrie permet d’obtenir des informations sur le fonctionnement vésico-sphinctérien pendant la phase de remplissage et pendant la phase de vidange. Cet examen est difficile à réaliser chez l’enfant en raison d’une coopération pas toujours évidente à obtenir chez le petit enfant. Cet examen doit être pratiqué au calme, avec du personnel habitué à prendre en charge des enfants. Il nécessite au moins 1 heure par patient. Il faut savoir recommencer l’enregistrement si les premières mesures sont ininterprétables en raison du stress de l’enfant.
Résidu post-mictionnel
Le résidu post-mictionnel est le volume résiduel dans la vessie après la miction. Le sondage évacuateur permet de le mesurer. Le résidu post-mictionnel est fonction de l’activité de la vessie et du sphincter pendant la phase de vidange vésicale. Un résidu post-mictionnel élevé indique généralement d’une augmentation des résistances sphinctériennes, une faiblesse de la contraction détrusorienne, ou les 2. Johnston et al. ont montré que le résidu post-mictionnel était <10% de la capacité vésicale chez le petit enfant et Yeung et al. a montré que la vessie normale du petit enfant se vidait presque complètement [15][38].
Le dysraphisme spinal et le syndrome de la moelle attachée
Le dysraphisme spinal est une anomalie du développement qui intéresse anatomiquement et avec une gravité variable le rachis, les méninges, et enfin la moelle et les racines en regard de la malformation osseuse. Une connaissance de l’embryologie normale permet une meilleure compréhension de ces lésions et du diagnostic anatomo-clinique. L’embryologie n’a pas été l’objet de cette thèse mais les travaux de thèse de Lalleman Dudek Pauline en 2016 et de Ait Sayad Hanane en 2010 en font une synthèse [42][43].
a) Les dysraphismes ouverts : Les dysraphismes ouverts, dépourvus de revêtement cutané, signent une atteinte globale du système nerveux central, avec possible atteinte neuropsychologique ou des membres supérieurs. Ils comprennent la myélocèle et la myéloméningocèle. La myélocèle est une protrusion postérieure extériorisée de la moelle épinière à travers la malformation osseuse. Dans la myéloméningocèle y est associée une hernie des méninges. L’anomalie siège le plus souvent au niveau lombo-sacré et le diagnostic est évident à la naissance. Dans le passé, la myéloméningocèle était la principale étiologie des vessies neurologiques retrouvée chez l’enfant. Actuellement l’incidence a progressivement diminué grâce à la popularisation de la supplémentation en acide folique chez les femmes avant la conception et en début de grossesse. L’amélioration du diagnostic anténatal (suivi échographique et dosage du taux d’alpha-foetoprotéine), conduisant à proposer une interruption médicale de la grossesse a aussi contribué à la diminution de cette incidence.
b) Les dysraphismes fermés : En cas de dysraphisme fermé ou spina bifida occulta, il existe un revêtement cutané. L’atteinte neurologique est locale ou loco-régionale. Des malformations d’organes peuvent y être associées. Les dysraphismes fermés sont plus fréquents chez les filles que les garçons. Ils doivent être suspectés devant l’existence d’anomalies cutanées au niveau du raphé médian de la région lombo-sacrée (fossette même borgne, sinus dermique, tache pigmentée avec pilosité, hémangiome, masse lipomateuse). On distingue plusieurs formes cliniques de dysraphisme fermé selon la présence ou l’absence d’une masse sous cutanée. Les dysraphismes spinaux fermés deviennent la cause majeure des vessies neurologiques.
c) Le syndrome de moelle attachée : On parle de moelle attachée si la fixation du cône médullaire terminal est en position basse, c’est-à-dire en dessous de L2. C’est une complication fréquente du dysraphisme spinal. Le diagnostic est neuro-radiologique. Quand la moelle est attachée, il y a une limitation de sa mobilité ce qui peut entraîner des dommages du tissu nerveux secondaire à l’étirement des fibres nerveuses et à un métabolisme anaérobie. Il existe un risque d’évolutivité neurologique important chez l’enfant du fait de la croissance. Il en résulte des troubles orthopédiques vésicosphinctériens et ano-rectaux susceptibles de s’aggraver [44][45].
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Table des matières
A/ INTRODUCTION
B/ PARTIE THEORIQUE
B.1. Etude du fonctionnement uréthro-vésical chez l’enfant en bas âge
B.1.1. Développement normal de la vessie et du contrôle sphinctérien
B.1.2. Caractéristiques de la vessie de l’enfant non propre
B.2. Le bilan urodynamique du nourrisson et du petit enfant
B.2.1. Généralités
B.2.2. La débitmétrie
B.2.3. La cystomanométrie
B.3. Dysraphisme spinal et dysfonction vésico-sphinctérienne
B.3.1. Le dysraphisme spinal et le syndrome de la moelle attachée
B.3.2. Bilan neuro-urologique du dysraphisme spinal
B.3.3. Traitement étiologique du dysraphisme spinal
C/ ETUDE CLINIQUE
C.1. Objectif de l’étude
C.2. Matériels et méthodes
C.2.1. Type d’étude et population
C.2.2. Méthodes
C.2.3. Conditions de réalisation l’examen urodynamique
C.2.4. Matériels et techniques
C.2.5. Réalisation du bilan urodynamique
C.3. Analyse statistique
C.4. Résultats
C.4.1. Analyse du bilan urodynamique chez 35 enfants de moins de 3 ans
C.4.2. Comparaison du bilan urodynamique avant et après chirurgie de libération médullaire chez 14 enfants
D/ DISCUSSION
D.1. Points forts et limites de l’étude
D.1.1. Points forts
D.1.2. Limites
D.2. Discussion des résultats
D.2.1. Discussion des résultats de la 1ère partie de l’étude
D.2.1. Discussion des résultats de la 2ème partie de l’étude
D.3. Apports et limites du bilan urodynamique dans la prise en charge initiale du dysraphisme
D.3.1. Apport diagnostic, pronostic, pré-thérapeutique du bilan urodynamique
D.3.2. Apport du bilan urodynamique dans la prise en charge péri-opératoire
D.3.3. Les limites du bilan urodynamique chez le nourrisson
E/ CONCLUSION
F/ BIBLIOGRAPHIE
G/ ANNEXES
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