Apport des tests allergologiques dans la prise en charge des conjonctivites allergiques

La rรฉaction allergique est une rรฉponse immunitaire inappropriรฉe aigue ou chronique de l’organisme au contact dโ€™une ou plusieurs substances รฉtrangรจres, appelรฉes allergรจnes ou antigรจnes (Ag). Lโ€™allergie est la maladie de ce nouveau millรฉnaire. Elle touche plusieurs dizaines de millions dโ€™individus, environ 1/6 de la population mondiale. Elle est en constante progression du fait de lโ€™augmentation du nombre dโ€™allergรจnes environnementaux. Cโ€™est une des pathologies les plus frรฉquentes de la surface oculaire [2]. La conjonctivite allergique est un vรฉritable problรจme de santรฉ publique avec 15 ร  20% de la population mondiale touchรฉe. Jusquโ€™alors souvent nรฉgligรฉe, elle devient lโ€™un des premiers motifs de consultation pour ล“il rouge [51]. Cโ€™est une affection inflammatoire de la conjonctive avec diverses expressions cliniques et une physiopathologie commune basรฉe sur une hyper sensibilitรฉ de type immรฉdiate ou anaphylaxie, dans 85% des cas et IgE mรฉdiรฉes, dans 95% des cas [50]. En Afrique sub-saharienne, il sรฉvit une forme particuliรจrement frรฉquente de kรฉratoconjonctivite vernale, la limboconjonctivite endรฉmique des tropiques [23]. La prise en charge de ces conjonctivites allergiques est longue, difficile et multidisciplinaire (ophtalmologue, allergologue, gรฉnรฉraliste, pรฉdiatre, pneumologue, ORL, dermatologue). Elle nรฉcessite lโ€™identification de lโ€™allergรจne causal pour permettre son รฉviction et la guรฉrison de la maladie. Plusieurs tests de dรฉtection sont utilisรฉs. Cependant, ils ne sont souvent pas accessibles et peu utilisรฉs dans nos rรฉgions Le but de ce travail รฉtait de rapporter notre expรฉrience de lโ€™utilisation des prick-tests cutanรฉs dans la prise en charge des conjonctivites allergiques en zone intertropicale.

Etude bibliographiqueย 

Bases anatomophysiologiques

La surface oculaire est une cible privilรฉgiรฉe des rรฉactions allergiques en raison de son contact direct avec lโ€™environnement et ses multiples allergรจnes aรฉroportรฉs. Elle est une entitรฉ clinique englobant les bords libres palpรฉbraux, le film lacrymal, la conjonctive et la cornรฉe.

Les paupiรจres
Les paupiรจres sont des voiles musculo-membraneux dans le prolongement des tรฉguments de la face (figure 2). Elles sont au nombre de quatre, deux supรฉrieures et deux infรฉrieures. Chacune prรฉsente ร  dรฉcrire deux faces, antรฉrieure et postรฉrieure et un bord libre porteur des cils. On leur distingue un plan cutanรฉo-musculaire superficiel et un plan tarso-conjonctival plus profond. Les deux sont sรฉparรฉs par une ligne grise au niveau du bord libre. Les paupiรจres assurent la lubrification de la cornรฉe et le drainage actif des larmes. Les cils sont implantรฉs sur la partie cutanรฉo musculaire qui contient les glandes sรฉbacรฉes de Zeiss et les glandes sudoripares de Moll. Au niveau de la partie tarsoconjonctivale sโ€™abouchent les canaux excrรฉteurs des glandes de Meibomius. La peau des paupiรจres est fortement dotรฉe en cellules mastocytaires et en cellules de Langerhans.

La conjonctive
Cโ€™est une membrane muqueuse vascularisรฉe, protectrice du globe oculaire. On lui dรฉcrit trois zones, palpรฉbrale ou tarsale, bulbaire et les culs de sac reprรฉsentant les zones de rรฉflexion (Figure 1). La portion palpรฉbrale tapisse les faces postรฉrieures des paupiรจres, la portion bulbaire recouvre le globe jusquโ€™au limbe oรน elle entre en contact avec la cornรฉe. La conjonctive est constituรฉe dโ€™un รฉpithรฉlium malpighien non kรฉratinisรฉ ร  cellules cuboรฏdes. Il comporte deux assises de cellules reposant sur une membrane basale surmontant un chorion. Sa surface est festonnรฉe et constituรฉe de cellules possรฉdant des microvilositรฉs qui augmentent ainsi la surface dโ€™รฉchange. On distingue des cellules รฉpithรฉliales ร  fonction sรฉcrรฉtoire, des cellules ร  mucus qui assurent la production des mucines, constituant primordial du film lacrymal.

Lโ€™รฉpithรฉlium contient รฉgalement des lymphocytes (T et B), des polynuclรฉaires neutrophiles et des cellules de Langerhans (prรฉsentatrices dโ€™antigรจnes). Le chorion est riche en vaisseaux sanguins et lymphatiques. Il contient de nombreuses cellules lymphocytes, plasmocytes, mastocytes et neutrophiles. Elles sont disposรฉes en follicules et prรฉdominent dans les culs-de-sacs. Les mastocytes des paupiรจres et de la conjonctive reprรฉsentent 94% de lโ€™ensemble des mastocytes oculaires. La conjonctive ne contient pas de cellules รฉosinophiles.

Le film lacrymal

La partie orbitale de la glande lacrymale principale, situรฉe dans le coin extรฉrieur de lโ€™ล“il sous chaque paupiรจre supรฉrieure, est contrรดlรฉe par le nerf facial VII et produit en permanence du liquide lacrymal (liquide semblable au liquide cรฉphalo-rachidien contenu dans la membrane de protection du systรจme nerveux central). Les cellules de cette glande produisent un liquide aqueux salin : les larmes. La partie palpรฉbrale de la glande lacrymale, situรฉe ร  l’intรฉrieur des paupiรจres, est ร  l’origine de la sรฉcrรฉtion continue des larmes basales aussi appelรฉes film lacrymal. A chaque clignement de la paupiรจre, les larmes sont rรฉparties de faรงon uniforme sur toute la surface oculaire (la cornรฉe et la conjonctive) sous la forme dโ€™un film de 4 ร  8ฮผ dโ€™รฉpaisseur. Ce film lacrymal (Figure 2) est composรฉ dโ€™une couche superficielle lipidique (sรฉcrรฉtรฉe par les glandes de Meibomius), dโ€™une couche intermรฉdiaire aqueuse (sรฉcrรฉtรฉe par la glande lacrymale principale), dโ€™une couche profonde phospholipidique et muqueuse (sรฉcrรฉtรฉe par les cellules caliciformes de la conjonctive).

La couche lipidique empรชche lโ€™รฉvaporation des larmes. La couche aqueuse assure un milieu de dilution stable aux substances dissoutes. La couche muqueuse permet lโ€™adhรฉsion du film lacrymal aux structures profondes. Les larmes protรจgent la cornรฉe et la conjonctive. Elles ont un rรดle immunologique grรขce aux protรฉines antibactรฉriennes aspรฉcifiques, aux anticorps et aux cellules phagocytaires quโ€™elles contiennent. Dโ€™autres rรดles leur sont รฉgalement assignรฉs. Elles nettoient et captent le mucus, assurent la nutrition et le polissage de la cornรฉe quโ€™elles lubrifient lors des mouvements palpรฉbraux [46]. Les larmes ont un grand intรฉrรชt immunologique. Elles contiennent la lactoferrine, la ceruloplasmine et le lysozyme qui sont antibactรฉriens. On y trouve diffรฉrentes classes dโ€™immunoglobulines (Ig). Les plus constantes sont les IgA sรฉcrรฉtoires et les IgG. Les IgA sรฉcrรฉtoires seraient secrรฉtรฉes localement. Les autres seraient essentiellement liรฉes ร  une diffusion depuis le plasma parallรจlement au passage lacrymal de lโ€™albumine sรฉrique. Il nโ€™existe pas dโ€™IgE dans les larmes. Le film lacrymal se comporte comme un ยซ bouclier ยป protรฉgeant lโ€™oeil des agressions extรฉrieures. En effet, tout organisme amenรฉ au contact de lโ€™oeil est captรฉ par les larmes et piรฉgรฉ par le mucus pour รชtre drainรฉ vers le canal lacrymo-nasal par le clignement de lโ€™ล“il. Des IgA2 fixent les antigรจnes de paroi et empรชchent la fixation cellulaire. Grรขce au lysozyme et ร  la transferrine, le milieu devient pauvre en fer et cela empรชche le dรฉveloppement des bactรฉries.

La cornรฉe
Cโ€™est une membrane transparente, avasculaire et richement innervรฉe, prolongeant en avant la sclรจre. Elle est grossiรจrement ovoรฏde ร  sa face antรฉrieure avec un grand axe horizontal. Elle est constituรฉe des couches successives, lโ€™รฉpithรฉlium superficiel surmontรฉ du film lacrymal, la membrane limitante externe dite de Bowman, le stroma, la membrane limitante interne dite de Descemet et de lโ€™endothรฉlium profond. Lโ€™รฉpithรฉlium cornรฉen serait un prolongement de lโ€™รฉpithรฉlium conjonctival. Cependant, elle est dรฉpourvue dโ€™รฉlรฉments cellulaires inflammatoires sauf au niveau du limbe ce qui explique la frรฉquence des localisations allergiques ร  ce niveau.

Les allergรจnes

Les pneumallergรจnes (allergรจnes inhalรฉs)ย 

Ils sont prรฉsents chez 15% de la population, Ce sont essentiellement :

Les acariens
Les acariens ou Dermatophagoides (D) sont de la famille des Pyroglyphidae. On distingue les espรจces, Dermatophagoides pteronyssinus, D. farinae et D.microceras qui existent dans les mรชmes zones, mais les proportions relatives ร  leur distribution varient gรฉographiquement. Les acariens sont une des sources les plus communes de sensibilisation dans toutes les parties du monde. Ils ont un cycle de vie dโ€™environ 2 ร  3 mois. Leur taille peut atteindre 0,3 mm, de la taille dโ€™un grain de pollen et peuvent donc รชtre aisรฉment en suspension dans lโ€™air et pรฉnรฉtrer dans les alvรฉoles pulmonaires . Ils vivent dans la poussiรจre des intรฉrieurs (maisons, appartements) et se dรฉveloppent bien dans la chaleur et la forte humiditรฉ. Les autres sources dโ€™exposition sont les maisons humides (>45% dโ€™humiditรฉ relative) ou les logements ร  basse altitude. Les fรจces dโ€™acariens semblent รชtre la source majeure de lโ€™exposition allergรฉnique. La poussiรจre, les tapis, oreillers, matelas et les tissus dโ€™ameublement contenant des matรฉriaux biologiques, en particulier les pellicules/squames humainesย  constituent des rรฉservoirs dโ€™acariens.

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Table des matiรจres

Introduction
PREMIERE PARTIE : Etude bibliographique
I-Bases anatomophysiologiques
I-1- Les paupiรจres
I-2- La conjonctive
I-3- Le film lacrymal
I-4-La cornรฉe
II- Bases physiopathologiques
III- Les allergรจnes
III-1- Les pneumallergรจnes (allergรจnes inhalรฉs)
III-2- Les trophallergรจnes (allergรจnes ingรฉrรฉs ou alimentaires)
III-3- Les allergรจnes de contact
III-4- Les mรฉdicaments
III-5- Les venins dโ€™hymรฉnoptรจres
IV- Etude clinique
IV-1 Exploration clinique
IV-2- Explorations paracliniques
IV-3- Formes cliniques
V- Traitement
V-1-But
V-2- Moyens
V-3-Indications
DEUXIEME PARTIE : Travail personnel
VI- Patients et mรฉthodes
VI-1- Cadre dโ€™รฉtude
VI-2-Critรจres dโ€™inclusion
VI-3- Mรฉthodologie
VII- Rรฉsultats
VII-1-Aspects dรฉmographiques
VII-2-Aspects cliniques
VII-3-Aspects thรฉrapeutiques
VIII- Commentaires
VIII-1-Aspects dรฉmographiques
VIII-2-Aspects cliniques
VIII-3-Aspects thรฉrapeutiques
Conclusion
Rรฉfรฉrences bibliographiques
Annexes

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