Apport de l’echographie dans le diagnostic des appendicites aigues

L’appendicite aiguë est l’inflammation de l’appendice iléo-cæcal évoluant depuis moins d’une semaine [25]. Elle représente la première urgence chirurgicale digestive en pratique quotidienne [40]. Au Sénégal, dans l’étude de SOUMAH à l’Hôpital Saint Jean de Dieu à THIES, elle représentait 65,9% des urgences abdominales ; à DAKAR dans l’étude de DEME à l’Hôpital Aristide Le Dantec, elle représentait aussi 48,4% des urgences abdominales [12 ,49]. L’appendicite survient avant 30 ans avec une prédominance masculine et beaucoup d’auteurs ont trouvé un genre ratio entre 1 et 1,5 [10,50]. Le diagnostic repose le plus souvent sur des critères cliniques et biologiques. Il n’est cependant pas toujours évident, compte tenu du polymorphisme anatomoclinique [36]. Les diagnostics différentiels devant une douleur de la FID sont multiples, l’imagerie est devenue alors indispensable afin d’établir le diagnostic positif et adapter la prise en charge thérapeutique adéquate [8]. L’échographie est une technique non irradiante, ses performances dans le diagnostic de l’appendicite sont réputées opérateur dépendant. Lorsque l’échographie n’est pas contributive, la tomodensitométrie (TDM) sera demandée. Cette dernière est source d’irradiation et doit être réalisée avec beaucoup de réserve chez la femme enceinte et les enfants [25,50]. Notre objectif principal était de déterminer l’apport de l’échographie abdominale dans le diagnostic des appendicites aigües. Les objectifs spécifiques étaient de :
• Décrire la sémiologie de l’appendicite aigüe à l’échographie.
• Confronter les résultats échographiques et chirurgicaux.
• Evaluer les performances diagnostiques de l’échographie dans les appendicites aigües et d’établir ses limites.

DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES

L’âge moyen des patients dans cette étude était de 27,05 ans, ABDELOUAFI à Ziguinchor, POUDIOUGOU au Mali et ELLEUCH à HALD avaient trouvé des résultats superposables avec des moyennes d’âge respectivement de 27,08 ans, 27,6 ans et 25 ans [1, 18 ,41]. Ils sont cependant inférieurs à ceux de KEITA au Mali et CHINBO au Maroc qui retrouvaient respectivement une moyenne d’âge de 30,5 ans et 30,37 ans [9,21]. L’âge des patients était compris entre 8 ans et 77 ans. Cependant, cette affirmation selon laquelle il s’agirait d’une pathologie du sujet jeune tend à être de moins en moins la norme du fait du vieillissement global et de l’augmentation de l’espérance de vie des populations comme suggéré par l’étude de MARTHE WEINANDT et al [53] portant sur l’appendicite du sujet âgé au cours des deux dernières décennies (1994 à 2013) ; il a été noté une augmentation de la prévalence des appendicites aigües chez les séniors avec des taux passant de 4,6% entre 1994-1999 à 9 ,2% de 2009 à 2013. Ces chiffres sont en parfaite corrélation avec ceux retrouvés chez (SPANGLER et al 2014) [51] et plus près de nous au Burkina Faso par OUEDRAOGO S et al [38]. Un genre-ratio de 1,55 avec une prédominance masculine a été noté dans notre population d’étude. En effet, les hommes représentaient 60,9% et les femmes 39,1%. Cette prédominance masculine a été retrouvée dans la majorité des études publiées. Nous citerons comme exemple: SOMDA à Ziguinchor, KOUAME, DILAI au Maroc et LY à Saint Louis qui rapportent respectivement un genre-ratio de 1,7 ; 1,03 ; 1,73 et 1,35 (15, 23, 28 ,48). Plusieurs auteurs ont également rapporté des valeurs similaires dans la littérature [7,23], contrairement à celle de CHINBO (9), de MBALAKESA à Kinshasa [32] qui rapportent une prédominance féminine importante.

Seize patients soit 18,8 % présentaient des antécédents médicaux similaires à ceux de POUDIOUGOU avec 12,5 %. Trois patients présentaient des antécédents chirurgicaux [41]. Deux patientes étaient porteuses d’une grossesse du premier trimestre. D’après la littérature, l’appendicite est l’urgence chirurgicale la plus fréquente pendant la grossesse [2]. Les signes d’appel sont polymorphes et trompeurs, source d’erreur diagnostique et de retard thérapeutique [2,26].Le diagnostic échographique d’appendicite aiguë pendant la grossesse présente des difficultés variables en fonction de l’âge gestationnel. Au 1er trimestre, la séméiologie de l’appendicite n’est pas différente de celle observée chez la femme non enceinte [2].

DONNEES CLINICO BIOLOGIQUES ET ECHOGRAPHIQUES 

Données clinico biologiques

La douleur abdominale était présente chez tous nos patients prédominant à la FID dans 59,8% des cas. Il s’y associait une défense de la FID dans 69,6 % des cas. Cette fréquence élevée de la douleur dans la FID dans notre série pourrait s’expliquer par la localisation anatomique normale de l’appendice. Cela semble étayer les chiffres similaires aux nôtres retrouvés chez : DILAI [15] ; CHINBO [9] ; ABDELOUAFI [1]; KEITA [21]. Bergeron rapporte ainsi l’existence de douleurs abdominales de la fosse iliaque droite chez 75% de ses patients sans que ce soit pour autant le signe le plus fréquent dans son étude [5].

Les nausées et vomissements étaient présents chez 75% de nos patients, ce qui fait de ce symptôme le deuxième le plus fréquent après la douleur abdominale dans notre série. Nos résultats concordent avec ceux d’ABDELOUAFI [1], qui a retrouvé 80,77% de cas de nausées vomissements. Ils sont cependant supérieurs à ceux de MOUNKAILA [34] qui a trouvé seulement 22% soit le 2ème signe fonctionnel dans sa série. La littérature rapporte que la moitié des patients présente des vomissements, cependant ce signe seul est insuffisant pour poser le diagnostic d’appendicite [24,37]. La fièvre, l’unique signe général de notre série, était présente chez 56,5% des patients, en accord avec les résultats de CHINBO [9] qui trouvait 58,4% de ses cas présentaient de la fièvre et de plusieurs autres auteurs [13, 24,36]. Elle est un signe inconstant. Nos patients ont tous bénéficié d’un bilan biologique notamment d’une NFS, et CRP car il s’agit d’examens dont la positivé permet de confirmer le diagnostic d’AA en corrélation avec la clinique et l’imagerie. S’agissant de la NFS un taux de leucocyte supérieur à 10.000 est fortement évocateur de la pathologie lorsqu’il est corrélé aux données de la clinique et de l’imagerie comme précisé tantôt. L’hyperleucocytose était présente chez 78,3 % de nos patients. Nous insistons sur ce point car le diagnostic d’appendicite est basé sur un faisceau d’arguments clinico paracliniques Il est habituel de demander une NFS devant toute suspicion d’appendicite aigüe. SASSO [47] trouve que dans 80% à 85% des appendicites aigües il y a une hyperleucocytose supérieure à 10 000 GB par mm3 et que dans 78% des cas on note une augmentation du taux de neutrophiles. Pour Beltran [4], la NFS couplée à l’examen clinique a une bonne sensibilité de 60 à 90 %, mais sa spécificité est plutôt basse de 41 à 84 %, cela quelles que soit la durée entre le début de la symptomatologie et le diagnostic. En plus, elle permet de donner une idée sur le caractère compliqué ou non de l’appendicite mais uniquement chez l’enfant. Pour DORAISWAMY [16], la sensibilité de la NFS est très élevée chez l’enfant. La C-réactive protéine (CRP) est maintenant souvent utilisée pour guider l’évolution diagnostic clinique ; mais des études antérieures ont démontré une  sensibilité des mesures de la CRP allant de 40 % à 94 % et des spécificités de 38 à 87% [35]. Dans notre étude, la CRP a été positive chez 67 % des patients. Comparable à celle de LY [28] avec 51,5%. Plusieurs scores ont été élaborés pour identifier les patients à haut risque, à risque intermédiaire et à faible risque ; le plus utilisé actuellement est le score d’Alvarado basé sur 8 critères prédictifs [36]. Dans la série française de VONS C [52] et indienne de MALICK A [30], le score D’ALVARODO était à la base du diagnostic. Dans l’article de HOUCINE MAGHREBI et AL [29] paru dans Pan African Médical journal january 2018, un score inférieur à 4 est peu évocateur du diagnostic d’AA et les patients pourraient être renvoyés chez eux sans exploration supplémentaire. Pour les scores compris entre 4 et 6, bien qu’ils aient été associés à un risque faible de diagnostic positif d’AA, il est recommandé particulièrement chez les femmes de compléter par un examen morphologique. Un score supérieur à 6 devait indiquer une hospitalisation en vue d’une surveillance rapprochée ou d’un geste chirurgical immédiat. Ainsi, le score D’ALVARODO constitue un élément qui permet fortement d’aider au diagnostic d’AA et aussi dans la prise en charge décisionnelle. Nous pouvons ainsi dire que l’apport des différents scores d’aide au diagnostic est certain, les praticiens devraient en profiter pour rationaliser la PEC et orienter le diagnostic.

Données échographiques 

L’échographie demeure l’examen de première intention dans le diagnostic de l’AA. Cet examen paraclinique présente de nombreux avantages : Simplicité de réalisation: accessibilité, non invasif surtout, chez l’enfant, chez la femme enceinte et en âge de procréer.

Ces qualités font de l’échographie un examen de choix dans la démarche diagnostic d’une appendicite aigüe. Il s’agit d’un examen très performant lorsque réalisé par un opérateur expérimenté [11]. Les principaux inconvénients de l’échographie selon ANDERSON [3] sont :
➤ Les résultats dépendant de la qualité du matériel
➤La faible sensibilité pour la détection des perforations appendiculaires
➤ La non faisabilité si présence de gaz au niveau de la FID
➤L’examen est opérateur dépendant
Dans notre série, l’appendice avait été visualisé chez 53,3% des patients. Nos résultats concordent avec ceux d’ELLEUCH où l’appendice a été visualisé chez 74% des patients [18]. Selon PUYLAERT [42], un appendice non visualisé est considéré comme normal. Cependant, la visibilité de l’appendice peut être liée à sa topographie mais aussi à l’existence de complications notamment un abcès ou une lyse appendiculaire. LEE, dans son étude, suggère une compression postérieure au cours de la réalisation de l’échographie appendiculaire afin d’améliorer sa visibilité surtout pour les appendices profondément situés [42]. Toutefois, devant une forte suspicion d’appendicite avec un appendice non visualisé à l’échographie, certains auteurs comme ROTHROCK pensent qu’une appendicectomie s’impose pour éviter les complications [46].

Dans notre étude, le diamètre transversal moyen était de 9,91 mm avec un diamètre transversal supérieur à 6 mm. Nos résultats sont superposables avec ceux d’AOUAMI à Ourossogui qui trouvait un diamètre transversal supérieur à 7 mm chez 100% de ses patients avec une moyenne de 10,9 mm [31]. Dans la série de KANE, avec une moyenne de 11 mm [20] et PRENDERGAST une moyenne de 9,4 mm [43]. Dans notre revue de la littérature, un diamètre transversal supérieur à 6 mm est généralement admis comme signe positif d’appendicite aigüe [3,11]. Cependant, PRENDERGAST suggère dans son étude réalisée en pédiatrie portant sur 688 examens qu’un seuil de 7 mm soit recherché chez les enfants afin de réduire le nombre de chirurgie blanche [43]. ROTHROCK a trouvé qu’une augmentation du diamètre transversal est le 2iéme signe le plus fiable pour le diagnostic de l’appendicite aigüe avec une sensibilité de 97% après l’infiltration de la graisse péri lésionnelle [19]. Néanmoins, ce signe clinique admis comme pertinent pour le diagnostic d’appendicite n’est pas significatif en dehors d’un contexte clinique.

L’épaisseur moyenne de la paroi était de 3,2 mm chez nos patients avec des extrêmes de 2 à 6, 7 mm. Dans la série de LY, 73,9% des patients avaient une moyenne de 4,2 mm [28]. RIOUX considère l’épaisseur pariétale comme l’un des 3 signes qui peuvent déterminer l’état de l’appendice [44]. Ce signe fait partie des signes directs d’appendicite aigüe et traduit l’engorgement de la sous muqueuse. L’augmentation de l’épaisseur pariétale est en grande partie liée aux phénomènes inflammatoires et cela peut être réduit en cas d’ischémie. La non-compressibilité de l’appendice est un signe décrit par la plupart des auteurs [11,42]. Dans notre série, l’appendice n’était pas compressible chez 97,9 %. PUYLAERT notait que 89% des patients avaient un appendice non compressible. Il fut le premier à avoir utilisé l’échographie comme moyen de diagnostic d’appendicite aigüe et le premier critère qu’il a mis en place était la compressibilité de l’appendice sous l’effet de la sonde sur la fosse iliaque droite [42]. En effet, lors de l’examen échographique, il est important de préciser la non compressibilité de l’appendice ce qui renforce la suspicion diagnostique. Nos résultats sont comparables à ceux de KANE qui a trouvé 93% d’appendice non compressible [20]. L’hyperhémie pariétale a été trouvée chez 95,9 % dans notre série. Nos résultats sont comparables à ceux de MOUNKAILA qui avait trouvé une hyperhémie pariétale chez 87 % des patients [34]. Nos résultats sont supérieurs à ceux d’AOUAMI et CHINBO qui trouvaient respectivement une hyperhémie au doppler couleur chez 48,38 % et 80,5 % [9, 31]. Il est ressorti dans la littérature que la dédifférenciation associée à l’hyperhémie pariétale est un signe pathognomonique d’appendicite aigüe et suffit pour poser le diagnostic [46]. L’hyperhémie pariétale est un critère important dans les appendicites aigües mais il peut être absent au stade de gangrène.

La graisse péri appendiculaire était hyperéchogène chez 98,1 % des patients de notre série, nos résultats comparables à ceux retrouvés dans la littérature [23]. MOUNKAILA l’a retrouvé chez 94% et AOUAMI chez 97,3 % [31,34]. L’étude de KOUAME [23] en Côte d’Ivoire révèle une valeur prédictive positive des signes indirects d’appendicite à l’échographie de 95,8% et une sensibilité de 83,9% pour l’association des trois signes indirects qui sont :
● L’hypertrophie de la graisse péri appendiculaire
● La douleur provoquée à l’exploration appuyée de la FID
● L’hypocinésie localisée des anses digestives.
Des auteurs comme KESLLER ont trouvé une spécificité de 91% de l’infiltration de la graisse en cas d’appendicite aigüe. Cependant il n’est pas pathognomonique du fait qu’il peut être présent dans d’autres pathologies comme l’appendagite et la maladie de Crohn [22].

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODE
I. CADRE DE L’ÉTUDE
1. Description
2. Personnel
II. TYPE, PERIODE ET DUREE D’ÉTUDE
III. PATIENTS ET MÉTHODOLOGIE
1. Patients
1.1. Critères d’inclusion
1.2. Critères de non inclusion
1.3. Population d’étude
1.3.1. Données épidémiologiques
1.3.3. Données biologiques
2. Méthodologie
2.1. Echographie abdominale
2.2. Procédure de réalisation de l’examen
2.3. Paramètres étudiés
2.4. Recueil et saisie des données
2.5. Traitement et Analyse des données
RESULTATS
I. ASPECTS ECHOGRAPHIQUES
1. Etude descriptive
2. Etude synthétique
II. COMPARAISON DES DONNEES ECHOGRAPHIQUES ET CHIRURGICALES
III. LA SENSIBILITE DE L’ECHOGRAPHIE
1. Comparaison échographie – chirurgicale pour le diagnostic d’appendicite aigüe simple
2. Comparaison échographie – chirurgicale pour le diagnostic d’appendicite aigüe compliquée
3 comparaison échographie – chirurgicale pour le diagnostic d’abcès appendiculaire
DISCUSSION
I. DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES
II. DONNEES CLINICO BIOLOGIQUES ET ECHOGRAPHIQUES
1. Données clinico biologiques
2. Données échographiques
III. COMPARAISON ECHOGRAPHIE ET CHIRURGIE
1. Comparaison entre l’échographie et la chirurgie dans le diagnostic de l’appendicite aigüe simple
2. Comparaison entre l’échographie et la chirurgie dans le diagnostic de l’appendicite aigüe compliquée
CONCLUSION
REFERENCES

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