Apport de la théorie des jeux et de l’économie industrielle à la stratégie d’entreprise

Apport de la théorie des jeux et de l’ économie industrielle à la stratégie d’entreprise 

Au cours de ces trente dernières années, l’économie industrielle a été profondément influencée par la mobilisation de la théorie des jeux, c’est à dire par l’étude des choix rationnels des acteurs lorsque les gains de chacun dépendent des actions des autres et lorsque ceux- ci en ont pleinement conscience. En 1994, cinquante ans après la publication du livre fondateur de John von Neumann et Oskar Morgenstern, « The Theory of Game and Economic Behavior », le prix Nobel d’économie fut attribué à trois théoriciens des jeux : John Nash, John Harsanyi et Reinhard Selten, marquant la reconnaissance du rôle essentiel de la théorie de jeux au sein de l’Economie. Mobilisée depuis dans de nombreux domaines, c’est probablement en économie industrielle qu’elle a trouvé le champ d’application le plus fructueux, lui procurant un essor très important. A titre illustratif, depuis 1980, 60% des articles d’économie industrielle publiés dans les cinq revues d’économie généralistes les plus citées, mobilisent la théorie des jeux .

Ce sont, historiquement, les problématiques de politique de la concurrence aussi bien aux Etats-Unis qu’en Europe qui en ont été le premier champ d’application, en s’intéressant au surplus des consommateurs, au travers, par exemple, des lois antitrust, de la lutte contre les cartels, de la régulation des fusions, etc. Cependant, ces trente dernières années marquent un changement considérable de perspective quant aux mobilisations de l’économie industrielle. En effet, les firmes se sont intéressées à l’outil avec lequel leurs potentielles déviances anticoncurrentielles étaient analysées, pour le mobiliser à des fins stratégiques. On peut vraisemblablement attribuer ce renouveau de l’usage de l’Economie Industrielle à l’ampleur des idées initiées par le Boston Consulting Group et propagées par la plupart des cabinets de conseil en stratégie dans les années 70, focalisant les enjeux sur le positionnement concurrentiel .

Pourtant, la véritable révolution qu’a opérée la théorie des jeux sur le plan académique, débouchant sur ce qu’il est maintenant convenu d’appeler la « nouvelle économie industrielle », et qui joue un rôle primordial dans la façon d’aborder en théorie les problèmes de stratégie d’entreprise, n’a pas eu le même retentissement dans son application en stratégie industrielle. En effet, les publications traitant des apports de la nouvelle économie industrielle sont très limitées dans les revues de management et de stratégie d’entreprise . Ainsi, bien que les liens entre les contributions de la théorie des jeux et les problématiques rencontrées dans les questionnements stratégiques des firmes semblent souvent évidents (en particulier concernant les interactions concurrentielles), nombre de stratèges industriels restent sceptiques et débattent toujours de son apport effectif à leur champ d’investigation.

Ce constat est d’autant plus surprenant que l’ « ancienne » économie industrielle avait, quant à elle, énormément influencé la stratégie d’entreprise, en particulier au travers du livre de Porter (1980), « Competitive Strategy », devenu la référence incontournable des cabinets de conseil en stratégie. Porter lui-même a, par ailleurs, souligné que l’apport de la théorie des jeux permet de focaliser l’analyse sur les profits individuels plutôt que sur le surplus collectif et de passer d’indicateurs de performance inter-industries à l’identification de différences structurelles et stratégiques des firmes à l’intérieur d’une même industrie. Ceci permet d’appréhender la structure de l’industrie, non plus comme exogène, mais comme résultant des stratégies des firmes .

En outre, la plupart des cursus de Master of Business Administration proposent aujourd’hui un enseignement de la théorie des jeux, en particulier au travers d’études de cas initiés par Havard Business School. En France, la plupart des grandes écoles proposent désormais un cours d’économie industrielle, même si l’enseignement de la théorie des jeux elle même restait jusqu’à ces dernières années cantonné au 3ème cycle universitaire de filières mathématiques. De plus, des ouvrages de vulgarisation riches en illustrations de cas concrets ont vu le jour et ont été accueillis avec un certain succès. On peut citer en particulier celui de Nalebuff et Brandenburger «Coopetition » (1996).

L’ensemble de ces éléments aurait dû contribuer au succès de la théorie des jeux auprès des stratèges de l’industrie dont les préoccupations se portent de plus en plus sur leurs concurrents plutôt que sur leurs produits : amélioration de la structure des coûts, différenciation des produits, construction de barrières à l’entrée et développement d’avantages concurrentiels durables.

Pourtant, lorsque l’on recherche les éventuels impacts de l’utilisation de la théorie des jeux au sein des firmes industrielles, voire même de cabinets de conseil en stratégie, le constat semble sans appel : les rares références à la théorie des jeux se limitent en général à quelques allusions au « dilemme du prisonnier ».

Certaines causes de l’échec de l’application de la théorie des jeux à la réalité industrielle sont identifiables. En effet, si toute tentative d’application d’une théorie à la réalité se révèle en général périlleuse, dans ce cas, plusieurs éléments viennent rendre l’exercice particulièrement délicat. Rumelt, Schendel et Teece (1991) avancent les raisons suivantes : Tout d’abord, les théoriciens des jeux sont en général peu enclins à considérer les problèmes des entreprises, très éloignés de leurs préoccupations académiques. Ensuite, l’objet de la théorie des jeux est d’analyser les interactions entre les variables plutôt que de présumer de leur importance pratique. Par ailleurs, la complexité des interactions impose rapidement de se limiter à quelques variables et à négliger les autres, limitant fortement toute tentative d’évaluation et d’application. Enfin, les équilibres proposés nécessitent un haut degré de rationalité et d’accès à l’information de la part des acteurs, ce qui n’est pas toujours le cas de la réalité industrielle.

L’« Industry Cost Curve » comme outil d’analyse stratégique 

Dans les années 1980, le cabinet de conseil McKinsey développe, avec un certain succès, des analyses mobilisant l’ « Industry Cost Curve » (ICC) comme outil de réflexion lors de la prise de décisions stratégiques dans les industries de commodité à forte intensité capitalistique. Les justifications théoriques font référence à la programmation linéaire et à la concurrence parfaite.

En particulier, ces analyses sont utilisées pour des décisions irréversibles d’investissement dans de nouvelles capacités de production, de rationalisation des ventes et de pricing stratégique. L’analyse proposée est la suivante : dans ces types d’industrie, la demande est quasi constante et le marché n’a pas d’autre critère que le prix pour le choix de ses fournisseurs. En outre, la production est caractérisée par des contraintes de capacité très rigides et des coûts variables de production déterminés par la technologie et le dimensionnement de l’outil industriel aboutissant à des coûts rendus au marché différenciés (souvent accentués par des coûts de transport relativement importants).

Dans ce cadre, les parts de marchés, les prix et donc les profits sont directement déterminés par trois facteurs : les capacités, les coûts et la taille du marché.

L’analyse proposée est la suivante : le leader en coût produira jusqu’à saturation de sa capacité et laissera à son concurrent suivant l’opportunité de faire de même. Et ce, ainsi de suite jusqu’à la satisfaction de l’ensemble de la demande, suggérant alors une fixation du prix proche du coût du premier non entrant. Ainsi, dans cet exemple, trois joueurs sont présents sur le marché (Alpha 1, Bravo 1 et Alpha 2), le prix étant déterminé par l’exclusion de Romeo. La vue des coûts est ici déterminante. Par exemple, le coût à considérer pour Bravo 2, premier non entrant (usine à l’état de projet), doit inclure le coût de production prévisionnel, le transport (en supposant qu’il soit effectué par le producteur), mais aussi le coût d’opportunité de la construction de l’usine, par comparaison avec une autre décision d’investissement de risque identique garantissant à la compagnie Bravo un retour sur capitaux investis acceptable.

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Table des matières

Introduction générale
1 Apport de la théorie des jeux et de l’économie industrielle à la stratégie d’entreprise
2 L’« Industry Cost Curve » comme outil d’analyse stratégique
3 Programmation linéaire et concurrence parfaite
4 Théorie de l’oligopole et industries de commodité
5 Conclusion
Problématique de la thèse
Introduction aux chapitres
1 Préemption et incertitude (Chapitre 1)
2 Cournot et contraintes de capacité (Chapitre 2)
3 Judo economics et négociation (Chapitre 3 et 4)
Références bibliographie
Chapitre 1 :
How Uncertainty Disciplines Pre-commitment on Risky Markets ?
Chapitre 2 :
Capacity Constrained Cournot-Nash Equilibrium : A Simple Formula
Chapitre 3 :
Equilibre de négociation sous menace de guerre de prix
Chapitre 4 :
The limits of accomodation : an experiment in Judo economics
Conclusion

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