Application des zéolites pour l’enlèvement de l’azote ammoniacal des eaux usées
MATÉRIEL ET MÉTHODE
Pilotes expérimentaux
Quatre unités pilotes identiques de 0,83 mètre de longueur et 0,59 mètre de largeur ont été conçues sur la base des caractéristiques d’un filtre granulaire classique d’applications résidentielles standards (situé en sortie de fosse septique). Ces unités pilotes se différencient par leur proportion zéolite/granite des médias granulaires. Une première unité pilote, qui sert d’unité témoin à l’expérimentation, est composée exclusivement de média granitique. Les trois autres unités sont composées de média granitique et zéolitique. L’épaisseur de zéolite varie d’un pilote à l’autre au détriment de celle granitique. Les unités 2, 3 et 4 permettent de suivre l’évolution et les variations des phénomènes de captage/fixation/désorption du média zéolitique en plus de ceux de métabolisation de l’azote ammoniacal (nitrification-dénitrification). Tel que mentionné précédemment, le système à l’étude favorise la nitrification biologique de l’azote ammoniacal présent à l’affluent. Des nitrates sont donc formés dans les couches profondes jusqu’à l’effluent, tandis que la DBO est retirée dans les couches superficielles. Le Tableau 2.1 présente la configuration des quatre unités qui présentent une hauteur totale de média granulaire constante de 0,81 ± 0,01 m. La hauteur de média granitique est prise à partir du point bas du montage, soit au niveau du radier de la conduite effluente. La zéolite est quant à elle directement déposée sur le média granitique.
Chaque unité possède une capacité nominale de 0,4 m³ et une superficie de 0,5 m². La charpente principale se compose d’acier tandis que la charpente secondaire (murs et planchers) en contact avec l’eau usée est composée de panneaux plexiglas transparents afin de pouvoir observer les hauteurs d’eau (zone de dénitrification) ainsi que le remplissage (colmatage) du média granulaire soumis aux variations de charges hydrauliques et organiques. La collecte de l’eau effluente est réalisée par une conduite située au point bas du montage. Celle-ci est composée d’une demi-conduite de PVC de 150 mm de diamètre (perforée d’orifices de 0,5 mm) installé longitudinalement au centre de chacune des unités pilotes. Un tube collecteur de 2,5 mm en polyéthylène, placé à l’intérieur de la demiconduite, permet ensuite d’évacuer l’eau par gravité. Afin de poursuivre l’abattement de l’azote par voie biologique, la configuration des unités pilotes prévoit une zone favorisant la dénitrification. En condition d’anoxie, les bactéries dénitrifiantes métabolisent alors les nitrates en nitrites, puis en azote gazeux. Pour ce faire, une zone submergée est aménagée dans la partie basse des unités pilotes. Cette zone permet de réduire l’oxygène dissous restante vers des valeurs qui tendent vers 0 mg-O2/L. La zone est créée en rehaussant la conduite de sortie de 100 mm.
Matériaux granulaires
Deux matériaux granulaires composent les quatre unités de traitement. D’une part, un granite est désigné comme matériel neutre au projet. L’importance de l’utilisation d’un média inerte est essentiel à l’étude afin de ne pas interférer dans le suivi des différents paramètres (azote ammoniacal, nitrite, nitrate, alcalinité, etc.) pour les phénomènes de captage/adsorption/désorption. D’autre part, une zéolite naturelle de type clinoptilolite est choisie pour ses propriétés intrinsèques de capacité d’échange ionique. Elle provient de Bear River dans l’état d’Idaho aux États-Unis. Deux granulométries ont été sélectionnées pour le montage des unités pilotes. La première granulométrie présente des dimensions allant de 6,35 à 12,70 mm tandis que la seconde granulométrie varie entre 2,38 et 4,78 mm. Le granulat le plus grossier a été disposé au-dessus de celui le plus fin afin de favoriser l’écoulement gravitaire et de diminuer les risques de colmatage des filtres. L’ensemble de la zéolite utilisée a été lavé et tamisé sur une maille 1,5 mm afin de retirer les fines particules. La courbe granulométrique de la zéolite la plus fine est présentée à l’Annexe II. Cette zéolite présente un diamètre effectif D10 de 3,02 mm et un coefficient d’uniformité Cu de 1,62 favorisant une bonne percolation et une réduction des pertes de rendement par colmatage.
Système d’alimentation
Le système d’alimentation achemine l’eau usée synthétique vers les quatre unités pilotes. L’eau minérale a été entreposée à l’intérieur de deux réservoirs en polypropylène de capacité de 1 m³ chacun tandis que l’eau organique a été confinée dans un réservoir en polypropylène de capacité 200 litres. La composition des eaux usées synthétiques est définie à la section 2.2. L’exutoire des réservoirs d’eau minérale est relié par de la tuyauterie de type ABS et l’eau est acheminée par une pompe centrifugeuse MARCH de capacité 1/40 HP. Le réservoir d’eau organique est pris en charge par une pompe doseuse à diaphragme IWAKI de capacité 16,3L/h. L’effluent de chacune des pompes se retrouvent sur une ligne principale et le mélange s’effectue dans un raccord de type « T ». L’eau usée synthétique de la ligne principale poursuit son chemin vers deux débitmètres (Cole Palmer – 0-220 mL/min) contrôlant l’alimentation des quatre unités. Des conduites flexibles de polyéthylène haute densité (PEHD) transparentes acheminent l’eau synthétique de la sortie des pompes jusqu’aux buses d’écoulement. Afin d’apporter davantage de précision à la répartition des débits, une chambre de répartition est requise à la suite des débitmètres de contrôle. Chacune des chambres est composée de cinq valves séparant le débit entrant dans chaque unité pilote en cinq voies d’alimentation. Finalement, les cinq conduites d’alimentation en PEHD sont suspendues au-dessus des unités pilotes et l’écoulement est ajusté à l’aide de buses à billes.
La gouttelette d’eau quittant la buse chute de 30 centimètres pour entrer en contact avec le média granulaire. Au contact du média, les gouttelettes se dispersent alors uniformément sur l’ensemble de la surface pour assurer un mouillage complet du milieu granulaire. Les pompes d’alimentation sont reliées à une minuterie afin d’alimenter le système 16 heures par jour et ainsi simuler une période de repos d’une résidence isolée durant la nuit (8 heures). Le taux de charge hydraulique visé à l’affluent est de 40 L/(m²·d) représentatif d’un faible taux appliqué sur un filtre granulaire (Bernier, 2001). L’étalonnage des débitmètres a été réalisé de manière périodique par la méthode volumétrique.
Prise d’échantillonnage
Le cheminement des eaux usées dans les unités pilotes s’opèrent de façon verticale. Trois points d’échantillonnage par unité pilote sont prévus pour suivre l’évolution des paramètres à l’étude soit à l’affluent (sortie des buses à bille), à un point intermédiaire dans l’unité et à l’effluent. Le prélèvement intermédiaire s’effectue à l’aide d’une conduite d’écoulement transversale. Cette conduite est composée d’une demi-conduite de polychlorure de vinyle (PVC) de 100 mm de diamètre et est assise sur la couche granitique à la jonction de la couche de zéolite. Elle recueille les eaux usées de percolation en les acheminant à une valve d’échantillonnage. Afin de codifier l’ensemble de des prises d’échantillonnage, une même terminologie est suivie sur l’ensemble de ce travail de recherche. La lettre « A » désigne le volume d’eau prélevé de l’affluent. Les prises intermédiaires (transversales) Z15, Z25, Z42 sont représentées par la lettre « Z » (Zéolite) suivi de la hauteur de zéolite (15, 25 et 42 cm). La prise transversale de l’unité témoin est désignée par « T15 » (« T » pour témoin) suivi de la hauteur de la prise située à 15 cm. Finalement, les prises à l’effluent (« E » pour Effluent) de chaque unité sont représentées par E15, E25 et E42 en fonction de la hauteur de zéolite dans l’unité (15, 25, 42 cm). L’effluent de l’unité témoin est désigné par ET. Rappelons que l’ensemble des prises d’effluents sont situées dans le fond des unités. La Figure 2.3 montre les différentes prises d’échantillonnage ainsi que leur position.
Eau synthétique
Le système à l’étude se classe parmi les systèmes de traitement de type secondaire, secondaire avancé ou tertiaire, c’est-à-dire à la suite d’un système de traitement primaire (fosse septique). Les propriétés de l’effluent d’un système de traitement primaire se caractérisent par un taux de MES inférieur ou égal à 100 mg/L conforme à la norme NQ3680-910 et une valeur en DBO5 inférieure ou égale à 200 mg-O2/L (Bernier, 2001). L’élément primaire (fosse septique) sert de clarificateur en sédimentant les MES facilement décantables et en recueillant les huiles et graisses en surface. Étant donné la complexité liée à l’alimentation de quatre unités pilotes par un effluent réel de fosse septique, la fabrication de cuvées d’eau usée synthétique a été considérée. Celle-ci a donc été élaborée de manière à représenter le plus fidèlement possible la caractéristique d’une eau issue de fosses septiques résidentielles.
Composition de l’eau synthétique minérale
L’eau usée synthétique doit inclure les principaux sels dissous et oligo-éléments retrouvés en situation réelle et nécessaires à la synthèse des bactéries hétérotrophes et autotrophes (nitrifiantes). L’apport d’éléments tels le sodium (Na), l’azote (N), le potassium (K), le phosphore (P), le calcium (Ca), le magnésium (Mg), le soufre (S), le fer (Fe), le manganèse (Mn) et le molybdène (Mo) peuvent être létaux ou ralentir grandement la synthèse cellulaire pour les organismes vivants s’ils sont absents ou s’ils se retrouvent en trop fortes concentrations. Les différents produits chimiques ont été dilués dans de l’eau du robinet (eau potable de Joliette) en accord avec les concentrations présentées au Tableau 2.2. La composition d’eau synthétique est inspirée des travaux réalisés par Chu (2006), Martin (2010) et Healy (2011). Des cuvées d’eau de 720 litres ont été préparées hebdomadairement durant toute la période d’essais d’une durée de près de six mois.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA DOCUMENTATION SCIENTIFIQUE
1.1 Azote ammoniacal
1.1.1 Problématique des rejets d’azote ammoniacal
1.1.1.1 Toxicité chronique et aigüe
1.1.1.2 Eutrophisation des milieux aquatiques
1.1.2 Exigences de rejets réglementaires
1.1.2.1 Azote ammoniacal
1.1.2.2 Autres paramètres
1.2 Nitrification biologique
1.2.1 Facteurs affectant la nitrification biologique
1.3 Dénitrification biologique
1.3.1 Facteurs affectant la dénitrification biologique
1.4 Technologie de traitement d’enlèvement de l’azote ammoniacal
1.4.1 Traitement biologique pour l’azote ammoniacal
1.4.2 Traitement physico-chimique pour l’azote ammoniacal
1.4.3 Traitements centralisés
1.4.3.1 Exemple de technologies existantes
1.4.4 Traitements décentralisés
1.4.4.1 Exemple de technologies existantes
1.5 Zéolites
1.5.1 Structure
1.5.2 Capacité d’échange cationique (CEC)
1.5.3 Sélectivité de la zéolite
1.6 Application des zéolites pour l’enlèvement de l’azote ammoniacal des eaux usées
CHAPITRE 2 MATÉRIEL ET MÉTHODE
2.1 Pilotes expérimentaux
2.1.1 Matériaux granulaires
2.1.2 Système d’alimentation
2.1.3 Prise d’échantillonnage
2.2 Eau synthétique
2.2.1 Composition de l’eau synthétique minérale
2.2.2 Composition de l’eau synthétique organique
2.2.3 Caractéristiques de l’eau usée reconstituée
2.3 Méthodes analytiques
2.4 Planification des analyses
CHAPITRE 3 RÉSULTATS
3.1 Traitement de l’azote ammoniacal
3.1.1 Masse de zéolite et capacité d’échange cationique (CEC)
3.1.2 Suivi de l’azote ammoniacal aux prises d’échantillonnage T15 et Z15
3.1.3 Suivi de la nitrification
3.1.4 Suivi de la nitrification par la consommation de l’alcalinité
3.2 Suivi du pH et de l’oxygène dissous
3.3 Traitement de la matière organique
3.3.1 Suivi de la demande biochimique en oxygène à 5 jours (DBO5)
3.3.2 Abattement de la DBO5
3.3.3 Suivi de la demande chimique en oxygène (DCO)
3.3.4 Abattement de la DCO
3.3.5 Rapport DCO / DBO5
3.4 Suivi de la température
3.5 Dénitrification
3.6 Synthèse
CONCLUSION
ANNEXE I VALEUR AIGÜE FINALE À L’EFFLUENT DE L’AZOTE AMMONIACAL TOTAL
ANNEXE II COURBE GRANULOMÉTRIQUE DE LA FINE ZÉOLITE
ANNEXE III COMPOSITION CHIMIQUE DE LA CLINOPTILOLITE
ANNEXE IV SUIVI MASSIQUE DE L’AMMONIUM
LISTE DE RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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