Aperçu sur l’analphabétisme
Le monde compte en 2003 près de 860 millions d’analphabètes, selon la communication du Secrétariat Général des Nations Unies, à l’occasion de la Journée Mondiale de l’alphabétisation, célébrée depuis 1967 tous les 8 septembre. Les deux tiers d’entre eux, soit près de 573 millions, sont des femmes. Plusieurs pays développés comptent encore un nombre certes, peu élevé, mais néanmoins préoccupant d’analphabètes. C’est dans les pays en développement que l’analphabétisme reste un problème alarmant. En effet, parallèlement à l’explosion démographique, aux calamités naturelles et aux guerres civiles, on observe une recrudescence de l’analphabétisme, et ceci malgré les efforts réalisés tant sur l’Education Formelle que sur l’Education extra scolaire.
L’analphabétisme persiste et prend même actuellement plus d’ampleur et Madagascar n’est malheureusement pas épargné par ce fléau.
Causes de l’analphabétisme à Madagascar
Le document de la Politique Nationale sur l’Education Non Formelle, adopté en Conseil du Gouvernement, suivant le décret N° 2003-834 en date du 05 Août 2003, relate les faits suivants comme sources principales de l’analphabétisme à Madagascar : La non scolarisation des enfants de certaines couches défavorisées de la population : zones rurales, zones marginales de grandes villes. Ces dernières vivent dans un environnement caractérisé par la pauvreté, la médiocrité de l’habitat et la ségrégation sociale et culturelle.
La déperdition scolaire de beaucoup d’enfants qui n’ont pu achever le cycle complet de l’enseignement primaire et viennent fatalement grossir le rang des analphabètes. L’absence d’un environnement socioculturel favorisant l’utilisation de « l’Ecrit », de sorte que les acquis en savoir de base chez les adultes, se perdent facilement. Les jeunes et adultes qui subissent cette situation présentent de forts pourcentages et constituent les néo-analphabètes. Ils sont victimes de l’analphabétisme de retour. La carence de l’information et de la mobilisation face au danger de l’analphabétisme, qui entraîne l’exclusion d’une partie importante de la population active. L’enclavement géographique, aggravé par les problèmes de sécurité et les cataclysmes naturels tels que les cyclones, les inondations chroniques. Ces phénomènes sont à l’origine de la fermeture de beaucoup d’écoles ou même la désertion des instituteurs.
L’alphabétisation des adultes dans le système éducatif malgache
La définition du cadre éducatif est formalisée dans la loi 94-033 du 15 Mars 1995, portant orientation générale du système d’éducation et de formation à Madagascar. L’article 22 stipule que « les besoins d’apprentissage fondamentaux des enfants, des adolescents et des adultes sont variés et il convient pour les satisfaire de recourir à des systèmes de formation diversifiés » Ainsi, l’éducation et/ou la formation fondamentale comprend :
– dans le cadre formel : l’école maternelle ou préélémentaire, et l’école primaire ou élémentaire
– dans le cadre non formel : l’alphabétisation fonctionnelle et la formation à la vie familiale et sociale.
L’éducation non formelle de base des jeunes et des adultes inclut en général la tranche d’âge au dessus de 15 ans. En dessous de cette tranche, c’est l’éducation scolaire fondamentale qui devra prendre le groupe d’apprenants en charge.
Les contraintes dues à l’analphabétisme
Les différentes initiatives de développement à Madagascar ont identifié l’analphabétisme comme facteur bloquant l’obtention de résultats concrets et rapides. Les contraintes se manifestent sous les facettes suivantes :
a) la difficulté de transmission des messages et des formations
Les études ont démontré que les adultes retiennent au maximum 25% de ce qu’on leur transmet de manière verbale. Les soucis liés aux problèmes de survie viennent de plus annihiler le peu que les groupes en situation difficile acquièrent lors des séances de formation technique sectorielle.
b) La non implication des adultes aux différents programmes de développement
Le fait d’être analphabète renforce généralement les résistances aux changements et à l’apprentissage, et donc au progrès en général. Les réticences vis à vis de propositions d’initiatives pour le développement ne sont en fait que la manifestation de ces résistances internes.
c) L’analphabétisme entrave la mobilisation sociale et communautaire
Les analphabètes adoptent généralement une attitude de réticence face à des initiatives communautaires qui s’accompagnent de procédures. En effet, qui dit procédure, dit « instruction écrite », pour faire respecter certaines régulations formelles, d’ordre administratif, d’ordre civique ou d’ordre cultuel.
d) L’analphabétisme freine l’introduction d’innovations techniques et technologiques
Les innovations techniques et technologiques sont toujours introduites au moyen de l’écriture (fiches d’utilisation…). La non maîtrise de l’écrit entraîne l’utilisation exclusive de l’oral ce qui engendre inévitablement une méfiance instinctive chez l’apprenant analphabète pour les données qu’il voit mais qu’il ne peut déchiffrer et/ou vérifier. Les résistances au changement sont plus accentuées chez les personnes analphabètes, puisque l’incapacité de lire et d’écrire handicape les possibilités de se documenter et de s’informer, pour libérer les initiatives et le sens de la créativité.
e) la réticence des parents pour scolariser
L’analphabétisme se répercute sur l’accès des enfants à l’école et à l’éducation, et les rapports officiels ont nettement montré que les abandons scolaires ou la non scolarisation des enfants sont moindres dans les ménages où les parents sont instruits.
LES ENJEUX DE LA CAPITALISATION ET DE LA VALORISATION DES EXPERIENCES EN MATIERE D’ALPHABETISATION
Les expériences et la Décennie 1990-2000 en matière d’alphabétisation à Madagascar
La Conférence de Jomtiem –Thaïlande en 1990, a précisé dans la Déclaration mondiale sur l’Education pour Tous, que les besoins éducatifs fondamentaux concernent aussi bien les enfants, les jeunes que les adultes. Le qualificatif «Fondamentaux » traduit ici une priorité, au même titre pour l’être humain que la nourriture et le logement. Les besoins éducatifs concernent les outils d’apprentissage essentiels (lecture, écriture, expression orale, calcul, résolution de problèmes), mais ils incluent aussi les contenus en terme de domaine de connaissances, tels que le savoir, l’aptitude, les valeurs et les attitudes. Leur satisfaction doit mener à l’épanouissement de l’individu, sur le plan physique, intellectuel, moral, culturel et artistique.
La Décennie de l’alphabétisation fut déclarée à l’occasion de la même Conférence, à laquelle Madagascar a adhéré pour la mise en œuvre. Le département étatique au sein du Ministère de la Population, dénommé à l’époque« Direction de l’Education Populaire et de l’Alphabétisation ou DEPA, a été chargé d’intégrer l’alphabétisation comme composante à part entière de l’éducation fondamentale pour Tous, et en particulier de l’éducation des adultes. La DEPA cherchait à développer les stratégies d’approche adéquates, pour améliorer les résultats de la lutte contre l’analphabétisme, et en partenariat avec des organismes internationaux tels que l’UNESCO, l’UNICEF, ou encore l’Association Allemande pour l’Education des Adultes ou l’IIZ-DVV. La DEPA a successivement expérimenté l’approche par partenariat, l’approche sélective, pour dépasser l’alphabétisation de masse évaluée comme inefficace.
Mais ce qui a le plus marqué la Décennie de l’alphabétisation de 1990 à 2000, c’était l’évolution de la recherche-action en matière d’alphabétisation, due au développement de l’approche de partenariat, soit entre la DEPA et les autres organismes non gouvernementaux, soit entre les organisations privées elles-mêmes. Les dernières années de la Décennie ont enregistré l’intensification de ces efforts de recherche et de capitalisation.. Les idées de développer des méthodes d’alphabétisation adaptées au contexte et à la culture malgache se sont concrétisées. L’amélioration de la fonctionnalité des acquis en alphabétisation demeurait au centre des soucis . Pour le cas de l’Alphabétisation Fonctionnelle Intégrée pour le Soutien au Développement ou AFISOD, c’était aussi la phase décisive pour son élaboration, avec l’initiative de l’Antenne de l’IIZ-DVV et ses partenaires à Madagascar.
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Table des matières
I-INTRODUCTION ET JUSTIFICATION
I.1 REFLEXION PAR RAPPORT A DES VECUS
I.2 CONSTATS SUR LE PROCESSUS DE RECHERCHE-ACTION ET DE CAPITALISATION
I.3 JUSTIFICATION DU CHOIX DU SUJET
I.4 FORMULATION DE LA PROBLEMATIQUE
I.5 METHODOLOGIE DE TRAVAIL ADOPTEE
II-HISTORIQUE ET RECONSTITUTION DE LA DEMARCHE D’ELABORATION DU DOCUMENT REFERENTIEL EN AFISOD
II.1 CHAPITRE 1 : LES FACETTES DES PROBLEMES ET LES DIFFICULTES RENCONTREES
II.1.1 – Aperçu sur l’analphabétisme et ses principales causes à Madagascar
II.1.1.1 Aperçu sur l’analphabétisme
II.1.1.2 Causes de l’analphabétisme à Madagascar
II.1.2 -L’alphabétisation des adultes dans le système éducatif malgache
II.1.3 – Les contraintes dues à l’analphabétisme
II.2 CHAPITRE II : LES ENJEUX DE LA CAPITALISATION ET DE LA VALORISATION DES EXPERIENCES EN MATIERE D’ALPHABETISATION
II.2.1 – Les expériences et la Décennie 1990-2000 en matière d’alphabétisation à Madagascar
II.2.2 – L’évolution des demandes et la situation des offres
II.2.2.1 Les demandes
II.2.2.2 – La situation de l’offre
II.2.3 – La recherche de complémentarité entre les organisations actives en alphabétisation
II.2.3.1 L’aspiration à l’approche par « Collectif » et l’éveil du sens de la complémentarité
II.2.3.2 Les enjeux de la capitalisation des expériences
II.3 CHAPITRE III : DOCUMENT REFERENTIEL EN ALPHABETISATION – « DE L’IDEE DE PROJET A LA PRISE DE DECISION »
II.3.1 – Présentation des Promoteurs
II.3.2 – Les motivations initiales
II.3.3 – Les défis à relever
II.4 CHAPITRE IV : LE PROCESSUS D’ELABORATION DU DOCUMENT REFERENTIEL EN ALPHABETISATION FONCTIONNELLE INTEGREE POUR LE SOUTIEN AU DEVELOPPEMENT (AFISOD)
II.4.1 – La logique de progression et les étapes
II.4.2 – Description des activités
II.4.2.1 Les activités sur site
II.4.2.2 Les activités en atelier
II.4.3 – Les acquis à valoriser
II.4.4 SYNTHESE
II.5 CHAPITRE V : PERTINENCE DE L’APPROCHE EN CONSORTIUM
II.5.1 – Valorisation de compétence
II.5.2 – Gestion positive de la diversité et de la différence
II.5.3 Prise en compte des dimensions géographiques et linguistiques
II.5.4 SYNTHESE
II.6 CHAPITRE VI : LA STRATEGIE DE DIFFUSION DU DOCUMENT REFERENTIEL AFISOD
II.6.1 – Les composantes du document et les supports à l’apprentissage
II.6.1.1 – Les composantes du document
II.6.1.2 Les supports à l’apprentissage
II.6.2 – L’organisation du pre-testing
II.6.3 – L’organisation de la formation des alphabétiseurs et des personnes relais
II.6.4 SYNTHESE
CONCLUSION GENERALE
III ANNEXES