Antécédent familial d’endométriose
Le facteur de risque le plus référencé dans les articles de notre revue de la littérature est l’antécédent familial d’endométriose : il est cité dans 18 études sur les 25 sélectionnées.
L’antécédent au premier degré d’endométriose est précisé dans six études. D’après la revue de littérature de Bourdel en 2006 (30), qui cite deux références, une étude de Dmowski de 1990 (31) ainsi qu’une étude de Simpson de 1980 sur 123 patientes (32), 7% des femmes atteintes d’endométriose ont une parente atteinte au premier degré. Ce chiffre est également cité dans les revues de la littérature d’Apgar de 1992 (33) et de Bell de 2001 (34) ; ils citent eux-mêmes également l’étude de Simpson, mais aussi une étude cas-contrôle sur 43 femmes de Lamb de 1986 (35). Apgar ajoute également la notion d’un risque cinq fois plus élevé de développer une endométriose en cas de parent atteint au premier degré (33), confirmé par les recommandations du CNGOF de 2018 avec un niveau de preuve 2 (2). Toujours d’après les revues d’Apgar et de Bell, 2% des femmes atteintes d’endométriose avaient une parente atteinte au deuxième degré.
Caractéristiques du cycle menstruel
De nombreuses études rapportent comme facteurs de risque certaines caractéristiques du cycle menstruel retrouvées plus particulièrement chez les patientes atteintes d’endométriose. D’après plusieurs auteurs, tout ce qui favoriserait l’obstruction du flux menstruel favoriserait la survenue d’une endométriose .
Les caractéristiques retrouvées sont :
– Une ménarche précoce, définie dans la plupart des études comme la ménarche survenant avant l’âge de 11 ans (10)(16)(37), est le deuxième facteur de risque retrouvé le plus fréquemment dans la littérature ; il est en effet cité dans 14 études sur les 25 sélectionnées. Dans les études les plus récentes et les plus nombreuses, cela a été prouvé de manière significative ; notamment dans la revue de littérature de Riazi de 2015 (37) qui s’appuie sur 6 références bibliographiques des années 2000, et également la revue de littérature de Geysenbergh de 2016 (39) citant l’étude de Missmer de 2004 (40) sur plus de 1300 femmes qui a comparé le risque de survenue d’une endométriose chez des femmes ayant eu une ménarche avant 10 ans, avec des femmes ayant eu une ménarche avant 12 ans, avec un risque relatif de 1,3 [IC 95% (1,0-1,8), p<0,001]. Ceci est également retrouvé dans les recommandations du CNGOF de 2018 avec un niveau de preuve 2 (38). Cependant, un seul article s’oppose à ce résultat en disant qu’il serait non significatif, c’est la revue de littérature réalisée par Bell en 2001 (34), mais avec des références bibliographiques datant de 1986 et de 1991.
– Templeman (41) ainsi que Youngster (42) retrouvaient dans leurs revues de littérature respectivement de 2012 et 2013, qu’une ménarche tardive après 14 ans était inversement proportionnelle à la survenue d’une endométriose (OR 0,3 [IC 95% 0,1-0,6]) et serait donc un facteur protecteur ; ce résultat est tiré de l’article de Treloar de 2010 (43) sur son étude cas-contrôle sur 268 Australiennes porteuses d’endométriose. À l’inverse, Riazi (37) était en désaccord et mentionnait qu’une ménarche tardive, après 14 ans, serait un facteur de risque d’endométriose.
– La présence de cycles raccourcis, de 27 jours ou moins, est retrouvée dans 7 références (10)(16)(20)(33)(37)(38)(39), et notamment dans les recommandations du CNGOF de 2018 (2) avec un niveau de preuve 2. A noter que la définition d’un « cycle court » est un cycle de moins de 21 jours dit polyménorrhée, mais que toutes les études se sont basées sur une définition des cycles raccourcis qui sont de 27 jours ou moins.
– Un allongement de la durée des règles (7 jours ou plus) a été retrouvé dans six articles (16)(19)(33)(34)(44) dont la revue de littérature de Riazi de 2015 (37) sans lien précisé avec l’abondance des règles.
– L’association chez une femme de cycles raccourcis et de menstruations longues (>7 jours) doublerait le risque de survenue d’une endométriose, selon Apgar (33).
– La présence de spottings pré-menstruels (16)(37)(45). Ils seraient présents chez 60% des adolescentes atteintes d’endométriose d’après la revue de littérature de Benagiano de 2017 (45), résultat tiré d’une étude de Dun en 2015 (46) sur 25 femmes Américaines de moins de 21 ans avec un diagnostic histologique d’endométriose.
– L’hyperménorrhée et les ménorragies, citées en particulier dans les recommandations du CNGOF de 2018 avec un niveau de preuve 2 (20)(37)(38).
– La survenue précoce des dysménorrhées (37)(42)(47), avec une attention à porter sur des symptômes qui auraient débuté un an après la ménarche d’après Saridogan dans sa revue de littérature de 2015 (47).
– Un environnement hormonal à prédominance œstrogénique serait également un facteur de risque d’endométriose. Selon Spaczynski (16), Eskenazi (1) et Batt (10), une réduction de l’imprégnation œstrogénique réduirait le risque de développer une endométriose. Ainsi, le tabagisme, l’activité physique et les grossesses seraient des facteurs protecteurs d’endométriose ; mais ceci n’a pas été démontré de manière significative.
– Résultat surprenant, la ménopause tardive est citée chez deux auteurs (Coleman et Riazi, en 2015) (36)(37). Il nous a paru surprenant d’intégrer la ménopause tardive aux facteurs de risque, en effet ce facteur a probablement été retrouvé chez des femmes ménopausées dont le diagnostic d’endométriose n’avait pas été fait plus tôt, ce qui est plausible au vu du pourcentage élevé de femmes avec une endométriose asymptomatique.
Antécédents gynécologiques
L’histoire gynécologique des patientes a également été analysée dans la littérature afin de déterminer d’éventuels facteurs de risque d’endométriose :
– Toute malformation génitale obstructive est un facteur de risque d’endométriose (30)(42). D’après Bourdel en 2006, ces malformations étaient retrouvées chez 5 à 6 % des adolescentes atteintes d’endométriose, avec la présence quasi constante d’endométriose lorsqu’une malformation génitale obstructive était observée (utérus bicorne, atrésie vaginale, etc.) .
Par ailleurs, d’autres facteurs ont été cités dans nos références bibliographiques mais avec un faible niveau de preuve ou de manière non significative, les voici cités ci-dessous :
– Un antécédent de fausses couches d’après la revue de littérature de Chapron de 2011 (48) ; les fausses couches pourraient également s’inscrire en tant que symptôme, car en cas de fréquence élevée chez une même femme, elles sont synonymes de subfertilité ou d’infertilité.
– Un antécédent de grossesse extra-utérine (48).
– Des grossesses tardives (36), la nulliparité ou nulligestité (19)(37). Ces facteurs sont cités comme des facteurs de risque mais peuvent également refléter la baisse de fertilité chez les femmes atteintes d’endométriose. À l’inverse, la grossesse serait un facteur protecteur d’endométriose (16).
– Un antécédent de kyste ovarien (36).
– Des facteurs embryonnaires (37), comme l’exposition in utero au distilbène (16 (47).
– Le début tardif de l’activité sexuelle.
Contraception
Le lien entre la contraception et l’endométriose a souvent été analysé dans la littérature. En ce qui concerne le dispositif intra-utérin non hormonal (au cuivre), son utilisation passée ou actuelle serait associée à une endométriose en favorisant le flux rétrograde par des menstruations augmentées de volume, d’après la revue de littérature d’Apgar en 1992 (33). Eskenazi confirme lui aussi ces résultats : dans sa revue de littérature de 1997 (1), il retrouvait un risque d’endométriose augmenté chez les patientes ayant utilisé un DIU entre 2 et 4 ans, comparées aux patientes n’ayant jamais utilisé de DIU (OR 3,0 [IC 95% 1,1-8,1]). Plus tard, le DIU hormonal a été étudié, et selon les recommandations du CNGOF, l’usage du DIU hormonal a été démontré comme étant un facteur protecteur d’endométriose et de manière significative.
L’analyse des études concernant le lien entre la contraception œstroprogestative et l’endométriose est complexe :
– La revue de littérature d’Eskenazi de 1997 (1), citant trois auteurs (Vessey, Parazzini et Sangi-Haghpeykar), a étudié l’association entre la survenue d’une endométriose et l’usage passé ou actuel d’une contraception œstroprogestative. Ils retrouvent que l’utilisation actuelle d’une COP serait inversement proportionnelle au risque de développer une endométriose (OR 0,5 [IC 95% 0,2-0,9]), et qu’alors l’usage actuel de la COP serait un facteur protecteur d’endométriose.
La revue d’Apgar de 1992 (33) abondait dans ce sens, se basant sur une étude cas contrôle de Kirshon de 1988 (49) sur 42 femmes atteintes d’endométriose, concluant qu’une utilisation actuelle ou passée d’une COP diminuerait le risque de survenue d’une endométriose, mais de façon non significative. La revue de littérature de Riazi (37) allait également dans ce sens en décrivant l’absence d’utilisation d’une COP comme facteur de risque, seulement leurs deux références bibliographiques montrent de nombreux biais.
– À l’inverse, selon la revue de littérature de Surrey (48) de 2017 sur 16 articles, l’usage passé ou actuel d’une COP serait un facteur prédictif d’endométriose, se basant sur une étude cas contrôle de Calhaz-Jorge de 2004 (50) qui compare 1079 femmes subfertiles Portugaises avec et sans endométriose.
– Chapron s’est penché sur le sujet dans son étude de 2011 (51) sur 410 femmes avec une endométriose avérée. Il retrouve :
o Que l’usage passé d’une COP est associé à l’endométriose et ce de manière significative (OR 2,79 [IC 95% 1,74-5,12], p = 0,002) ;
o Que l’usage antérieur d’une COP pour des dysménorrhées primaires est significativement plus fréquent chez les femmes atteintes d’endométriose (OR 5,6 [IC 95% 3,2-9,8]) ;
o Et que l’usage prolongé (sans précision de durée) d’une COP pour dysménorrhées primaires est également plus fréquent chez les femmes avec une endométriose (OR 4,5 [IC 95% 1,9-10,4]).
o Saridogan (47) dans sa revue de la littérature citait également les résultats de Chapron, en précisant que les femmes avec une endométriose profonde étaient plus à risque d’avoir débuté une COP avant leurs 18 ans.
– Toujours Chapron, mais dans son étude cas-contrôle rétrospective et multicentrique de 2016 (52), confirmait les résultats précédents : l’utilisation antérieure d’une COP était associée à la survenue d’une endométriose (profonde et endométriomes) et ce de manière significative (OR 6,66 [IC 95% 4,05-10,93]).
– Templeman, dans sa revue de littérature de 2012 (41), citait deux résultats contradictoires, celui de Chapron et celui de Vercellini (tous les deux en 2011) :
Tout d’abord, le résultat de Chapron de 2011 : l’utilisation précoce et prolongée d’une COP pour traiter des dysménorrhées primaires serait un facteur de risque d’endométriose. A l’opposé, la méta analyse de Vercellini de 2011 (53) concluait à:
o L’usage actuel de la COP diminuerait le risque de développer une endométriose (RR 0,63 [IC 95% 0,47-0,85]) et serait donc un facteur protecteur d’endométriose ;
o L’usage passé ou actuel de la COP diminuerait le risque de survenue d’une endométriose mais de manière non significative (RR 1,19 [IC 95 % 0,89-1,60]) ;
o Mais son usage passé augmenterait le risque de développer la pathologie, de manière non significative, avec un RR à1,21 [IC 95% 0,94-1,56] et serait donc un facteur de risque.
– Par ailleurs, l’utilisation de la pilule à visée antalgique pour des dysménorrhées est citée parfois comme un facteur de risque d’endométriose, mais doit plutôt être considérée comme un identifiant du risque pour le praticien, donc comme un symptôme et sera donc traitée dans cette partie.
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Table des matières
INTRODUCTION
GÉNÉRALITÉS
A. Dépistage
B. Endométriose
1) Définition
2) Physiopathologie
3) Épidémiologie
4) Diagnostic
5) Examen physique
6) Sévérité de l’endométriose
7) Examens complémentaires
8) Traitement
PARTIE 1 : REVUE DE LITTÉRATURE
A. Matériel et Méthode
1) Stratégie de recherche
2) Critères d’inclusion / exclusion des études
3) Sélection des études
4) Extraction des données
B. Résultats
1) Description des études
2) Résultats des critères de jugement
C. Discussion
1) Limites de l’étude
2) Discussion des résultats sur les facteurs de risque
3) Discussion des résultats sur les symptômes
4) Discussion des résultats sur les comorbidités
5) Spécificités de l’adolescente
D. Conclusion de la première partie
PARTIE 2 : ÉTUDE QUALITATIVE
A. Matériel et Méthode
1) Type d’étude
2) Population étudiée
3) Recueil des données
4) Analyse des données
B. Résultats descriptifs
1) Entretiens
2) Population de l’étude
C. Résultats qualitatifs
1) Pratiques des médecins généralistes
2) Difficultés
3) Dépistage
D. Discussion
1) Forces et limites de l’étude
2) Principaux résultats
3) Discussion des principaux résultats
4) Comparaison des résultats à la littérature
E. Conclusion de la deuxième partie
CONCLUSION
ANNEXES
A. Annexe 1 : Classification ASRM, mode de calcul
B. Annexe 2 : Tableau résumant les caractéristiques et résultats principaux des articles étudiés
C. Annexe 3 : Guide d’entretien
D. Annexe 4 : Fiche pratique sur l’endométriose : Suivi des femmes de la ménarche à la ménopause
1) Tableau des éléments à retenir à l’interrogatoire pour le diagnostic de l’endométriose
2) Arbre décisionnel pour l’endométriose en soins primaires
E. Annexe 5 : Serment d’Hippocrate
BIBLIOGRAPHIE
RÉSUMÉ
MOTS CLÉS