Anatomie fonctionnelle du cerveauย
Les techniques de cartographie fonctionnelle ont permis dโexplorer le fonctionnement du cerveau in vivo chez des sujets sains conscients et de faรงon non invasive et donc une meilleure comprรฉhension des interactions entre le cortex et les structures sous-corticales dans lโรฉlaboration des fonctions neurologiques.
En effet contrairement ร la thรฉorie ยซ localisationniste ยป, qui pensaient que le cerveau รฉtait organisรฉ en structures anatomo-fonctionnelles indรฉpendantes les unes des autres et que chaque aire รฉtait responsable dโune fonction, le cerveau est en fait constituรฉ de rรฉseaux parallรจles distribuรฉs, qui incluent ร la fois des rรฉgions corticales susceptibles de travailler de faรงon synchrone, et interconnectรฉe par des faisceaux cortico-corticaux (ยซ connectivitรฉ horizontale ยป), mais รฉgalement des structures sous-corticales modulatrices (notamment les noyaux gris centraux) connectรฉes au cortex par une ยซ connectivitรฉ verticale ยป ceci constitue la base de la thรฉorie ยซ hodotopique ยป [12]. On peut รฉgalement subdiviser les composants de ce rรฉseau fonctionnel en structure primaire effectrice dont lโatteinte est responsable de dรฉficits manifestes, et des structures secondaires associatives dont lโatteint est cliniquement plus discrรจte.[13] toutefois, en pratique, la carte cyto-architectonique du cortex cรฉrรฉbral, proposรฉe par Brodmann en 1909, reste le dรฉcoupage du cortex cรฉrรฉbral le plus simple et la plus frรฉquemment utilisรฉ (figure 19).
Fonctions motrices et territoires moteurs
La rรฉgion prรฉcentrale est le siรจge de lโaire motrice primitive ou aire 4 de Brodmann. Ce cortex moteur qui contient les cellules pyramidales de Betz est ร lโorigine de la voie motrice pyramidale (faisceau cortico-spinal et faisceau cortico nuclรฉaire). Il sโagit dโune zone hautement fonctionnelle et diffรฉrenciรฉe constituรฉe donc dโun cortex spรฉcifique et trรจs fonctionnel on distingue :
Fonctions motrices et territoires moteurs [9] :
๏ La rรฉgion prรฉmotrice constituรฉe elle-mรชme de plusieurs aires :
โ lโaire 6 de Brodmann en avant de lโaire 4. Cette aire 6 qui sโรฉtend sur toute la face latรฉrale du lobe frontal constitue la partie postรฉrieure des trois circonvolutions frontales. Cette aire 6 participe ร la formation de la voie pyramidale, mais aussi ร la voie motrice extrapyramidale : faisceau fronto-ponto-cรฉrรฉbelleux dโArnold ร destination du nรฉocerebellum.
โ lโaire 8 situรฉe en avant ร cheval sur F1 et F2. Lโaire 8 est dรฉsignรฉe comme lโaire oculomotrice frontale qui entraรฎne un mouvement conjuguรฉ des yeux et dans certains cas de la tรชte.
โ lโaire de Broca situรฉe au niveau du pied et du cap de F3 (aires 44 et 45 de Brodmann). Ce centre effecteur du langage ou centre du langage parlรฉ ne sโobserve que du cรดtรฉ gauche, cโest-ร -dire du cรดtรฉ de lโhรฉmisphรจre dominant chez les droitiers et chez la grande majoritรฉ des gauchers. Cette aire de Broca est exceptionnellement du cรดtรฉ droit.
โร la face interne du lobe frontal (occupant la rรฉgion de lโaire 6) se trouve une autre zone fonctionnelle importante : lโaire motrice supplรฉmentaire (AMS). Elle correspond ร lโaire corticale oรน le mouvement volontaire est programmรฉ, prรฉparรฉ et initiรฉ. En effet, les influx nerveux naissent de cette aire avant de faire relais dans les aires motrices 4, 6 ou 8.
Le cortex prรฉfrontalย
Situรฉ en avant des aires motrice et prรฉmotrice. Il se divise en 3 parties. une partie latรฉrale impliquรฉe dans les fonctions cognitives, lโattention, la mรฉmorisation, le jugement et le choix dโune rรฉponse, une partie mรฉdiale impliquรฉe dans la rรฉgulation de la motivation et une partie orbitaire ou ventrale : impliquรฉe dans la vie รฉmotionnelle et la thymie
Fonctions sensitivesย
Le cortex pariรฉtal est le centre rรฉcepteur de la sensibilitรฉ gรฉnรฉrale. Dโun point de vue architectonique et fonctionnel, le lobe pariรฉtal est divisรฉ en 3 zones :
โLapariรฉtale ascendante constitue lโaire rรฉceptrice des diffรฉrentes sensibilitรฉs (cortex somato-sensitif)
โ les aires 5 et 7 constituent lโaire oรน sโรฉlaborent les sensations brutes
โ les aires 39 et 40 permettant la reconnaissance des objets par le tact et une partie du langage pour lโhรฉmisphรจre gauche.
la fonction langagiรจre
Inspirรฉ des confrontations anatomo-cliniques de Broca et Wernicke, le modรจle associationniste de Lichtheim (fig.20) demeure en grande partie valide et constitue une bonne base pour comprendre les relations entre les principales zones effectrices du langage et rechercher des lรฉsions focales devant des troubles de la parole.
Aujourdโhui, on distingue principalement des zones corticales disposรฉes autour du sillon latรฉral et des structures sous-corticales qui les relient et participent ร la prรฉparation et ร lโapprentissage du langage. La grande particularitรฉ des zones fonctionnelles du langage est la latรฉralisation hรฉmisphรฉrique. On considรจre que 95 % des droitiers et 70 % des gauchers ont une prรฉdominance fonctionnelle de lโhรฉmisphรจre gauche. Seuls 10 % des gauchers auraient une prรฉdominance nette de lโhรฉmisphรจre droit.
Le cortex linguistique antรฉrieur comprend lโaire de Broca (aires 44 et 45) avec une portion du cortex dorso-latรฉral prรฉfrontal et permet lโarticulation de la parole. Une aphasie de Broca se traduit par une rรฉduction de la fluence et une dysarthrie, la comprรฉhension รฉtant peu touchรฉe. Le cortex linguistique postรฉrieur dรฉcode la parole et la comprend, est constituรฉ par lโaire de Wernicke (aire 22) les gyrus angulaire et supra-marginal et une partie de la deuxiรจme circonvolution temporale.
la Plasticitรฉ cรฉrรฉbrale post lรฉsionnelle
La plasticitรฉ cรฉrรฉbrale est un phรฉnomรจne dynamique qui permet le remodelage continu des connexions synaptiques afin dโoptimiser le fonctionnement des rรฉseaux neuronaux, secondaires ร un stimulus rรฉpรฉtรฉ notamment lors de la croissance et lโapprentissage, mais aussi aprรจs une lรฉsion : cโest la plasticitรฉ cรฉrรฉbrale post lรฉsionnelle (PCPL). Dans le cas des tumeurs cรฉrรฉbrales la PCPL รฉvolue en trois phases :
rรฉorganisation fonctionnelle au cours de la croissance tumorale
La majoritรฉ du patient atteint de tumeurs cรฉrรฉbrales, notamment les gliomes de bas grade, ont le plus souvent un examen neurologique sans particularitรฉ malgrรฉ un volume tumoral importantcela peut sโexpliquer si lโon admet que la lente infiltration tumorale induit une rรฉorganisation fonctionnelle progressive. En accord avec cette idรฉe, quatre grands modรจles de redistribution ont รฉtรฉ rapportรฉs dans la littรฉrature.
Redistribution intratumorale : Persistance de la fonction ร lโintรฉrieur de la tumeur en raison du caractรจre infiltrant des gliomes .
Redistribution des aires รฉloquentes autour de la tumeur : aires paraissant parfois plus larges que la normale, et dรฉplacรฉes en comparaison avec lโhรฉmisphรจre controlatรฉral sain .
Redistribution intrahรฉmisphรฉrique : Recrutement distribuรฉ de rรฉseaux sains ร lโintรฉrieur de lโhรฉmisphรจre lรฉsionnel (par exemple lโactivation dโaires motrices secondaires) .
Redistribution controlatรฉrale avec Implication et recrutement dโaires dans lโhรฉmisphรจre controlatรฉralsain .
Plasticitรฉ cรฉrรฉbrale peropรฉratoire
Au cours du geste chirurgical, la stimulation รฉlectrique directe peut dรฉtecter une rรฉorganisation corticale peropรฉratoire, qui consiste en un dรฉmasquage ร la fin du geste dโaire fonctionnelle latent ou redondant, non dรฉtectรฉ lors de lโรฉtape de cartographie.
Ces aires semblent avoir une fonction similaire ร dโautres primaires. Il est donc possible dโavoir plusieurs zones exerรงant la mรชme fonction, mais qui reste latent et qui seront dรฉmasquรฉ en peropรฉratoire probablement suite ร une hyperexcitabilitรฉ induite par le geste.Durant la derniรจre dรฉcennie, de nombreux travaux ont montrรฉ que la rรฉorganisationcรฉrรฉbrale fonctionnelle pouvait se poursuivre au-delร de la chirurgie, lโexemple leplus frappant de plasticitรฉ postopรฉratoire est celui des chirurgies itรฉratives :
Lorsquโune exรฉrรจse tumorale complรจte est impossible du faite de lโenvahissement dโun tissu fonctionnel par la tumeur, il est frรฉquent quโun patient bรฉnรฉficie dโun autreou plusieurs gestes chirurgicaux aprรจs quelques mois voire des annรฉes. Il a alors pu รชtre observรฉ, grรขce ร la SED, que la stimulation des zones รฉpargnรฉes lors du premier geste nโentraรฎnait plus de dรฉficit neurologique (et donc nโรฉtais plus fonctionnelles) ce qui a permis leurs exรฉrรจses. Cela peut sโexplique par une rรฉorganisation locorรฉgionale et un recrutement des aires pรฉrilรฉsionnelles ayant compensรฉe les zones envahies ou enlever.
INCIDENCE DES DรFICITS NEUROLOGIQUES
Lโincidence des dรฉficits neurologiques postopรฉratoires aprรจs une chirurgie รฉveillรฉe varie en fonction des sรฉries et dรฉpend de plusieurs facteurs, dont la topographie tumorale, lโรฉtat neurologique prรฉopรฉratoire, le dรฉroulement de la cartographie, la survenue de complications et dโautres. Le taux des dรฉficits immรฉdiats varie entre 13 et 80 % alors que celui de sรฉquelles permanentes est entre 4,5 % et 13 %.
Lโรฉtendue de lโexรฉrรจse
Lโรฉtendue dโexรฉrรจse est un facteur pronostique ayant un impact majeur sur la durรฉe de rรฉmission et de la mรฉdiane de survie globale des malades opรจrent pour tumeur cรฉrรฉbrale notamment les gliomes de bas grade [1,2] et aussi de haut grade de malignitรฉ [3,4]. Cโest aussi un facteur qui conditionne lโรฉvolution clinique en post opรฉratoire. Plusieurs sรฉries ,dont la nรดtre ,on aboutit ร la conclusion que lorsque la tumeur siรจge en zone รฉloquente, une exรฉrรจse partielle augmente le risque de dรฉficit neurologique postopรฉratoire [20, 24,32], cela pourrait รชtre du a une inflammation locale maintenue par le rรฉsidu tumoral, pouvant รฉgalement augmenter de volume et comprimer le parenchyme adjacent.
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
I. Type dโรฉtude
II. Critรจres dโinclusion et dโexclusion
1. Critรจres dโinclusion
2. Critรจres dโexclusion
III. Mรฉthodes de recueil et analyse des donnรฉes
IV. Mรฉthodes de recherche
V. Technique chirurgicale
1. Donnรฉes prรฉopรฉratoire
2. Donnรฉes per et postopรฉratoire
RESULTATS ET ANALYSESย
I. Donnรฉes รฉpidรฉmiologiques
1. Rรฉpartition selon le sexe et lโรขge
2. La latรฉralisation manuelle
3. Langues parlรฉes et bilinguisme
4. Les antรฉcรฉdents des patients
5. Symptomatologie clinique
6. Examens paracliniques prรฉopรฉratoires
7. Donnรฉes opรฉratoires
8. Donnรฉes postopรฉratoires
9. Rรฉsultats de lโexamen anatomopathologique
10. Suivi ร long terme
11. Rรฉcidive et survie globale
II. รtude analytique
1. Sexe
2. Age
3. Etat neurologique en prรฉopรฉratoire
4. La survenue dโincidents peropรฉratoires
5. Etendue de lโexรฉrรจse
6. Grade histologique tumoral
DISCUSSIONย
I. Rappels anatomiques
1. Anatomie morphologique du cerveau
2. Anatomie fonctionnelle du cerveau
II. La plasticitรฉ cรฉrรฉbrale post lรฉsionnelle
1. Rรฉorganisation fonctionnelle au cours de la croissance tumorale
2. Plasticitรฉ cรฉrรฉbrale peropรฉratoire
3. Plasticitรฉ cรฉrรฉbrale postopรฉratoire
III. Incidence des dรฉficits neurologiques
IV. Facteurs de risques
1. La proximitรฉ aux zones รฉloquentes et Cartographie corticale positive
2. La cartographie sous-corticale
3. Dรฉficit prรฉopรฉratoire
4. Incidents opรฉratoires et รฉchec du geste
5. Lโรฉtendue de lโexรฉrรจse
6. Autres facteurs
V. รtiologies
1. Les faux nรฉgatifs
2. Atteinte de structures รฉloquentes
3. Les causes vasculaires
4. Lโoedรจme cรฉrรฉbral
VI. Moyens dโamรฉlioration des rรฉsultats fonctionnels de la chirurgie รฉveillรฉe
1. Lโimagerie cรฉrรฉbrale fonctionnelle par rรฉsonance magnรฉtique
2. La tractographie
3. Lโรฉlectrocorticographie
CONCLUSION
ANNEXESย
RรSUMรSย
REFERENCES
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