La majorité des caries chez les jeunes survient sur les surfaces de mastication des dents postérieures. Si les surfaces occlusales ne représentent que 12,5% des surfaces dentaires, elles sont pourtant majoritairement concernées par la maladie carieuse. Aux USA, 90 % des caries chez les écoliers apparaissent au niveau des puits et fissures dans les zones fluorées [4]. En France, l’atteinte des puits et fissures des premières molaires permanentes représente 73 % de l’indice CAOD à 12 ans [40]. En Lorraine, 26,3 % des enfants âgés de 6-7 ans nécessitent des soins dont 8,5 % sur la seule première molaire définitive. Chez les enfants ayant leurs quatre premières molaires définitives en bouche, un sur six est atteint par la carie, 4,4 % ont déjà̀ leurs quatre premières molaires définitives cariées et seule une molaire sur trois est soignée [71]. Les sillons, puits et fissures des faces occlusales des molaires constituent des zones de fragilité anatomique. La première molaire permanente reste encore la dent la plus touchée par la carie [13]. Les mesures traditionnelles de prévention (brossage des dents, utilisation de la soie dentaire et fluorures) agissent sur la surface lisse des dents. Le scellement des puits et fissures est un traitement préventif qui a pour but de prévenir ou d’arrêter le développement de lésions carieuses initiales, en formant une barrière physique étanche aux bactéries cariogènes. Les sealants s’ajoutent aux mesures traditionnelles en agissant sur les dents qui comportent des puits et fissures, généralement les premières et deuxièmes molaires permanentes. Le scellement des sillions est une méthode non invasive dont l’efficacité par rapport au coût, n’est plus à démontrer pour la prévention de la carie des puits et des fissures. Des études récentes ont démontré qu’après huit ans, l’adhésif était toujours présent dans 80 % des fissures scellées et on ne notait aucune carie [49]. Une autre avait démontré que 16 % des surfaces occlusales scellées montraient une présence partielle de l’adhésif et on ne notait aucune carie. Après dix ans, seulement 6 % des surfaces occlusales scellées démontraient des caries ou des restaurations .
Le scellement des sillons doit s’inscrire dans une philosophie préventive globale; il ne constitue pas la solution idéale mais il contribue dans un certain nombre de cas à prévenir le développement de lésions carieuses dans les anfractuosités occlusales [14]. Depuis leur apparition en 1967 (Cueto et Buonocore) et malgré l’évolution des techniques de mise en place et des matériaux utilisés, cette thérapeutique bien que préventive reste encore sous employée dans les cabinets dentaires : 18,5% aux USA selon Feigal [27], 15% chez les 6-7 ans selon Simonsen [77], 10,7% en Auvergne .
ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE DE LA DENT TEMPORAIRE
Caractères anatomiques
Particularités morphologiques de la dent temporaire
Bien que leur structure générale soit identique, les dents temporaires possèdent leurs caractéristiques propres par rapport aux dents définitives :
❖ la teinte des dents est plus blanche,
❖ l’émail est plus fin et par conséquent s’use plus, donc les dents lactéales sont plus sujettes à la carie et à ses conséquences,
❖ la dentine possède moins de tubuli mais ceux-ci ont un diamètre plus gros,
❖ la hauteur coronaire est plus réduite,
❖ les dents temporaires sont plus petites que les dents de remplacement sauf pour les molaires remplacées par les prémolaires,
❖ le collet anatomique des dents temporaires est plus marqué et sous gingival, ce qui rend la dent plus globuleuse,
❖ les faces vestibulaires sont très inclinées,
❖ le germe de la dent permanente sous-jacente est proche.
❖ elles ont également des racines beaucoup plus fines et effilées que les dents permanentes. La pulpe et les cornes pulpaires, notamment les cornes mésiales, sont proportionnellement plus importantes,
❖ les racines des dents temporaires pluriradiculées sont divergentes pour laisser place au germe de la dent permanente ; l’anatomie endodontique est très variable. De plus, la dent temporaire présente de nombreuses communications pulpo-parodontales, ce qui lui confère une sensibilité accrue à la nécrose.
Particularités histo-anatomiques de la dent temporaire
L’émail
L’émail de la dent temporaire est beaucoup plus fin que celui de la dent permanente. Il présente une disposition irrégulière des prismes, ce qui explique la sensibilité importante à la pathologie carieuse. Il est moins minéralisé que celui de la dent permanente, et est moins translucide.
La dentine
La couche dentinaire est plus fine, et proportionnellement moins importante que sur la dent permanente. Les tubulis dentinaires ont un diamètre plus important en denture temporaire, et sont plus nombreux et larges à proximité pulpaire, ce qui favorise la pénétration bactérienne et une contamination pulpaire plus rapides.
La pulpe
Le tissu pulpaire lui est proportionnellement plus volumineux chez la dent temporaire, et présente des cornes longues et effilées, proches de la surface amélaire. Par ailleurs elle présente les mêmes constituants fibreux et cellulaires que la pulpe des dents permanentes. Ainsi, l’implication pulpaire lors de lésion carieuse ou traumatique est fréquente .Ce tissu ressemble fortement au tissu pulpaire en denture permanente d’un point de vue histologique, cependant son innervation est moindre. De plus, le phénomène de fistulisation est plus fréquent en raison d’un os alvéolaire moins dense, ce qui implique une pression intra pulpaire moindre. Les dents temporaires ont alors tendance à être moins douloureuses à l’inflammation pulpaire .
Le parodonte
Comme celui de l’adulte, le parodonte de l’enfant se constitue de quatre tissus: la gencive, le desmodonte, l’os alvéolaire et le cément. Il existe cependant des différences notables entre le parodonte de l’enfant et celui de l’adulte :
❖ la gencive est souvent décrite comme étant plus rouge, du fait du réseau capillaire plus abondant et d’un épithélium plus mince, plus translucide ;
❖ la gencive marginale en denture temporaire stable est rose, de consistance ferme et élastique, d’aspect lisse ou finement granité ;
❖ l’anatomie cervicale des dents temporaires et la proéminence des bombés vestibulaires lui confèrent un aspect ourlé et épais ;
❖ la hauteur de la gencive adhérente est plus importante au maxillaire qu’à la mandibule et elle augmente avec l’âge. La profondeur du sulcus a une valeur constante de 1 mm en moyenne ;
❖ au niveau des diastèmes, on observe une gencive recouverte d’un épithélium ortho ou para kératinisé desquamant. L’épithélium de jonction semble moins haut que pour les dents définitives ;
❖ la largeur de l’espace desmodontal est augmentée avec des faisceaux de fibres de collagène moins nombreux et une vascularisation plus importante ;
❖ le cément est moins dense et moins épais, il est acellulaire dans la partie coronaire de la racine et cellulaire dans sa partie apicale ;
❖ l’os alvéolaire apparait avec une minéralisation moins dense et des trabéculations moins nombreuses, cependant il possède une vascularisation sanguine dense. La lamina dura est également plus mince.
Physiologie de la dent temporaire
Les dents de lait se développent et évoluent suivant les trois stades suivants :
➤ Premier stade
C’est une phase de croissance et de développement , la couronne et la racine s’édifient. Cette période dure un an environ. La physiologie du tissu dentino-pulpaire est orientée vers la réparation grâce à un système vasculo-nerveux important et à l’ouverture des apex radiculaires. Ce processus est appelé dentinogenèse.
➤ Deuxième stade
C’est la phase de maturation et de stabilité , qui s’étend de l’édification complète de la racine jusqu’à sa résorption cliniquement décelable. Cette période dure trois ans plus ou moins six mois. La physiologie du tissu dentino-pulpaire possède là encore des possibilités de réparation: la dentinogenèse est conservée.
➤ Troisième stade
C’est la phase de régression; il s’agit d’un phénomène de résorption radiculaire physiologique aboutissant à la chute de la dent temporaire : c’est l’apoptose dentaire. Cette période dure trois à quatre ans. La physiologie du tissu dentino-pulpaire dominée par un remaniement cellulaire ostéoclastique important ne permet plus la réparation: la dentinogenèse est compromise. Cette phase est le siège de modifications structurales radiculaires, osseuses et tissulaires.
ANATOMIE ET PHYSIOPATHOLOGIE DE LA MOLAIRE PERMANENTE IMMATURE
Une dent permanente est dite immature tant qu’elle n’a pas achevé son édification radiculaire correspondant à la mise en place de la jonction cémentodentinaire. Les dents permanentes immatures sont présentes à partir de l’établissement de la denture mixte (6 ans) jusqu’au début de la phase de denture adulte jeune (15 ans) .
Anatomie
Caractéristiques morphologiques externes
D’un point de vue anatomique, la dent permanente immature présente une couronne dont la morphologie mouvementée est marquée par ses cuspides prononcées, des sillons profonds ou anfractueux avec parfois même des puits creusés dans l’émail (zones de moindre résistance). La racine est d’apparence frêle plus ou moins courte selon son degré d’évolution avec les parois dentinaires minces et par conséquent, très fragiles. Elle se caractérise par une région apicale non encore formée. Cette zone très vascularisée et à intense potentiel cellulaire participe directement à l’édification du tiers apical. La dent permanente immature est aussi caractérisée par un apex largement ouvert (en tromblon).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
1. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE DE LA DENT TEMPORAIRE
1.1. Caractères anatomiques
1.1.1. Particularités morphologiques de la dent temporaire
1.1.2. Particularités histo-anatomiques de la dent temporaire
1.1.2.1. Émail
1.1.2.2. Dentine
1.1.2.3. Pulpe
1.1.2.4. Parodonte
1.2. Physiologie de la dent temporaire
2. ANATOMIE ET PHYSIOPATHOLOGIE DE LA MOLAIRE PERMANENTE IMMATURE
2.1. Anatomie
2.1.1. Caractéristiques morphologiques externes
2.1.2. Puits et fissures
2.1.2.1. Définitions
2.1.2.2. Différents types morphologiques
2.2. Physiopathologie de la molaire permanente immature
2.2.1. Éruption
2.2.2. Immaturité amélaire
2.2.3. Immaturité dentinaire
2.2.4. Immaturité pulpo-radiculaire
2.2.5. Susceptibilité carieuse
3. SCELLEMENT DES PUITS ET FISSURES : LES SEALANTS
3.1. Définition
3.2. Indications
3.3. Contre-indications
3.4. Matériaux de scellement
3.4.1. Critères de choix des matériaux
3.4.2. Classification
3.4.2.1. Résines composites
3.4.2.2. Ciments verres ionomères
3.4.2.3. Vernis
3.5. Protocole opératoire
3.5.1. Protocole opératoire du matériau de scellement à base de résine (MSR)
3.5.2. Autres protocoles opératoires
DEUXIEME PARTIE
1. JUSTIFICATIFS
2. MATERIEL ET METHODE
2.1. Type d’étude
2.2. Population et cadre d’étude
2.3. Critères de sélection
2.4. Échantillonnage
2.5. Procédure de collecte et variables étudiées
2.6. Analyse statistique
3. RESULTATS
3.1. Données sociodémographiques
3.1.1. Sexe
3.1.2. Âge
3.1.3. Spécialité
3.1.4. Secteur d’activité
3.1.5. Lieu d’implantation du cabinet
3.1.6. Expérience
3.2. Données cliniques
3.2.1. Fréquentation des enfants en consultation
3.2.2. Prévention des lésions carieuses au cabinet
3.2.3. Méthodes de prévention utilisées
3.2.4. Utilisation du sealant
3.2.5. Utilisation du sealant selon l’expérience
3.2.6. Raison de non utilisation
3.3. Attitudes et connaissances
3.3.1. Sealant et risque carieux
3.3.2. Choix des dents à protéger
3.3.3. Sélection des dents
3.3.4. Moyens de diagnostic de l’état des sillons
3.3.5. Moyens d’isolement
3.3.6. Préparation de la dent
3.3.7. Procédure d’application
4. DISCUSSION
4.1. Contraintes et limites
4.2. Données sociodémographiques
4.3. Données cliniques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES