Anatomie et fonction de l’œil

Anatomie et fonction de l’œil

L’œil est l’organe sensoriel spécialisé dans la détection, la localisation et l’analyse de la lumière. De par son origine embryonnaire (organe dérivant du tube neural), l’œil fait partie du système nerveux central (SNC) (Purves, 2001). Il permet aux êtres vivants de traiter l’information lumineuse en signal électrique qui est ensuite transmis vers le cerveau. L’œil est divisé morphologiquement en deux parties: un segment antérieur et un segment postérieur. Dans cette partie, l’œil sera décrit suivant l’axe antéro-postérieur.

Le segment antérieur

Il est la partie la plus en avant de l’œil, comprenant tous les tissus situés entre la cornée et laface postérieure du cristallin (Figure.1). La cornée est la première structure traversée par la lumière et constitue la barrière entre l’environnement extérieur et intérieur de l’œil. Par ailleurs, elle participe au maintien du globe oculaire et à la protection des tissus contenus dans l’œil. La cornée est une lame de tissu conjonctif dense, transparente, avasculaire et fortement innervée (riche en fibres nerveuses nociceptives) (Zander and Weddell, 1951).

En dehors de son rôle protecteur, elle joue également un rôle majeur dans la réfraction de l’œil, participant ainsi pour 70 % au pouvoir réfractif oculaire. La chambre antérieure qui est située entre la cornée et l’iris est infiltré par un liquide transparent, l’humeur aqueuse. Ce liquide est composé essentiellement à plus de 99% d’eau, de vitamine C, d’acide lactique, de glucose et d’une faible concentration en protéines (De Berardinis et al., 1965). Le rôle premier de l’humeur aqueuse est d’apporter les nutriments nécessaires à la cornée et au cristallin. Elle permet aussi de maintenir la forme de l’œil ainsi que de maintenir la pression intraoculaire par un renouvellement constant de l’humeur aqueuse grâce aux procès ciliaires. Cependant, un défaut de sa réabsorption au niveau du canal de Schlemm peut entraîner une augmentation de la pression intraoculaire pouvant conduire à un glaucome (McLaren, 2009). Ensuite vient l’iris qui est une membrane circulaire et contractile, qui se trouve dans l’humeur aqueuse entre la cornée et le cristallin. Il s’agit d’une structure pigmentée conférant à l’œil sa couleur. Ce dernier est perforé en son centre, formant la pupille. La contraction ou la dilatation de l’iris permet de contrôler le degré d’illumination de la rétine par l’intermédiaire de deux muscles antagonistes: le sphincter et le dilatateur. Le cristallin est une capsule mince et élastique qui est responsable de la projection fine de l’image sur la rétine. Il joue le rôle d’une lentille biconvexe dont le but est de focaliser les rayons lumineux sur la rétine. Il est composé de fibres cellulaires riches en cristallines. L’opacification du cristallin conduit à une cataracte qui constitue la première cause de cécité dans le monde (Javitt et al., 1996).

Le segment postérieur

Il est délimité en avant par la capsule postérieure du cristallin et en arrière par la sclère. Le vitré (ou humeur vitré), qui occupe 90 % du volume de l’œil humain, est un gel transparent, visqueux composé à 98 % d’eau, d’acide hyaluronique, de collagènes, de glycosaminoglycanes et d’acides aminés (Durham, 1970). Ce gel est contenu dans une enveloppe transparente, la membrane hyaloïde. Par ailleurs, le vitré se fixe au niveau du cristallin et de la rétine ce qui permet de maintenir la forme de l’œil en absorbant les chocs et de garder la rétine collée contre la paroi postérieure de l’œil. La rétine est formée de la rétine neurale (siège de la phototransduction) et de l’épithélium pigmentaire rétinien (EPR) (cette partie sera détaillée ci-dessous). La membrane de Bruch (MB) est une couche acellulaire située entre l’EPR et la choriocapillaire, qui est constitué d’une couche centrale d’élastine bordée de chaque coté par une zone riche en collagène. Cette membrane est le lieu d’échanges métaboliques très importants depuis la choroïde qui est la couche collée à la MB dans sa partie externe, et qui est une source de nutriments et d’oxygène vers la rétine externe et l’épithélium pigmentaire qui ont une activité métabolique intense. Et enfin, la sclère, la plus externe, est la membrane conjonctive qui protège l’œil et qui permet le maintien de la forme oculaire. Le nerf optique regroupe la totalité des axones des cellules ganglionnaires de l’œil vers le tectum puis vers cortex visuel. La papille aussi appelée tache aveugle est la région d’émergence du nerf optique dans la rétine. Elle est dépourvue de photorécepteurs et ne peut donc capter aucun stimulus lumineux.

La rétine neurale

La rétine neurale est composée à 95 % de cellules neurales et gliales et à 5 % de vaisseaux (Figure. 2). Elle tapisse la partie interne de l’œil et est fixée au niveau de l’ora serrata (partie postérieure des corps ciliaires) et au niveau du nerf optique. La lumière qui pénètre dans l’œil traverse toute la couche de la rétine interne avant d’atteindre la couche nucléaire externe (CNE) (la partie la plus externe de la rétine neurale) qui est le siège de la phototransduction.

Les photorécepteurs (PR) dont il en existe deux types: les cônes et les bâtonnets, constituent la CNE. Ils sont responsables de la transduction du stimulus lumineux en un signal nerveux. L’information électrique est ensuite transmise aux cellules bipolaires (CB). La transmission de cet influx à travers la rétine est modulée par les cellules horizontales et les cellules amacrines. Les noyaux des cellules bipolaires, horizontales et amacrines participent à la couche nucléaire interne (CNI). Et enfin l’information est transmise à la couche des cellules ganglionnaires (CCG), dont les axones se regroupent pour former le nerf optique (NO). Entre ces couches cellulaires, se trouvent deux couches acellulaires, la couche plexiforme externe (CPE) et la couche plexiforme interne (CPI). Elles contiennent les capillaires sanguins irrigant la rétine interne. La CPE se trouve entre la CNE et la CNI qui est composée des synapses et fibres que les CB forment avec les cellules horizontales (CH) et les PR. La CPI est située entre la CCG et la CNI qui est composée de toutes les synapses et fibres que les CB forment avec les cellules amacrines et les cellules ganglionnaires.

Photorécepteurs

Bien que ces deux types de PR se distinguent par la forme de leurs segments externes (SE) (conique pour les cônes et cylindrique pour les bâtonnets), ils ont néanmoins une structure similaire (Figure. 3).

Ils possèdent tous les deux une partie distale, le SE, adjacent à l’épithélium pigmentaire et qui contient toute la machinerie de phototransduction et des photopigments qui absorbent la lumière et génèrent des modifications de potentiel de membrane des PR. Ce segment est continuellement renouvelé grâce à un équilibre entre la phagocytose (par l’EPR) et la croissance (au niveau du cil connecteur). Ce cil connecteur relie le SE au segment interne (SI). Dans le SI, on retrouve les organites (mitochondries qui sont indispensables à la production d’énergie par la synthèse d’adénosine triphosphates (ATP), l’appareil de golgi et le réticulum endoplasmique). Les noyaux des PR confèrent son épaisseur à la CNE et l’extrémité interne des PR donne naissance aux prolongements synaptiques qui s’articulent avec les CB ou les CH.

Bâtonnets
L’homme possède 120 millions de bâtonnets (Shichi, 1999) qui sont sensibles aux basses intensités lumineuses. Les bâtonnets présentent un long SE cylindrique avec de nombreux disques (empilement de 700 à 1100 disques) enchâssés dans le cytoplasme de la cellule, les rendant sensibles à la lumière (Figure. 3). Ils sont responsables de la vision nocturne, périphérique et des formes (vision scotopique).

Cônes
Les cônes représentent 5 à 10% (environ 6,5 millions) (Shichi, 1999) des cellules photoréceptrices. Dans le cas des cônes, les disques des cônes sont formés par le repliement de la membrane plasmique et ont un SE plus court que les bâtonnets (Figure. 3). Ils sont responsables de la vision diurne et de la vision des couleurs (vision photopique).

Phototransduction
La phototransduction est l’ensemble des réactions aboutissant à la transformation du signal lumineux en signal électrique par les PR grâce aux photopigments contenus dans les disques de leurs SE. Les photopigments des PR sont constitués par l’association d’une opsine, protéine à 7 domaines transmembranaires et d’un chromophore, le 11-cis-retinal (qui est un dérivé de la vitamine A). A l’obscurité, les PR sont maintenus en constante dépolarisation (- 40 mV) par l’ouverture des canaux cationiques (sodiques et calciques) qui sont dépendants de la concentration intracellulaire de GMPc (se lient aux canaux cationiques membranaires des SE et les maintiennent ouverts). Cet état de dépolarisation induit une libération permanente de neurotransmetteur (le glutamate) au niveau des terminaisons synaptiques avec les CB (Purves, 2001). Les bâtonnets sont des récepteurs monochromatiques qui ne contiennent qu’un seul type de pigment visuel: la rhodopsine, qui présente un pic de sensibilité des photons à une longueur d’onde de 496 nm. Les cônes possèdent des pigments sensibles à des longueurs d’onde différentes permettant la vision des couleurs. Ainsi chez l’homme, les cônes bleus ou S (10% des cônes) sont principalement activés par une longueur d’onde vers 420 nm, les cônes verts ou M (30% des cônes) autour de 530 nm et les cônes rouges ou L (60% des cônes) vers 560 nm. Cette disposition est appelée vision trichromatique. Lorsqu’un photon arrive au niveau des PR, cela induit l’isomérisation du 11-cis-retinal en tout-trans retinal. Cette dernière permet l’activation d’une protéine appartenant à la famille des protéines G, la transducine, qui à son tour va activer une phosphodiestérase (PDE) associée à la membrane. Cette PDE va ensuite hydrolyser le GMPc (qui s’accumule en absence de lumière), ce qui entraine une fermeture des canaux cationiques situés au niveau des SE. La fermeture de ces canaux mène à une hyperpolarisation membranaire des PR et à l’arrêt de libération du glutamate au niveau des synapses (Figure. 4).

Différences régionales dans la rétine

Un des points essentiels concernant la physiologie de la vision repose sur la distribution des PR dans la rétine (Figure. 5). En effet, les bâtonnets sont majoritairement présents au niveau de la périphérie de la rétine alors que les cônes sont principalement situés dans la macula (Figure. 5A). La rétine de l’homme possède une macula (environ 2 mm de diamètre) qui est située au centre de la rétine dans l’axe optique, proche du nerf optique et qui est responsable de la vision fine. Au centre de la macula se trouve la fovéa (de 1 mm2 ) (Figure. 5B). Elle est caractérisée par la présence d’une petite dépression au milieu, la fovéa centralis (ou foveola) constituée exclusivement de cônes (150 000 mm2 ) (Jonas et al., 1992) qui est le point focal postérieur du système optique avec la meilleure acuité visuelle (Figure. 5B). Au niveau de la fovéa, il existe une différence de convergence des signaux émanant des PR. La convergence moyenne en périphérie est de 60 bâtonnets sur une même cellule ganglionnaire, ce qui résulte en une plus grande sensibilité à la lumière. Alors qu’au niveau de la fovéola, le nombre de cellules ganglionnaires est quasiment similaire au nombre de cônes, ce qui augmente fortement le nombre d’informations détaillées reçues par le cerveau et améliore la résolution de l’image qui s’y forme. De plus, les vaisseaux sanguins et les couches internes de la rétine (CCG, CNI) sont décalés vers la périphérie pour éviter la perte de l’acuité visuelle liée à la traversée de ces couches. Ainsi les rayons lumineux atteignent directement les cônes (Figure. 5C).

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Table des matières

INTRODUCTION
I- Anatomie et fonction de l’œil
1-1 Le segment antérieur
1-2 Le segment postérieur
1-2-1 La rétine neurale
1-2-1-1 Photorécepteurs
1-2-1-1-1 Bâtonnets
1-2-1-1-2 Cônes
1-2-1-1-3 Phototransduction
1-2-1-1-4 Différences régionales dans la rétine
1-2-1-2 Les cellules bipolaires
1-2-1-3 Les cellules horizontales
1-2-1-4 Les cellules amacrines
1-2-1-5 Les cellules ganglionnaires
1-2-1-6 Les cellules gliales
1-2-1-6-1 Les astrocytes
1-2-1-6-2 Les cellules gliales de Müller
1-2-1-6-3 Les cellules microgliales
1-2-2 L’épithélium pigmentaire rétinien
1-2-2-1 Généralités
1-2-2-2 Fonctions de l’EPR
1-2-3 Les réseaux vasculaires
1-2-3-1 Le réseau vasculaire rétinien
1-2-3-2 Le système vasculaire choroïdien
II- DMLA
2-1 Généralités
2-2 Epidémiologie
2-3 MLA
2-4 DMLA
2-4-1 La forme exsudative
2-4-2 La forme atrophique
2-4-3 Facteurs de risques
2-4-3-1 Facteurs environnementaux
2-4-3-2 Facteurs génétiques
III- Le système des phagocytes mononucléés
3-1 La famille des chimiokines
3-1-1 Classification
3-1-2 Les récepteurs chimiokines
3-1-3 Interactions Chimiokine-Récepteur
3-1-4 Implication de CCL2/CCR2 et CX3CL1/CX3CR1 dans les pathologies
3-1-4-1 L’axe CX3CL1/CX3CR1
3-1-4-2 Axe CCL2/CCR2
3-2 Les phagocytes mononucléés
3-2-1 Les Monocytes
3-2-1-1 Les monocytes humains
3-2-1-1-1 Les monocytes CD14++CD16-: les monocytes « classiques »
3-2-1-1-2 Les monocytes CD14+CD16++: les monocytes non classiques
3-2-1-1-3 Les monocytes CD14++CD16+: les monocytes intermédiaires
3-2-1-2 Les monocytes murins
3-2-1-2-1 Les monocytes inflammatoires (classiques)
3-2-1-2-2 Les monocytes résidents (non classiques)
3-2-2 Différenciation des monocytes en macrophages
3-2-2-1 Les macrophages M1
3-2-2-2 Les macrophages M2
3-2-2-3 Lien entre les Mo et les Mp
3-2-3 Microglies
3-2-3-1 Origines
3-2-3-2 Principales fonctions
3-2-3-3 Activation des CM (à long terme)
IV- DMLA et inflammation
4-1 Privilège immun de l’œil
4-1-1 Barriere hémato-rétinienne
4-1-2 Facteurs cellulaires et moléculaires
4-2 Inflammation dans la DMLA
4-2-1 Les changements biologiques et histologiques
4-2-2 Drusen
4-2-3 Le complément
4-2-4 Marqueurs plasmatiques
4-2-5 Inflammation sous-rétinienne
4-2-6 Modèles d’inflammation sous-rétinienne
4-2-6-1 Modèle de souris Abca4-/- Rdh8-/-
4-2-6-2 Modèle de souris immunisées par du carboxyethylpyrrole (CEP)
4-2-6-3 Modèle de souris Ccr2-/- , Ccl2-/- , Ccl2-/- Cx3cr1-/- (Crb1rd8/rd8)
4-2-6-4 Modèle de souris Cx3cr1-/-
V- P2RX7, Inflammasome NLRP3 et IL-1β 64
5-1 Le récepteur P2X7
5-1-1 Généralités
5-1-2 Le récepteur P2X7 (P2RX7)
5-1-3 Fonctions
5-1-4 Implication du P2RX7 dans les pathologies neuro-dégénératives
5-2 Inflammasome NLRP3
5-2-1 Structure NLRP3
5-2-2 L’activation
5-2-3 Régulation de l’inflammasome NLRP3
5-2-4 Inflammasome NLRP3 et pathologies rétiniennes
5-3 Interleukine-1
5-3-1 IL-1α
5-3-2 IL-1Ra
5-3-3 IL-1β
5-4-3-1 Synthèse
5-4-3-2 Sécrétion
5-4-3-3 Implication de l’IL-1β dans la neuro-dégénérescence
5-3-4 Les récepteurs de l’IL-1
CONCLUSION

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