Analyses géochimiques et pétrographiques de nouvelles roches-mères du Jurassique supérieur

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Géologie du Liban

Le Liban est situé au Nord-Ouest de la plateforme arabique, à l’Est du bassin levantin. Il est constitué de deux chaines montagneuses, le Mont-Liban à l’Ouest du pays, et le Mont Anti-Liban à l’Est, séparées par la vallée de la Békaa. Le Liban est traversé par plusieurs failles majeures orientées NNE-SSO, prolongements de la faille de la Mer Morte.
La figure I. 4 décrit la lithostratigraphie du pays. Selon la description lithostratigraphique de Nader (2014 a) dans son ouvrage sur la géologie du Liban, les plus anciennes formations connues au Liban datent du Jurassique inférieur. La plateforme carbonatée du Jurassique (Formation de Kesrouane) correspond à 1300 m de carbonates dolomitisés déposés dans un contexte de mer chaude peu profonde. Elle est suivie de 180 m de dépôts volcaniques, de la marne et des carbonates du Kimméridgien (Noujaim Clark et Bou Dagher-Fadel, 2001), puis d’un maximum de 60 m de calcaire micritique à rognons de silex, richement fossilifère et indiquant des dépôts récifaux ou de mer chaude peu profonde du Tithonien inférieur (Toland, 2000). La fin du Jurassique, la Formation de Bikfaya, est marquée par une transgression marneuse du Tithonien inférieur à moyen (Granier et al., 2016).
Le Crétacé commence par une épaisseur variable (maximum de 200 m) de calcaire oolithique ferrugineux, de marne, d’argile et de grès d’âge Valanginien inférieur (Granier et al., 2016), c’est l’alloformation de Salima. L’alloformation du Grès du Liban (détaillée plus loin), d’âge Barrémien inférieur, est caractérisée par des dépôts fluvio-deltaïques et lacustres d’épaisseur variable (Granier et al., 2016). Par la suite, un repère stratigraphique s’étend sur tout le pays, formé de calcaire micritique et découlant d’une transgression marine d’âge Barrémien supérieur – Aptien inférieur, c’est l’étage régional du Jezzinien (Maksoud et al., 2014). La transgression marine continue durant la mise en place de la Formation de Hammana de l’Albien et s’accompagne parfois de dépôts argileux, de la marne, de cinérites, de laminites, de calcaire oolithique et de grès. La plateforme carbonatée du Cénomanien – Turonien est épaisse de 1000 m (Formation de Sannine). Au cours du Crétacé supérieur se déposent du calcaire, des dolomites à rognons de silex et des marnes bien laminées. La fin du Crétacé (l’alloformation de Chekka d’âge Campanien, Maastrichtien) et le début du Paléogène sont marqués par 600 m de marne crayeuse.
Au cours de l’Eocène, les dépôts de mer chaude peu profonde font leur retour avec des calcaires à Nummulites et des calcaires à silex. Le Miocène, est caractérisé par des dépôts marins (calcaire massif), récifaux et lacustres (marne et conglomérats alluvionnaires). Par contre, le Pliocène est caractérisé par des dépôts continentaux et des dépôts marins (marne, argile, calcaire crayeux) avec des intrusions de basalte. Le tout est surmonté de sable, d’argile et de formations volcaniques quaternaires (Nader, 2014 a). Des niveaux riches en matière organique se trouvent dans la Formation de Bikfaya, dans le Grès du Liban et dans la Formation de Hammana. En plus, du bitume est rencontré dans la Formation de Chekka (Connan et Nissenbaum, 2004).

L’alloformation du Grès du Liban

Le Liban parait comme une entité carbonatée, traversée d’une couche gréseuse marquant le début du Crétacé. Ces grès ont été longtemps considérés comme azoïques, mais en fait, ils constituent, avec les couches à poissons du Crétacé supérieur, l’une des formations les plus riches en fossiles au Liban puisqu’ils contiennent les faciès à dysodile étudiés ici.
Le Grès du Liban appartient à une unité fluvio-deltaïque bien répandue dans la plateforme arabique, et reconnue sous différents noms dans la région. Ainsi c’est le Palmyra/Rutbah Sandstone en Syrie, le Kurnub Sandstone en Israel et en Jordanie, le Nubian Sandstone en Lybie, et le Zubair Formation en Iraq et en Kuwait. Il est admis que ces grès proviennent de l’érosion de grès carbonifères et permiens (Nader, 2014 a), d’où les ressemblances au niveau de la minéralogie et des faciès (Massaad, 1976) entre le Grès du Liban et le grès nubien de la Jordanie (même âge, stratification horizontale régulière, alternances de grès et de laminites, environnements de dépôt continental, fluvio-deltaïque, lagunaire et estuarien, présence de rutile, zircon et tourmaline…) Cette unité gréseuse s’étend sur 1/20ème de la surface du pays, mais son épaisseur est variable, passant de quelques mètres au Nord du Liban, jusqu’à un maximum de 300 mètres au Sud du Liban (Dubertret, 1950). Elle est comprise entre les couches calcaires du Jurassique supérieur et celles du Jezzinien.
À la base de la formation, se trouvent des roches volcaniques et des argiles provenant de l’altération volcanique (Tixier 1971-1972). Ces roches volcaniques sont representées par du basalte et des tuffs volcaniques (Bellos, 2008). Dans le Grès de base, sont intercalés différents types de grès ; mal trié et anguleux d’origine fluviatile, modérément trié d’origine fluviatile ou dunaire, et bien trié et arrondi d’origine éolienne (Bellos, 2008). En plus, on trouve de l’argile, des nodules de fer (Bellos, 2008), du lignite, des laminites, de l’ambre extrêmement riche en fossiles et du basalte (Massaad, 1976 ; Azar et al., 2010). Dans ces niveaux se trouvent des plantes fossiles, des dents de poissons, des gastéropodes, des fragments d’ostracodes et des os de dinosaures (Heybrock et Dubertret, 1945 ; Buffetaut et al., 2006). Selon Blankenhorn (1927), les bois fossiles et les impressions de feuilles retrouvés dans les lignites, sont rattachés aux genres Weichselia, Credneria et Pleuropholis.
L’âge, la stratigraphie et les environnements de dépôt du Grès du Liban ont varié au fil des travaux géologiques. Douvillé (1910) et Zumoffen (1926) ont utilisé la nomination Grès lignitifère pour indiquer la richesse en lignite des lits argileux et sableux qui s’étendent du Crétacé basal jusqu’à l’Aptien. Day (1930) décrit un environnement marécageux (à cause des débris de bois), des dunes de sable et vallées d’argile formées par l’érosion des anticlinales qui existaient au moment. Selon Dubertret (1955) la limite supérieure du Grès est marquée par l’arrivée des couches à fossiles marins et il le considère donc comme ayant un âge Néocomien. La présence de montmorillonite et de kaolinite dans la région de Jezzine, est à l’appui d’une érosion rapide et importante (Tixier, 1971-1972). Massaad (1976) considère que les conditions de dépôt des grès ont varié entre fluvio-deltaïques et plaines submergées, entrainant ainsi le remaniement des sables, la décantation de l’argile et de laminites. Alors que l’accumulation de la matière organique dans les eaux stagnantes a formé les lignites. Des hypothèses plus récentes refusent que les grès soient la fossilisation d’un dépôt fluviatile, et considèrent que l’instabilité du substratum met en place des cuvettes qui retiennent l’eau, à l’intérieur desquelles la vie est influencée par l’assèchement, les intoxications magmatiques et les blooms microbiens. Et c’est au sommet de la formation que les grès se déposent dans un système fluviatile (Veltz, 2008).
Des études micropaléontologiques, biostratigraphiques et lithostratigraphiques récentes (Granier et al., 2016 ; Maksoud et al., 2017) ont permis de mieux comprendre le Grès du Liban. Ainsi il est marin à sa base puis surmonté d’une série de carbonates lacustres riches en charophytes (Ascidiella reticulata, Atopochara trivolvis var. triquetra, Clavator ampullaceus, C. delteus, Sphaerochara asema et Charaxis martinclosasi) qui constitue un passage latéral de faciès avec les grès (Granier et al., 2015). La présence des foraminifères Balkania balkhanica Mamotova 1996 dans les grès, permet d’attribuer un âge Barrémien inférieur à ces niveaux-là (Granier et al., 2016).

Jdaydet Bkessine

Le site de Jdaydet Bkessine se situe à proximité de la route menant vers Ouadi Jezzine au Sud du Liban (N 33˚33’24.23’’, E 35˚34’47.64’’, 713 m, Fig. II. 7a).
Trois échantillons de dysodiles ont été prélevés de Jdaydet Bkessine, JB1, JB2 et JB3. Ce sont des feuillets qui se séparent facilement et sont exceptionnellement riches en fossiles. Le banc de dysodiles qui affleure en bord de route est de 90 cm d’épaisseur (Fig. II. 7b), intercalé entre une trentaine de mètres de dépôts gréseux et argileux (Fig. II. 7c). A cause de la mauvaise qualité de l’affleurement et de sa discontinuité, le lever du log semblait inutile.
Veltz (2008) a pu décrire et lever un log de ces couches à dysodiles dans un affleurement situé à une vingtaine de mètres au Nord-Est de notre gisement (N 33˚33’27.34’’, E 35˚34’59.17’’). Selon elle, les schistes cartons d’à peu près 2,5 m d’épaisseur sont riches en poissons et ostracodes, reposent sur une vingtaine de mètres d’épaisseur d’une formation volcanique, renferment par endroits des nodules carbonatés, et sont surmontés de petits bancs argileux à quartz.

Zehalta

Le site de Zehalta se situe au Sud du Liban (N 33˚30’36’’, E 35˚32’24’’, 900 m, Fig. II. 8), à 3 km au Sud du site de Snyya. Lors de ma première visite, le site était complet et affleurait en bordure de route (Fig. II. 11). Mais au cours de la mission d’échantillonnage visant le lever de log en mai 2017, cet affleurement était rendu inaccessible derrière un mur de construction. Deux échantillons Z1 et Z2 de dysodiles bien feuilletés ont été utilisés pour les analyses. La même succession de couches et les mêmes faciès trouvés à Snyya sont repérables dans ce gisement, ce qui pourrait attester d’une continuité entre les deux gisements, ou la présence des mêmes conditions lors du dépôt..

Tomographie CT-scan

La tomographie permet une meilleure visualisation des fossiles et des caractères indispensables à la détermination des espèces. Pour cela, nous avons eu recours au CT-scan du laboratoire PalEvoPrim de l’Université de Poitiers.

Observation et identification

Autour de 600 poissons ont été découverts dans la totalité des sites d’échantillonnage (comm. pers. D. AZAR). Il faut signaler que la fréquence d’échantillonnage n’est pas la même dans tous les sites. Le plus grand nombre de fossiles provient du site de Jdaydet Bkessine, alors que le site de Qrayn montre une lacune dans le registre faunistique. On peut toutefois se demander si dans ce cas, cette absence est réelle ou bien est liée au fait que les conditions d’affleurement des dysodiles en ce site (en haut d’une paroi verticale) ne permettent pas une fouille extensive.
La préservation des poissons est différente d’un affleurement à l’autre, et y compris au sein du même affleurement à différents niveaux. La figure III. 14 illustre quelques exemples et compare les différents types de préservation. La plupart des poissons ont le squelette entier, articulé, et préservé avec les détails des nageoires. Les fossiles représentent des reliefs bien distincts sous une mince couche de sédiment. Lorsqu’on arrive à se débarrasser de cette couche, on peut voir qu’un nombre appréciable de spécimens conservent leur peau et leurs écailles. C’est surtout le cas des poissons de Tarchich qui possèdent tous ce type de préservation.
L’identification des poissons n’a pas atteint le niveau spécifique mais il est évident qu’une certaine diversité taxonomique peuplait ces environnements lacustres. Le tableau III. 1 dresse une liste des poissons identifiés dans les cinq sites.
Les coelacanthes sont connus depuis le Dévonien inférieur. La majorité des genres sont éteints à la fin du Crétacé supérieur, à l’exception du genre Latimeria encore vivant (Thompson, 1991). Les coelacanthes ont des nageoires charnues qui les rapprochent des tétrapodes. Au Liban, les seuls coelacanthes connus sont des espèces franchement marines du Crétacé supérieur (Gayet et al., 2003). Le spécimen trouvé dans les dysodiles est rapporté à la famille Mawsoniidae Schultze 1993, essentiellement continentale. Ils possèdent une bouche munie de petits denticules qui couvrent la partie interne de la mandibule et le palais, et une cavité bucco-branchiale volumineuse (Cavin, 2018). Cette structure buccale est caractéristique d’un mode d’alimentation par succion ou par filtration. De nombreux mawsoniidées sont trouvés dans le Crétacé inférieur du Brésil (Mawson & Woodward, 1907 ; Woodward, 1908 ; Yabumoto, 2008) et de l’Afrique, plus précisément en Egypte (Cavin, 2018) et au Maroc (Tabaste, 1963). Ainsi, le spécimen trouvé dans les dysodiles est le premier coelacanthe d’eau douce trouvé au Liban et dans la région.
L’infraclasse Palaeopterygii (Romano et al., 2016) regroupe plusieurs genres de poissons surtout marins avec de rares genres dulçaquicoles. Ce sont des poissons primitifs d’eau douce, diversifiés et endémiques de diverses régions du monde.
Les Acipenseriformes Berg 1940 sont actuellement les esturgeons Peipiaosteidae Liu & Zhou 1965, et les poissons-spatules Polyodontidae Bonaparte 1838. Ces poissons ont un squelette partiellement ossifié, et plutôt cartilagineux. Depuis le Crétacé inférieur, ces poissons ont une origine continentale. Une diversité de peipiaostéidés est observée en Chine, dans le biote de Jehol d’âge Crétacé inférieur (Cavin, 2018).
La famille Pleuropholidae Saint-Seine 1949 comprend surtout des poissons marins et quelques exceptions dulçaquicoles. Les genres décrits proviennent de l’Afrique centrale, de l’Amérique du Sud (Brésil et Argentine) et d’Espagne (Cavin, 2018). Ces poissons ont un âge Jurassique supérieur et Crétacé inférieur. Ils possèdent des écailles ganoïdes primitives (Schultze, 1996). Jusqu’à présent, les poissons trouvés dans les dysodiles, appartiennent au moins à 6 familles et 4 ordres (puisque les téléostéens n’ont pas été décrits en détail). Si on compare avec les poissons trouvés dans les principaux lagerstätten continentaux du Crétacé inférieur, on remarque que le biote de Jehol en Chine, contient 4 ordres et 6 familles (Zhou & Wang, 2010), la Santana Formation au Brésil renferment 30 espèces (Kellner & Campos, 1999), et Las Hoyas en Espagne contient 6 ordres et 16 genres (Poyato-Ariza & Martín-Abad, 2016). Ainsi la diversité de l’ichtyofaune trouvée dans les dysodiles du Liban peut être considérée comme énorme et exceptionnelle, d’autant plus que la taille des affleurements est limitée.

Mesures effectuées sur les poissons

Toutes les mesures n’ont pu être effectuées sur la totalité des spécimens, puisque certains ne sont pas complets, et d’autres conservent la peau qui cache la limite du squelette.
Les Pleuropholidés trouvés possèdent un squelette de longueur variable entre 7,1 et 7,5 cm, et une largeur de 2,2 cm. Le corps est couvert d’écailles cachant ainsi le squelette osseux. La tête est de 1,5 cm de long et de large, avec une bouche édentée. Les nageoires caractéristiques sont robustes à rayons ramifiés. Il est intéressant de signaler que les nageoires dorsales et anales sont symétriques chez certains spécimens (distance tête – nageoire est la même) alors que dans d’autres non.
Les autres téléostéens sont de petite taille, la hauteur maximale du corps correspond à la hauteur du crâne, la nageoire dorsale parait symétrique aux nageoires pelviennes, alors que la nageoire anale commence juste après la fin de la dorsale, et la nageoire caudale est homocerque. Parmi ces téléostéens on peut distinguer deux formes principales (Fig. III. 17) :
 T1 : le corps est mince et effilé et la tête est petite .
 T2 : le corps est large, la tête est grosse et les orbites oculaires occupent la majorité du crâne.

Premier enregistrement de la faune d’ostracodes non-marins provenant des dysodiles du Barrémien inférieur du Liban

La préservation des ostracodes, leur morphologie variable et leur vaste distribution écologique géographique et temporelle, font des ostracodes de bons indicateurs biostratigraphiques et paléoenvironnementaux (Horne & Siveter, 2016). De ce fait, cette partie présente les différentes espèces trouvées dans les dysodiles des différents sites et établie des comparaisons taphonomiques et biostratigraphiques afin de comprendre le paléoenvironnement de dépôt de ces roches exceptionnelles. L’étude des ostracodes est faite en collaboration aved le Prof. David J. Horne de la « Queen Mary University of London », et a abouti à un papier en cours de préparation.

Aspect environnemental

Ces palynomorphes indiquent une flore typique du Crétacé inférieur (Watson & Alvin, 1996). Les Classopollis sont présents dans toutes les coupes. Ils appartiennent à la famille des Cheirolepidiaceae qui regroupe des conifères xérophiles (Watson & Alvin, 1996 ; Traverse, 2007). Certaines espèces sont adaptées à vivre dans des environnements stressés (Alvin, 1982) et d’autres indiquent des milieux arides (Hunt, 1985). Ces Classopollis peuvent être isolés ou associés en diades, triades et tétrades (Conway, 1996). La forme isolée est principalement trouvée dans les échantillons indiquant ainsi le transport des grains de pollen d’un environnement plus sec, situé à proximité des lacs.
Les Araucariaceae sont des plantes qui tolèrent une humidité modérée ou équilibrée (Doyle et al., 1982 ; Kunzmann, 2007). Les Ephedraceae actuels vivent sous des climats arides à semi-arides (Srivastava, 1968) préférant alors les conditions de sécheresse.
Le bon développement des fougères nécessite de l’humidité (Hedlund, 1966). Ainsi, les fougères du Mésozoïque vivaient dans des milieux humides plutôt chauds, comme les marécages le long des rivières ou les sous-bois des forêts (Van Konijnenburg-Van Cittert, 2002). Cependant, l’aridité et la sécheresse (peut-être saisonnière) ne doivent pas être exclues, puisque la plupart des fougères productrices des spores identifiées, sont des fougères arborescentes tropicales adaptées à la sécheresse (Watson et Alvin, 1996 ; Schrank, 2010).

Aspect biostratigraphique

La coupe de Qrayn (Fig. III. 27), est dominée par les grains de pollen de gymnospermes, alors que les spores de fougères sont très faibles. Les Classopollis sont dominants dans tous les faciès avec des pourcentages supérieurs à 80 %. Les Araucariacites sont moins représentés et sont déformés et dégradés dans la plupart des cas. Ainsi, on peut conclure qu’il n’y a pas un vrai changement dans le type de végétation le long de la coupe de Qrayn.
A Tarchich et Snyya les palynomorphes sont plus diversifiés qu’à Qrayn. A Tarchich (Fig. III. 28), bien que le nombre de palynomorphes soit faible, les Classopollis ne sont dominants que dans un seul échantillon. Les Araucariacites ne figurent que dans un seul échantillon à la base des dysodiles. Alors que les spores de fougères sont variées, des Cicatricosisporites de tailles variables, différentes spores trilètes lisses (Deltoidospora et Matonisporites) et des Verrucosisporites. Ces spores sont de plus en plus dégradées et fragmentées dans les couches de dysodiles altérés. Il est intéressant de noter que les spores trilètes lisses sont présentes dans le niveau à cinérites, disparaissent totalement le long de la coupe, puis réapparaissent dans les niveaux supérieurs de dysodiles.
A Snyya (Fig. III. 29), le niveau le plus riche en palynomorphes correspond à des argiles à nodules. Un changement de taxons est décelé le long de la coupe. Les grains de pollen sont dominants dans les niveaux sous-jacents aux vrais dysodiles, avec Classopollis, Araucariacites, et Ephedripites (détecté dans un seul échantillon). Trois niveaux à dysodiles ont été analysés. Le premier, compris entre les argiles et les dysodiles-like, renferme un nombre appréciable de palynomorphes, parmi lesquels les Classopollis isolés sont dominants, puis les Araucariacites, et les spores trilètes lisses. Par contre, dans les deux autres faciès à dysodiles, le nombre total de palynomorphes est faible mais n’inclue que des spores. Contrairement aux autres sites, les spores trilètes lisses sont identifiées le long de la coupe et sont bien diversifiées (Deltoidospora, Matonisporites et Trilobosporites). Par ailleurs, les Cicatricosisporites n’apparaissent que dans ces couches de dysodiles au sommet de la coupe.
Dans de nombreuses études, la variation des palynomorphes était interprétée comme un changement dans le type de végétation, et par la suite comme un changement environnemental. A titre d’exemple, les assemblages de palynomorphes à Las Hoyas (de la Fuente & Zetter, 2016) a permis la distinction de trois microenvironnements, le premier irrigué en permanence caractérisé par des grains de pollen d’algues, des Classopollis en tétrades et peu de palynomorphes de grande taille. Le second est inondé continuellement ou temporairement, caractérisé par l’abondance d’algues, des spores de fougères, des grains de pollen de gymnospermes (surtout de Classopollis) et d’angiospermes. Le troisième est un environnement émergé soumis à un stress hydrique dans lequel les Classopollis sont dominants (plus que 80 %) et les spores de fougères sont peu abondantes. Egalement, l’étude palynologique effectuée sur des argiles du Crétacé inférieur de Jordanie (Ahmad et al., 2012), montre un changement dans la végétation qui révèle la transition d’un environnement plus humide vers un environnement plus aride.
Par conséquent, les trois affleurements de dysodiles ne corrèlent pas en terme de biostratigraphie. Le site de Qrayn situé au Nord du Liban, témoigne d’un environnement de dépôt distal dans lequel les grains de pollen sont dominants dans tous les échantillons. L’assemblage de palynomorphes contenant plus de 80 % de Classopollis et de rares spores indique probablement un environnement émergé soumis à un stress hydrique.
Par contre, au centre du Liban, à Tarchich, la dominance des spores de fougères indique un environnement proximal inondé puisque les fougères nécessitent de l’humidité même si celles-ci sont des espèces adaptées à la sécheresse. En outre, le site de Snyya au Sud du Liban laisse voir une transition d’un environnement sous stress hydrique avec une dominance de Classopollis, vers un environnement inondé, plus humide, favorable au développement des fougères. Par ailleurs, les spores trilètes lisses (surtout les Deltoïdospora) apparaissent dans tous les sites, alors que les Cicatricosisporites et les mégaspores (Matonisporites) n’apparaissent que dans Tarchich et dans les niveaux supérieurs de Snyya, indiquant vraisemblablement une préférence pour les milieux inondés. Ces interprétations ne peuvent être considérées qu’avec beaucoup de précaution à cause du faible nombre de palynomorphes détectés. Toutefois, des analyses palynologiques poussées sont nécessaires afin de confirmer notre interprétation.

Analyses géochimiques et pétrographiques de nouvelles roches-mères du Jurassique supérieur  et du Crétacé inférieur de l’onshore Liban

Récemment, les recherches sur le potentiel pétrolier libanais se sont accrues. Toutefois, elles se sont focalisées sur les roches-mères pétrolières contenant une MO d’origine marine sans prendre en considération les roches-mères contenant une MO d’origine continentale. Ainsi dans ce qui suit, nous avons vu l’intérêt d’étudier le potentiel pétrolier des faciès riches en MO du Jurassique supérieur et du Crétacé inférieur du Liban. Parmi ces faciès on site les dysodiles formés par la superposition de feuillets millimétriques faciles à séparer ; les dysodiles-like formés de feuillets plus compactes ; et les non-dysodiles qui ne contiennent pas de feuillets distinguables. Nous avons procédé en utilisant des analyses géochimiques (pyrolyse Rock-Eval et analyse élémentaire) des analyses optiques (palynofaciès et pétrographie organique) et des analyses moléculaires afin de vérifier l’origine de la MO contenue dans ces différents types de faciès, et d’évaluer leur potentiel pétrolier. Cette étude a fait l’objet d’un papier publié en février 2019 : EL HAJJ L., BAUDIN F., LITTKE R., NADER F.H., GEZE R., MAKSOUD S., AZAR D. (2019). – Geochemical and petrographic analyses of new petroleum source rocks from the Upper Jurassic and Lower Cretaceous of Lebanon. International Journal of Coal Geology. 204, 70 – 84.

Résultats moléculaires

Par la suite, des analyses moléculaires ont été effectuées afin de mieux caractériser ces niveaux exceptionnels. Les chromatogrammes représentatifs des fractions aliphatiques des dysodiles de chaque site sont illustrés dans la figure IV. 26.
La distribution des pics suit deux modèles, soit les n-alcanes sont répartis entre n-alcanes à chaines courtes (n-C12 – n-C20) et n-alcanes à chaines longues (n-C28 – n-C35). Les n-alcanes à chaines courtes dérivent d’une MO algaire ou planctonique (Cranwell et al., 1987; Peters et al., 2005), alors que les n-alcanes à chaines longues montrent un apport terrigène important, et une activité bactérienne (Peters et al., 2005). De plus, la concentration d’hopanes dans les dysodiles de Qrayn indique une origine bactérienne de la MO.
D’autre part, le pic de phytane est dominant dans les dysodiles de Qrayn alors que le pic de pristane domine dans les autres sites. La principale source de pristane et de phytane est le phytol qui se trouve dans la chlorophylle a (Tissot et Welte, 1984 ; Peters et al., 2005). L’anoxie du milieu de dépôt favorise la formation de phytane, alors que l’oxygénation permet la formation du pristane (Peters et al., 2005) (Fig. IV. 27).
Pour autant, la pristane peut provenir d’autres sources comme le zooplancton et les bactéries (Ten Haven et al., 1987). Ainsi, la dominance de pristane n’indique pas nécessairement un environnement oxique.

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Table des matières

Introduction
1. Définition des dysodiles
2. Etudes antérieures sur les dysodiles du Liban
3. Problématique
4. Objectifs de la thèse
5. Plan du manuscrit
Chapitre I : Contexte général
1. Etat d’art
1.1. Matière organique
1.1.1. Définition
1.1.2. Production de la matière organique
1.1.3. Composition de la matière organique
1.1.4. Evolution de la matière organique
1.1.5. Préservation exceptionnelle de la matière organique
1.2. Les Lacs
1.2.1. Définition
1.2.2. Types de lacs
1.2.3. Facteurs influençant la production à l’intérieur des lacs
1.2.3.1. Facteurs physiques
1.2.3.2. Facteurs chimiques
1.2.4. Faciès lacustres
1.2.5. Lacs fossiles
2. Zone d’étude
2.1. Géologie du Liban
2.2. L’alloformation du Grès du Liban
Chapitre II : Matériel et Méthodes
1. Matériel
1.1. Qrayn
1.2. Tarchich
1.3. Jdaydet Bkessine
1.4. Snyya
1.5. Zehalta
2. Méthodes
Chapitre III : Caractérisation paléontologique
1. Introduction
2. Les dysodiles : nouveau konservat-lagerstätte du Barrémien inférieur du Liban
Abstract
2.1. Introduction
2.2. Material and methods
2.2.1. Geological setting
2.2.2. Field observation and sampling
2.2.3. Methods for facies and palynofacies analysis
2.2.4. Methods for paleontological study
2.3. Results
2.3.1. Presentation of the dysodile localities
2.3.1.1. Qrayn
2.3.1.2. Tarchich
2.3.1.3. Jdaydet Bkessine
2.3.1.4. Snyya
2.3.1.5. Zehalta
2.3.2. Dysodiles main facies
2.3.3. Paleontological findings
2.3.3.1. Ichthyofauna
2.3.3.2. Chelonians
2.3.3.3. Insects
2.3.3.4. Gastropods
2.3.3.5. Ostracods
2.3.3.6. Plant debris
2.3.3.7. Palynomorphs
2.3.3.8. Coprolites
2.3.4. Taphonomy
2.4. Discussion
2.5. Conclusion
3. L’ichtyofaune fossile
3.1. Introduction
3.2. Analyses effectuées sur les poissons
3.2.1. Observations et mesures
3.2.2. Tomographie CT-scan
3.3. Résultats
3.3.1. Observation et identification
3.3.2. Mesures effectuées sur les poissons
4. Les ostracodes fossiles
4.1. Introduction
4.2. Premier enregistrement de la faune d’ostracodes non-marins provenant des dysodiles du Barrémien inférieur du Liban
Abstract
4.2.1. Introduction
4.2.2. Material and Methods
4.2.3. Results
4.2.3.1. Systematic paleontology
4.2.3.2. Taphonomy of ostracod assemblages
4.2.4. Discussion
4.2.4.1. Ostracod palaeoecology
4.2.4.2. Paleoenvironmental interpretation
4.2.4.2.1. Qrayn
4.2.4.2.2. Tarchich
4.2.4.2.3. Jdaydet Bkessine, Snyya, Zehalta
4.2.4.3. Questions revolving around the presence of the ostracods in the anoxic bottom
4.2.5. Conclusion
5. Les palynomorphes fossiles
5.1. Introduction
5.2. Résultats
5.3. Interprétation
5.3.1. Aspect environnemental
5.3.2. Aspect biostratigraphique
Chapitre IV : Caractérisation de la matière organique
1. Analyses géochimiques et pétrographiques de nouvelles roches-mères du Jurassique supérieur et du Crétacé inférieur de l’onshore Liban
1.1. Introduction
1.2. Geological setting
1.3. Material
1.4. Methods
1.4.1. Rock-Eval pyrolysis
1.4.2. Elemental analysis
1.4.3. Palynofacies analysis
1.4.4. Organic petrography
1.4.5. Molecular geochemistry
1.4.6. GC-FID
1.5. Results
1.5.1. Rock-Eval pyrolysis
1.5.2. Elemental analysis
1.5.3. Palynofacies analysis
1.5.4. Organic petrography
1.5.5. Molecular geochemistry
1.6. Discussion
1.6.1. Origin of the Organic matter
1.6.2. Petroleum potential and maturity
1.6.3. Comparison with other local and regional source rocks
1.7. Conclusion
2. Caractérisation géochimique des dysodiles dans leur contexte stratigraphique
2.1. Méthodes utilisées
2.1.1. Analyses géochimiques
2.1.2. Analyses optiques
2.1.3. Analyses moléculaires
2.2. Résultats et discussion
2.2.1. Résultats géochimiques
2.2.2. Résultats optiques
2.2.3. Résultats moléculaires
Chapitre V : Conclusion générale et perspectives
1. Conclusion générale
1.1. Aspect pétrolier
1.2. Aspect paléontologique
1.3. Aspect environnement de dépôt
2. Perspectives
Références
Liste des figures
Liste des tableaux
Annexes
Annexe 1 : Méthodes
1. Préparation des échantillons
1.1. Préparation des fossiles
1.1.1. Collection des macrofossiles
1.1.2. Extraction des ostracodes par acétolyse à chaud (laboratoire du CR2P)
1.2. Préparation des échantillons de roche brute (laboratoire ISTeP)
1.3. Isolement de la matière organique totale (laboratoire ISTeP)
2. Analyses géochimiques (laboratoire ISTeP)
2.1. Pyrolyse Rock-Eval
2.2. Analyse Elémentaire
2.3. Calcimétrie
3. Analyses optiques
3.1. Palynofaciès (laboratoire ISTeP)
3.2. Pétrographie organique (laboratoire LEK)
3.2.1. Préparation des sections polies
3.2.2. Mesure de la réflectance de la vitrinite
3.2.3. Analyse des macéraux
4. Analyses moléculaires
4.1. Analyse des GDGTs (laboratoire METIS)
4.1.1. Extraction
4.1.2. Fractionnement
4.1.3. Chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS)
4.2. Analyses GC-FID et GC-MS (laboratoire LEK)
4.2.1. Extraction
4.2.2. Changement du solvant
4.2.3. Déshydratation
4.2.4. Désulfurisation
4.2.4.1. Préparation du cuivre utilisé pour la désulfurisation
4.2.4.2. Désulfurisation de l’échantillon
4.2.5. Fractionnement
4.2.6. Chromatographie gazeuse couplée à un détecteur à ionisation de flamme (GC-FID)
4.2.7. Chromatographie gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (GC-MS) . 241
Annexe 2 : Résultats
Résultats de la pyrolyse Rock-Eval pour les échantillons associés aux dysodiles
Résultats de la pyrolyse Rock-Eval pour les échantillons de matière organique totale
Résultats de la calcimétrie
Résultats détaillés de l’analyse des palynofaciès effectuée sur les dysodiles et les faciès associés
Caractéristiques de la matière organique amorphe contenue dans les dysodiles et les faciès associés
Résultats de l’analyse pétrographique effectuée sur les dysodiles et les faciès associés par Kaï Hanke durant son stage de master
Annexe 3 : An exceptional ephemeropteran larva from the Lower Cretaceous dysodiles of Lebanon
Abstract
Introduction
1. Material and methods
3. Systematic palaeontology
4. Discussion
5. Conclusion

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