Analyses de l’alachlore et de deux de ses métabolites de biodégradation 

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Cibles biologiques potentielles des pesticides

En accord avec la définition de Butler (1978) (Boudou et Ribereyre 1997), « l’écotoxicolo-gie concerne les effets toxiques des agents chimiques et physiques sur les organismes vivants, spécialement sur les populations et les communautés à l’intérieur des écosystèmes ; ceci inclue les voies de transfert de ces polluants et leurs interactions avec l’environnement ».
Comme abordé au début de ce chapitre, les pesticides par différents moyens de dissipation se retrouvent dans les eaux de surface (Devault 2007). Ces molécules présentent donc une source de pollution potentielle pour ces milieux, notamment pour les organismes aquatiques qui ne sont pas la cible première de leur usage, avec des risques pour la santé humaine en ce qui concerne la potabilisation de l’eau (seuil fixé à 0,1 g.L 1 pour l’exemple de l’Eu-rope). Il a été répertorié un grand nombre d’effets directs ou indirects (Friberg-Jensen et al. 2003), positifs ou négatifs sur les organismes aquatiques à différents niveaux d’organisation biologique, des producteurs primaires (phytoplancton, biofilm phototrophe, macrophytes), aux prédateurs (poisson. . . ) en passant par les herbivores (zooplancton, poisson. . . ) (cf. les revues bibliographiques de DeLorenzo 2001, Relyea et Jason 2006 et Ricciardi et al. 2009). Les effets directs d’un polluant induisent habituellement une réduction de l’abondance de la part de l’organisme, alors que les effets indirects souvent mènent à une augmentation ou une diminution de l’abondance (cf. revue bibliographique de Fleegler et al. 2003). Fleegler et al. (2003) ont observé que les effets indirects sont prédominants. La figure 13 présente 4 exemples d’études écotoxicologiques qui ont évalué l’impact de pesticides au sein d’écosys-tèmes aquatiques. Ainsi, à terme, une pollution par des pesticides peut donc engendrer des changements à de plus grandes échelles, perte de la biodiversité par une sélection d’espèces ré-sistantes, homogénéisation des biotopes, prolifération d’espèces opportunistes… D’après ces 4 exemples, le compartiment des biofilms phototrophes (= périphyton) semble être un compar-timent clef dans l’évaluation de la toxicité d’un pesticide et son impact sur le fonctionnement d’un écosystème.

Interactions biofilms phototrophes-pesticides en mi- lieux lotique

L’importance des biofilms phototrophes en écotoxicologie

L’utilisation des biofilms phototrophes est largement préconisée dans l’évaluation de la toxicité d’un polluant (Sabater et al. 2007) au sein des systèmes lotiques (Figure 14) pour différentes raisons (cf. partie I, chapitre 1 Synthèse bibliographique). D’un point de vue écologique :
– Leur participation à une grande partie de la production primaire (Stevenson et al. 1996 ; Navarro et al. 2008), et leur participation aux cycles biogéochimiques (Battin et al. 2003a) ;
– La fraction microbienne des écosystèmes d’eau douce se trouve principalement sous une forme fixée (Pyl’nik et al. 2007) ;
– Son utilisation comme bio-indicateur de la qualité de l’eau (Coste et al. 2009) notam-ment pour des pollutions trophiques (Debenest 2007) ou des pollutions par les métaux (Morin 2006) ;
– Contrairement aux communautés du phytoplancton, les biofilms ne sont pas unique-ment contrôlés par des facteurs allogènes tels que la température, l’hydrodynamisme, l’intensité lumineuse, etc. . . , mais également par les interactions existantes au sein même de l’agrégat, liées à la dynamique temporelle du biofilm (facteurs autogènes) ;
– Le caractère sessile du biofilm fait qu’il n’est pas capable d’éviter le polluant (Sabater et Admiraal 2005).

L’impact des pesticides sur les biofilms autotrophes

Comment évaluer la réponse du biofilm phototrophe ?

Il existe de nombreux paramètres possibles pour évaluer l’impact d’un polluant sur les biofilms phototrophes, tout en intégrant les deux compartiments, algues et bactéries. Ces paramètres sont de deux types, les descripteurs structuraux et fonctionnels (Figure 15) (Sabater et al. 2007).
Choisir l’un ou l’autre de ces paramètres dépend de l’effet potentiel du polluant (réversible ou pas, phénomène de résilience, Culp et al. 2000) et de son mode d’action (Vinten et al. 2011) (pour les inhibiteurs de la photosynthèse comme le diuron ou l’isoproturon, la stratégie est de mesurer l’activité de la photosynthèse ou la production primaire). Les effets aigus sont souvent bien détectés par des paramètres physiologiques plus ou moins spécifiques (photosynthèse, activités enzymatiques…) alors que les effets persistants ou chroniques sont détectés par des paramètres plus structuraux comme les teneurs en chlorophylle a ou la composition en espèces (Sabater et al. 2007). Il a été montré que coupler des descripteurs structuraux et fonctionnels permettait au mieux d’évaluer les effets potentiels des pesticides (Foley et al. 2008 ; Lawrence et al. 2003 ; Montuelle et al. 2010).
Lors de leurs expériences écotoxicologiques, Ricart et al. (2009) ont montré que cer-tains paramètres répondent mieux aux pesticides, tels que la chlorophylle a et l’activité photosynthétique (capacité et efficacité) particulièrement pour les herbicides inhibiteurs de la photosynthèse. Il est important de considérer la sensibilité de chaque paramètre mesuré. Par exemple les descripteurs de biomasse comme exprimés en termes de matière sèche sans cendre ne sont pas toujours considérés comme de très bons indicateurs de la qualité chimique de l’eau (Montuelle et al. 2010). Ces descripteurs sont très influencés par les conditions hy-drodynamiques et l’intensité lumineuse (Villeneuve et al. 2010).
De même, les méthodes de typage moléculaire telles que la DGGE et T-RFLP intègrent uniquement les taxons les plus dominants de la communauté bactérienne avec une part asso-ciée à des taxons d’Eucaryotes pour les couples d’amorces choisies dans cette étude (Lyautey et al. 2005b ; Cole et al. 2009). Pour les paramètres basés sur des méthodes de culture (Biolog), il est important de se rappeler que seulement 1 % des espèces bactériennes sont cultivables (Amann et al. 1995).
Parmi les descripteurs structuraux utilisés durant les expériences écotoxicologiques, nous pouvons citer l’évaluation de la biomasse (exemple, Noack et al. 2003 ; Roubeix et al. 2011a), l’analyse des pigments (e.g. Dorigo et Leboulanger 2001), l’épaisseur du biofilm (Lawrence et al. 2008), la composition, la structure, la forme de vie des diatomées, la forme de leur frus-tule et leur métabolisme… (Debenest et al. 2010), la structure des communautés Eucaryotes (DGGE 18S, Villeneuve et al. 2011c) et bactériennes (DGGE 16S, Pesce et al. 2009a ; T-RFLP 16S, Vercraene-Eairmal et al. 2010 ; FISH, Pesce et al. 2006 ; Grenni et al. 2009), et la composition des EPS (Lawrence et al. 2008 ; Ricart et al. 2009). Les descripteurs fonctionnels prennent en compte l’état physiologique des communautés comme la production bactérienne (Pesce 2006), la production primaire par une mesure de la photosynthèse (par exemple, Nys-tröm et al. 2000 ; Bérard et al. 2008 ; Tlili et al. 2008), les profils physiologiques au niveau des communautés (CLPP, Community Level Physiological Profil, Ecoplate, Foley et al. 2008), diverses activités enzymatiques (Ricart et al. 2009 ; Bonnineau et al. 2010), la présence ou non de gènes de dégradation de certains pesticides principalement utilisés pour le moment.

Chimiodynamique de l’alachlore

Comme souligné précédemment, l’alachlore une fois appliqué au sol va être soumis à une combinaison de processus (biotransformation, photodégradation, adsorption, volatilisa-tion. . . ) qui vont contrôler sa persistance, sa biodisponibilité au sein des écosystèmes aqua-tiques (eaux de surfaces ou souterraines) et sa toxicité sur les organismes (Stamper et Tuo-vinen 1998). Suivant les écosystèmes considérés (sols, eaux de surface ou eaux souterraines), le temps de demi-vie de l’alachlore varie (Tableau 4). La persistance de l’alachlore est plus grande dans les environnements les plus saturés (aquifères, Novick et al. 1986 ; Pothuluri et al. 1990 ; Cavalier et al. 1991), et la biotransformation de l’alachlore apparaît être généralement plus lente dans les eaux, peut être dû à un contenu plus faible en micro-organismes.
L’alachlore est considéré comme relativement mobile dans le sol. Albanis et al. (1998) considèrent que le pouvoir lessivable de l’alachlore au vu de ses propriétés est relativement faible sans pour autant être absent (Fava et al. 2000). La mobilisation augmente avec la quantité de matière organique et d’argile dans le sol (Guo et al. 1993). Weber et Peter (1982) observent une fixation du calcium dans l’argile avec les groupements carboxyles de l’alachlore. L’adsorption des chloroacétanilides augmente avec la diminution de la température. Le pH, à des valeurs inférieures à 7, a peu d’effet sur l’adsorption des chloroacétanilides, par contre pour des valeurs de pH supérieures, l’adsorption augmente, donc le lessivage diminue (Chesters et al. 1989).
La volatilisation dans le sol dépend de la pression de vapeur saturée, de la solubilité dans l’eau, du contenu en eau du sol, de la porosité, de la densité, des matières organiques, de la température, de la présence d’argile, de la vitesse du vent, de l’humidité, et de la précipitation (Chesters et al. 1989 ; Gish et al. 1995). L’alachlore, avec une constante de Henry de 1,3.10 6, est considéré comme peu volatile (Chesters et al. 1989). Toutefois, dans certaines conditions, les processus de volatilisation peuvent apparaitre au niveau du sol lorsque que celui-ci est humide et associé à un vent fort (Clay et al. 2004).
La biodégradation de l’alachlore a été détectée plusieurs fois dans le sol (Sun et al. 1990 ; Thurman et al. 1996 ; Rodriguez-Cruz et Lacorte 2005), bien que l’alachlore soit très peu minéralisé (Alkhabib et al. 2002). Des bactéries et des champignons isolés montrent une capacité à dégrader les chloroacétanilides (Sette et al. 2004). Cette biodégradation dépend à la fois de la concentration en herbicide, de la température du sol (Selim et al. 2002 ; Sette et al. 2004 ; Wang et al. 2009) et de la complexité de la communauté microbienne (Wang et al. 2008). Par exemple, Wang et al. (2008) observent qu’une température de 30˚C est la plus favorable.
La photodégradation n’est pas le mécanisme prédominant de la dissipation de l’alachlore du sol ou du milieu aquatique (Graham et al. 2000b ; Ryu et al. 2003). La dégradation par voie chimique dans le sol apparaît être un processus susceptible d’être significatif suivant les caractéristiques physico-chimiques du sol (Chesters et al. 1989). En ce qui concerne la pho-todégradation indirecte de la molécule (Miller et al. 2005), les matières organiques dissoutes, les teneurs en nitrates et le type d’eau sont des facteurs importants car ils absorbent la lu-mière (Bahena et al. 2006). Lors d’une étude réalisée par Chiron (2005), avec une solution de 4 mg.L 1 de substances humiques, la demi-vie de l’alachlore est de 84 à 150 minutes pour une irradiation d’intensité 550 W.m 1 et de spectre de 300 à 800 nm. Tissier et al. (2005) trouvent un temps de demi-vie de 2 heures à 239 jours pour l’alachlore.
De nombreux produits de dégradation biotiques ou abiotiques ont été mis en évidence (Chesters et al. 1989 ; Galassi et al. 1996 ; Stamper et Tuovinen 1998 ; Fava et al. 2000) dans le sol comme en milieu aquatique. Parmi les plus détectés, l’alachlore ESA (Ethane Sulfonic Acid) et OA (Oxanilic Acid) font l’objet de nombreuses études (par exemple Graham et al. 1999 ; Kalkhoff et al. 1998), et présentent des toxicités relativement faibles (Heydens et al. 2000). D’autres produits de dégradation des chloroacétanilides ont été montrés comme possédant une toxicité similaire voire supérieure aux molécules mères (Osano et al. 2002). Les OA et ESA métabolites résultent d’un enlèvement de l’atome de chlore associé à l’arrivée d’un groupe fonctionnel acide sulfonique (Figure 20). Généralement ces molécules métabolites sont plus stables, avec des poids moléculaires plus faibles que la molécule mère (alachlore = 270) ou très proche (ESA = 314) et sont oxydés, leur donnant une plus grande solubilité et un plus grand potentiel de lessivage (Potter et Carpenter 1995), ce qui explique leur présence dans les eaux de surface, parfois sous de plus fortes concentrations que l’alachlore (Kolpin et al. 1998 ; Kalkhoff et al. 1998).

Contamination des eaux de surface par l’alachlore

L’alachlore appliqué à un sol, sera soit transporté vers les eaux souterraines par infil-tration, soit vers les eaux de surface (lotique et lentique) par ruissellement (Postle et al. 2001). Dans cette partie, nous nous focalisons uniquement sur la contamination des eaux de surface par l’alachlore. Le tableau 5 montre bien la répartition mondiale d’utilisation de l’alachlore. Dans la plupart des études, les auteurs n’enregistrent que de faibles concen-trations (< 30 g.L 1) dans les écosystèmes aquatiques d’eau douce. Différents paramètres, incluant la proximité entre le site d’application et l’eau de surface, le type de terrain et le sol, les pratiques agricoles, la pluviométrie, la période d’étude… peuvent expliquer ces écarts de concentrations inter et intra sites d’étude.
Parmi les produits de dégradation de l’alachlore (biotique ou abiotique), OA et ESA sont les plus recherchés (par exemple Thurman et al. 1996 ; Rebich et al. 2004 ; Sanchez-Camasano et al. 2005).

Impact de l’alachlore au sein des milieux aquatiques

Généralement le potentiel toxique d’un pesticide est évalué à partir de tests écotoxico-logiques le plus souvent monospécifiques et réalisés sur du cours terme. Lors de ces tests, la toxicité potentielle de la molécule est basée sur le calcul de l’EC50, correspondant à la concentration qui engendre 50 % d’inhibition des individus de la population. Comme nous le montre le tableau 6, de nombreux tests ont été réalisés afin d’évaluer la toxicité de l’ala-chlore sur des vertébrés, des invertébrés et des producteurs primaires. Parmi les producteurs primaires, les tests sont généralement utilisés sur les algues vertes (Scenedesmus et Chlorella) et beaucoup moins sur les cyanobactéries ou les diatomées. Ces données soulignent bien les différentes valeurs d’EC50 qui ont été enregistrées. La toxicité varie en fonction des espèces, mais également du design expérimental tels que la taille des microcosmes, la durée de l’expé-rience, la mesure de l’EC50 (chlorophylle a, nombre de cellules. . . ) et le groupe taxonomique de l’espèce (Pavlic et al. 2006). Par exemple pour des tests sur l’algue verte Scenedesmus capricornutum, Fairchild et al. (1998) observent des valeurs d’EC50 comprises entre 4 et 9 g.L 1alors que Pavlic et al. (2006) observent des valeurs comprises entre 12 et 15 g.L 1.
A notre connaissance, peu de données sont disponibles dans la littérature en ce qui concerne la toxicité des principaux produits de dégradation (OA et ESA). Bian et al. (2009) enregistraient une valeur d’EC50 (à 96 h) sur des espèces d’algues vertes de 0,019 à 0,037 g.L 1 pour l’alachlore contre des valeurs d’EC50 > 1000 g.L 1 pour ESA alachlore, sug-gérant une toxicité plus faible de la part du métabolite. Les quelques études à ce sujet suggèrent que ESA et OA alachlore sont moins toxiques que l’alachlore (Bian et al. 2009). Les métabolites des chloroacétanilides sont souvent considérés comme non mutagènes et non génotoxiques bien que certains ont été soulignés plus tératogènes que leurs molécules mères (Tessier et Clark 1995 ; Heydens et al. 2000).
Les valeurs d’EC50 mesurées sont souvent nettement supérieures aux concentrations en alachlore détectées dans les eaux de surface. Sur la base de ces tests standardisés monospé-cifiques, l’alachlore présente une toxicité chronique modérée pour les vertébrés et invertébrés aquatiques et globalement peu toxique pour les producteurs primaires (algues ou plantes) (US EPA 1997). Une étude réalisée dans un lac du Portugal a détecté des concentrations importantes d’alachlore dans des tissus de poissons, 0,16 et 0,08 .g.kg 1 de tissus de Mi-cropterus salmoides, en octobre 2004 et juin 2004, et 0,19 .g.kg 1 de tissus de Cyprinus carpio (Abrantes et al. 2010). Les différents habitats et stratégies d’alimentation peuvent expliquer les quantités différentes d’alachlore accumulées dans les tissus des deux espèces de poissons. M. salmoides est un poisson prédateur appartenant à des niveaux trophiques supérieurs. Dans un environnement aquatique, la présence de ces poissons contaminés peut engendrer des effets sur la santé humaine et des phénomènes de bioaccumulation d’un échelon à l’autre de la chaîne trophique.

L’alachlore et les biofilms phototrophes

Peu d’études se sont intéressées à l’impact de l’alachlore sur les biofilms phototrophes à l’échelle des communautés (Krieger et al. 1988 ; Spawn et al. 1997 ; Carder et Hoagland 1998…), en comparaison aux herbicides inhibiteurs de la photosynthèse (e.g. Debenest et al. 2009). De nombreux auteurs observent des dommages plus marqués de la part des inhibiteurs de la photosynthèse, comparés aux dommages engendrés par les herbicides de la famille des chloroacétanilides (exemple Debenest et al. 2009). Cette différence vient probablement des modes d’actions différents de ces deux types de famille et la fonction de détoxication des chloroacétanilides par les organismes via la GST. Globalement une exposition à des concen-trations importantes en alachlore (5 g.L 1) induit une réduction des teneurs en chlorophylle a, et de la densité algale (Carder et Hoagland 1998 ; Spawn et al. 1997). Pour des concentra-tions plus élevées (> 30 g.L 1), la composition algale peut être affectée (Carder et Hoagland 1998). Certaines espèces se présentent comme directement tolérantes à l’alachlore, c’est le cas de F. crotonensis (diatomée) ou de Chlorella vulgaris (algue verte), et d’autres semblent plus sensibles comme M. varians (diatomée) ou Cladophora glomerata (algue verte) (Carder et Hoagland 1998 ; Mohr et al. 2008). Mohr et al. (2008) suggéraient que la faible sensibilité de C. vulgaris à une exposition au métozachlore pouvait venir de sa faible quantité en acides gras à longues chaînes.
Vu les fortes similarités du mode d’action des chloroacétanilides, nous pouvons nous ba-ser sur les impacts engendrés par les autres chloroacétanilides sur les biofilms phototrophes. Noack et al. (2003) et Debenest et al. (2009) obervaient pour des concentrations de 5 et 30 g.L 1, que le métolachlore et le métazachlore engendrent des inhibitions de la croissance du biofilm illustrées par des teneurs en chlorophylle a plus faibles que les contrôles alors que Roubeix et al. 2011a n’observaient pas d’effet sur la biomasse pour des biofilms phototrophes exposés à 5 et 30 g.L 1 de métolachlore. Les impacts sur la composition taxonomique des diatomées ou des algues vertes sont espèces dépendantes, certaines espèces étant tolérantes (Melosira varians, Nitzschia dissipata et Cocconeis placentula), d’autres sensibles (Eolimna minima et Navicula reichardtiana). Certaines études ont pu montrer qu’à de fortes concen-trations en métolachlore (environ 30 g.L 1, il est possible d’observer des déformations de diatomées ou d’algues vertes (Liu et Xiong 2009 ; Roubeix et al. 2011a).
Il est important de rappeler le pouvoir adsorbant des biofilms vis-à-vis des métaux (Duong et al. 2011) mais également vis-à-vis des herbicides (Lawrence et al. 2001, pour l’atrazine), qui dépend du Koc du polluant (Junghans et al. 2003). Nous ne connaissons pas d’étude focalisée sur l’adsorption de l’alachlore par les biofilms phototrophes. Bohuss et al. (2005) observent seulement 1,3 % d’adsorption de l’acétolachlore par un biofilm. Il faut noter que cette adsorption est susceptible de modifier la toxicité de l’alachlore vis-à-vis du biofilm. En effet, la mobilité d’un herbicide dépend de sa distribution entre les phases liquide et solide, ce qui va également agir sur sa biodisponibilité.

Les arguments du choix de l’alachlore

L’ensemble de ce travail a été réalisé autour d’un chloroacétanilide, l’alachlore, pour dif-férentes raisons :
– Son mode d’action : l’alachlore est susceptible d’avoir des effets directs et indirects sur les bactéries et sur les algues de nos communautés au sein des biofilms phototrophes ;
– C’est une molécule souvent détectée dans les eaux de surface, certes le plus souvent à de faibles concentrations mais suivant une large répartition géographique. Ce qui peut poser des problèmes (i) écotoxicologiques pour les organismes aquatiques autochtones et (ii) de contamination de l’eau à potabiliser et des organismes aquatiques devenus impropres à la consommation .
– La présence des produits de dégradation notamment OA et ESA, détectés parfois en plus fortes concentrations .
– Les connaissances analytiques de nos collaborateurs .

Dispositifs de collecte des biofilms phototrophes

Dans le cadre de cette thèse, les biofilms phototrophes ayant colonisé des supports ar-tificiels ou naturels sont collectés sur les sites d’étude présentés ci-dessus. L’utilisation de supports artificiels s’est avérée très utile car le site M ne présentait aucun support naturel pour le développement de biofilms phototrophes. D’une manière plus générale, l’utilisation de substrats artificiels présente de nombreux autres avantages :
– faciliter les prélèvements in situ, le surfaçage des supports et leur transport jusqu’au laboratoire,
– maîtriser le temps de production des biofilms phototrophes et ainsi en connaître l’âge et le degré de maturation,
– limiter l’hétérogénéité intra-sites (Cattaneo et Amireault 1992).
La littérature rapporte de nombreux types de supports artificiels pour la production de biofilms phototrophes (Aloi 1990), le plus utilisé étant des lames de verre (par exemple Morin et al. 2008) que ce soit pour des études in situ (par exemple Dorigo et al. 2009 ; Duong et al. 2010) ou en laboratoire (par exemple Bonnineau et al. 2010) parfois sablées, (Sabater et al. 2002) ou dépolies (Dorigo et al. 2009) pour faciliter l’adhésion des micro-organismes. Il est également utilisé des tuiles en céramique (Smucker et al. 2009), en argile cuites (Belanger et al. 1996), des briques, plaques ou billes de polystyrène, des fils de nylon, des bouées de navigation (Vis et al. 1998), des substrats diffusant des nutriments (nutrient diffusive sub-strate) (Hoch 2008), des supports en polyéthylène (Szlauer-Lukaze 2007), en polypropylène (Jobger et al. 2005), en polycarbonate (Lawrence et al. 2000) et en polyuréthane (Boulêtreau et al. 2010). Généralement les supports artificiels sont très souvent utilisés pour disposer directement dans les micro/mésocosmes des supports préalablement colonisés par du biofilm phototrophe en milieu naturel (par exemple Pérès et al. 1996 ; Schmitt-Jansen et Altenburger 2005 ; Debenest et al. 2009).
Dans le cadre de notre étude, suivant l’utilisation des substrats collectés que nous en avons faite, pour des aspects pratiques, deux types de dispositifs de collecte associés à deux types de substrats ont été utilisés :
i) un premier dispositif de collecte (nommé « cagette ») adapté des dispositifs de Morin et al. (2008) et constitué de lames de verre (L x h : 244 x 78 mm) (Figure 26A) maintenues verticalement sur leur largeur par des baguettes à relier, et disposées à l’intérieur de cagettes en matière plastique ajourées (L x l x h : 400 mm x 300 mm x 100 mm ; volume : 12 L). Chaque cagette contient quatre lames de verre et est recouverte d’un grillage de maille 5 mm pour limiter l’accumulation de sédiments et de débris plus grossiers transportés par la colonne d’eau (Aloi 1990).
ii) un deuxième dispositif de collecte (nommé « coupons ») constitué de plaques en poly-éthylène à haute densité (PEHD 300) (L x l x h : 100 mm x 50 mm x 5 mm) fixées par des vis en inox sur des barres d’inox (Figure 26B). Ce dispositif contient 4 séries de 10 plaques placées en parallèle les unes par rapport aux autres.
Les lames de verre et les plaques en polyéthylène sont disposées de telle sorte qu’elles soient positionnées à la verticale de manière à limiter les dépôts sédimentaires, et parallèlement au courant pour reproduire sur leurs surfaces les vitesses de courant qui agissent sur le fond du cours d’eau. Ces dispositifs de collecte sont ainsi maintenus dans la colonne d’eau des sites d’échantillonnage à environ 10 cm en dessous de la surface (Figure 27), attachés par des ficelles soit aux arbres des berges soit à des piquets métalliques plantés dans les sédiments du fond. Ils sont entourés par un grillage de maille 5 mm de manière à limiter l’abrasion par l’accumulation de débris transportés par le courant (Figure 27).
A la fin de la période choisie de production des biofilms phototrophes sur les sites, les dispositifs sont prélevés et transportés au laboratoire dans des glacières en polystyrène (700 mm x 500 mm x 400 mm), disposés à l’intérieur de sacs poubelle hydratés.

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Table des matières

I Synthèse bibliographique
I Modèle biologique d’étude : les biofilms phototrophes de milieux lotiques 
I.1 Présentation
I.2 Le développement d’une entité structurelle et fonctionnelle dynamique
I.2.1 Les facteurs influant le développement des biofilms phototrophes
I.2.1.1 La lumière
I.2.1.2 Les teneurs en nutriments
I.2.1.3 Les conditions hydrodynamiques
I.2.1.4 La température
I.2.1.5 Les substrats de colonisation
I.2.1.6 Les facteurs biotiques
I.2.2 Le concept de succession écologique
I.2.2.1 Dynamique temporelle de la biomasse
I.2.2.2 Dynamique temporelle du compartiment algal
I.2.2.3 Dynamique temporelle du compartiment bactérien
I.3 Les biofilms phototrophes : compartiment fonctionnel clef des milieux lotiques
I.4 Les biofilms phototrophes : un outil pour la Directive Cadre Européenne ?
I.5 Les dispositifs d’investigation des biofilms phototrophes
II La problématique des pesticides dans l’environnement 
II.1 La contamination des milieux aquatiques par les pesticides : origines du problème
II.2 Impact des pesticides sur les organismes aquatiques en milieu lotique
II.2.1 Différentes approches utilisées en écotoxicologie
II.2.2 Cibles biologiques potentielles des pesticides
II.3 Interactions biofilms phototrophes-pesticides en milieux lotique
II.3.1 L’importance des biofilms phototrophes en écotoxicologie
II.3.2 L’impact des pesticides sur les biofilms autotrophes
II.3.2.1 Comment évaluer la réponse du biofilm phototrophe ?
III Etude de cas : l’alachlore 
III.1 Présentation de la molécule d’alachlore
III.2 Mode d’action de l’alachlore
III.3 Chimiodynamique de l’alachlore
III.4 Contamination des eaux de surface par l’alachlore
III.5 Impact de l’alachlore au sein des milieux aquatiques
III.6 L’alachlore et les biofilms phototrophes
III.7 Les arguments du choix de l’alachlore
II Matériel et Méthodes 
I Sites d’étude et stratégies d’échantillonnage 
I.1 Choix des sites
I.2 Présentation des sites
I.3 Caractéristiques physico-chimiques des stations
I.4 Dispositifs de collecte des biofilms phototrophes
II Stratégies d’approche expérimentale 
II.1 Approche expérimentale in situ
II.1.1 Objectif de l’étude
II.1.2 Déroulement de l’étude
II.2 Approches expérimentales en microcosmes
II.2.1 Capacité de biodégradation d’un herbicide par des suspensions de biofilms phototrophes
II.2.1.1 Objectif de l’expérience
II.2.1.2 Déroulement de l’expérience
II.2.2 Réponse des communautés microbiennes de biofilms phototrophes à une exposition à un herbicide
II.2.2.1 Objectif de l’expérience
II.2.2.2 Déroulement de l’expérience
II.2.3 Bioréacteurs annulaires rotatifs
II.2.3.1 Prototype de bioréacteur annulaire rotatif (RAB) à écoulement de type Taylor-Couette
II.2.3.1.1 Présentation et description générale
II.2.3.1.2 Choix des conditions expérimentales
II.2.3.1.2.1 Support de colonisation
II.2.3.1.2.2 Source lumineuse interne
II.2.3.1.2.3 Conditions hydrodynamiques
II.2.3.1.2.3.1 Distribution des temps de séjours
II.2.3.1.2.3.2 Simulations numériques de l’écoulement
II.2.3.1.2.4 Inoculum et eau d’alimentation
II.2.3.1.2.5 Entretien du bioréacteur : nettoyage complet et partiel
II.2.3.1.3 Validation de la capacité du bioréacteur à produire du biofilm phototrophe
II.2.3.1.3.1 Phase d’inoculation
II.2.3.1.3.2 Echantillonnage des coupons
II.2.3.1.3.3 Analyses physico-chimiques
II.2.3.1.4 Bioréacteur prototype RAB, une nourrice à biofilms phototrophes
II.2.3.1.4.1 Objectif de l’expérience
II.2.3.1.4.2 Déroulement de l’expérience
II.2.3.1.4.3 Mini-bioréacteurs annulaires rotatifs de laboratoire
II.2.3.1.4.3.1 Description
II.2.3.1.4.3.2 Objectif de l’expérience
II.2.3.1.4.3.3 Déroulement de l’expérience
III Volet analytique 
III.1 Analyses physico-chimiques
III.2 Analyse des pesticides
III.2.1 Analyses de l’alachlore et de deux de ses métabolites de biodégradation
III.2.2 Dosage des pesticides
III.3 Analyses biologiques des biofilms
III.3.1 Préparation des échantillons de biofilms
III.3.2 Descripteurs structurels
III.3.2.1 Descripteurs de biomasse
III.3.2.1.1 Matière sèche et matière sèche sans cendre
III.3.2.1.2 Chlorophylle a
III.3.2.1.3 Index autotrophique et ratio MSSC / MS
III.3.3 Analyse de la composition algale
III.3.4 Microscopie confocale à balayage laser
III.3.5 Structure des communautés bactériennes (DGGE et T-RFLP)
III.3.5.1 Préparation des échantillons
III.3.5.2 Extraction de l’ADN génomique total (ADNg)
III.3.5.3 Amplification par PCR
III.3.5.3.1 La T-RFLP
III.3.5.3.2 La DGGE
III.3.5.4 Exploitation et interprétation des profils
III.3.6 Descripteurs fonctionnels
III.3.6.1 Etat physiologique du biofilm
III.3.6.2 Productions bactériennes
III.3.6.3 Mesure de l’activité enzymatique de la GST
IV Analyses statistiques des données 
IV.1 Les analyses univariées
IV.2 Le calcul du temps de demi-vie de l’alachlore durant les expériences en microcosmes
IV.3 Les analyses multivariées
III Etudes expérimentales 
I Biodégradation d’un herbicide par des communautés bactériennes de biofilms phototrophes : approche expérimentale en microcosme 
I.1 Contexte de l’étude
I.2 Approche expérimentale
I.3 Principaux résultats et discussion
I.4 Résultats complémentaires à l’article 1
I.5 Conclusion et perspectives
I.6 Article 1
II Comment appréhender les facteurs qui contrôlent les successions écologiques des communautés microbiennes : cas des biofilms phototrophes 
II.1 Importance des facteurs allo- et autogènes sur les communautés bactériennes durant le développement de biofilms phototrophes
II.1.1 Contexte de l’étude
II.1.2 Approche expérimentale
II.1.3 Principaux résultats et discussion
II.1.4 Conclusion et perspectives
II.1.5 Article 2
II.2 Déterminisme autogène sur la structuration/dynamique des communautés microbiennes en bioréacteur
II.2.1 Contexte de l’étude
II.2.2 Approche expérimentale
II.2.3 Principaux résultats et discussion
II.2.4 Conclusion et perspectives
II.2.5 Article 3
II.3 Conclusions du chapitre
III Importance relative des facteurs allogènes et autogènes dans la réponse de biofilms phototrophes à un herbicide – différentes approches expérimentales en microcosmes 
III.1 Contexte scientifique
III.2 Influence de l’histoire sur la réponse structurelle et fonctionnelle de biofilms phototrophes post-exposés à l’alachlore
III.2.1 Approche expérimentale
III.2.2 Principaux résultats
III.2.3 Résultats complémentaires
III.2.4 Conclusion et perpectives
III.2.5 Article 4
III.3 Réponse du biofilm phototrophe à un herbicide durant ses premiers stades de développement
III.3.1 Approche expérimentale
III.3.2 Principaux résultats et discussion
III.3.3 Conclusion et perspectives
III.3.4 Article 5
III.4 Réponse du biofilm phototrophe à un herbicide selon son degré de maturation
III.4.1 Approche expérimentale
III.4.2 Principaux résultats et discussion
III.4.3 Conclusion et perspectives
III.4.4 Article 6
III.5 Conclusion et perspectives du chapitre 3
Conclusion générale et perpectives 
Les communautés microbiennes des biofilms phototrophes : modèle d’étude pour appréhender les relations entre diversité / structure et fonctionnement des écosystèmes
Intégrer l’écologie des communautés aux approches de l’écotoxicologie
Des approches expérimentales en microcosmes vers une stratégie d’approche in situ
Vers un modèle de bio-indication ?
Annexe
Bibliographie 

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