Analyse statistique des distributions des séries de bilans de masse des glaciers alpins et des calottes polaires de l’hémisphère nord

Les calottes de glace polaires et les glaciers des régions de montagne couvrent actuellement 10% de la superficie du globe et sont présents de l’équateur aux pôles (nord et sud) sur presque tous les continents (Paterson, 1994). Même si cette extension n’est plus que le tiers de celle atteinte pendant les périodes de grandes glaciations, la composante glace du système climatique terrestre n’en reste pas moins un élément essentiel de son fonctionnement puisque les régions glaciaires semblent très sensibles aux variations des autres composantes du système, comme les océans ou l’atmosphère (Barry, 1990).

L’une des caractéristiques majeures des glaciers est leur constante évolution au cours du temps, traduite par des fluctuations annuelles plus ou moins marquées. Ces fluctuations sont dues à des variations du climat local (vallée, massif montagneux) à proximité du glacier ainsi qu’à des changements plus globaux (continent, hémisphère) affectant leurs conditions d’alimentation. Les glaciers sont ainsi en quelques sortes des témoins privilégiés des fluctuations climatiques, des « archives » du climat, à la fois dans des régions proches de l’activité humaine mais aussi dans des régions souvent éloignées ou situées dans des gammes d’altitude où les relevés directs n’existent pas toujours. L’étude des glaciers et des calottes polaires permet de comprendre ces témoins du climat. L’observation des variations glaciaires passées et présentes permet de tirer des enregistrements du climat et de comprendre cette relation privilégiée qui les unit, que ce soit à l’échelle globale ou bien pour en suivre les différences régionales et locales.

Les conséquences les plus visibles des fluctuations glaciaires sont sûrement les variations de formes comme les variations de longueurs. Par exemple, le retrait des glaciers au cours des dix-neuvième et vingtième siècles semble être détectable un peu partout sur le globe, même si cette tendance à long terme masque de considérables variations à court terme qui ne sont pas uniformes pour tous les glaciers du globe (Haeberli et al., 1989 ; Oerlemans, 1994).

En revanche, bien que ces modifications de forme, de dynamique soient facilement discernables, elles n’en restent pas moins très fortement influencées par les caractéristiques mêmes du glacier. En effet, dans une région soumise aux mêmes changements climatiques, on observe des réponses très diverses des différents glaciers, avec des temps de réaction dépendant étroitement des morphologies (Reynaud et al., 2000). En revanche, les variations annuelles de volume des glaciers sont directement dépendantes des conditions climatiques annuelles (précipitations, températures, …). C’est pourquoi, le bilan de masse (qui représente pour chaque glacier, le gain ou la perte de masse annuel du glacier) est mesuré actuellement sur un certain nombre de glaciers du globe, et les séries temporelles vont de la simple année de mesure aux plus longues séries de 70 ans. L’intérêt du bilan de masse glaciaire pour apprécier les conséquences des variations du climat vient aussi du fait que ce paramètre est évalué sur des surfaces allant du demi km² (Sarennes) à plus de 80 km² pour Aletsch (ou même plus pour les calottes polaires), et non pas uniquement pour des stations ponctuelles. L’étude de ce bilan et de la distribution de ses changements dans le temps et dans l’espace forme donc un lien important dans la chaîne d’évènements reliant l’avance et le retrait des glaciers aux changements climatiques.

LA RECHERCHE EN GLACIOLOGIE

UN BREF APERÇU HISTORIQUE

L’attrait scientifique pour les glaciers ou les calottes de glace semble assez récent puisque l’on attribue réellement le développement de la glaciologie vers le milieu du dix-neuvième siècle. Avant cette période, il existe peu de récits sur des observations de glaciers. Dans les Alpes, qui semblent être le berceau des premières observations, les plus anciennes constatations scientifiques peuvent être attribuées à Horace Benedict de Saussure (1740-1799). Ce n’est qu’au milieu du dix-neuvième siècle que la glaciologie en tant que science (c’est à dire l’observation de phénomènes, le développement de théories et la vérification de ces lois) a vraiment vu le jour. Agassiz, vers 1850, bouleversa les opinions en développant la théorie des grandes glaciations et fut ainsi sûrement l’instigateur des premières mesures sur les glaciers (sur le glacier Unterrar en Suisse notamment) en popularisant largement ses idées.

Le développement de cette discipline nécessita la découverte de nouveaux horizons, depuis les profondes vallées alpines jusqu’aux bords du continent Antarctique. L’histoire de la glaciologie s’honore ainsi d’une galerie de portraits peu commune par les personnalités d’exception qu’elle rassemble, comme Agassiz ou Tyndall bien entendu, mais aussi Forel, Forbes, Althman ou encore Vallot dans les Alpes. A la conquête des pôles (Arctique et Antarctique) s’attachent les noms célèbres des grands explorateurs scientifiques comme Nansen, Wegener, Amundsen ou de Quervain. Chacun d’eux a contribué au développement de la glaciologie, en formulant les premières hypothèses, en développant de nouvelles théories ou en recueillant des observations que nous continuons à exploiter plus d’un siècle plus tard.

En plein essor avant la première guerre mondiale, la glaciologie « s’essouffle » jusqu’aux années 1950, se limitant à de simples relevés des glaciers (variations de fronts par exemple). La France est un cas particulier puisque les données, abondamment collectées par le service des Eaux et Forêts de 1907 à 1960, constituent ainsi des informations uniques qui permettent de décrire le comportement des glaciers sur de longues périodes. C’est ensuite grâce à l’intervention des physiciens, géophysiciens et ingénieurs que la glaciologie fut relancée notamment depuis la Décennie Hydrologique Internationale (1965-1975). Ainsi, en 1961, l’Assemblée Générale de l’Association Internationale d’Hydrologie Scientifique (AIHS), tenue à Helsinki, a insisté sur la nécessité d’entreprendre des travaux de recherche en glaciologie à l’échelle mondiale. La glaciologie devient alors une réelle science « d’état ». Elle occupe aujourd’hui une place parfois décisive dans les choix politiques et économiques mondiaux, grâce à la diversité de ses domaines de recherche.

DOMAINES DE RECHERCHE DE LA GLACIOLOGIE MODERNE

la recherche fondamentale en glaciologie

La glaciologie est l’étude de la glace naturelle sous toutes ses formes : glaces de glaciers, de calottes, de rivières, de lacs, de mers, étude de la neige, de la glace dans le sol, etc… Certaines études se développent également autour des cristaux de neige et de glace présents dans notre atmosphère. Cette composante glace du système Terre représente la cryosphère. Si l’on exclut les glaces de mers, de lacs ou de rivières, la cryosphère comprend les calottes polaires Arctiques (Groenland, Svalbard, Baffin Island…), le continent Antarctique, et aussi la multitude des petits glaciers présents sur tous les continents (exceptée l’Australie), répartis dans les différents massifs des Alpes, de la Scandinavie, des Rocheuses Américaines, de l’Asie Centrale, des Andes…Au même titre que l’atmosphère, la biosphère, la lithosphère ou l’océan, la cryosphère fait partie intégrante du système climatique : elle agit sur les différentes composantes et est influencée par ces dernières. Ces interactions glace – climat sont l’un des domaines de recherche de la glaciologie moderne.

Les interactions entre ces deux composantes sont très marquées. A travers l’histoire des changements climatiques de l’ère quaternaire (dite « ère glaciaire »), les variations des volumes de glace (notamment la présence plus ou moins étendue des calottes polaires) ont été l’un des phénomènes naturels les plus remarquables sur le globe. Des variations climatiques importantes (comme celles entre périodes glaciaires et interglaciaires ou des variations plus modérées comme le refroidissement observé sur la plupart des continents vers le milieu du dix-huitième siècle), jusqu’aux variations annuelles dues aux changements des régimes d’alimentation, des modifications de l’ensemble des systèmes glaciaires (de leur dimension, de leur forme ou de leur propriétés internes) ont continuellement lieu. Comprendre ce système climatique global et ses variations passées semble nécessaire pour mieux appréhender les rétroactions glace – climat. L’objectif de telles études est en réalité de prévoir les fluctuations futures du climat, en évaluant notamment l’éventuelle contribution des systèmes glaciaires à l’élévation du niveau des mers (Meier, 1984, Zuo et Oerlemans, 1997) ou les changements de végétation entre périodes glaciaires et interglaciaires (variations de l’albédo notamment) (par exemple, Kubatzki et al., 1998).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
Contexte général de l’étude
Etudes antérieures sur le sujet
Organisation de la thèse
CHAPITRE I – CONTEXTE HISTORIQUE ET SCIENTIFIQUE DE L’ETUDE, GENERALITES SUR LES GLACIERS ET LES CALOTTES POLAIRES
I.1 – INTRODUCTION
I.2 – LA RECHERCHE EN GLACIOLOGIE
I.2.1 Un bref aperçu historique
I.2.2 Domaines de recherche de la glaciologie moderne
I.2.2.1 la recherche fondamentale en glaciologie
I.2.2.2 aspects économiques et sociaux
I.3 – QUELQUES DEFINITIONS SUR LES GLACIERS ET LES CALOTTES DE GLACE
I.4 – CALOTTES POLAIRES ET GLACIERS COMME INDICATEURS CLIMATIQUES
I.4.1 Interactions climat – glacier
I.4.2 Le bilan de masse comme indicateur climatique
I.4.2.1 les différents indicateurs, choix d’une variable glaciaire
I.4.2.2 le bilan de masse glaciaire
I.5 – METHODES DE MESURE ET TRAITEMENTS STATISTIQUES DU BILAN
I.5.1 Différentes méthodes de mesure
I.5.1.1 la méthode cartographique ou volumétrique
I.5.1.2 la méthode hydrologique
I.5.1.3 l’application de l’équation de continuité
I.5.1.4 la méthode directe dite glaciologique
I.5.2 Mesures de terrain du bilan par la méthode glaciologique
I.5.2.1 la mesure du bilan annuel
I.5.2.2 le bilan hivernal
I.5.2.3 le bilan estival
I.5.2.4 systèmes de datation
I.5.2.5 erreurs de mesure
I.5.3 Traitements statistiques – le modèle linéaire de variation du bilan
I.5.3.1 échantillonnage des points de mesure
I.5.3.2 théorie du modèle linéaire de variations du bilan
I.5.3.3 intérêts du modèle linéaire
I.6 – CONCLUSION
CHAPITRE II – INVENTAIRE DES BILANS DE MASSE DES GLACIERS ET DES CALOTTES POLAIRES DE L’HEMISPHERE NORD
II.1 – INTRODUCTION
II.2 – LES GLACIERS DE L’HEMISPHERE NORD
II.2.1 Sélection des séries de bilans
II.2.2 Sélection des références bibliographiques
II.2.3 Présentation des séries retenues
II.2.4 Les glaciers des Alpes
II.2.4.1 situation géographique
II.2.4.2 méthodes de mesure
II.2.4.3 références bibliographiques
II.2.4.4 différences entre les diverses sources de bilans
II.2.4.5 présentation des données
II.2.5 Les glaciers Scandinaves
II.2.5.1 situation géographique
II.2.5.2 références bibliographiques
II.2.5.3 différences entre les diverses sources de bilans
II.2.5.4 présentation des données
II.2.6 Les glaciers nord-américains
II.2.6.1 situation géographique
II.2.6.2 méthodes de mesure
II.2.6.3 références bibliographiques
II.2.6.4 différences entre les diverses sources
II.2.6.5 présentation des données
II.2.7 Les glaciers de l’Arctique
II.2.7.1 localisation géographique
II.2.7.2 méthodes de mesure
II.2.7.3 différences entre les diverses sources de données
II.2.7.4 présentation des données
II.2.8 Les glaciers asiatiques
II.2.8.1 localisation géographique
II.2.8.2 méthodes de mesure
II.2.8.3 références bibliographiques
II.2.8.4 présentation des données
II.2.9 Longues séries de bilans reconstituées
II.2.10 Synthèse des données de l’hémisphère nord
II.3 – LA CALOTTE POLAIRE DU GROENLAND
II.3.1 Introduction
II.3.1 Un bref historique
II.3.2 Les sites et les mesures
II.3.3 La région sud de la calotte
II.3.3.1 Paakitsup Sermia
II.3.3.2 Glacier Russel
II.3.3.3 Qapiarfiup Sermia
II.3.3.4 1CE05025
II.3.3.5 Qamanârsûp Sermia
II.3.3.6 1CG14033
II.3.3.7 Nordbogletscher
II.3.3.8 Vahaltindegletcher
II.3.3.9 station de Dye 3
II.3.4 La région centre de la calotte
II.3.4.1 axe EGIG
II.3.4.2 la région de Summit
II.3.4.3 la région de Crête
II.3.5 Le nord de la calotte
II.3.5.1 l’expédition Party Cristal
II.3.5.2 Station de Site 2
II.3.5.3 site de Camp Century
II.3.5.4 sites de NASA-U et Humboldt
II.3.6 synthèse des données au Groenland
II.4 – CONCLUSION – SYNTHESE DES DONNEES DE BILANS
CHAPITRE III -ETUDE DE LA RELATION BILANS DE MASSE – CLIMAT A L’ECHELLE DU GLACIER, SUR QUELQUES CAS PARTICULIERS DE L’HEMISPHERE NORD
III.1 – INTRODUCTION
III.2 – PROPRIETES GENERALES DE DIFFERENTS GLACIERS
III.2.1 Introduction
III.2.2 Répartition du bilan en fonction de la latitude
III.2.3 Variations de la ligne d’équilibre avec la latitude 120
III.2.3.1 introduction
III.2.3.2 ligne d’équilibre sur différents glaciers
III.2.4 Conclusion
III.3 – EVOLUTION DES COMPOSANTES DU BILAN DE MASSE
III.3.1 Introduction
III.3.2 Les glaciers alpins
III.3.2.1 le glacier de Sarennes
III.3.2.2 le glacier de Vernagt
III.3.2.3 conclusion
III.3.3 Les glaciers scandinaves
III.3.3.1 évolution des paramètres du bilan
III.3.3.2 corrélation entre les différents paramètres
III.3.3.3 conclusion
III.3.4 Les glaciers asiatiques
III.3.3.1 évolution des paramètres du bilan
III.3.3.2 corrélation entre les différents paramètres
III.4.5 Conclusion
III.4 – VARIATIONS DU BILAN DE MASSE EN FONCTION DE L’ALTITUDE
III.4.1 Introduction
III.4.2 Généralités sur les bilans en fonction de l’altitude
III.4.3 Les glaciers des Alpes
III.4.4 Les glaciers Scandinaves
III.4.5 Les glaciers arctiques
III.4.6 Les glaciers du continent asiatique
III.4.7 Discussion sur les variations du bilan avec l’altitude
III.5 – DOMAINE DE VALIDITE ET LIMITES DU MODELE LINEAIRE DE VARIATION
III.5.1 Introduction
III.5.2 Evolution dans le temps
III.5.2 Différenciations des deux composantes du bilan
III.5.3 Différenciations spatiales
III.5.4 Tests du modèle linéaire
III.5.4.1 le glacier de Sarennes
III.5.4.2 le glacier Kesselwand
III.6 – CONCLUSION
CONCLUSIONS GENERALES

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