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Les ลufs
Sphรฉriques, ils mesurent 30 ร 50 micromรจtres et sont formรฉs de deux parties:
– L’embryophore: une รฉpaisse capsule externe rigide composรฉe d’รฉlรฉments ร sections orthogonales soudรฉs entre eux.
– L’oncosphรจre ou embryon hexacanthe interne qui porte trois paires de crochets et une glande bilobรฉe. Il est trรจs rรฉsistant et peut survivre au moins un an dans un milieu extรฉrieur humide. Sa rรฉsistance est infรฉrieure ร trois semaines dans un environnement sec ou par des tempรฉratures infรฉrieures ร -5ยฐC. Les ลufs sont libรฉrรฉs aprรจs rupture de l’anneau, dรฉtachรฉ du strobile. Ils sont alors ingรฉrรฉs par le porc, hรดte intermรฉdiaire, qui avale des anneaux gravides contenus dans les selles humaines. Les facteurs de dissรฉmination des ลufs dans la nature sont l’eau principalement, les vers de terre, les oiseaux ou encore les arthropodes.
La forme larvaire
La larve lorsqu’elle est dรฉveloppรฉe, forme une vรฉsicule opalescente de 6 ร 18 mm de long, remplie de liquide clair (aussi appelรฉ ยซ eau de roche ยป) oรน l’on trouve un protoscolex invaginรฉ, qui contient les mรชmes รฉlรฉments que ceux du tรฆnia adulte.
La larve n’est pas rigide et donc les pressions auxquelles elle est soumise (fonction de la localisation) modifient sa forme; allongรฉe dans les muscles et les mรฉninges, lenticulaire dans les tissus sous-cutanรฉs, sphรฉrique dans les ventricules cรฉrรฉbraux ou l’humeur vitrรฉe. Elle se prรฉsente ainsi macroscopiquement :
La larve peut se retrouver dans une enveloppe kystique; celle-ci est la rรฉsultante d’une rรฉaction de l’hรดte au parasite.
Au fil des mois et des annรฉes, elle รฉvolue vers la nรฉcrose et se calcifie. Le liquide clair se trouble. La cavitรฉ contient alors une substance anhiste รฉosinophile ou du tissu fibreux (collagรจne majoritaire). Le tissu conjonctif contient des granulations fines ou en amas.
La larve est sensible ร certaines circonstances: les tempรฉratures supรฉrieures ร 45ยฐC (mais elles peuvent rรฉsister si une piรจce de viande est insuffisamment cuite en son centre). Les tempรฉratures infรฉrieures ou รฉgale ร -10ยฐC pendant quatre jours (survie possible ร 0ยฐC au delร de 70 jours). Les larves sont insensibles au sel. Les kystes survivent ร la mort de l’hรดte pendant quatre semaines ร 20ยฐC (Chabasse et al., 2010)
Il existe deux sortes de cysticerques (Mark et al., 2005):
– Cysticercus cellulosae:
C’est la forme larvaire la plus commune, que l’on trouve au niveau du parenchyme cรฉrรฉbral dans la neurocysticercose, ainsi que dans tous les hรดtes de la larve et dans toutes les localisations tissulaires. Elle est constituรฉe d’une vรฉsicule unique, ovoรฏde ou arrondie, mesurant entre 0.5 et 1.5 cm, dont la paroi est รฉpaisse, รฉlastique et blanchรขtre. La vรฉsicule contient un scolex, visible ร l’ลil nu. Quand elle se localise au niveau ventriculaire ou sous-arachnoรฏdien, elle se caractรฉrise par une lรฉsion de grande taille, jusqu’ร 5 ou 10 cm de diamรจtre parfois.
– Cysticercus racemosus:
C’est une forme particuliรจre ร l’homme que l’on retrouve au niveau ventriculaire et surtout sous-arachnoรฏdien (au niveau des citernes de la base en particulier). Il s’agit de vรฉsicules volumineuses de 4 ร 12 cm de diamรจtre (20 cm exceptionnellement), multilobรฉes ยซย en grappe de raisinย ยป (Del Brutto et Sotelo, 1988). Sa membrane est d’รฉpaisseur variable. Cette forme correspondrait ร une forme dรฉgรฉnรฉrรฉe de Cysticercus cellulosae dans laquelle le scolex n’est pas macroscopiquement visible mais dont les dรฉbris peuvent histologiquement รชtre mis en รฉvidence.
Cysticercus racemosus est de mauvais pronostic car elle infiltre les tissus avoisinants, entraรฎnant des rรฉactions inflammatoires locales intenses ร l’origine de complications sรฉvรจres: leptomรฉningite, arachnoรฏdite, hydrocรฉphalie, infarctus cรฉrรฉbraux.
Il existe une troisiรจme forme intermรฉdiaire: elle se prรฉsente sous la forme d’une vรฉsicule plus grande que Cysticercus cellulosae, et est soit multilobรฉe, soit segmentรฉe. Le scolex est visible dans la vรฉsicule ou รฉvaginรฉ en dehors. Cette forme serait un stade de transformation entre les deux formes principales.
Cycles du parasite
Deux cycles distincts caractรฉrisent Taenia solium:
– Le cycle รฉvolutif qui permet la survie de l’espรจce:
Il fait appel ร un hรดte dรฉfinitif et un hรดte intermรฉdiaire.
L’hรดte dรฉfinitif est l’homme: son tube digestif abrite le ver adulte, qui se fixe par son scolex au niveau du jรฉjunum. Le parasite y trouve tous les nutriments utiles ร son dรฉveloppement. Les ลufs sont excrรฉtรฉs dans les selles de leur hรดte. C’est la tรฉniase humaine.
L’hรดte intermรฉdiaire est souvent le porc mais cela peut รชtre le chat, le chien, le rat, le lapin, le sanglier, la chรจvre, etc. Ils se contaminent en ingรฉrant des ลufs prรฉsents dans les selles humaines (aussi appelรฉ coprophagie) (Markell et al.,1992). L’embryon est libรฉrรฉ de l’embryophore sous l’action des enzymes digestives, et va pรฉnรฉtrer au niveau intestinal grรขce ร ses crochets et des enzymes. Au niveau sanguin, l’embryon migre alors jusqu’ร sa localisation terminale, oรน il se transforme en environ deux ou trois mois en cysticerque. Beaucoup sont dรฉtruits par le systรจme immunitaire de l’hรดte mais 60 ร 90 % survivent et provoquent une atteinte tissulaire. C’est la ladrerie ou cysticercose du porc (Houin et al., 1994).
Le plus frรฉquemment, l’homme se contamine en ingรฉrant de la viande de porc ladre.
Le cysticerque est alors digรฉrรฉ sauf le scolex qui se fixe au jรฉjunum pour donner naissance ร un tรฉnia adulte. Cela prend 5 ร 12 semaines. L’รฉlimination de proglottis gravides survient au minimum deux mois aprรจs lโingestion et pendant cet intervalle, l’examen parasitologique des selles se rรฉvรจle nรฉgatif. Les symptรดmes sont alors peu caractรฉristiques: anorexie, boulimie, douleurs รฉpigastriques, urticaire. Un tรฉnia adulte peut vivre 25 ans chez l’homme.
C’est un cycle indirect hรฉtรฉroxรจne du fait de la nรฉcessitรฉ d’un hรดte intermรฉdiaire.
– Le cycle accessoire qui engendre la cysticercose humaine:
L’homme remplace le porc dans le cycle parasitaire et devient alors hรดte intermรฉdiaire. C’est une impasse parasitaire, les larves ne pouvant arriver au stade adulte que par consommation de chair humaine.
Le cycle รฉvolutif de Taenia. solium peut se rรฉsumer ainsi :
Plusieurs modes de contaminations sont possibles:
– L’hรฉtรฉro-infestation par consommation d’aliments ou d’eau souillรฉe. C’est le cas majoritaire (Davis et Kornfeld, 1991).
– L’auto-infestation exogรจne qui est une contamination oro-fรฉcale par les ยซ mains sales ยป.
– L’auto-infestation endogรจne semble exceptionnelle. Elle consiste en la remontรฉe de proglottis des intestins vers l’estomac.
Les atteintes du systรจme nerveux central surviennent dans 60 ร 90 % des cas, c’est la neurocysticercose. Les localisations cรฉrรฉbrales et ophtalmiques majoritaires s’expliquent par la richesse capillaire et l’environnement immunitaire particulier. Seules le atteintes nerveuses et oculaires sont symptomatiques en gรฉnรฉral (Mark et al., 2005; Garcia et Del Brutto, 2000).
Les autres localisations sont le plus frรฉquemment musculaires (muscle striรฉ), sous-cutanรฉes, hรฉpatiques, pancrรฉatiques, pulmonaires, rรฉnales, etc.
รvolution du parasite
La larve vivante ne provoque que peu de rรฉaction immunitaire de la part de son l’hรดte: en effet elle dรฉveloppe des capacitรฉs de modulation immunologique pour รฉchapper ร son hรดte.
Par contre, lorsque la larve dรฉgรฉnรจre, une rรฉaction inflammatoire intense se produit, par libรฉration d’antigรจnes et par perte des pouvoirs d’immuno-modulation de la larve (Castillo, 2004).
Ces particularitรฉs physiologiques permettent d’expliquer la variabilitรฉ des expressions cliniques rencontrรฉes en fonction du stade d’รฉvolution du cysticerque.
Escobar a dรฉcrit quatre stades รฉvolutifs du cysticerque (Singhi et Singhi, 2004):
– Stade vรฉsiculaire (mรฉtacestode):
C’est la forme viable du kyste parasitaire. La larve s’implante dans un tissu puis รฉvolue en un kyste de 4 ร 20 mm contenant du liquide clair et le scolex fixรฉ ร une paroi. Ce cysticerque dรฉtourne le systรจme immunitaire de l’hรดte et peut ainsi rester des annรฉes vivant et asymptomatique. C’est une sorte de symbiose avec l’hรดte.
Aprรจs un ร cinq ans, il dรฉgรฉnรจre et perd ses facultรฉs immunosuppressives (ou bien l’inverse). Cela dรฉclenche une rรฉaction inflammatoire immuno-allergique de l’hรดte qui entraรฎne l’รฉvolution de la larve en trois autres stades successifs.
– Stade colloรฏdal ou dรฉgรฉnรฉrescence hyaline de la larve:
Le liquide kystique devient gรฉlatineux et il apparaรฎt un ลdรจme rรฉactionnel dans les tissus adjacents.
– Stade granulo-nodulaire:
Le kyste se rรฉtracte et ses parois sont remplacรฉes par des zones de nรฉcrose et des nodules lymphoรฏdes. L’ลdรจme pรฉri lรฉsionnel est toujours prรฉsent et peut aboutir ร une encรฉphalite cysticercosique quand un grand nombre de parasites dรฉgรฉnรจrent en mรชme temps; la rรฉaction inflammatoire est dรฉmultipliรฉe.
Le stade colloรฏdal et le stade granulo-nodulaire sont des stades de transition.
– Stade de calcification nodulaire:
A la mort du parasite, le tissu granuleux laisse place ร du collagรจne et des zones de calcification. Il peut s’รฉcouler trente ans avant d’atteindre ce stade. La lรฉsion s’estompe progressivement en totalitรฉ ou bien laisse une cicatrice calcifiรฉe (inactive).
La durรฉe des diffรฉrents stades est fonction de la rรฉaction inflammatoire et immunitaire de l’hรดte. Les rรฉactions inflammatoires dรฉclenchรฉes par le parasite seraient l’origine des manifestations et des complications de la maladie, plus que le parasite lui-mรชme.
La symbiose entre l’hรดte et les oncosphรจres (forme circulante dans le sang) puis entre l’hรดte et la larve au stade vรฉsiculaire, est permise par diffรฉrents mรฉcanismes qui dรฉvient ou suppriment la rรฉponse immunitaire de l’hรดte vis ร vis du parasite:
– La localisation des parasites dans des sites immunologiquement privilรฉgiรฉs: le cerveau et les yeux, favorisรฉe par une forte richesse capillaire.
– L’inhibition de l’activation du complรฉment par sรฉcrรฉtion d’une ยซย serine protease inhibitorย ยป ou tรฆniastatine, et de paramyosine. Cela inhibe la production de cytokines et interfรจre dans le chimiotactisme des leucocytes.
– La dissimulation des antigรจnes de surface du cysticerque par des immunoglobulines de l’hรดte.
– L’immunitรฉ concomitante: quand une infection antรฉrieure protรจge contre une nouvelle infection. Les cysticerques matures expriment des antigรจnes diffรฉrents des cysticerques en dรฉveloppement et la rรฉponse immunitaire est dirigรฉe non pas contre les formes matures mais contre les formes invasives.
– Le mimรฉtisme molรฉculaire: le parasite synthรฉtise des antigรจnes similaires ร ceux de l’hรดte.
– L’autoprotection anti oxydative (superoxyde dismutase)
– L’induction de la mort des neutrophiles locaux.
Epidรฉmiologie
La neurocysticercose est reconnue problรจme de santรฉ publique depuis quโau 20รจme siรจcle, des soldats britanniques stationnรฉs en Inde ont dรฉveloppรฉ des รฉpilepsies en rapport avec la neurocysticercose, deux ร cinq ans aprรจs leur retour en Angleterre (Andriantsimahavandy et al., 2003).
Elle est actuellement responsable de 50000 morts par an et on estime entre 20 et 50 millions le nombre de personnes infectรฉes dans le monde. Elle sรฉvit pour l’essentiel ร l’รฉtat endรฉmique dans les rรฉgions pauvres du globe oรน deux facteurs รฉpidรฉmiologiques essentiels sont rรฉunis:
– L’รฉlevage familial de porcs.
– le pรฉril fรฉcal (Castillo, 2004).
C’est le cas en Amรฉrique latine, au Mexique, en Inde, en Afrique sub-saharienne, en Asie du Sud-Est et en Chine. Madagascar serait l’un des pays les plus touchรฉs avec plus de 10
% de sa population atteinte (Scott, 2005). Ces estimations sont sans doute en deรงร de la rรฉalitรฉ, la neurocysticercose n’รฉtant pas toujours une expression clinique; une รฉtude de 2005 au Mexique montre que 10 ร 20 % de la population serait porteuse asymptomatique d’une ou plusieurs calcifications cรฉrรฉbrales dues ร la neurocysticercose (Singhi et Singhi, 2004 ; Del Brutto et al, 2005)
La neurocysticercose touche aussi bien les hommes que les femmes (Morales et al., 2000). Rarement dรฉcelรฉe avant 2 ans du fait de la longรฉvitรฉ des larves et du dรฉlai de calcification, la moyenne d’รขge de dรฉcouverte est entre 30 et 40 ans et rarement aprรจs 60 ans.
La frรฉquence de la tรฉniase adulte parmi les cas de cysticercose est relativement faible et ne plaide pas pour une contamination endogรจne ร l’origine de la cysticercose.
La consommation de vรฉgรฉtaux mal lavรฉs est la premiรจre cause de contamination dans le monde. Considรฉrรฉe comme une pathologie des gens pauvres du milieu rural, la neurocysticercose touche de plus en plus de gens des catรฉgories socio-รฉconomiques supรฉrieures (Ruiz-Garcia et al., 1997). Les flux migratoires expliquent ce phรฉnomรจne.
De plus, la neurocysticercose peut aussi toucher des patients sans facteur de risque. Elle touche des communautรฉs ne mangeant pas de porc car la contamination peut รชtre manu portรฉe (Wraige, 2003). Le diagnostic doit donc รชtre รฉvoquรฉ en cas de doute chez les personnes sans facteur de risque ou les enfants (Schantz et al., 1992).
Nรฉanmoins, la grande majoritรฉ des patients infectรฉs ont au moins un facteur de risque: mauvaises conditions sanitaires (eau souillรฉe, etc.), carence en matiรจre d’รฉducation sanitaire telle que se laver les mains rรฉguliรจrement, l’รฉpandage d’engrais humains qui contamine l’eau et les lรฉgumes ou certaines pratiques sexuelles.
Sur le plan gรฉographique, la cysticercose est ainsi ร l’รฉtat endรฉmique dans les pays en voie de dรฉveloppement ร une limite prรจs: les pays musulmans sont beaucoup moins touchรฉs; cela s’explique par le fait que la population porcine est faible compte tenu de l’interdit religieux concernant la consommation de porc.
Les pays industrialisรฉs n’ont eux pas encore totalement รฉradiquรฉ la cysticercose du fait des รฉchanges internationaux, commerciaux et humains.
Sur le continent amรฉricain, les zones dโendรฉmie sont le Mexique oรน la neurocysticercose est la premiรจre cause dโhypertension intracrรขnienne (HTIC); 3 ร 12 % de la population est porteur de cysticerques (Flisse et al., 2003). Les autres pays fortement touchรฉs par la neurocysticercose sur le continent amรฉricain sont le Brรฉsil, le Pรฉrou, lโArgentine, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, le Salvador, le Honduras, le Nicaragua, le Panama, lโEquateur, le Guatemala et le Vรฉnรฉzuela.
Sur le continent africain, les zones dโendรฉmie sont le Cameroun, le Congo, le Ghana, le Zaรฏre, le Sรฉnรฉgal, le Zimbabwe, la Rhodรฉsie, le Kenya, le Rwanda, LโAfrique du Sud, lโAngola.
En Asie, lโInde (2 ร 3 % de la population a une sรฉrologie positive), la Corรฉe, lโIndonรฉsie, lโIndochine et la Chine sont les zones dโendรฉmie.
En Europe, les cas sont plus sporadiques quโailleurs du fait de conditions sanitaires globalement meilleures quโailleurs et de contrรดles vรฉtรฉrinaires rรฉguliers voire obligatoires. Les zones les plus concernรฉes sont lโEurope de lโEst (Russie, Roumanie, Pologne, Yougoslavie, Hongrie) et la pรฉninsule ibรฉrique, sans รชtre considรฉrรฉes comme des zones endรฉmiques.
Nรฉanmoins, lโanalyse des donnรฉes nโest pas rassurante : le nombre de cas recensรฉs entre 1995 et 2012 a augmentรฉ par rapport ร la pรฉriode de 1970 ร 1994 en Europe de lโOuest (Del Brutto, 2012) et une part minoritaire de ces malades sont des cas autochtones (Anton Martinez et al., 2003), pour lesquels aucun facteur de risque nโest identifiรฉ. Lโanalyse de la littรฉrature montre sans รฉquivoque, quโen raison de lโaccroissement des phรฉnomรจnes migratoires, qui sโest considรฉrablement intensifiรฉ depuis 2014 et des voyages en zones dโendรฉmie, la neurocysticercose est en train de devenir un problรจme de santรฉ publique pour les pays ร revenu รฉlevรฉ, principalement dans les communautรฉs oรน les conditions dโhygiรจne sont prรฉcaires. Lโimmigration de porteurs de tรฉnias provenant de zones dโendรฉmie est la principale cause des cas autochtones observรฉs (Del Brutto, 2013)
De plus, la migration internationale nโest pas la seule qui affecte lโendรฉmicitรฉ de la cysticercose ; la migration interne peut aussi modifier les profils dโendรฉmicitรฉ au sein dโun mรชme pays dโendรฉmie. Les consรฉquences neurologiques de lโinfection cysticerquienne sont susceptibles de perdurer durant des annรฉes aprรจs la mort du parasite, et cela indรฉpendamment des migration des zones rurales vers les zones urbaines (Gonzales et al., 2015).
LโOcรฉanie est comme lโEurope relativement prรฉservรฉe.
Les รฎles de lโocรฉan indien nโรฉchappent pas au flรฉau, placรฉes entre lโAfrique et lโAsie : ร Madagascar, 19 % de la population aurait une sรฉrologie positive (Migliani, 2000). Lโรฎle de la Rรฉunion, lโรฎle Maurice et les Comores sont aussi touchรฉes.
Formes anatomopathologiques
Classification des neurocysticercoses
La pathogรฉnie de cette infection dรฉpend du stade รฉvolutif du ou des parasites, de leur localisation, de leur taille, de leur nombre et de lโimportance de la rรฉponse immunitaire de lโhรดte contre le parasite (Singhi et Singhi, 2004).
Dans les zones dโendรฉmie, cette pathologie est si frรฉquente que le diagnostic doit รชtre รฉvoquรฉ devant toute anomalie neurologique ou psychiatrique, telle quโune crise convulsive.
Le but des diffรฉrentes classifications est de mieux dรฉcrire les manifestations pour รฉtablir un diagnostic et adapter au mieux la thรฉrapeutique.
On peut classer la neurocysticercose selon :
– La localisation cรฉrรฉbrale du cysticerque : parenchymateuse ou extra parenchymateuse. Cโest la classification de rรฉfรฉrence.
– Le caractรจre actif ou asymptomatique de la lรฉsion avec :
. Les formes infectieuses actives (stade รฉvolutif nยฐ1 du kyste)
. Les formes de transition avec un parasite en dรฉgรฉnรฉrescence (stade 2 et 3)
. Les formes infectieuses inactives (stade 4)
– Le caractรจre aigu ou chronique : syndrome neurologique brutal associant convulsions, cรฉphalรฉes et HTIC aiguรซs. Dรฉveloppement dโune รฉpilepsie en chronique.
Nous utiliserons la classification de rรฉfรฉrence, la localisation du parasite pour dรฉcrire les diffรฉrentes formes de neurocysticercose.
Dโun point de vue macroscopique, la neurocysticercose se prรฉsente de diffรฉrentes faรงons :
– Un seul kyste, plus ou moins volumineux.
– De nombreux petits kystes, parfois des dizaines.
– Un kyste multi lobaire, en grappe, pouvant atteindre 20 cm dans les espaces pรฉricentraux.
– Des kystes calcifiรฉs.
Dโun point de vue microscopique, des lรฉsions associรฉes existent au contact du parasite par rรฉaction locale et ร distance par rรฉaction toxique.
Neurocysticercose intra-parenchymateuse
Cโest la neurocysticercose la plus frรฉquente (Davis et Kornfeld, 1991). Le parasite se loge le plus souvent au niveau du lobe pariรฉtal, mais aussi frontal ou occipital. Ces localisations sont probablement en rapport avec le mode de vascularisation cรฉrรฉbrale.
Les formes viables des kystes restent asymptomatiques longtemps et des signes cliniques nโapparaissent quโau moment de leur dรฉgรฉnรฉrescence. Il y a alors rupture de la paroi du kyste et libรฉration du contenu de la vรฉsicule, ce qui provoque la rรฉponse immunitaire et lโinflammation. Cela entraรฎne la formation dโun ลdรจme cรฉrรฉbral ร distance du kyste et la formation dโun tissu de granulation au contact du kyste.
Trois zones sโindividualisent alors autours du kyste : des cellules inflammatoires (lymphocytes, polynuclรฉaires รฉosinophiles et neutrophiles, macrophages) au contact, entourรฉes dโune fibrose mรชlรฉe de cellules mononuclรฉes, puis une zone de congestion.
Ensuite, le contenu du kyste se transforme en une masse amorphe, entourรฉe de cellules macrophagiques: cellules รฉpithรฉlioรฎdes et cellules gรฉantes, toutes deux entourรฉes dโune zone fibreuse, elle-mรชme cernรฉe de lymphocytes.
Le tissu pรฉri kystique subit une dรฉmyรฉlinisation, une dรฉgรฉnรฉrescence cellulaire et une prolifรฉration gliale.
A la fin, le kyste est remplacรฉ par le tissu glial et se calcifie. Lโลdรจme cรฉrรฉbral disparaรฎt et les cellules lรฉsรฉes ne se rรฉgรฉnรจrent pas.
Neurocysticercose extra-parenchymateuse
Elle se caractรฉrise par le dรฉveloppement de kystes parasitaires de grande taille (jusquโร 5 cm), entraรฎnant des complications mรฉcaniques obstructives. Elle peut aussi se rรฉvรฉler par le dรฉveloppement de formes racรฉmeuses (Cysticercus racemosus), au niveau sous-arachnoรฏdien principalement.
Cette forme est de moins bon pronostic en gรฉnรฉral et est rare chez lโenfant.
La neurocysticercose extra-parenchymateuse peut se localiser au niveau intra-ventriculaire, sous-arachnoรฏdien, spinal, intra sellaire, et ophtalmiques.
Neurocysticercose intra-ventriculaire
Elle peut concerner nโimporte quel ventricule mais dans plus de 50 % des cas, lโatteinte touche le quatriรจme ventricule, le troisiรจme ventricule dans environ 25 % des cas, puis les ventricules latรฉraux et lโaqueduc de Sylvius (Amaral et al., 2003). Cโest sans doute ร cause des lois de la gravitรฉ et du sens de circulation du liquide cรฉphalo-rachidien; les cysticerques sont souvent mobiles dans le LCR et peuvent ainsi migrer dโun ventricule ร un autre.
Cette forme est frรฉquemment associรฉe ร des localisations sous-arachnoรฏdiennes de neurocysticercose.
Dans cette atteinte, on trouve un kyste flottant ou ยซ pรฉdicule ยป dans lequel la larve est rarement vivante. Ce kyste peut obstruer les orifices du quatriรจme ventricule, entraรฎnant une hydrocรฉphalie (Del Brutto et Sotelo, 1988), de maniรจre transitoire ou dรฉfinitive.
La paroi ventriculaire est le siรจge dโune รฉpendymite granuleuse.
Neurocysticercose sous-arachnoรฏdienne
Cette forme se caractรฉrise par le dรฉveloppement de formes racรฉmeuses (Castillo, 2004), frรฉquemment au niveau des citernes de la base, dans la scissure de Sylvius.
Les kystes peuvent atteindre une taille de dix cm, voire plus car le dรฉveloppement nโest pas limitรฉ par la pression intracรฉrรฉbrale.
Il sโagit dโune mรฉningite plastique, souvent lardacรฉe, avec des cellules gรฉantes pรฉri vasculaires, entraรฎnant des รฉpendymites granulaires et des cytomรฉningites adhรฉsives. Cela provoque des complications obstructives (blocage de la circulation du LCR) et des complications cรฉrรฉbro-vasculaires (HTIC).
Lโoblitรฉration des vaisseaux engendre de petits foyers de ramollissement. Lโoblitรฉration de vaisseaux plus importants engendre de gros foyers, source de syndromes focaux, voire dโhรฉmiplรฉgie (Bronstein et Klotz, 2005).
Neurocysticercose spinale
Cโest une forme trรจs rare ; moins de 5 % des cas (Amaral, 2003).
Elle se situe souvent au niveau cervical ; les formes spinales pures sont exceptionnelles et il existe souvent une invasion parasitaire associรฉe, les citernes de la base par exemple (Aubry, 2004).
Les kystes se trouvent au niveau de lโespace extra mรฉdullaire, leptomรฉningรฉ. Ils sont le fait dโune extension de la neurocysticercose par les espaces sous-arachnoรฏdiens.
Il arrive que les kystes soient intra-mรฉdullaires et provoque une myรฉlopathie (myรฉline transverse).
Cysticercose intra sellaire
Cysticercose ophtalmique
Elles peuvent รชtre considรฉrรฉes comme une forme de neurocysticercose, que lโon retrouve dans 40 % des cas.
Le kyste peut se loger ร diffรฉrents endroits (Amaral et al., 2003) :
– Au niveau du globe oculaire le plus souvent, et dans le segment postรฉrieur (corps vitrรฉ, choroรฏde, rรฉtine, nerf optique). Les cysticerques passent par les vaisseaux choroรฏdiens pour se loger au niveau de la rรฉtine, puis du corps vitrรฉ. Ils prennent alors lโaspect dโun mรฉlanome. Rarement, ils vont au segment antรฉrieur (iris, chambre antรฉrieure).
– Au niveau des annexes de lโลil (paupiรจre, conjonctives, orbites)
– Au niveau des muscles extra oculaires : cette forme provoque une rรฉtractation du muscle palpรฉbral supรฉrieur oblique ou syndrome de Brown (Rao, 2003)
Cysticercose extra neurologique
Elles ne rentrent pas dans la classification des neurocysticercoses, mais doivent systรฉmatiquement faire lโobjet de recherches en raison de leur prรฉsence asymptomatique. On les trouve associรฉes chez 10 % des enfants et davantage chez lโadulte (Grill, 1996)
Les localisations sont :
– Musculaire : souvent asymptomatique, elle est associรฉe ร une hyperรฉosinophilie.
– Sous-cutanรฉe : sous la forme de kystes sur le tronc et le cou. Elle se prรฉsente sous lโaspect de nodules ยซ en grains de plomb ยป. On les trouve souvent chez lโadulte (50 % des cas) (Wortman, 1991), peu chez lโenfant (4 % des cas)
– Intra buccale : ยซ langue de cysticercose ยป chez le porc (Gonzales et al., 2005).
– Autres : reins, foie, pรฉritoine, pancrรฉas, thyroรฏde, et.
Histopathologie
Le parasite est pathogรจne par diffรฉrentes actions : mรฉcanique, inflammatoire, toxique et immuno-allergique.
Lโhistopathologie dรฉpend de lโรฉtat du parasite: vivant, dรฉgรฉnรฉrescent ou mort.
Le parasite vivant
Le parasite vivant est pathogรจne essentiellement par action mรฉcanique.
Il peut induire :
– Une compression et/ou une irritation des neurones (cause de symptรดmes dรฉficitaires รฉventuels)
– Une compression et/ou une irritation corticale (cause dโรฉpilepsie)
– Une obstruction des voies de passage du liquide cรฉphalo-rachidien (hydrocรฉphalie, HTIC)
Il peut provoquer รฉgalement une rรฉaction inflammatoire pรฉri lรฉsionnelle; souvent de faible intensitรฉ, elle peut toucher :
– Les zones juxta corticales (cause dโรฉpilepsie)
– Les zones parenchymateuses (cause dโลdรจme cรฉrรฉbral)
– Les voies nerveuses
– Les ventricules (lรฉsions รฉpendymaires : รฉpendymite granuleuse)
La larve dรฉgรฉnรฉrescente
Actions toxiques, immuno-allergiques et inflammatoires
La dรฉgรฉnรฉrescence se rรฉalise par des rรฉactions toxiques, immuno allergiques et inflammatoires entraรฎnant la nรฉcrose et la calcification du cysticerque.
Il y a en premier lieu รฉvolution de la larve et transformation du tissu pรฉri kystique immรฉdiat. Pour des raisons mรฉconnues, le parasite dรฉgรฉnรจre en dรฉbutant par la dรฉsintรฉgration de la paroi vรฉsiculaire de la couche externe vers la couche rรฉticulo-fibrillaire ; la paroi perd alors ses propriรฉtรฉs osmorรฉgulatrices et le volume du kyste augmente. Ce phรฉnomรจne sโaccompagne dโune rรฉaction immuno-allergique et inflammatoire due vraisemblablement ร la libรฉration de toxines parasitaires. Ses rรฉactions aboutissent ร la formation dโun tissu de granulation au contact du kyste.
Ce tissu de granulation a trois zones :
– Zone de congestion interne avec des cellules รฉpithรฉlioรฏdes, polynuclรฉaires neutrophiles et macrophages chargรฉs de graisse.
– Une coque fibreuse mรฉdiane avec des cellules mononuclรฉes.
– Zone inflammatoire polymorphe externe avec des capillaires contenant lymphocytes, polynuclรฉaires neutrophiles et รฉosinophiles.
Le contenu du kyste se trouble au fur et ร mesure. Le parasite et la paroi vรฉsiculaire se nรฉcrosent puis se dรฉsintรจgrent dans le liquide vรฉsiculaire. A ce moment, la cavitรฉ du kyste contient une substance anhiste trรจs รฉosinophile, ou du tissu fibreux (collagรจne) avec des granulations calciques.
Dans les muscles, la dรฉgรฉnรฉrescence autour des kystes est fibreuse ; dans le tissu nerveux, cโest une dรฉgรฉnรฉrescence gliale.
En fin de processus, la dรฉgรฉnรฉrescence gliale se poursuit et le tissu glial remplace le kyste (tissu fibreux pour les muscles) ou bien le kyste se calcifie. La rรฉaction inflammatoire disparaรฎt alors. La calcification des kystes cรฉrรฉbraux intervient aprรจs un dรฉlai dโau moins cinq ans gรฉnรฉralement.
Au voisinage et ร distance du kyste se dรฉveloppent des lรฉsions, dont lโลdรจme cรฉrรฉbral, de diffรฉrents types :
– Lรฉsions mรฉningรฉes : ou lรฉsions inflammatoires de lโarachnoรฏde, importante au voisinage des kystes, et plus marquรฉes dans la forme racรฉmeuse.
– Lรฉsions vasculaires : elles touchent les artรจres de petit et moyen calibre ; รฉgalement plus importantes au voisinage des kystes. Ses lรฉsions causent une infiltration de lโadventice, un รฉpaississement et une sclรฉrose de la mรฉdia et une prolifรฉration de lโendoartรจre. La consรฉquence peut รชtre une endoartรฉrite oblitรฉrante avec ramollissement cรฉrรฉbral ; des thromboses sont aussi possibles. Une atteinte des veines est possible mais plus rare.
– Lรฉsion รฉpendymaire.
– Atteinte neuronale par la nocivitรฉ des toxines parasitaires
– Lรฉsions neurologiques: gliose rรฉactionnelle ou rรฉaction dรฉgรฉnรฉrative.
Au niveau des tissus musculaires et sous-cutanรฉs, les lรฉsions de voisinage sont peu ou pas symptomatiques et souvent sans consรฉquence majeure, sauf au niveau cardiaque (hypertrophie).
Action mรฉcanique
La dรฉgรฉnรฉrescence larvaire sโeffectue aussi par des actions mรฉcaniques : un effet de masse peut sโobserver par lโassociation de lโaugmentation du volume du kyste et de la rรฉaction inflammatoire pรฉri lรฉsionnelle. La compression et/ou lโirritation induite peuvent entraรฎner un syndrome dรฉficitaire ou des crises dโรฉpilepsies.
Le parasite mort, calcifiรฉ ou stade cicatriciel
Le pouvoir pathogรจne peut subsister par :
– Les rรฉactions mรฉcaniques : elles compriment ou dรฉtruisent le parenchyme cรฉrรฉbral par une hydrocรฉphalie permanente. Elles irritent les zones juxta corticales qui forment des foyers รฉpileptogรจnes.
– Les rรฉactions inflammatoires sรฉquellaires : arachnoรฏdite et fibrose mรฉningรฉe.
Les phรฉnomรจnes immunologiques dans la relation hรดte-parasite
Il semble que le parasite soit capable dโรฉchapper au contrรดle immunitaire de lโhรดte, notamment par la variation antigรฉnique et le mimรฉtisme molรฉculaire. Il dรฉveloppe ร sa surface des composants peu diffรฉrents de ceux du systรจme immunitaire de lโhรดte.
Taenia solium synthรฉtise par exemple la glutathion peroxydase (ou GPo), qui inhibe les radicaux peroxydes libรฉrรฉs par les cellules inflammatoires. Cette enzyme est dรฉtectรฉe en western blot sur du sรฉrum et du LCR issu de patients atteints de cysticercose. Lโexamen est nรฉgatif chez les patients sains (Flisser et al., 1991).
Autre exemple, les cestodes synthรฉtisent de lโacide sialique sur leur paroi. Cette enzyme bloque la rรฉaction de fixation de la protรฉine C3b du complรฉment empรชchant le dรฉclenchement de la cytotoxicitรฉ molรฉculaire due au complรฉment.
Cependant, la compรฉtence immunitaire de lโhรดte semble nรฉcessaire au contrรดle de lโinfection. Une baisse de lโimmunitรฉ favorise lโinfection cysticerquienne. Cette infection peut รชtre opportuniste chez les patients sous immunosuppresseurs ou infectรฉs par le VIH et atteints de SIDA.
Peu dโinformations existent sur la rรฉaction immunitaire au cours de la cysticercose humaine; on sait nรฉanmoins que les anticorps spรฉcifiques sont surtout des immunoglobulines de classe IgG. Leur augmentation lors de la lyse des cysticerques est plus importante dans le LCR, ce qui plaide pour une sรฉcrรฉtion intrathรฉcale dโIgG spรฉcifiques.
Des protรฉines de lโoncosphรจre ont รฉtรฉ utilisรฉes comme antigรจne-cibles chez de petits ruminants pour la mise au point dโun vaccin vรฉtรฉrinaire contre la cysticercose ovine (Taenia ovis). Ce vaccin est utilisรฉ chez le mouton.
Clinique
Lโexpression clinique de la cysticercose est trรจs variรฉe et entre autres facteurs vus prรฉcรฉdemment, la localisation des cysticerques est dรฉterminante (Coyle et al., 1999).
Zentivo-Alanis a classรฉ la maladie en quatre catรฉgories :
– Cysticercose viscรฉrale.
– Cysticercose ophtalmique.
– Neurocysticercose.
– Formes mixtes.
Les atteintes cรฉrรฉbrale et oculaire sont les plus graves รฉtant donnรฉ quโelles mettent en jeu le pronostic fonctionnel et vital. Dans les pays en voie de dรฉveloppement, 65 % des cas dโรฉpilepsie seraient liรฉs ร une neurocysticercose.
Les signes cliniques de la neurocysticercose.
Lโรฉvolution de la neurocysticercose est imprรฉvisible, mais elle est souvent longue, avec des crises convulsives plus ou moins frรฉquentes.
La localisation du parasite, la rรฉaction inflammatoire et lโรฉventuel obstacle ร la circulation du LCR conditionnent la gravitรฉ de lโaffection.
Dixon estime la mortalitรฉ de la neurocysticercose ร 10 % dans les cinq annรฉes suivant le diagnostic.
Les signes cliniques sont les suivants :
Les crises convulsives
Cโest le symptรดme rรฉvรฉlateur le plus frรฉquent, retrouvรฉ dans 70 ร 90 % des cas.
En effet, les personnes ayant une neurocysticercose ont un risque bien supรฉrieur de dรฉvelopper une รฉpilepsie; ce risque serait multipliรฉ par 3,4 en Afrique (Quet et al., 2010).
Les manifestations sont souvent de type moteur, sensitivomoteur, sensitives pures, vรฉgรฉtatives ou psychiques.
Des manifestations intermittentes peuvent sโapparenter ร des manifestations รฉpileptiques car elles peuvent sโaccompagner de modifications de lโรฉlectro-encรฉphalogramme :
– Cรฉphalรฉes paroxystiques accompagnรฉes ou non de vertiges.
– Dysesthรฉsies, paresthรฉsies de lโhรฉmicorps controlatรฉral.
– Dystonie transitoire dโun membre.
– Sensation de lรฉgรจretรฉ ou dโengourdissement dโun membre.
– Asomatognosie.
Lโintervalle entre les crises peut parfois atteindre des mois voir des annรฉes, ou bien se rรฉpรฉter pendant quelques jours ; ce nโest pas prรฉvisible.
Les crises sont frรฉquemment de courte durรฉe, moins de cinq minutes.
Les convulsions se dรฉclenchent le plus souvent lorsque le cysticerque est en voie de dรฉgรฉnรฉrescence.
Une crise รฉpileptique chez une personne en zone dโendรฉmie ou en venant, doit faire รฉvoquer le diagnostic dโune neurocysticercose.
Chez lโadulte, il sโagit gรฉnรฉralement dโune รฉpilepsie de type grand-mal avec des crises tonico-cloniques gรฉnรฉralisรฉes, alors que chez lโenfant, elle est de type partiel (Singhi et Singhi, 2004). Ces crises sont partielles complexes dans 50 % des cas, et partielles simples dans 40 % des cas.
Les cรฉphalรฉes
Second symptรดme de rรฉvรฉlation de la neurocysticercose.
Elles sont frรฉquentes chez lโenfant.
Lโhypertension intracrรขnienne (HTIC)
Elle se manifeste par :
– Des cรฉphalรฉes.
– Des vomissements.
– Des vertiges.
– Des troubles psychiatriques.
– Une obnubilation intellectuelle.
– Un ลdรจme papillaire plus ou moins marquรฉ ร lโexamen du fond dโลil.
Elle est provoquรฉe par lโhydrocรฉphalie et/ou par lโลdรจme cรฉrรฉbral.
Elle se manifeste ร la phase aiguรซ de la maladie.
Ce signe clinique est trรจs frรฉquent chez lโadulte mais ne touche quโun tiers des enfants. Lโhydrocรฉphalie peut รชtre due ร une arachnoรฏdite diffuse dans les formes racรฉmeuses, lโinflammation entraรฎnant lโocclusion des foramens de Luschka et Magendie. Elle peut aussi
รชtre due ร lโobstruction des voies de circulation du LCR par un kyste ventriculaire.
Elle est parfois intermittente ; ce cas de figure se rencontre plutรดt lors des localisations ventriculaires de la neurocysticercose (Jaroonvesama, 1988).
Le syndrome mรฉningรฉ
Il est la consรฉquence de la rรฉaction inflammatoire du systรจme nerveux central.
Il se retrouve dans les formes racรฉmeuses oรน lโarachnoรฏdite basilaire et mรฉdullaire entraรฎne une mรฉningite aseptique.
Chez un patient venant dโune zone dโendรฉmie, la neurocysticercose doit toujours รชtre รฉvoquรฉe devant tout symptรดme neurologique, mรชme non conventionnel (Roth et al., 2002).
Les accidents vasculaires cรฉrรฉbraux
La rรฉaction inflammatoire peut atteindre les vaisseaux entraรฎnant des infarctus cรฉrรฉbraux (Cantu et Barinagarrementeria, 1996).
Ils sont de nature :
– Ischรฉmique de type lacunaire : provoquรฉ par lโocclusion inflammatoire des petites artรจres ou par une arachnoรฏdite que la neurocysticercose a provoquรฉ. Cโest le cas le plus frรฉquent.
– Ischรฉmique avec un infarctus รฉtendu : secondaire ร lโoblitรฉration de lโartรจre cรฉrรฉbrale ou de la carotide interne.
– Hรฉmorragique.
Les autres manifestations cliniques
– La fiรจvre: signe non spรฉcifique de neurocysticercose, elle ne peut orienter vers ce diagnostic et est rarement prรฉsente (Sahu et al., 2014)
– Les dรฉficits neurologiques localisรฉs: retrouvรฉs chez 16 % des adultes et 4 % des enfants. Ils peuvent se manifester par une hรฉmiparรฉsie, une monoparรฉsie ou encore des anomalies oculomotrices. Ils peuvent correspondre ร un dรฉficit neurologique post-critique transitoire (paralysie de Todd).
– Encรฉphalite ou mรฉningo-encรฉphalite ร cysticerque: plus spรฉcifique des enfants (chez 30 % dโentre eux) (Grill et al.,1996), son รฉvolution est souvent sรฉvรจre avec des รฉpisodes rรฉcidivants, des encรฉphalopathies convulsivantes avec des troubles psychiatriques ou le dรฉcรจs.
– Encรฉphalite cysticercosique aiguรซ : ลdรจme cรฉrรฉbral diffus avec rรฉtrรฉcissement des espaces ventriculaires lorsque plusieurs lรฉsions deviennent inflammatoires en mรชme temps.
– Syndrome hypothalamique.
– Troubles de lโรฉlocution : dysarthrie, aphasie.
– Agnosie.
– Dystonies.
– Syndrome cรฉrรฉbelleux.
– Syndrome pyramidal.
– Paralysie faciale.
– Syndrome de la queue de cheval.
– Malaise dโorigine non รฉpileptique.
Revue des troubles psychiatriques
Les troubles psychiatriques et les troubles du dรฉveloppement psychomoteur se manifestent de maniรจre extrรชmement variable. Ils sont secondaires aux formes actives de neurocysticercose et ร lโexistence dโune HTIC.
Une corrรฉlation existe entre lโapparition de troubles psychiatriques, le nombre et le type de lรฉsions, la sรฉvรฉritรฉ des รฉventuels dรฉficits neurologiques, une รฉpilepsie et lโutilisation de corticoรฏdes (Ramirez-Bermudez, 2005)
Leur prรฉvalence est trรจs variable, de 10 ร 65 %, et la rรฉversibilitรฉ aprรจs traitement et guรฉrison de la neurocysticercose nโest pas assurรฉe.
Nous pouvons citer :
– Les troubles du comportement : impulsivitรฉ, agressivitรฉ, voire auto-agressivitรฉ avec ou sans mutilations, difficultรฉs dโattention, hyperactivitรฉ. Ses symptรดmes aboutissent ร des difficultรฉs dโapprentissage, et ils peuvent รชtre les premiers signes rรฉvรฉlant la neurocysticercose.
– Les troubles du dรฉveloppement psychomoteur: la rรฉgression psychomotrice est possible. Ils concernent lโenfant.
– Les troubles cognitifs: rรฉgression mentale accompagnรฉe ou non de poussรฉes confusionnelles pouvant aller jusquโร la dรฉmence, dรฉsorientation temporo-spatiale, obnubilation, stupeur.
– Le syndrome dรฉpressif : il touche plus de 50 % des patients.
– Les troubles psychotiques ou de la personnalitรฉ : ils se retrouvent chez 14 % des patients touchรฉs par des troubles psychiatriques secondaire ร une neurocysticercose.
– Des troubles divers : syndrome dโanxiรฉtรฉ gรฉnรฉralisรฉ (attaques de panique), phobie.
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Table des matiรจres
HISTORIQUE
PARTIE 1 : GENERALITES
1. PARASITOLOGIE
1.1. รtat adulte
1.2. Les ลufs
1.3. La forme larvaire
1.4. Cycles du parasite
1.5. Evolution du parasite
2. EPIDEMIOLOGIE
3. FORMES ANATOMOPATHOLOGIQUES
3.1. Classifications des neurocysticercoses
3.2. Neurocysticercose intraparenchymateuse
3.3. Neurocysticercose extraparenchymateuse
3.3.1. Neurocysticercose intraventriculaire
3.3.2. Neurocysticercose sous-arachnoรฏdienne
3.3.3. Neurocysticercose spinale
3.3.4. Cysticercose intra-sellaire
3.3.5. Cysticercose ophtalmique
3.4. Cysticercoses extra neurologiques
4. HISTOPATHOLOGIE
4.1. Le parasite vivant
4.2. La larve dรฉgรฉnรฉrescente
4.2.1. Action toxique, immuno-allergique et inflammatoire
4.2.2. Action mรฉcanique
4.3. Le parasite mort, calcifiรฉ ou stade cicatriciel
4.4. Les phรฉnomรจnes immunologiques dans la relation hรดte-parasite
5. CLINIQUE
5.1. Les signes de la neurocysticercose
5.1.1. Les crises convulsives
5.1.2. Les cรฉphalรฉes
5.1.3. Lโhypertension intracrรขnienne (HTIC)
5.1.4. Le syndrome mรฉningรฉ
5.1.5. Les accidents vasculaires cรฉrรฉbraux
5.1.6. Les autres manifestations cliniques
5.1.7. Revue des troubles psychiatriques
5.2. Les formes de la neurocysticercose
5.2.1. La forme รฉpileptogรจne ou cortico-rolandique
5.2.2. La forme ventriculaire
5.2.3. La forme racรฉmeuse
5.2.4. La neurocysticercose spinale
5.2.5. La neurocysticercose intrasellaire
5.2.6. Les autres formes
5.3. La cysticercose ophtalmique
5.4. Les localisations extra neurologiques
6. MOYENS DIAGNOSTIQUES
6.1. Le recueil dโinformations
6.1.1. Lโinterrogatoire du patient
6.1.2. Lโexamen du patient
6.1.3. Les examens biologiques
6.1.4. Lโexamen parasitologique des selles
6.2. Lโimagerie mรฉdicale
6.2.1. La radiographie simple
6.2.2. La tomodensitomรฉtrie (TDM)
6.2.3. Lโimagerie par rรฉsonance magnรฉtique (IRM)
6.2.4. Les autres techniques radiologiques
6.3. Le diagnostic immunologique
6.3.1. ELISA
6.3.2. Western blot
6.4. Lโรฉlectroencรฉphalogramme (EEG)
6.5. Les critรจres diagnostiques
7. TRAITEMENT
7.1. Les traitements mรฉdicaux
7.1.1. Visรฉe curative
7.1.1.1. Lโalbendazole
7.1.1.2. Le praziquantel
7.1.2. Visรฉe symptomatique
7.1.2.1. Les traitements antiรฉpileptiques
7.1.2.2. La corticothรฉrapie
7.2. Le traitement chirurgical
7.3. La stratรฉgie thรฉrapeutique
8. PROPHYLAXIE
8.1. Prophylaxie animale et humaine
8.2. Le traitement de la population humaine et animale
8.3. La vaccination
8.4. Le contrรดle
PARTIE 2 : ANALYSE RETROSPECTIVE DE 4 CAS CLINIQUES PRIS EN CHARGE AU CHU DE ROUEN
1. PRESENTATION DE LโANALYSE
2. MONSIEUR RAM. I
2.1. Anamnรจse
2.2. Prise en charge mรฉdicale
2.2.1. Prise en charge immรฉdiate
2.2.2. Suivi mรฉdical
2.3. Discussions
3. MONSIEUR PRE. L
3.1. Anamnรจse
3.2. Prise en charge mรฉdicale
3.2.1. Prise en charge en Allemagne
3.2.2. Prise en charge en France
3.3. Discussions
4. MONSIEUR TAV.R
4.1. Anamnรจse
4.2. Prise en charge
4.3. Discussions
5. MADAME POI. S
5.1. Anamnรจse
5.2. Prise en charge
5.3. Discussions
CONCLUSION
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