Rodage avec texturation laser
Ce procédé a été développé par Gehring [13]. Il consiste à créer des éléments texturaux sur la surface rodée. Ces éléments, générés par un faisceau laser, sont caractérisés par une densité, une forme et une distribution spécifique. Ils permettent alors d’avoir une surface plus fine avec des poches de rétention d’huile permettant d’élargir l’intervalle du régime de fonctionnement hydrodynamique du moteur. Des essais basés sur des tests moteurs ont révélé une réduction de 30% à 60% de la consommation d’huile par rapport à un rodage plateau [11, 14]. Outre le contrôle de la forme des stries profondes de rétention d’huile, les effets thermiques du laser contribuent à l’amélioration des propriétés mécaniques de la surface après rodage. Différents travaux ont porté sur l’optimisation de la texturation laser générée en travaillant sur la forme, la distribution ou l’orientation des structures. La structuration des surfaces demeure toutefois empirique. Par exemple, la longueur de la cavité peut varier de 1 à 3 mm ou encore la limitation de la texturation aux zones du Point Mort Haut (PMH) et au Point Mort Bas (PMB) de la course du Segment-Piston- Fût. L’intérêt majeur de la texturation laser des surfaces rodées réside dans le contrôle de la régularité de structuration des surfaces avec une distribution spécifique des cavités intérieures [14]. Bien que ce procédé ait donné des résultats satisfaisants au niveau de la consommation d’huile, les faisceaux laser induisent des bavures pouvant dégrader le contact segment-fût. D’un point de vue industriel, cette solution reste toutefois onéreuse et n’est utilisée que par peu de constructeurs sur des applications de moteurs à hautes performances.
Mécanismes physiques activés en rodage
Un procédé de finition à l’abrasif est considéré comme un mécanisme complexe durant lequel un abrasif à dureté élevée raye une surface antagoniste d’un matériau moins dur, engendrant une modification plastique de la surface [18,19]. Le grain abrasif possède plusieurs arêtes et faces de coupe de géométries et de dimensions différentes induisant ainsi différents modes de sollicitations de la surface que sont [20-21] :
Mode d’abrasion I de type Labourage (figure 3.a) : Il se caractérise par l’apparition d’un bourrelet en tête de sillon. Aucun débris ne se détache lors du processus et la trace rémanente est définie comme un sillon plastique ;
Mode d’abrasion II de type Coupe (figure 3.b) : Il se définit par la formation d’un micro-copeau. La surface plane devant la pointe est d’abord déformée pour ensuite former un micro copeau. Ce procédé est similaire à un usinage avec outil coupant à angle d’attaque négatif. Le mode de coupe est régulièrement représenté en abrasion comme une dégénérescence du mode de labourage ;
Mode d’abrasion III de type Fragmentation (figure 3.c) : Il se caractérise par l’apparition de fissures sous forme d’écaillage en arrière de la pointe. Ce mode est lié à la nature du matériau abrasé (fragile).
Ces modes élémentaires sont souvent couplés Les seuils de transition d’un mode à un autre sont difficiles à quantifier du fait de leurs dépendances aux paramètres géométriques, cinématiques, rhéologiques et tribologiques du contact (figure 4). L’étude des mécanismes physiques du contact abrasif/pièce a été abordée en littérature par deux approches différentes : la première dite approche « locale» ou « mono-grain » et la deuxième dite approche « globale » ou « multi-grains ». L’approche « mono-grain » présente l’inconvénient de ne pas tenir en considération la distribution et les interactions entre les grains abrasifs. Une première étude des mécanismes physiques activés pendant le rodage a été basée sur une approche de modélisation mono-grain avec une représentation sphérique des grains [22, 24]. Salje et al. ont, dans ce sens, essayé d’établir une comparaison entre les procédés de rodage, de rectification et de polissage par une approche mono-grain [23]. Ils ont montré que le procédé de rodage peut être assimilé à un procédé de rectification à faibles vitesses de coupe. Par ailleurs, contrairement à la rectification, les grains sont actifs pendant toute la durée du procédé (le quotient entre temps de coupe par grain et la durée du procédé tend vers 1 pour le rodage alors qu’il est inférieur à 0.01 pour la rectification et variant de 0.1 à 0.5 pour la rectification plane ou le polissage). En plus, en assumant qu’un seul grain est actif par surface unitaire, la force normale par grain au cours de l’opération de rodage est estimée entre 0.8N à 10N. Lee et Malkin exploitent quant à eux une approche globale. Cette approche a été appliquée aux deux procédés de finition par rodage et par superfinition [25,26]. Dans le cas du rodage, une machine instrumentée a été utilisée afin de mesurer la puissance du moteur de rotation, la pression d’expansion des pierres et le déplacement vertical de la broche.
Variables liées à l’outil
L’outil de rodage intérieur des cylindres est constitué d’un support, d’un rodoir et d’un abrasif incrusté dans le rodoir. La forme du rodoir utilisé dépend de la surface à roder : disques plan pour les surfaces planes, bagues pour les arbres, cylindres pour les alésages. Gouskov et al. ont tenté de modéliser le comportement des rodoirs avec un modèle dynamique pour des applications de rodage profond [36,37]. L’outil de rodage a été modélisé par trois pierres régies par des lois de contact visco-élastiques (figure 9). Ce modèle a été appliqué pour l’analyse de l’effet de la disposition et de la rigidité des pierres sur la forme du cylindre rodé et les vibrations engendrées dans le cas de rodage profond. Il en ressort que l’augmentation de la rigidité de l’outil améliore la forme du cylindre rodé à partir d’unnombre de cycles de course critique. Toutefois, cette augmentation de la rigidité induit des vibrations et un taux d’enlèvement de matière irrégulier agissant sur le fini de surface. Cette modélisation simpliste de rodage profond peut être exploité pour le rodage interne des fûts de carter en considérant la rigidité de l’outil constante et en négligeant la composante vibratoire.
Spécification fonctionnelle requise
Le contrôle de la surface obtenue par rodage nécessite, au préalable, la détermination des caractéristiques et le choix des limites (appelées aussi tolérances) de conformité de la surface. Il faut que ces limites soient connues par l’expert qui effectuera le contrôle. Toutefois, il n’existe pas une spécification précise de la texture de la surface obtenue par le process de rodage plateau. Les paramètres et les méthodes de contrôle de qualité utilisés ainsi que les tolérances choisies varient d’un constructeur automobile à un autre selon le cahier de charge imposé, le matériau usiné ou encore les conditions opératoires du process (rodage hélicoglissant, rodage plateau…). Dans un système piston/fût, une typologie particulière de surface est élaborée. Elle est composée des éléments suivants (figure 10) :
– des stries croisées considérées comme des vallées de réserve d’huile ;
– des plateaux de glissement possédant de légères irrégularités. Ils ont pour fonction de s’user au contact des segments et d’user les segments afin que les formes respectives s’adaptent afin d’assurer l’étanchéité. Quelques études se sont intéressées à la détermination de l’importance de ces caractéristiques dans la fonctionnalité des surfaces des fûts de carter cylindre et ce, dans l’environnement du système tribologique Segment-Piston-Fût (SPF) de carter. Ces études sont basées sur des tests sur banc moteur ou des simulations numériques du contact SPF via la résolution de l’équation de Reynolds [51-54]. La synthèse de ces travaux montre que :
– le frottement diminue en réduisant la rugosité de la surface rodée. Par ailleurs, une surface très fine ne possède pas la capacité de rétention d’huile et ne résistera pas au débris d’usure. Le contact métal-métal (régime de lubrification limite) sera prédominant et pourrait conduire au grippage du moteur ;
– la striation de la surface augmente l’effet hydrodynamique sur les segments grâce aux pores de rétention d’huile formées notamment au croisement des stries. De surcroît, l’angle de rodage joue un rôle prépondérant sur les performances en frottement et en lubrification. Il a été démontré expérimentalement que la consommation d’huile diminue avec l’accroissement de l’angle de rodage. Par ailleurs, le frottement est optimal pour des angles de rodage allant de 30° à 60°.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 : Etude bibliographique
1. Introduction
2. Le procédé de rodage
2.1. Technologies de rodage
2.1.1. Rodage plateau
2.1.2. Rodage hélico-glissant
2.1.3. Rodage avec texturation laser
2.1.4. Rodage avec fausse culasse
2.1.5. Performances comparées des variantes du rodage industriel
2.2. Mécanismes physiques activés en rodage
2.3. Influence des variables process en rodage
2.3.1. Variables liées à la machine
2.3.2. Variables liées à l’outil
2.3.3. Variables liées à la pierre abrasive
2.3.4. Variables liées au matériau rodé
3. Contrôle de la qualité des surfaces rodées
3.1. Spécification fonctionnelle requise
3.2. Contrôle industriel appliqué en production
3.2.1. Contrôle de la topographie
3.2.2. Contrôle industriel de l’aspect de surface en production
3.2.3. Limites du contrôle industriel
3.3. Quelles méthodes alternatives de caractérisation des surfaces rodées ?
3.3.1. Méthode statistique
3.3.2. Méthodes de décomposition Pics/Vallées (PV)
3.3.3. La décomposition multi-échelle
3.3.4. Comment caractériser l’aspect de surface rodée ?
4. Conclusion
Chapitre 2 : Banc de rodage instrumenté et protocole expérimental développé
1. Introduction
2. Banc de rodage à l’échelle 1
3. Instrumentation intégrée
3.1. Détermination de la puissance de rodage « Prodage »
3.2. Mesure des efforts de coupe
4. Méthodologie expérimentale
4.1. Pierres de rodage
4.2. Pièces d’essais
4.3. Cycles de rodage
4.4. Procédure expérimentale
5. Métrologie des surfaces rodées
5.1. Mesure des diamètres
5.2. Mesure des écarts de forme
5.3. Mesure de l’état de surface
5.3.1. Mesurage tactile 2D
5.3.2. Mesurage optique 3D
5.4. Mesure de l’aspect de surface
6. Conclusion
Chapitre 3 : caractérisation multi-échelle des surfaces rodées
1. Introduction
2. Analyse multi-échelle par ondelettes continues
2.1. Principe
2.2. Conditions d’existence des ondelettes
2.3. Famille d’ondelettes
2.4. Transformée en ondelettes
2.5. Transformée en ondelettes inverse
3. Algorithme de caractérisation multi-échelle par ondelettes continues
3.1. Spectre multi-échelle d’état de surface
3.2. Etude de la taille optimale des surfaces échantillons
4. Etude de l’influence du choix de la fonction ondelette
4.1. Les différentes familles d’ondelettes testées
4.2. Effet du choix de l’ondelette « Mère »
4.3. Sensibilité du choix de l’ondelette à l’amplitude de rugosité
5. Caractérisation objective de l’aspect de surface
5.1. Angle de rodage »ș »
5.1.1. La méthode de la DSP
5.1.2. La méthode de la transformée de Radon
5.2. Densité des stries » Ds »
5.3. Coefficient de striation » Rs »
5.4. Taux des stries résiduels »mturn »
6. Conclusion
Chapitre 4 : Etude de l’intervention des variables process par distorsion des macros et micro-topologies spécifiques au rodage : concept de signature process multi-échelle
1. Introduction
2. Analyse multi-échelle de l’effet des différentes étapes de rodage
2.1. Concept de signature process multi-échelle (CSPM)
2.2. Identification de la signature multi-échelle de chaque étape du rodage plateau
3. Intervention des paramètres process en rodage de finition
3.1. Influence de la taille de grain des pierres en carbure de silicium vitrifié
3.1.1. sur les performances du process en rodage finition
3.1.2. sur la qualité de la surface
3.2. Processus physiques induits par le facteur de granulométrie
3.3. Application du CSPM à la conception du process de rodage
3.4. Influence des variables cinématiques sur les performances de rodage
3.4.1. Impact de la vitesse d’expansion
3.4.2. Influence de la vitesse de coupe
4. Conclusion
Chapitre 5 : Etude d’applications Process/Produit comprises et concertées par analyse multi-échelle et qualification fonctionnelle
1. Introduction
2. Etude du procédé de rodage diamant
2.1. Le rodage avec des pierres en diamant métallique
2.1.1. Etude des performances du process
2.1.2. Etude de la qualité des surfaces produites
2.2. Le rodage avec de nouvelles structures de pierres à base de grains diamant
2.2.1. Etude des performances du process
2.2.2. Identification des mécanismes physiques activés
2.2.3. Etude de la qualité des surfaces produites
3. Etude du besoin fonctionnel des surfaces des fûts dans le tribosystème SPF
3.1. Description du modèle de contact hydrodynamique SPF
3.2. Procédure numérique de résolution
3.2. Processus de génération des surfaces simulées
3.3. Effet de l’aspect de surface sur le frottement dans le système SPF
3.3.1. Effet de l’angle de rodage
3.3.2. Effet de la densité des stries
3.3.3. Effet du coefficient de striation
4.Conclusion
Conclusion Générale et perspectives
Annexe 1 : Production scientifique
Annexe 2 : Enveloppes Soleau déposées
Annexe 3 : Etude de cas industriels
Références bibliographiques
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