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Systèmes productifs agricoles
Le concept de système productif concilie à la fois l’approche agro-économique et l’anthropologie économique. L’approche agro-économique privilégie l’unité de production comme niveau d’une analyse empirique techno-économique qui met l’accent sur le procès technique de production, sur la disponibilité et le coût des facteurs de production. Le principal outil d’analyse est le système de production entendu, suivant les auteurs, comme une combinaison des productions et des facteurs de production ou comme une seule combinaison des facteurs. L‟anthropologie économique privilégie l’analyse qualitative, au niveau de groupes sociaux, des rapports de production, des processus de différenciation sociale, des modes de production. Le concept de système productif concilie ces deux approches et permet de raisonner à la fois en termes de calcul économique et de rapports sociaux. Il met en relation à la fois l‟ensemble des éléments et des activités qui concourent à la formation de flux des produits agricoles (COLIN, 1992). BADOUIN (1987) propose de distinguer trois aspects du système productif : le système de culture, le système de production et le système d’exploitation.
le système de culture, se rapporte aux combinaisons des cultures dans le temps et dans l’espace (rotations, assolements, associations).
le système de production est relatif à la combinaison des facteurs de production (terre, travail, consommations intermédiaires, biens d’équipement).
le système d’exploitation est considéré comme un mode de fonctionnement des unités de production : détention du pouvoir de décision, structure interne de l’unité de production, modalités d’accès aux facteurs de production, rapports entre l’exploitation et son environnement économique. Cette troisième composante du système productif complète l’approche techno-économique « système de culture-système de production » en intégrant les rapports de production dans l’analyse.
Logique des acteurs
Par définition, l’acteur est celui ou celle qui agit et qui agit par rapport à des logiques d’action qui orientent son rôle social. L’acteur n’a que rarement des objectifs clairs et cohérents, en fait, il en change, il les adapte en fonction de ses résultats. Il a toujours une certaine activité, même dans la passivité : son comportement a toujours un sens, ayant un aspect offensif pour améliorer sa situation et défensif pour maintenir sa marge de liberté. Mais la stratégie n’est pas toujours consciente (CROZIER & FRIEDBERG, 1977). Ces logiques qui régissent le système culturel et social sont extrêmement importantes dans la mesure où elles constituent la toile de fond de l’activité de l’acteur, son espace de jeu, et les règles, contraintes, normes qu’il doit prendre en compte pour bâtir sa stratégie et se positionner en tant qu’acteur dans le champ social. Autrement dit, il y a une interdépendance profonde entre la logique de l’acteur et les logiques d’actions de l’acteur. La logique d‟action est ce qui fonde les choix des acteurs, les rationalités qui sont à l‟œuvre derrière chaque action (BERNOUX et al., 2001).
Etat de l’art
De nombreuses études ont déjà été menées concernant l‟analyse de l‟efficacité technique des EAF productrices de riz. Pour mieux situer la présente étude, les principaux résultats de ces études sont présentés dans cette section Etat de l‟art.
Analyse de la productivité
Dans l‟ouvrage intitulé « Analyse des performances productives des exploitations familiales agricoles de la localité de Zoetelé » écrit par KANE en 2010, l‟auteur a mis en évidence l‟importance de l‟évaluation des performances productives des EAF investies dans les cultures de maïs et d‟arachide. L‟auteur avance que l‟analyse de la productivité est un moyen de mesure de la performance agricole. Il a démontré à travers l‟analyse de la productivité des facteurs de production que le facteur capital était le moins performant par rapport aux facteurs dont la terre et le travail. Ceci est dû en grande partie par le fait que les exploitants utilisent uniquement des matériels rudimentaires et traditionnels, et qu‟aucun d‟eux ne s‟adonne à l‟utilisation d‟intrant chimique. Il estime que l‟accroissement de la productivité contribue non seulement à l‟augmentation de la production mais également à celle du revenu des ménages, leur permettant ainsi d‟investir davantage dans leurs activités.
Etude de l’efficacité technique
Dans l‟ouvrage intitulé « Diagnostic de l‟efficacité technique des exploitations agricoles françaises : une analyse de l‟efficacité d‟utilisation des ressources énergétiques et exploration des déterminants relevant des pratiques agricoles » écrit par GHALI et al en 2013, les auteurs ont présenté que pour être complète, l‟analyse de la productivité se doit de prendre en compte l‟efficacité de l‟utilisation des ressources, c’est-à-dire, des facteurs de production. L‟analyse de l‟efficacité des exploitations considère les détails des consommations intermédiaires notamment les postes des engrais, amendements, carburants et lubrifiants, qui représentent la majorité de l‟énergie fossile directe ou indirecte utilisée sur l‟exploitation agricole. De plus, l‟étude s‟est intéressée à l‟identification de certains déterminants potentiels de l‟efficacité et qui relève des pratiques agricoles telles que le nombre de cultures, la présence de légumineuses. Les résultats montrent qu‟il existe des marges de manœuvre pour améliorer l‟efficacité d‟utilisation des ressources énergétiques. De plus, l‟excès d‟utilisation de ce facteur augmente avec le niveau d‟efficacité des exploitations et varie en fonction de leur orientation technico-économique. L‟analyse des déterminants de l‟efficacité technique pure a montré que les variables relatives à la structure de l‟exploitation et à ses caractéristiques financières (le taux d‟endettement et la part des subventions dans le produit total) représentent un obstacle majeur à l‟amélioration de l‟efficacité productive. Toutefois, le capital de l‟exploitation présente un atout pour l‟amélioration de l‟efficacité, mais il faudra l‟orienter vers des investissements technologiques plus adaptés et des changements des pratiques.
MATERIELS ET METHODES
Matériels
Justification du choix du thème
Le riz constitue la principale filière agricole à Madagascar. Son poids économique en fait un pilier majeur dans l‟ensemble du développement socio-économique de l‟île (FAO-UPDR, 2000). L‟agriculture familiale malgache est essentiellement orientée vers la production pour l‟autoconsommation, puisqu‟environ 75% de la production vivrière des ménages ruraux est autoconsommée (INSTAT, 2011). Ainsi, les exploitations familiales produisent d‟abord pour leur propre consommation, et les stratégies de production développées par les chefs de ménage visent à assurer la satisfaction des besoins alimentaires, ce qui est souvent considéré comme une limite ou même un frein à la croissance économique (CIRAD, 2014).
L’agriculture, pour faire face aux exigences du développement économique et permettre l’accession au développement, se doit d’améliorer ses performances (BADOUIN, 1985). Selon EICHER (1999), le secteur agricole ne peut assurer son rôle primordial de stimulant de la croissance économique, de générateur d’emploi et de fournisseur de devises à cause du faible niveau de productivité dans ce secteur. Une hausse de la productivité peut, en théorie, accroître à la fois le revenu des producteurs et le pouvoir d‟achat des consommateurs, grâce à la baisse des coûts de production unitaires. Elle stimule la production et la consommation et constitue, de ce fait, un moteur majeur de la croissance économique et de la progression du niveau de vie à moyen terme (FARM, 2013). De plus, la croissance de la productivité est une source importante d‟amélioration du bien-être économique à long terme. La hausse de la productivité est donc essentielle à la progression soutenue des revenus réels et du niveau de vie au fil du temps (Banque du Canada, 2013). C‟est pourquoi la présente étude est focalisée sur l‟analyse de la productivité et de l’efficacité technique des EAF riziculteurs pour l‟amélioration de leurs productivités. Cette étude a permis d‟avoir une situation de départ suite à l‟introduction de nouvelles variétés de riz dans le cadre d‟un projet de recherche sur l‟adoption d‟une variété améliorée de riz NERICA.
Justification du choix de la zone d’étude
A l‟instar de la situation de la pauvreté au niveau national, une large majorité, 84,7 %, de la population de Haute Matsiatra est classée comme pauvre en 2010 (INSTAT, 2011). Il s‟agit de ceux qui ont un niveau de consommations agrégées (alimentaires et non alimentaires) inférieur au seuil national de pauvreté de 468 800Ar/personne/an. La riziculture reste la spéculation prioritaire dans la région avec deux saisons de culture : la campagne « Vary aloha » de juillet à décembre pour satisfaire les besoins dans la campagne suivante correspondant à la période de soudure et la campagne grande saison de décembre à mai durant la saison pluvieuse.
La Commune Rurale de Fenoarivo se situe à 100 km à l‟ouest du District d‟Ambalavao de la Région Haute Matsiatra et à 38 km de la Route Nationale N°7. La commune a une superficie de 1200 km². Elle est divisée en cinq fokontany dont trois ont été choisis pour cette étude en fonction de leur distance par rapport aux plantations et les restrictions de travail (GRASS et ZELLER, 2011), qui sont respectivement Fenoarivo, Maroilo et Sakafia. Ces villages représentent l‟ensemble de la population qui vit dans les environs de 10 km de la plantation industrielle de jatropha ou le « Jatrogreen ». Le fokontany de Sakafia est le plus proche de l‟exploitation, puis celui de Fenoarivo et enfin celui de Maroilo.
La Région Haute Matsiatra est située dans la province de Fianarantsoa, dans le centre de l‟île. Elle fait partie des hautes terres centrales de Madagascar et est située entre 45,51°et 47,41° longitude Est et 20,68° et 22,21° latitude Sud. La capitale de la région est Fianarantsoa. Elle s‟étend sur une superficie de 23 034,6 km², représentant 20,46 % de la superficie totale de la province de Fianarantsoa (CREAM, 2013). Ci-après est présentée la Figure n°1, élaborée à partir de la base de données de la FTM qui illustre la zone d‟étude.
Méthodes
Démarche globale commune aux hypothèses
Bibliographie
Etape incontournable pour toute recherche, différents ouvrages ont été consultés pour cerner à la fois le contexte de la zone et le thème de l‟étude. Cette bibliographie a contribué à la planification des entretiens et des enquêtes à réaliser sur terrain et a également servi de complément et de recoupement des informations obtenues sur le terrain. Ainsi, la bibliographie a été réalisée auprès du CID de l‟ESSA, de la bibliothèque universitaire et du CITE, à travers des documents, rapports et articles disponibles en ligne. Les thèmes recherchés ont été principalement axés sur la productivité des facteurs de production, l‟efficacité technique et les pratiques paysannes….
Entretiens auprès de personnes ressources
Ces entretiens ont eu pour but d‟avoir une bonne connaissance de la problématique de recherche mais aussi de pouvoir réaliser au mieux les enquêtes proprement dites auprès des ménages. Les informations ont été recueillies auprès du CSA Ambalavao, le maire de la Commune de Fenoarivo et les chefs des trois Fokontany. Ces informations à faire ressortir ont été :
Les activités principales dans la zone d‟étude.
L‟importance accordée à l‟intégration d‟innovation technique.
Les difficultés rencontrées.
Enquête formelle
Une enquête auprès des ménages ou EAF a été effectuée afin de recueillir les données nécessaires pour constituer la base de données. Un questionnaire préétabli a permis d‟effectuer l‟enquête auprès des ménages (Annexe n°1). Le questionnaire a été orienté vers des informations sur les EAF pratiquant la riziculture dans le District d‟Ambalavao, au niveau des trois fokontany de la Commune rurale de Fenoarivo.
Pour l‟échantillonnage, la détermination selon la technique de sondage élémentaire a été adoptée. Il s‟agit de prélever des individus au sein de la population définie. Le choix est fait au hasard et s‟effectue en une seule opération, soit par tirage au sort, soit par tirage systématique. Selon ZELLER et al. (2011), le nombre d‟enquêtés est de 238 ménages riziculteurs sur 685 ménages Selon CLAIRIN et BRION (1996), la taille minimale pour une étude scientifique et statistique est de 30%. L‟échantillon compte 238 ménages soit un taux d‟échantillonnage de 34%. Ce taux est bien représentatif du fait que la population est homogène et que les enquêtés sont uniquement des riziculteurs.
Ces 238 ménages ont été répartis comme suit :
115 dans le fokontany Fenoarivo.
57 dans le fokontany Maroilo.
66 dans le village de Sakafia.
Démarche spécifique de vérification des hypothèses
Démarche spécifique de vérification de l’Hypothèse 1 : « Les ménages se différencient par leur niveau de possession de facteurs de production »
Pour la vérification de cette hypothèse, une étude des types d‟exploitation et une analyse de la productivité rizicole des EAF ont été effectuées.
Typologie des EAF
Démarche
L‟établissement de la typologie consiste à catégoriser les ménages riziculteurs afin de décrire les différentes pratiques rizicoles. La typologie regroupe des individus homogènes dans une même classe suivant des variables définies ultérieurement. A chaque type identifié correspond une valeur des variables permettant de caractériser la pratique d‟une typologie représentative d‟exploitation rizicole.
DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
Discussions
Pratiques paysannes selon l’accès aux facteurs de production
Pratiques paysannes non homogènes
Le concept de pratique est un ensemble des actions agricoles mises en œuvre dans l‟utilisation du milieu (MILLEVILLE, 1985). Ainsi, une typologie a été effectuée pour différencier les pratiques paysannes selon des caractères bien individualisés spécifiant les activités d‟un groupe plus restreint d‟individus.
Les ménages de la Classe 1 se caractérisent surtout par un niveau élevé en superficie cultivée et un grand nombre d‟actifs. Le nombre élevé d‟actifs leur permet de pratiquer d‟autres cultures que la riziculture. Cependant, malgré ce nombre élevé d‟actifs, ces ménages utilisent moyennement les techniques améliorées et leurs productions sont destinées uniquement à l‟autoconsommation.
Les ménages de la Classe 2 sont ceux qui ont le moins de ressources : manque de surface disponible, peu de moyens financiers et matériels. Ces exploitations ont moins d‟actifs que les deux autres classes et se contentent d‟une main d‟œuvre familiale pour leur faible superficie et pratiquent des activités agricoles peu diversifiées. Ces ménages choisissent l‟opportunité de revenus immédiats au détriment des activités agricoles tels que le travail comme main d‟œuvre salariale, dans les exploitations de jatropha. Cependant, ils adoptent faiblement les techniques améliorées et n‟effectuent ni irrigation, ni sarclage.
Les ménages de la Classe 3 adoptent le plus les techniques améliorées. Ils mobilisent une main d‟œuvre salariale en sus de leurs actifs. La pratique de l‟irrigation et du sarclage en plus des techniques améliorées leur permet de dégager un surplus de production destiné à la vente.
Logique des acteurs
La logique des acteurs constitue des processus qui sont toujours sous-entendus par des logiques d‟action par lequel l‟acteur est, d‟une certaine façon, mis en scène et contraint par le système d‟activités dans lequel il se trouve, et vis-à-vis duquel il se positionne, établit des stratégies (RASAMBO, 2016). La majorité des ménages n‟arrivent pas à produire la quantité de riz suffisante pour leur consommation quotidienne. Seuls 29% des ménages enquêtés sont autosuffisants en riz. La plupart des ménages produit uniquement pour subvenir à leurs besoins mais leur production est loin de couvrir leurs besoins annuels. Faire face aux périodes de soudure implique donc d‟avoir des stratégies propres à chaque ménage pour assurer les besoins alimentaires. Les ménages de la Classe 2 ayant le moins de ressources sont les plus enclins à rechercher du travail en tant que salarié agricole ou bien comme des employés fixes ou temporaires dans les exploitations de jatropha. En effet, leur localisation, étant la plus proche de cette exploitation, leur permettent une facilité d‟accès à ces emplois. Cependant, la possibilité d‟y travailler dépend en grande partie de la demande d‟ouvriers au sein de Jatrogreen. Certains des ménages de la Classe 1 considèrent plutôt leur élevage bovin comme une sorte de garantie en cas d‟urgence ou de manque de liquidité. Il y a cependant, quelques ménages qui effectuent en parallèle de l‟agriculture, des activités de commerce comme les gargotes, les épiceries ou bien le trafic de bœuf. Ils considèrent n‟être jamais touchés par une insuffisance alimentaire et que leurs besoins en aliments sont toujours satisfaits. Pour le cas de la Classe 3, étant la classe la plus aisée et adoptant le plus les techniques innovantes par rapport aux deux autres classes, la plupart de ces ménages ont presque tous des AGR, autres que l‟agriculture, comme employé public, salarié non agricole.
Analyse économique des systèmes productifs agricoles
Evaluation de l‟utilisation des facteurs de production
La taille moyenne des exploitations est de 0.58 ha dans l‟échantillon. En effet, la majorité des exploitations familiales ont de faibles capacités productives : elles ont de petites superficies (70% cultivent moins de 1,5 ha), peu d‟équipements, et utilisent peu d‟intrants. Les contraintes sont fortes telles que les cyclones, les inondations et sécheresses, les invasions acridiennes, la variabilité de la pluviométrie, les sols fragiles, entrainant ainsi des rendements faibles (INSTAT, 2011). De plus, cette faible superficie exploitée s‟explique par le fait que la main d‟œuvre est généralement familiale. La filière riz de la Région Haute Matsiatra se caractérise par un fort potentiel en terre cultivable. Cependant, la faiblesse du rendement rizicole est liée à la non maîtrise de l‟eau ; l‟inondation et l‟ensablement des bas-fonds. De plus, la Région présente une faible adoption de techniques de production et de gestion appropriées : pratiques de techniques de production peu performantes, matériel de production rudimentaire (PRD HAUTE MATSIATRA, 2015).
Le niveau du capital et celui du travail sont plus importants pour les exploitations de la Classe 3. Ceci peut être expliqué par la pratique des techniques améliorées et des matériels telles que la sarcleuse, ce qui justifierait également l‟exigence en temps de travail. En effet, le capital est de 129 930 Ar pour la classe 1 ; 62 605 Ar pour la Classe 2 et 131 849 Ar pour la Classe 3. Les résultats du test ANOVA confirment une différence significative à 5% entre les trois classes concernant la productivité du capital. Cependant, ces moyennes sont relativement faibles puisque les ménages utilisent majoritairement des matériels traditionnels. En effet, les principaux déterminants de la productivité agricole sont les innovations techniques comme l‟emploi d‟engrais de meilleure qualité ou de variétés de semences mieux adaptées au milieu ; l‟intensification de la culture incluant plus d‟intrants, d‟équipements agricoles ou de travail par hectare et les innovations organisationnelles comme l‟application plus précise des engrais ou une gestion plus fine de l‟irrigation (FARM, 2013).
Evaluation de la productivité des facteurs de production
L‟étude a uniquement considéré les surfaces allouées à la riziculture. La forte productivité de la terre s‟explique par la disponibilité de ce facteur. La majorité des ménages ont acquis leur terre par héritage et par don. Malgré l’importance de ce facteur, il est donc obtenu gratuitement. Malgré leur faible superficie par rapport à la Classe 3, la Classe 1 intensifie le plus leur facteur de production « terre » par rapport aux deux autres. En effet, compte tenu du fait de leur souci de subvenir aux besoins quotidiens, ils ont tendance à intensifier leur facteur de production. Une des stratégies adoptées par cette classe est la diversification culturale, avec la pratique de 3 à 4 autres cultures que la riziculture.
La plupart des ménages se caractérisent par une faible productivité du travail (28 520Ar/Hj). Cette faiblesse peut s’expliquer par l’utilisation majoritaire de la main d’œuvre familiale qui peut être moins productive que la main d’œuvre salariale. En effet, la main d’œuvre salariale est contrainte par l’atteinte d’un résultat qui doit être satisfaisant tandis qu’il n’y a aucune contrainte et incitation sur la main d’œuvre familiale (MAHESH, 2000). Ce qui explique l‟effet positif et significatif du coefficient de la main d’œuvre pour la Classe 3. Ceci suggère que lorsque les ménages utilisent de la main d’œuvre salariale, leur efficacité augmente.
La productivité du travail reflète le volume de production généré par heure de travail. Il ne faut toutefois pas en conclure qu‟elle dépend uniquement de la performance de la main-d‟œuvre. Elle est également influencée par tous les autres facteurs de production et l‟environnement. En fait, l‟intensité de l‟effort fourni par les travailleurs a effectivement des répercussions sur la productivité du travail, mais cet élément est généralement beaucoup moins important que le volume de capital (comme les outils ou la machinerie) dont dispose un individu pour accomplir sa tâche (GAMACHE, 2005).
Le facteur capital a une productivité relativement faible dans l‟échantillon (26,45Ar/unité de capital). La plupart des ménages ne possédant pas d‟équipements, tels que la charrue ou la charrette, ont recours à l‟emprunt auprès de leurs voisins ou de leurs familles. De plus, le capital variable n‟est constitué que des coûts des semences utilisées, puisque les ménages n‟utilisent ni engrais, ni pesticides, ni fongicides pour la riziculture. Ces semences sont issues de leurs productions précédentes et les ménages effectuent rarement des renouvellements des semences. En effet, l‟offre locale en semences améliorées est insuffisante en termes de quantité. De plus, les centres semenciers sont à Nasandratrony et Anosy (PRD HAUTE MATSIATRA, 2015).
Toutefois, dans un système d‟exploitation, les facteurs de production sont utilisés simultanément. En effet, les productivités partielles ne prennent pas en considération la possibilité de substitutions entre ces facteurs. La productivité permet uniquement de mesurer l’efficacité du système productif et ne permet qu’une interprétation limitée de la performance productive des ménages riziculteurs. C‟est donc une comparaison entre la production réalisée et les quantités de facteurs de production utilisés (KANE, 2010). Ainsi, il s‟avère nécessaire d‟effectuer une analyse de l‟efficacité technique des ménages afin de considérer les interactions qui existent entre les facteurs de production.
Efficacité technique des EAF
Niveau d’efficacité technique des types d’exploitations
Efficacité technique totale
Les ménages de la Classe 3 sont les plus efficaces par rapport à leur niveau moyen d‟efficacité technique totale. Le niveau d‟efficacité d‟une exploitation mesure l‟écart par rapport à l‟optimum. En effet, l‟ensemble des optimums techniques constitue la frontière de production. Les exploitations qui se situent sur cette frontière sont jugées efficaces et leur niveau d‟efficacité technique est égal à 1. (ALBOUCHI et al., 2005). Ceci peut s‟expliquer par le fait que les ménages de la Classe 3 utilisent plus de facteur terre et adopte le plus des techniques améliorées.
Efficacité technique pure
Les niveaux moyens de l‟efficacité technique pure montrent que les ménages de la Classe 3 sont également les plus efficaces (0,81). Les résultats du test de Student confirment une différence significative de 5% entre les moyennes des Classes 2 et 3 ; et entre les moyennes des Classes 1 et 3. En revanche, il n‟y a pas de différence significative entre les moyennes respectives des exploitations de la Classe 1 et la Classe 2 (Annexe n°2). Ceci montre qu‟en termes de gestion de pratiques de production les exploitations de la Classe 3 sont plus efficaces que les exploitations des Classes 1 et 2, mais le faible niveau d‟efficacité technique totale des exploitations de la Classe 1 semble provenir essentiellement de leurs niveaux d‟efficacité d‟échelle. En effet, le niveau moyen calculé de l‟efficacité d‟échelle est de 0,71 pour la Classe 1 contre 0,78 pour la Classe 2 et 0,88 pour la Classe 3. Ce niveau moyen est relativement élevé pour les trois types d‟exploitations, mais suggère que les exploitations de la Classe 1 souffrent plutôt d‟une taille sous-optimale, montrée par leurs niveaux d‟efficacité totale significativement moins élevés que pour les autres exploitations.
Input slacks ou excès d‟utilisation des inputs
Les exploitations les plus efficaces techniquement sont celles qui gaspillent le plus le facteur travail et le capital. Les résultats témoignent de l‟effort que ces trois types d‟exploitations doivent apporter en matière de gestion de l‟exploitation et des pratiques culturales. Ils reflètent la sur-utilisation des facteurs de production et confirment la conclusion de BUTAULT (2006) sur la nécessité d‟améliorer la productivité d‟autres facteurs que le travail comme les consommations intermédiaires et le capital.
Gains de productivité et modèle d’EAF performante
Sans tenir compte de l‟optimalité de la taille de l‟exploitation, le pourcentage des exploitations situées sur la frontière de production est plutôt faible avec moins de 16%. Ce pourcentage montre que la majorité des exploitations de l‟échantillon ne sont pas totalement efficaces et peuvent réduire davantage la quantité des intrants utilisés. Les résultats d‟analyse ont permis de mettre en exergue les caractéristiques d‟un modèle d‟EAF performant. Ce modèle est en premier lieu caractérisé par une utilisation plus efficace des facteurs de production grâce à une augmentation de la taille moyenne de l‟exploitation et aux recours à des améliorations technologiques, comme c‟est le cas pour la Classe 3 (sans pour autant avoir une production plus élevée que la Classe 1. La performance de la Classe 3 se traduit donc par la capacité des ménage à maximiser la productivité des facteurs de production. En effet, les gains d‟efficience peuvent provenir d‟améliorations technologiques, d‟augmentations de la taille moyenne de l‟exploitation qui entraînent des économies d‟échelle, et d‟autres changements organisationnels au niveau de l‟exploitation. Les gains de productivité peuvent survenir sans augmenter la production. En effet, la productivité s‟améliore lorsque les ressources sont utilisées plus efficacement du fait que la production s‟accroît plus rapidement que les intrants, ou produire autant avec une utilisation moindre d‟intrants (KACI, 2006). En d‟autres termes, ces gains de productivité proviennent en grande partie du progrès technique, c‟est-à-dire des innovations qui modifient les méthodes de production : amélioration des méthodes de travail, machines plus performantes, nouvelles technologies.
Déterminants des efficacités techniques
Les résultats de ces régressions confirment que l‟influence de certains déterminants peut varier selon la spécialisation de l‟exploitation. Ceci conforte l‟hypothèse généralement adoptée dans la littérature, selon laquelle ces exploitations utilisent des technologies de production différentes et donc elles ont des frontières de production différentes (GHALI et al., 2013).
Faire partie d‟une organisation paysanne ne contribue pas à l’explication de l’efficacité technique. En effet, la représentativité des chefs de ménage intégrant une organisation paysanne est faible et ne représente que 7 % de l‟échantillon (Annexe n°3). Compte tenu de ce nombre réduit, l‟effet de l‟intégration à une organisation paysanne n‟est pas visible, à moins d‟avoir un échantillon contenant autant de chefs de ménages membres d‟une organisation que non membres.
Mode de faire valoir
L‟efficacité technique des ménages est influencée positivement par l‟accès à la terre par la location. Cette forme d‟accès à la terre implique selon les termes de la location, que ce soit par métayage ou par fermage, des charges à payer au propriétaire ou le partage de la récolte. Cela suppose que le riziculteur se doit d‟être techniquement performant afin de pouvoir honorer ses engagements. Ces résultats sont confirmés par NUAMA (2010), qui révèlent que les ménages ayant recours à la location de terre se doit de produire plus pour pouvoir honorer ses engagements de location. Une augmentation de la productivité est possible par la mise en possession temporaire des terres cultivables par des ménages ayant la capacité d’investir dans l’utilisation de plus d’intrants agricoles (RANDRIANARISOA, 2002).
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Table des matières
INTRODUCTION
1 CONCEPTS ET ETAT DE L’ART
1.1 Concepts
1.1.1 Exploitation Agricole Familiale (EAF)
1.1.2 Théorie économique de la production
1.1.3 Approche de la mesure de la productivité partielle
1.1.4 Systèmes productifs agricoles
1.1.5 Logique des acteurs
1.2 Etat de l’art
1.2.1 Analyse de la productivité
1.2.2 Etude de l‟efficacité technique
2 MATERIELS ET METHODES
2.1 Matériels
2.1.1 Justification du choix du thème
2.1.2 Justification du choix de la zone d‟étude
2.2 Méthodes
2.2.1 Démarche globale commune aux hypothèses
2.2.1.1 Bibliographie
2.2.1.2 Entretiens auprès de personnes ressources
2.2.1.3 Enquête formelle
2.2.2 Démarche spécifique de vérification des hypothèses
2.2.2.1 Démarche spécifique de vérification de l‟Hypothèse 1 : « Les ménages se différencient par leur niveau de possession de facteurs de production »
a. Typologie des EAF
Démarche
Variables
Outils
Finalités
b. Logique des acteurs pendant la période de soudure
Démarche
Variables
Outils
Finalités
c. Structure économique des ménages par type d‟exploitation
Démarche
Variables
Outils
Finalités
2.2.2.2 Démarche spécifique de vérification de l‟Hypothèse 2 : « L‟efficacité des
EAF dépend des caractéristiques socio-économiques»
a. Approche DEA
Démarche
Variables
Outils
Finalités
b. Analyse des déterminants du niveau d‟efficience à l‟échelle de l‟exploitation
Démarche
Variables
Outils
Finalités
c. Préférences des ménages en termes de variétés de riz
Démarche
Variables
Outils
Finalités
2.3 Limites de l’étude
2.4 Chronogramme de recherche
3 RESULTATS
3.1 Pratiques paysannes selon leur niveau de possession des facteurs de production
3.1.1 Typologie des exploitations agricoles
3.1.1.1 Classe 1 : « ménages avec un nombre d‟actifs élevé »
3.1.1.2 Classe 2 : « ménages avec des ressources limitées »
3.1.1.3 Classe 3 : « ménages dotés en superficie cultivée et main d‟œuvre élevée »
3.1.2 Logique des acteurs
3.1.2.1 Stratégie de la Classe 1
3.1.2.2 Stratégie de la Classe 2
3.1.2.3 Stratégie de la Classe 3
3.1.3 Analyse de la production et de la productivité des ménages
3.1.3.1 Importance de la riziculture
3.1.3.2 Structure des facteurs de production et de la production
3.1.3.3 Analyse de la productivité partielle des EAF
a. Production rizicole
b. Terre
c. Capital
d. Travail
3.2 Efficacité technique des EAF
3.2.1 Niveau d‟efficacité technique
3.2.1.1 Efficacité Technique Totale (ET)
3.2.1.2 Efficacité Technique Pure (ETP)
3.2.1.3 Inputs slacks ou excès d‟utilisation des inputs
3.2.2 Facteurs expliquant les efficacités techniques
3.2.2.1 Signification statistique du modèle
3.2.2.2 Signification statistique des variables
3.2.3 Préférences des ménages en termes de variétés de riz
4 DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
4.1 Discussions
4.1.1 Pratiques paysannes selon l‟accès aux facteurs de production
4.1.1.1 Pratiques paysannes non homogènes
4.1.1.2 Logique des acteurs
4.1.1.3 Analyse économique des systèmes productifs agricoles
a. Evaluation de l‟utilisation des facteurs de production
4.1.1.3.1 Evaluation de la productivité des facteurs de production
4.1.2 Efficacité technique des EAF
4.1.2.1 Niveau d‟efficacité technique des types d‟exploitations
a. Efficacité technique totale
4.1.2.1.1 Efficacité technique pure
4.1.2.1.2 Input slacks ou excès d‟utilisation des inputs
4.1.2.2 Gains de productivité et modèle d‟EAF performante
4.1.2.3 Déterminants des efficacités techniques
a. Mode de faire valoir
4.1.2.3.1 Capital humain
4.1.2.3.2 Technique améliorée et maitrise de l‟eau
4.1.2.4 Préférences des ménages en termes de variétés de riz
4.2 Recommandations
4.2.1 Augmentation de la production
4.2.2 Incitation à la pratique de la riziculture pluviale
4.2.3 Aménagement des réseaux hydro-agricoles
4.2.4 Formation de main d‟œuvre plus qualifiée
4.2.5 Création d‟organisation paysanne
4.2.6 Amélioration de la communication locale
4.2.7 Promotion d‟activités génératrices de revenus
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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