Analyse du processus électrochimique par simulation numérique

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Méthodologies d’étude des matériaux actifs de batterie Li-ion et exploration des liens entre microstructure et performances électrochimiques.

Nous venons de montrer qu’au fur et à mesure de leur développement les batteries Li-ion se sont complexifiées, aussi bien au niveau de la structure des matériaux utilisés (composition, stabilité cristalline) que du contrôle de leur morphologie et de leur mise en électrode. A cette complexification s’est associée la nécessité de mettre en place des méthodologies d’étude pour identifier les paramètres limitant les performances des batteries. La méthodologie la plus établie paraît celle de l’identification d’une composition comme un bon candidat pour une application batterie. Nous la détaillerons dans la première partie à partir de l’exemple de NMC. Cela nous permet par la même occasion de montrer les caractéristiques principales de ce matériau, étudié par la suite. Ensuite nous nous intéressons plus particulièrement aux techniques et outils mis-en-œuvre pour comprendre la relation entre morphologie et performances.
Analyse de la microstructure des matériaux actifs d’électrode positive de batteries lithium-ion.

Méthodologie d’évaluation d’une nouvelle composition chimique comme matériau actif d’électrode : exemple de LiNi1/3Mn1/3Co1/3O2 (NMC).

Comme nous l’avons vu dans la partie précédente, de nombreuses compositions d’oxydes lamellaires ont été évaluées pour une utilisation batterie. Il en va de même pour les autres familles de matériaux actifs où des substitutions atomiques sont également régulièrement testées. La composition LixNi1/3Mn1/3Co1/3O2 a été proposée en 2002 par Shaju et al.[82] puis en 2003 par Yabuuchi et Ohzuku[83]. Le second groupe a notamment présenté dans une série de trois publications la méthodologie qui conduit à proposer une composition pour une application batterie. Puisque ce travail de doctorat utilise NMC comme matériau modèle, il est doublement intéressant d’utiliser cet exemple pour illustrer la méthodologie.
La première publication de Yabuuchi et Ohzuku[84] se fonde sur des simulations numériques pour étudier les structures cristallographique et électronique de la composition. Les calculs suggèrent que la stœchiométrie (1/3:1/3:1/3) sont stables dans une configuration de type -NaFeO2 et forment une solution solide de LiNiO2, LiMnO2 et LiCoO2. De par l’expérience de LiCoO2 qui adopte la même structure, ce résultat encourage l’exploration de cette composition pour une application batterie. L’étude de la densité d’états électroniques montre que les ions nickel, manganèse et cobalt sont divalents, tétravalents et trivalents, respectivement. Ils n’ont donc pas le même degré d’oxydation que dans leurs composés LiMO2 respectifs : le nickel a un degré d’oxydation +2, le manganèse +4 et le cobalt +3. Il y a une séparation de charges entre le nickel et le manganèse. Les auteurs étudient ensuite les possibles changements de la structure électronique dus à l’extraction du lithium. Ils montrent que pour une stoechiométrie de lithium, x, entre 1 et 2/3, la compensation de charge se fait par le couple Ni3+/Ni2+. Entre 2/3 et 1/3, elle se fait par Ni4+/Ni3+ puis c’est le couple Co4+/Co3+ qui est actif. Le manganèse est donc inactif dans la structure. Notons que dans leurs calculs, la configuration électronique de l’oxygène est fixée. Cette étude leur permet d’évaluer les potentiels redox des différentes étapes de l’extraction du lithium dans la structure : 2.99 V pour 1 ≤ x ≤ 2/3, 3.30 V pour 2/3 ≤ x ≤ 1/3 et 4.50 V pour 2/3 ≤ x ≤ 0. Ils notent que leurs calculs sous-estiment les potentiels redox expérimentaux, mais montrent l’intérêt en termes de potentiel et de capacité du matériau NMC en comparant avec des calculs sur LiNiO2 et LiCoO2 dont les potentiels expérimentaux sont connus. Les calculs ab initio sont ainsi un outil puissant pour étudier, a priori, l’intérêt d’une structure pour une application batterie. Le groupe de Ceder a notamment montré qu’elles permettent de calculer les potentiels redox, aujourd’hui avec précision, qui donnent ensuite une idée de l’énergie possiblement stockée[85]. Ils permettent également d’évaluer l’intérêt de l’utilisation de dopants pour stabiliser la structure. Reed J. S. a par exemple montré dans ses travaux doctoraux l’intérêt du dopage en aluminium dans les structures de type LiMO2 afin de réduire la migration des métaux de transition dans les feuillets de lithium[86]. Approche qui est validée expérimentalement par l’étude des composés LiNi1-yAlyO2 la même année par le groupe de Delmas[87], et par le matériau NCA par la suite. Les calculs ab initio sont aujourd’hui une base de l’exploration de nouveaux matériaux d’électrode. En ce sens, le Lawrence Berkeley National Laboratory, sous l’impulsion de Ceder et Persson, a rendu public un site internet permettant d’explorer une large banque de données de résultats de calculs sur les structures électroniques et cristallographiques de nombreux matériaux et aussi d’effectuer ses propres calculs en ligne (67 189 matériaux inorganiques y sont répertoriés à cette date, dont 3 628 matériaux d’intercalation)[88].
La seconde publication du groupe d’Ohzuku est consacrée à la préparation et la caractérisation du matériau NMC[89]. Il est préparé par co-précipitation de l’hydroxyde triple Ni1/3Mn1/3Co1/3(OH)2 calciné à 1 000 °C en présence de LiOH.H2O. Le matériau obtenu est ensuite caractérisé par diffraction X (DRX) et microscopie électronique à balayage et en transmission (MEB et TEM, respectivement). La DRX permet de contrôler la phase cristalline obtenue par la synthèse et d’en mesurer les paramètres de maille. Elle est ici couplée avec une étude par diffraction électronique et absorption X. La Figure 1.8 illustre l’image obtenue par microscopie électronique en transmission (TEM) de leur matériau. On peut y discerner les plans de métaux de transitions perpendiculaires à l’axe c (maille hexagonale). Ils montrent que leur matériau présente une structure de type -NaFeO2, mais l’arrangement cationique n’est obtenu que sur une courte distance (les atomes de cobalt, nickel et manganèse ne sont pas parfaitement alignés dans la structure). L’étude par absorption X permet de confirmer les degrés d’oxydation des métaux prédits pas les calculs ab initio. Cette publication est représentative de nombreuses autres dans la littérature. Un matériau d’électrode est obtenu par une voie de synthèse, l’optimisation de celle-ci étant plus ou moins détaillée. Dans le cas de NMC, citons les voies sol-gel[90], par émulsion[91], les synthèses assistées par plasma[92], nanoetching template[93], le frittage isotherme[94], spray drying et la co-précipitation[95]. Il est ensuite caractérisé par DRX et TEM. Les techniques de caractérisation se sont multipliées par la suite. Elles permettent de contrôler ou de caractériser la structure obtenue, qui sera l’hôte des ions lithium.
Analyse de la microstructure des matériaux actifs d’électrode positive de batteries lithium-ion. Le matériau est ensuite testé en configuration batterie[96]. Il est préparé en électrode qui est utilisée en tant que positive, le plus souvent dans une pile bouton, face au lithium métal. Ce dernier est choisi car, sur peu de cycles, il a un potentiel stable à 0 V. La mesure du voltage de la batterie est donc la mesure du potentiel du matériau synthétisé. Sur peu de cycles, il est également stable en capacité car utilisé en excès. La première étude consiste à examiner les courbes de charge/décharge de la batterie. Pour une nouvelle composition, il est difficile de prédire qu’elle sera la capacité utilisable selon la plage de potentiel. Les calculs ab initio permettent d’en avoir une idée, mais il est nécessaire d’effectuer le test en batterie. Yabuuchi et Ohzuku ont étudié la capacité réversible en fonction de la borne haute de charge, autrement dit en fonction du nombre de lithium extraits de la structure. La stabilité structurelle du matériau est étudiée par DRX ex-situ en mesurant la variation des paramètres de maille. Ils montrent qu’il n’y a pas d’expansion volumique jusqu’à une stœchiométrie de Li1/3Ni1/3Mn1/3Co1/3O2. La Figure 1.9.a illustre les mesures du volume de la maille cristalline en fonction de la stœchiométrie. Pour x ≥ 1/3, aucun changement n’est observé. Ceci résulte en fait de la baisse de a couplée à l’augmentation de c, qui maintiennent le volume de la maille hexagonale (0.886a2c) constant. A des stœchiométries plus faibles, a est constant alors que c décroit fortement, ce qui conduit à une baisse du volume, jusqu’à 5 % en fin de charge. L’étude de stabilité structurelle est accompagnée d’une étude de stabilité de la capacité déchargée sur plusieurs cycles. La Figure 1.9.b illustre la capacité déchargée en fonction du nombre de cycles, pour différents potentiels de fin de charge. Le matériau démontre une stabilité (200 mAh/g) sur 15 cycles pour des potentiels de fin de charge inférieurs ou égaux à 4.6 V. Au-delà, une perte de stabilité significative est observée. Cette borne de charge correspond à Li0.24Ni1/3Mn1/3Co1/3O2. La structure connait une diminution volumique significative à des stœchiométries plus faibles ce qui entraîne une instabilité du matériau. Aujourd’hui, les matériaux sont utilisés jusqu’à 4.3 V pour assurer la stabilité sur des centaines de cycles.

Méthodologie et enjeux de l’étude du lien entre la morphologie du matériau actif d’électrode et ses performances électrochimiques.

Travailler sur la morphologie est une des approches principales utilisées dans la littérature pour jouer sur les performances des matériaux actifs. Il est évident que la géométrie impacte directement les trois composantes de l’insertion/l’extraction du lithium : le transfert de charge a lieu à l’interface entre l’électrolyte et les plans d’insertion du lithium et les phénomènes de transport se déroulent dans le volume du matériau actif, le long des chemins de diffusion. Pour une composition donnée, changer la morphologie change ainsi les performances en puissance. Faciliter le processus électrochimique se fait en augmentant la surface de contact électrolyte/matériau actif ou en réduisant la longueur de diffusion des ions lithium. Ces deux aspects sont souvent liés – ouvrir les porosités entraîne les deux par exemple – et il est difficile d’identifier sans ambiguïté le paramètre clé qui pourrait, s’il existe, prédire les performances. Ceci est fait en étudiant le matériau en électrode poreuse, dont la structure peut être plus déterminante que le matériau actif. Ceci est d’autant plus problématique que changer la microstructure ne peut se faire sans impacter les densités d’énergie volumique, la stabilité thermique et la cyclabilité. Une compréhension fine du lien entre morphologie et processus électrochimique est donc nécessaire pour obtenir le meilleur compromis, en fonction de l’application. Des articles de revues présentent les nombreuses morphologies proposées dans la littérature[67,69]. Nous avons choisi d’axer cette partie sur les techniques et méthodologies employées dans la littérature pour lier morphologie et performances électrochimiques.
La méthodologie classique d’étude des liens entre performances électrochimiques et morphologies prologe celle pour l’exploration de nouvelles compositions ou synthèses présentée dans la partie précédente. Un matériau est synthétisé et sa structure contrôlée par DRX (couplée possiblement à d’autres techniques d’analyse de structures et de composition). La morphologie est visualisée par microscopie électronique à balayage ou à transmission selon la taille des motifs à visualiser. On ajoute aux études de stabilité en cyclage une étude des performances en puissance, le plus souvent en décharge. La capacité déchargée est mesurée en fonction du courant appliqué. De nombreuses publications adoptent cette démarche[63,66,71,73,93,112–118]. Elle présente l’intérêt de tester le matériau en condition batterie, c’est-à-dire dans un milieu proche d’une application possible. Le paramètre géométrique qui pourrait expliquer les performances – porosité, surface développée, forme des cristallites… – est ensuite discuté vis-à-vis des processus de transport et de transfert.
La discussion s’appuie sur deux techniques principales : la microscopie électronique et la mesure de surface développée par utilisation de la théorie Brunauer, Emmett et Teller (BET) sur les isothermes d’adsorption d’azote. Elles ne donnent pas d’information sur le processus électrochimique directement, mais demande une interprétation de l’impact de ce qui est observé sur l’utilisation en batterie. Certaines sont illustrées sur la Figure 1.12. Il y a peu de consensus dans la littérature sur le paramètre géométrique déterminant pour les oxydes lamellaires. Zhang et al. ont identifié la surface BET comme bon indicateur des performances sur des nanoparticules de matériaux Li-rich[71]. C’est également le cas pour Noh et Cho[119] sur des agglomérats micrométriques de LiNi0.5Co0.2Mn0.3O2. Le diamètre des agglomérats a été identifié comme paramètre clé par Wu et al.[73] et Lee et al.[113] sur des compositions (1/3:1/3:1/3). L’augmentation de porosité a aussi été évoquée pour expliquer une augmentation des performances par de nombreux groupes[66,93,116]. Elle conduit à une meilleure imprégnation de l’électrolyte, comme reproduit de [93] sur la Figure 1.12.a, ce qui réduit la longueur de diffusion en phase solide pour les ions lithium. La surface BET est assimilée à la surface électroactive, son augmentation conduirait à la facilitation des phénomènes de transfert. Oh et al.[42] ont également proposé que la morphologie pouvait impacter la conductivité électronique, permettant ainsi des performances en puissance plus élevées. Leur matériau est sous la forme d’agglomérats de 10 µm de diamètre formés par des particules primaires qui plongent vers le cœur des agglomérats, facilitant ainsi le transport électronique (voir Figure 1.12.b). Leur approche est validée par le fait qu’ils proposent une architecture d’électrode comportant moins d’additifs conducteurs, mais des performances supérieures. La conduction électronique est toutefois rarement considérée comme limitante dans la littérature.
La dissonance des observations expérimentales peut venir de plusieurs facteurs. Tout d’abord, il est possible qu’il n’existe pas de paramètre géométrique rendant compte des performances de l’ensemble des oxydes lamellaires. Les morphologies rapportées dans la littérature sont en effet très différentes, et il n’est peut-être pas possible de rapprocher le comportement de nanofils avec celui de larges agglomérats. Il y a cependant également des problèmes fondamentaux de compréhension.
L’un des soucis d’interprétation provient de la pertinence des paramètres géométriques discutés. L’ouverture des porosités conduit à l’augmentation de la surface spécifique. Inversement, les surfaces développées sont augmentées en ouvrant la porosité du matériau dans le cas des agglomérats microstructurés. Il y a donc une ambigüité entre les deux paramètres, d’autant plus que les volumes poreux ne sont jamais mesurés. Nous n’avons en effet pas la connaissance de publication utilisant une technique de porosimétrie pour quantifier ce paramètre sur les oxydes lamellaires pour application Li-ion. Le lien avec la porosité reste ainsi assez évasif, puisque non quantifié, mais seulement visuel. Ce qui importe au final est la longueur de diffusion, et certains auteurs utilisent des images MEB de matériaux découpés à la sonde ionique focalisée (FIB) pour mesurer les particules primaires comme cela est illustré sur la Figure 1.13.a[121]. On a ainsi un accès direct cette longueur (ici la moitié d’une cristallite de 2 µm, soir 1 µm). Cette technique reste toutefois peu employée dans la littérature, du fait de l’utilisation d’un microscope équipé d’un FIB. La surface spécifique est mesurée à partir des isothermes d’adsorption d’azote. Il s’agit d’une mesure de toute la surface accessible du matériau. Comme nous l’avons déjà mentionné, les matériaux lamellaires sont orientés et l’insertion du lithium ne se fait que sur les plans cristallographiques {010}. La surface BET surestime donc la surface réellement électroactive. Il y a dans la littérature un caractère systématique de la mesure de sa surface qui perd de sa pertinence lorsqu’elle est supposée égale à la surface électroactive. Il a été montré que les cristaux d’oxyde lamellaire croissent préférentiellement perpendiculairement à la direction [001], de telle sorte que les faces {010} sont minoritaires[122]. Ce constat a tout d’abord été utilisé pour la fabrication d’électrodes en couche mince de LiCoO2 pour des micro-batteries[123]. Il est aujourd’hui à la base de stratégies d’augmentation des performances. Les chercheurs favorisent la croissance des plans {010} pour augmenter la surface d’échange ou exposent volontairement ces plans à l’extérieur des agglomérats comme illustré sur la Figure 1.12.c[120,124,125]. Li et al.[124] préparent la composition de stœchiométrie (1/3:1/3:1/3) par méthode sol-gel en présence d’éthylène glycol, qui joue le rôle d’agent chelatant qui permet d’exposer les plans {010} à l’extérieur des agglomérats. La Figure 1.13.b montre les images TEM de leur matériau, on peut voir que les plans de métaux de transition parallèles à la face étendue de la particule. Comparé à un matériau préparé par co-précipitation, ils obtiennent de meilleures performances en puissance. Ils ne sont toutefois pas capable d’identifier le paramètre géométrique pertinent pour expliquer les meilleures performances en puissance et proposent trois explications : l’imprégnation de l’électrolyte dans la structure poreuse, l’exposition des plans {010} qui facile le transfert de charge, et la cristallinité plus élevée du matériau.
La porosité impacte intuitivement le processus de diffusion par le biais de la longueur de diffusion alors que la surface développée joue sur le processus de transfert. Etudier ces deux processus permettrait donc de mieux comprendre comment la géométrie change les performances. Les trois composantes du processus électrochimique sont toutefois intimement liées, si bien que l’on peut rapidement conclure qu’un phénomène est favorisé alors qu’il s’agit en réalité d’un autre. Un bon exemple a été donné par Garbeseck et al. [126]. Ils ont montré, à partir des données de neuf publications sur LiFePO4, que l’effet de l’enrobage de carbone est minimal face à la taille des particules. Toutes ces publications présentent la conduction électronique comme le processus limitant les performances, et donc concluent que l’enrobage de carbone est le paramètre clé.

Etude par adsorption azote, porosimétrie mercure et pycnométrie hélium.
Les matériaux synthétisés – précurseur et NMC850-900-950-1000 – ont été étudiés par porosimétrie mercure. La Figure 2.20 montre le volume poreux cumulé du précurseur et des matériaux calcinés en fonction du diamètre des pores responsables de la porosité.
Pour les tailles de pores supérieures à 10 µm, la porosité mesurée est liée à une intrusion dans le lit de poudre et non représentative d’une réelle porosité. Elle a été soustraite sur la Figure 2.20. Elle est suivie par une partie non linéaire, jusqu’à un palier constant, qui est représentative des pores dans les grains ou agglomérats. La valeur du palier donne la porosité totale du matériau : 0.941 mL/g pour le précurseur, 0.631 mL/g pour NMC850, 0.588 mL/g pour NMC900, 0.522 mL/g pour NMC950, et 0.260 mL/g pour NMC1000. La calcination entraîne donc une fermeture de la porosité du matériau. La porosité de NMC950 est notamment élevée. La porosité du précurseur augmente continuellement pour des pores de diamètres de 5 µm à 400 nm, là où celles de NMC850 et NMC900 présentent deux populations distinctes de pores : la première de diamètres entre 3 et 1 µm et la seconde à des diamètres inférieurs à 500 nm. Cette population de petits pores n’est pas clairement définie pour NMC950 et NMC1000 sur les courbes de volumes poreux cumulés.
Pour pouvoir mieux identifier les classes de pores le graphique du volume poreux incrémental en fonction du diamètre moyen est présenté sur la Figure 2.21. Il s’agit de la dérivée du volume poreux cumulatif. On retrouve tout d’abord la population de pores à des diamètres supérieurs à 10 µm. Elle est suivie de la population de pores centrées à 3.9 µm pour le précurseur et NMC950-1000 et à 2.8 µm pour NMC850-900. Il s’agit des pores majoritaires en volume pour tous les matériaux (Figure 2.20). Pour le précurseur, une seconde population forme un épaulement entre 500 nm et 2 µm de diamètre. On la retrouve, de façon plus détachée, pour NMC850, NMC900 et, de façon limitée, pour NMC950. Il y a une légère différence de diamètre moyen entre les matériaux : 400 nm pour NMC850, 600 nm pour NMC900, et 700 nm pour NMC950. Les particules plus épaisses laissent des pores plus grands dans les agglomérats. NMC1000 présente peu de porosité à ces diamètres de pores.
Le Tableau 2-3 récapitule les valeurs de volumes poreux et de diamètre moyen que l’on trouve dans le précurseur et les matériaux calcinés. La première population, située à des diamètres de pores élevés, a le même volume de 0.5 mL/g pour les matériaux NMC850-900-950. Elle a un volume plus faible pour NMC1000, 0.26 mL/g. D’après les clichés MEB, elle correspond certainement à la porosité inter-agglomérats laissée dans la poudre tassée. NMC1000 laisse ainsi moins de porosité, ce qui peut être dû à l’existence d’une faible fraction de particules fines (de diamètre < 2 µm) visibles sur les résultats de distribution de tailles de particules. La seconde population de pores présente dans NMC850-900-950 représente un volume différent entre les matériaux, qui augmente avec la température de calcination : il s’agit de la porosité interne des agglomérats. Elle vaut 0.131 mL/g, 0.088 mL/g, et 0.022 mL/g pour les calcinations à 850, 900, et 950 °C, respectivement Si la porosité des agglomérats était évidente chez NMC850 et 900 de par les clichés MEB, les résultats de porosimétrie mercure démontrent ici que NMC950 présente une porosité intra-agglomérat non négligeable. Pour NMC1000, le volume mesuré à ces diamètres de pores est faible.
Analyse de l’étape cinétique limitante du processus électrochimique.
Ce chapitre vise à étudier, en configuration batterie, les matériaux obtenus par co-précipitation et présentés dans le chapitre précédent. Les techniques d’électrochimie permettent de caractériser la réponse à une demande, soit en courant (galvano), soit en potentiel (potentio). Elles constituent les outils centraux de toute étude de matériau actif pour batterie Li-ion. Le matériau est étudié dans des conditions proches de celles qu’il connaîtra au cours de son utilisation, sa réponse est donc de premier intérêt. Un matériau actif est toujours caractérisé par un cyclage galvanostatique qui rend compte de sa capacité à délivrer de l’énergie sur un certain nombre de cycles[1]. Cela donne des informations sur sa stabilité structurelle et sa possible utilisation. Dans le cas de LiNi1/3Mn1/3Co1/3O2, il a déjà été démontré que cette composition d’oxyde lamellaire peut délivrer des capacités stables sur plusieurs dizaines de cycles en configuration demi-pile face au lithium métal[2,3]. Des cyclabilités proches de 1 000 cycles sont atteintes pour des batteries complètes industrielles de type graphite/NMC. Le cyclage galvanostatique n’est donc ici qu’une vérification de la qualité des matériaux que nous avons synthétisés.
De nombreuses techniques électrochimiques sont utilisées afin d’étudier, qualitativement ou quantitativement, le processus d’intercalation des ions lithium. On peut citer la spectroscopie d’impédance (EIS)[4,5], les titrages galvanostatique et potentiostatique (GITT/PITT)[4–6] ou encore la voltampérométrie cyclique (CV)[7–9]. Elles permettent d’identifier le processus physique limitant les performances d’un matériau ou peuvent encore donner accès à des paramètres d’entrée des outils de modélisation. La quantification des paramètres cinétiques du processus électrochimique, coefficient de diffusion et courant d’échange, est également courante[4,6,10–14].
Le but ici est de mettre en perspective les comportements électrochimiques des matériaux synthétisés dans la partie précédente avec leur morphologie. Les trois composantes du processus électrochimique sont nécessairement impactées par la géométrie : le transfert de charge a lieu à l’interface entre l’électrolyte et le matériau actif, alors que la conduction électronique et la diffusion ionique se déroulent dans le volume du matériau actif et peuvent être affectées par l’agglomération. Nous avons observé et quantifié des différences de trois paramètres qui ont été liées aux performances électrochimiques dans la littérature:
Les surfaces spécifiques changent l’interface électrolyte/matériau actif et donc potentiellement le transfert de charge[15]
Les porosités intra-agglomérats réduisent ou augmentent la distance de diffusion des ions lithium en phase solide[16]
Les formes des cristallites ont potentiellement un impact sur les processus de transport et interfaciaux[12,17]
La première partie de ce chapitre s’intéresse à la réponse sous courant de NMC850, NMC900, NMC950 et NMC1000. Le régime galvanostatique s’apparente le plus aux conditions d’utilisation en batterie et permet notamment de comparer les performances en puissance. Nous discuterons des paramètres géométriques qui reflètent le mieux les différences observées. La conductivité électronique est ensuite étudiée par spectroscopie diélectrique large-bande, technique qui permet de différencier nos matériaux. Nous étudions ensuite la réponse au cours d’une voltampérométrie cyclique, afin de détailler l’étape cinétique limitant le processus électrochimique selon la microstructure. Une discussion plus approfondie, notamment quantitative, de la cinétique du processus électrochimique sera faîte au chapitre suivant car elle demande l’introduction d’outils supplémentaires.
Performances électrochimiques en régime galvanostatique.
Tenue en cyclage.
La Figure 3.1 montre la tenue en cyclage à 1C des matériaux NMC850, NMC900, NMC950, et NMC1000 sur 100 cycles face au lithium métal. Entre 80 et 84 % de la capacité est conservée, ce qui est attendu pour des matériaux NMC. Nous ne voyons ici pas de différence en vieillissement. On pourrait s’attendre à ce que les matériaux présentant les plus grandes surfaces développées (NMC850-900) perdent plus rapidement de la capacité, du fait d’une augmentation de la surface en contact avec l’électrolyte. Sur les plages de potentiels utilisées, les électrolytes carbonates sont relativement stables[18], mais les oxydes lamellaires eux-mêmes peuvent subir des dégradations en surface (changement d’état d’oxydation des métaux de transition en surface[19] ou distorsion de la structure lamellaire[20]). D’un autre côté, la surtension présente à l’interface électrolyte/matériau actif est répartie sur une surface plus importante, et les contraintes liées sont donc moins fortes. Dans la configuration demi-pile, nous ne voyons au final pas de différence entre nos matériaux. Il est aussi tout à fait possible que les pertes de capacités observées proviennent de l’électrode négative, puisque le lithium métallique réagit spontanément avec les solvants et sels d’électrolyte[21]. Une étude approfondie des phénomènes de vieillissement en demi-pile et système Li-ion serait un prolongement possible des travaux présentés dans cette thèse.
Potentiel en circuit ouvert.
Description de la réponse de LiNi1/3Mn1/3Co1/3O2 à une expérience de GITT.
La technique de titrage coulométrique (GITT) a été introduite par Wagner en 1953 sur le composé AgxS[22]. Une GITT consiste en l’application d’un pulse de courant suivi d’une relaxation. Un pas de titrage typique obtenu en charge est présenté sur la Figure 3.2. La commande en courant est un signal carré caractérisé par son amplitude et sa durée t, représenté en rouge (axe y de droite). Pendant le temps du pulse, le potentiel augmente fortement jusqu’à une valeur limite. L’augmentation se décompose en deux parties : une partie purement ohmique due à la résistance de la batterie, et une seconde de polarisation, Et, due à l’intercalation ou l’extraction des cations lithium selon que le courant appliqué soit négatif ou positif. Chaque pas induit ainsi un changement de composition du matériau actif. Une fois le pulse de courant terminé, le potentiel relaxe jusqu’à une valeur d’équilibre. La différence entre le nouveau potentiel d’équilibre et celui issu du pas précédent, Es, représente le changement en potentiel lié au changement de composition du matériau. Si on suppose que l’électrode de lithium métallique a un potentiel constant, on peut ainsi mesurer le potentiel en circuit ouvert de LixNi1/3Mn1/3Co1/3O2 en fonction de la stœchiométrie en lithium.
Un travail pour se placer dans les « bonnes » conditions expérimentales est toutefois nécessaire. Différentes conditions sont décrites dans la littérature : pulses courts de forte intensité[8,23], pulses longs de faible intensité[5], temps de relaxation longs et courts[8,24]. En l’absence d’autodécharge de la batterie, on peut postuler qu’un temps de relaxation le plus long possible est le plus adéquat pour atteindre un régime stationnaire et ainsi mesurer le potentiel en circuit ouvert. Généralement, on préfèrera travailler avec un courant le plus élevé possible : à quantité égale de charges injectées par pas, le temps d’application du courant est minimal. On s’assure ainsi qu’il n’y ait pas de relaxation du matériau pendant le pulse. Cela pose toutefois des problèmes de chute ohmique et de dissipation capacitive.
La première étape nécessaire pour traiter les données obtenues en GITT est de corriger la chute ohmique à chaque pas. Il faut en effet s’assurer qu’elle ne dépend pas du potentiel, sinon il faudra à chaque pas mesurer l’impédance. Il a été envisagé de travailler avec des montages à 3 électrodes, notamment pour les mesures d’impédance. Les montages à trois électrodes permettent en effet de dissocier la contre électrode de l’électrode de référence. L’électrode de référence ne travaille donc pas, et peut être supposée plus stable que lorsque du lithium y est déposé/extrait par cyclage. La problématique se situe au niveau du choix de l’électrode de référence, qui doit être stable aux potentiels utilisés dans les batteries Li-ion, dans les électrolytes carbonates et également présenter une cinétique rapide vis-à-vis des électrodes qui travaillent. Elle doit également venir se placer au plus proche de l’électrode étudiée afin de minimiser la chute ohmique due à l’électrolyte, sans pour autant gêner la diffusion ionique entre les électrodes positive et négative.
Dans la littérature, le lithium métallique est largement utilisé comme électrode de référence[25]. On trouve également l’utilisation de matériaux présentant un plateau en potentiel, comme LiFePO4 et Li4Ti5O12[26]. Nous avons utilisé les montages disponibles au laboratoire qui sont constitués de connexions Swagelok en T avec comme électrode de référence le lithium métallique. L’électrode de référence n’y est pas idéalement placée : elle ne se place pas entre les deux électrodes qui travaillent (électrode de travail et contre-électrode), mais sur le côté.

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Table des matières

Introduction générale
Références bibliographiques de l’introduction générale
CHAPITRE 1. Contexte bibliographique et positionnement du travail de doctorat.
I Historique et technique des dispositifs électrochimiques Li-ion.
I.1. Systèmes de stockage électrochimiques, introduction aux matériaux d’insertion et batteries lithium ion
I.1. Batteries Li-ion : constituants et enjeux liés à mon travail doctoral
II Méthodologies d’étude des matériaux actifs de batterie Li-ion et exploration des liens entre microstructure et performances électrochimiques
II.1. Méthodologie d’évaluation d’une nouvelle composition chimique comme matériau actif d’électrode : exemple de LiNi1/3Mn1/3Co1/3O2 (NMC).
II.2. Méthodologie et enjeux de l’étude du lien entre la morphologie du matériau actif d’électrode et ses performances électrochimiques.
II.3. Positionnement des travaux doctoraux
Références bibliographiques du premier chapitre
CHAPITRE 2. Synthèse et caractérisation microstructurale d’oxyde lamellaires modèles 
I Mise en place et optimisation de la voie de synthèse pour l’obtention du précurseur
hydroxyde Ni1/3Mn1/3Co1/3(OH)2
I.1. Montage de co-précipitation.
I.2. Méthodologie d’essai-erreur pour obtention d’une morphologie sphérique
I.3. Comparaison des performances avec une référence commerciale après calcination à 900°C
II Etape de calcination : contrôle du frittage des cristallites
II.1. Changement de la température de calcination
II.2. Etude par adsorption azote, porosimétrie mercure et pycnométrie hélium
III Conclusion du premier chapitre
Références bibliographiques du deuxième chapitre
CHAPITRE 3. Analyse de l’étape cinétique limitante du processus électrochimique
I Performances électrochimiques en régime galvanostatique
I.1. Tenue en cyclage
I.2. Potentiel en circuit ouvert.
I.3. Polarisation sous régime galvanostatique.
I.4. Performances en puissance.
II Etude la conductivité électronique par spectroscopie diélectrique large bande
II.1. Technique de spectroscopie diélectrique large bande : quelques bases théoriques, intérêt de la technique sur nos matériaux et montage expérimental.
II.2. Résultats sur NMC850 et NMC1000.
III Etude par voltampérométrie cyclique
III.1. Comportement en voltampérométrie cyclique : exemple de NMC950
III.2. Comparaison de NMC850-900-950-1000
III.3. Etude de l’étape cinétique limitante par suivi de courant de pic
IV Conclusions
Références bibliographiques du troisième chapitre.
CHAPITRE 4. Analyse du processus électrochimique par simulation numérique.
I Formules analytiques utilisées pour étudier par électrochimie le transport ionique dans les matériaux d’insertion.
I.1. Définition du système étudié.
I.2. Formules analytiques dérivées des techniques de titrage potentiostatique et coulométrique (PITT/GITT) et de voltampérométrie cyclique
I.3. Discussion sur l’applicabilité des formules analytiques dérivées pour mesurer le coefficient de diffusion
I.4. Conclusions
II Modélisation de la réponse électrochimique
II.1. Equation aux dérivées partielles, schéma de discrétisation et choix de paramètres.
II.2. Optimisation des paramètres r, D, i0 et βs pour simuler la réponse anodique
II.3. Introduction d’une distribution de tailles de particules
II.4. Simulation de la réponse anodique
III Conclusions.
Références du quatrième chapitre.

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