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Mécanisme d’action
Du fait de leur structure chimique de base commune, les benzodiazépines sont les ligands d’un site allostérique du récepteur GABAa. Le GABA (Acide Gamma Amino-Butyrique) est le neuromédiateur inhibiteur majoritaire du SNC [8].
Le récepteur GABAa est un récepteur ionotropique, canal ionique pour l’anion Cl-.
Il est pentamérique (composé de 5 sous unités parmi les 8 types de sous-unités connus). Certaines sous unités ont également des sous types ((1-6), (1-3), (1-3), , , (1-3), et ) [9].
Les sous-types de récepteur GABAa doivent assembler 2 sous unités et ainsi qu’une sous-unité pour être sensibles aux BZD [10].
Le neuromédiateur GABA se fixe à l’interface des sous-unités α et alors que le BZD se fixera à l’interface des sous-unités α et γ.
Le GABA, en se fixant à l’interface des sous-unités α et , modifie la conformation du récepteur et permet l’entrer de Cl- dans la cellule ce qui induit son hyperpolarisation due à̀ l’entrée de charges négatives (Cl-). Il en résulte une baisse de l’excitabilité du neurone post-synaptique [8].
Les BZD ayant leur propre site allostérique sur ce canal chlore, sont des composés dits modulateurs allostériques positifs (MAP) des récepteurs GABAa.
De ce fait, en se liant à ces récepteurs, en présence de GABA, elles augmentent l’affinité́ du GABA et permettent une ouverture du canal chlore plus fréquente que quand le GABA agit seul. Elles renforcent ainsi ses effets.
La coexistence entre GABA et BZD augmente encore l’hyperpolarisation de la cellule et permet d’obtenir donc une capacité́ d’excitabilité́ du neurone encore moins importante [9].
Contrairement aux barbituriques et à l’alcool qui peuvent activer directement la conductance au chlore en se fixant sur d’autres sites du récepteur GABAa, les BZD nécessitent la présence de GABA sur ses sites agonistes pour agir. Elles n’ont donc pas d’activité́ propre [2].
Anxiolytique
L’indication « manifestations anxieuses sévères et/ou invalidantes » regroupe deux situations distinctes :
– Les manifestations anxieuses liées à un trouble anxieux (trouble anxieux généralisé, trouble panique [avec ou sans agoraphobie], trouble de l’anxiété sociale ou phobie sociale, trouble obsessionnel compulsif [TOC] état de stress post-traumatique) [17]
– Les manifestations anxieuses liées à un trouble de l’adaptation (ensemble de syndromes de réponse au stress qui se développent après un événement de vie difficile [18].
Ces benzodiazépines, administrées par voie orale, se distinguent principalement par leur demi-vie et la présence de métabolites actifs. En effet, la majorité d’entre elles ont une demi-vie longue et sont, en outre, transformées en métabolites actifs ayant aussi une demi-vie importante, ce qui explique leurs effets prolongés [19] .
Les BZD anxiolytiques sont également souvent prescrites en prévention et traitement du delirium tremens et des autres manifestations du sevrage alcoolique, pour soulager les tremblements essentiels et les effets indésirables moteurs des antipsychotiques (akathisie), en cas d’insomnie d’endormissement (souvent liée à un état anxieux), en pré-médication des interventions chirurgicales.
Enfin, les BZD anxiolytiques peuvent être prescrites en association avec un traitement antidépresseur, en cas de dépression de type névrotique, dont la composante anxieuse est importante [16].
Onze benzodiazépines par voie orale sont prises en charge dans le « traitement des manifestations anxieuses sévères et / ou invalidantes ». (Certains de ces médicaments possèdent également d’autres indications non concernées par ce document).
Hypnotique
Les somnifères les plus prescrits aujourd’hui font partie de la famille des benzodiazépines et apparentés.
On classera une nouvelle fois, les BZD selon leur durée d’action [20] :
– Celles à courte durée d’action sont prescrites pour les insomnies de début de nuit ou contre les insomnies occasionnelles (durant deux ou trois jours, par exemple en cas de décalage horaire).
– Celles à durée d’action moyenne sont utiles en cas d’insomnies de milieu de nuit ou en cas d’insomnies à court terme (d’une durée d’une à trois semaines, souvent en lien avec des problèmes familiaux ou professionnels).
Ces causes sont ponctuelles et les conséquences sont en général réversibles lorsque l’élément déclencheur disparaît.
Il faudra en premier lieu traiter la cause de l’insomnie. Si le retentissement pour le patient est trop grand, un traitement hypnotique par BZD sur une courte durée est envisageable en complément [2].
– Enfin, les benzodiazépines à durée d’action prolongée sont utilisées pour les insomnies de fin de nuit ou chroniques.
Néanmoins, chaque personne possède une sensibilité particulière et la durée d’action d’un hypnotique peut varier d’un patient à l’autre [21].
De plus, si le problème d’insomnie persiste ou récidive, même après la disparition de la cause de l’insomnie (problèmes familiaux, stress…), et devient chronique, il n’y a en théorie plus d’indication à la prise de BZD (sauf en dernier recours), mais plutôt à une prise en charge personnalisée, selon une investigation étiologique et une approche cognitivo-comportementale [22]
Anticonvulsivante
Certaines BZD sont utilisées en première intention dans la crise d’épilepsie et l’état de mal épileptique pour leur action rapide (mais pas au long cours car l’efficacité diminue après quelques mois).
Leur action est très rapide, moins de 4 minutes et durant 2 à 3h par voie intra-rectale ou IV et action en 30 à 60min et durant 6 à 12h par voie orale [16].
Les BZD avec un effet anticonvulsivant important (diazépam) ou prédominant (clonazepam) sont indiquées dans le traitement de toutes les formes d’épilepsie généralisée et partielle chez l’adulte et chez l’enfant, soit en monothérapie temporaire, soit en association à un autre traitement antiépileptique [17].
Autres indications
Les BZD possèdent d’autres indications, comme la prévention et le traitement des manifestations du sevrage alcoolique notamment du delirium tremens, ou encore dans la prévention des crises comitiales, lors des spasmes dues au tétanos.
Elles possèdent également des indications dans la prémédication à certaines explorations fonctionnelles, sédations vigiles, prémédication avant l’induction de l’anesthésie, induction de l’anesthésie, sédation anesthésique en association avec d’autres agents anesthésiques et analgésiques, ainsi que la sédation en unité de soins intensifs [16]
On notera que l’usage de BZD sous forme injectable (clorazepate, diazépam et clonazepam) est réservé aux situations d’urgence (délai d’action <5minutes après administration intra-rectale ou IV ou lorsque la voie orale est impossible). Cependant l’injection IV nécessite une surveillance en continu des paramètres vitaux et implique donc de disposer de moyen de réanimation.
Du fait de ses propriétés particulièrement myorelaxantes, le tetrazepam (Myolastan) était commercialisé en traitement d’appoint des contractures musculaires douloureuses d’origine rhumatologique. Son AMM française a été suspendue en Juillet 2013 pour des raisons de santé publique et notamment suite à la mise en évidence de graves effets secondaires cutanés qui apparaissaient fréquemment [7].
Effets indésirables et précautions d’emploi
Dans l’ensemble, les BZD sont des médicaments bien tolérés, surtout lorsqu’elles sont utilisées à bon escient (respect des posologies et des modalités de traitement). Les effets secondaires sont relativement rares (< 5 %). Les plus fréquents sont :
– Les réactions paradoxales (anxiété, agitation, irritabilité voire agressivité, confusion, hallucinations)
– Les El neuropsychiatriques (somnolence, ataxie, vertiges, amnésie transitoire, difficultés de concentration).
– L’amnésie antérograde fait également partie de ces EI avec l’altération des processus de mémorisation à long terme qui apparaît dans les heures qui suivent la prise. Cette amnésie est susceptible de survenir aux doses thérapeutiques, le risque augmentant proportionnellement à la dose. Elle peut en principe survenir avec toutes les benzodiazépines, mais elle est plus fréquente à des doses élevées, avec des benzodiazépines à courte demi-vie et à forte lipophilicité (passage rapide au niveau de la barrière hémato-encéphalique), lors des premières prises et chez des sujets souffrant déjà de troubles mnésiques. L’amnésie antérograde est quasi systématique aux doses utilisées en anesthésiologie [24].
Les enfants et les personnes âgées sont particulièrement sensibles et présentent parfois des effets paradoxaux sous forme d’état d’excitation avec désinhibition et parfois avec confusion. Ces effets ne sont rencontrés que très rarement chez l’adulte.
– Parmi les autres effets indésirables et risques, peuvent être mentionnées les éruptions cutanées maculo-pulpeuse, les manifestations d’hypotonie, d’hypotension, d’hypersécrétion bronchique et de dépression respiratoire en cas de surdosage massif (clonazépam).
– On notera que tout traitement d’une durée supérieure à 1 mois et/ou à posologie élevée expose à un risque de tolérance et de pharmacodépendance physique et psychique avec syndrome de sevrage à l’arrêt brutal du traitement : anxiété rebond, insomnie, tremblements, crampes, céphalées, nausées, plus rarement convulsions, état confusionnel voire hallucinations et délires. Le processus de sevrage doit donc se faire sous suivi médical.
La survenue d’une dépendance semble favorisée par la durée du traitement, la dose, l’association de plusieurs BZD (anxiolytiques et/ou hypnotiques) et enfin des antécédents d’autres dépendances, médicamenteuses ou non, y compris alcoolique [17].
Tous ces effets indésirables sont également observables avec le Zopiclone et Zolpidem
Précautions d’emploi et contre-indications
→ Conducteurs et utilisateurs d’engins : médicament dépresseur du SNC, baisse de la vigilance, effet sédatif, sensations d’euphorie.
→ Hypersensibilité (rare).
→ Insuffisance respiratoire, apnées du sommeil (effet dépresseur respiratoire).
→ Myasthénie (effet myorelaxant).
→ Porphyrie.
→ Grossesse et allaitement : Les BZD sont à éviter car elles passent la barrière placentaire et dans le lait maternel.
o Au cours du premier trimestre, il existe un risque tératogène faible.
o Au cours du troisième trimestre, il existe un risque d’effets indésirables (détresse respiratoire, hypotonie, hypothermie) chez le nouveau-né avec possibilité de retards de croissance et d’acquisition chez les enfants nés de mères ayant consommé des BZD durant la grossesse.
→ Contre-indication relative en cas de toxicomanie ou de comportement addictif (sauf dans le cas de l’aide au sevrage).
→ Personnes âgées : augmentation du risque de chutes responsables de fractures et de confusion.
→ Conduite à tenir : respecter les doses maximales recommandées, réduire les posologies en cas de risque de surdosage (patient âgé, insuffisance hépatique).
L’intoxication ou le surdosage se manifestent principalement par une dépression centrale avec somnolence, hyporéflexie, difficultés d’élocution, confusion mentale (cas bénins) pouvant aller jusqu’à une dépression respiratoire et un coma selon la quantité ingérée.
Le pronostic vital peut être menacé, notamment dans les cas de poly-intoxication (y compris avec l’alcool). Les intoxications sont traitées par le flumazénil (Anexatel, antagoniste compétitif d’affinité élevée pour les récepteurs aux BZD). Administré par voie intraveineuse, l’action est extrêmement rapide (< 1 minute) mais brève (demi-vie plasmatique, 30 minutes), d’où la nécessité de le réadministrer à plusieurs reprises pour maintenir l’antagonisme.
Le flumazénil est aussi indiqué en anesthésiologie, pour l’interruption d’une sédation ou d’une anesthésie générale induite et maintenue par une benzodiazépine [17].
→ Interactions à prendre en compte [17] :
o Alcool (boissons alcoolisées et médicaments contenant de l’alcool), médicaments dépresseurs du SNC. (Dérivés morphiniques et traitements de substitution, antipsychotiques, antidépresseurs, antihistaminiques H1, antihypertenseurs centraux…), cimétidine (potentialisation des effets sédatifs centraux → associations déconseillées ou avec prudence.
o Morphiniques (antitussifs et analgésiques), buprénorphine, barbituriques : risque majoré de dépression respiratoire, pouvant être fatale → associations déconseillées.
o Phénytoïne : variations des concentrations plasmatiques de phénytoïne (augmentation avec signes toxiques) → association avec prudence.
o Buspirone : risque de majoration des effets indésirables de la buspirone → association avec prudence.
o Stiripentol : inhibition du métabolisme hépatique du diazépam, d’où l’augmentation de ses concentrations plasmatiques, avec risque de surdosage
→ association avec prudence, surveillance clinique, dosage plasmatique de la BZD et adaptation éventuelle de Posologie.
Modalités de prescription et législation
Depuis 1991, la durée maximale de prescription est limitée à 12 semaines pour les anxiolytiques et 4 semaines pour les hypnotiques. Cette restriction de la durée maximale de prescription a été un levier pour limiter les abus.
Elle a été réduite de façon plus importante pour certains médicaments hypnotiques (par exemple, restriction des conditions de prescription et de délivrance du zolpidem par voie orale à compter d’avril 2017).
Pour certaines benzodiazépines particulièrement détournées notamment par les toxicomanes, la prescription en toutes lettres sur ordonnance sécurisée est devenue obligatoire (clorazépate dipotassique et clonazépam). Par ailleurs, les indications de certaines benzodiazépines ont été restreintes.
Depuis 2012, la prescription initiale du clonazépam est également restreinte à certains prescripteurs (neurologue ou pédiatre) [25].
Le traitement doit être débuté par la dose minimale préconisée, qui sera augmentée si nécessaire jusqu’à la dose minimale efficace pour le patient sans toutefois dépasser la dose maximale. Concernant les modalités d’arrêt du traitement, elles doivent être prévues et décidées avec le patient. Dès l’initiation du traitement, ce dernier doit être informé de la possibilité d’une diminution progressive de l’effet thérapeutique en cas d’administration durant plusieurs semaines (phénomène de tolérance), de la nécessité de décroissance progressive des doses (un syndrome de sevrage peut survenir en cas d’arrêt brutal) et de la possibilité d’une période de rebond qui peut être inconfortable.
Sauf exception, les BZD, qui ont pour indication l’anxiété, ne devraient pas être prescrites plus de 8 à 12 semaines, en y incluant le temps nécessaire à la diminution progressive des doses.
La durée recommandée pour les BZD hypnotiques n’est que de 2 à 5 jours en cas d’insomnie occasionnelle, et de 2 à 3 semaines en cas d’insomnie transitoire.
On rappellera aux patients qu’il s’agit essentiellement de traitements symptomatiques, auxquels il convient d’associer une prise en charge spécifique du trouble sous-jacent (Psychothérapie, méthodes de relaxation, hygiène de vie…) [17].
Selon les recommandations, il n’y a pas lieu d’associer plusieurs BZD. Ces associations semblent d’ailleurs augmenter le risque de survenue de dépendance.
Les BZD anxiolytiques sont prescrites dans 50% des cas avec des médicaments antidépresseurs. La co-prescription se justifie au début du traitement de la dépression, chez les sujets avec anxiété et troubles du sommeil, en raison de l’action retardée des antidépresseurs.
Cependant, même si elles atténuent certains symptômes observés au cours des états dépressifs, elles n’ont pas d’action antidépressive et ne doivent pas être prescrites seules pour traiter un état dépressif. En effet elles laissent la dépression évoluer pour son propre compte avec persistance du risque suicidaire (notamment par intoxication médicamenteuse).
Chez les personnes âgées, la demi-vie des BZD peut s’allonger considérablement ; la posologie doit donc impérativement être réduite de 50 à 70 %.
Les BZD à demi-vie longue doivent être évitées, et on préfèrera des molécules à demi-vie courte (5 à 8 heures) ou intermédiaire (8 à 12 heures). La prescription initiale sera la plus brève possible et sera renouvelée après réévaluation [26].
L’effet sédatif, les troubles de la vigilance et/ou l’effet myorelaxant peuvent favoriser les chutes, avec des conséquences souvent graves dans cette population.
Une étude publiée fin 2012 a par ailleurs confirmé l’existence, dans la population française vivant à domicile, d’une association entre la prise de benzodiazépines et le risque de démence chez les personnes âgées de plus de 65 ans [27].
La prescription chez l’enfant de moins de 15 ans et au cours de la grossesse doit rester exceptionnelle et d’une durée aussi brève que possible. Elle est à éviter en cas d’allaitement (passage dans le lait) et avec prudence chez les conducteurs de véhicule et les utilisateurs de machines (effet sédatif, baisse de la vigilance).
La dose sera systématiquement réduite de 50 à 70 % en cas d’antécédent de pharmacodépendance ou chez les patients souffrant d’insuffisance rénale ou hépatique.
Les BZD sont contre-indiquées chez le sujet alcoolique ou toxicomane (majoration des effets sédatifs et du risque de dépression respiratoire) [17].
Initiation et durée d’utilisation
Dans le même temps, la proportion de français ayant débuté un traitement par benzodiazépines, quelle que soit l’indication, est de 5,4 %.
Ainsi, alors que la proportion de la population française ayant initié un traitement par benzodiazépine anxiolytique n’a pas évolué entre 2012 et 2015 (3,8 % correspondant à environ 2,3 millions de patients), une légère baisse d’initiation de benzodiazépines hypnotiques est observée (1,2 % de la population française en 2015, soit environ 744 000 patients, par rapport à 2012 avec 1,5 %).
Enfin, les durées de consommation étaient trop longues, allant jusqu’à plusieurs années, sans interruption de traitement pour certains patients.
Les traitements sont initiés par des médecins généralistes dans environ 82 % des cas. La durée du premier épisode de traitement est inférieure ou égale à 28 jours dans environ 76 % des cas et inférieure ou égale à 12 semaines dans 89 à 90 % des cas.
De 2012 à 2014, 14 à 15 % des nouveaux utilisateurs de benzodiazépines ont un premier épisode de traitement d’une durée non conforme aux recommandations, dont environ 2 % depuis plus d’un an.
Benzodiazépines et COVID-19 [29]
D’après l’étude EPI-PHAR jusqu’en Avril 2021, parmi les médicaments dont la consommation a augmenté, en fin de confinement et durant la période qui a suivi, figuraient des médicaments des troubles mentaux : les anxiolytiques et les hypnotiques.
La consommation d’antidépresseurs et d’antipsychotiques est restée proche du niveau attendu sur l’ensemble de la période, hormis un pic de délivrances transitoire observé en début de confinement.
Pour les anxiolytiques, après une augmentation de 18,6% des délivrances lors des 2 premières semaines de confinement on a observé une consommation au-dessus du niveau attendu de façon persistante depuis la fin Avril et jusqu’à̀ la mi-Août 2020.
Au total, depuis la première semaine de confinement jusqu’à̀ la première quinzaine de septembre 2020, c’est plus d’un million de délivrances sur ordonnance en pharmacie d’anxiolytiques qui est observé́ par rapport à̀ l’attendu sur la même période.
Pour les hypnotiques, après une augmentation de plus de 11,8% des délivrances lors des 2 premières semaines de confinement on a observé une consommation au-dessus du niveau attendu de façon persistante depuis la fin Avril et jusqu’à̀ la mi-Août 2020.
Au total, depuis la première semaine de confinement jusqu’à̀ la première quinzaine de septembre 2020, plus de 478 000 délivrances sur ordonnance en pharmacie d’hypnotiques ont été observé́ par rapport à̀ l’attendu sur la même période.
Présentation et résultats de l’étude à l’officine
Compte tenu des données épidémiologiques rapportées dans les chapitres précédents et des conséquences de la prise de BZD au long cours, j’ai souhaité réaliser une enquête au sein de l’officine dans laquelle j’exerce, afin d’avoir une meilleure connaissance des patients, de leur état de dépendance, de l’utilisation et de leur niveau de savoir sur ces médicaments.
Cette enquête permettrait de proposer à l’équipe officinale un guide d’accompagnement de ces patients à l’officine. Ce guide pourra être proposé via l’URPS-PACA pour des protocoles pluriprofessionnels.
Matériels et méthodes
Critères d’inclusions et d’exclusions des patients
L’étude menée à l’officine incluait divers critères d’inclusions et d’exclusions. Nous proposions l’étude aux patients après délivrance de leur ordonnance et des conseils associés. C’est seulement après quelques minutes de concertation, que nous décidions ou non de proposer au patient de participer à l’étude.
Dans un souci de pertinence et de compréhension, l’étude n’était pas proposée aux patients ne parlant pas ou ne sachant pas lire et écrire correctement le français.
Les patients atteints de maladies psychiatriques connues ou pour lesquels il existait un diagnostic posé de démence, de trouble neurologique ou cognitif ou suivis et traités au long cours pour un trouble bipolaire, un trouble psychotique ou ayant sur leur ordonnance un neuroleptique, étaient également exclus afin d’éviter tous biais de compréhension ou liés à̀ l’utilisation d’autres traitements psychotropes.
Les patients venant pour une première délivrance de benzodiazépine(s) étaient exclus.
Ils devaient venir pour un renouvellement de leur(s) benzodiazépine(s) avec ou sans autre médicament sur l’ordonnance. Il n’y avait aucune sélection concernant l’âge ou le sexe des patients.
Enfin, dans un souci de praticité, les patients choisis devaient être déjà enregistrés et connus de la pharmacie.
Déroulement de l’étude
Cette étude a été mise en place dans l’officine dans laquelle j’exerce, officine de quartier située au 3 avenue Maréchal Foch dans le 4e arrondissement de Marseille.
Nous avons recruté nos patients directement au comptoir de l’officine du 04 Mars au 21 Mai 2021, lorsqu’ils venaient à l’officine pour la dispensation de leur(s) traitement(s) et selon des critères d’inclusion détaillés plus loin.
Nous avons établi un questionnaire anonyme qui reprenait les différents points d’étude présent dans le dossier épidémiologique de l’ANSM vu précédemment.
La mise en place de cette étude a pu être effectuée avec l’aide des pharmaciens de l’officine et se déroulait selon un protocole établi en amont.
Après dispensation des traitements, explications et conseils associés, il était proposé au patient choisi de remplir le document en répondant aux questions tout en précisant que ce questionnaire était strictement anonyme et qu’il n’influencerait en rien la prise en charge actuelle du patient dans notre officine.
La phrase d’« accroche » type était « Je vois que vous prenez ce(s) médicament(s) depuis un certain temps et je voulais, si vous êtes d’accord, vous proposer de faire un bilan sur ce traitement en répondant à quelques questions afin de participer à notre étude »
L’ensemble du questionnaire est à consulter en Annexe 1.
Le questionnaire
Nous avons donc réalisé un questionnaire anonyme, se basant sur les principaux points d’étude de l’ANSM vus précédemment, complété par plusieurs autres questions.
Informations générales du patient
Cette partie permettait de connaitre les données socio-démographiques du patient, le sexe et l’âge du patient, son mode de vie (vie seule ou pas) son statut (célibataire, marié(e), pacsé(e), veuf(ve), ou en concubinage), de savoir s’il gérait lui-même ses médicaments seul ou avec l’aide d’une autre personne.
Cette première partie permettait également de connaitre la profession et le niveau d’étude du patient (plus haut diplôme obtenu) et de savoir s’il avait déjà consulté un psychiatre, un neurologue ou aucun des deux.
Ce questionnaire étant anonyme, il était demandé au patient, dans un souci de saisi et de traitement des données, de ne renseigner exclusivement que ses initiales.
Caractéristiques médicales
La seconde partie, permettait de recueillir les principales caractéristiques médicales du patient avec plusieurs questions concernant l’état général du patient lui-même, puis des questions concernant son traitement ainsi que le questionnaire ECAB. Enfin, les deux dernières questions permettaient de savoir si le patient avait déjà reçu une fiche d’information sur son traitement et s’il souhaitait recevoir plus d’informations à ce sujet.
État général du patient:
Cette 1e sous partie est composée de 4 principales questions à choix multiples.
La première, permettait de savoir si le patient avait déjà présenté un des problèmes parmi l’anxiété, la dépression, la tentative de suicide, l’insomnie, l’épilepsie et la douleur chronique.
La 2e et 3e question permettaient de savoir si le patient présente ou présentait une dépendance a un produit (tabac, alcool, médicament, cannabis, cocaïne ou autre substance) ou à une activité (jeux, sport, travail, sexe ou autre activité).
Enfin il était demandé au patient le nombre de médicaments présents sur son (ses) ordonnance(s) au total (benzodiazépines inclues), sur une échelle allant de 1 à plus de 5.
Son traitement:
Cette 2nde sous partie est composée de 12 questions. Le patient devait tout d’abord cocher la benzodiazépine qu’il consommait parmi une liste établie des 17 noms commerciaux et DCI. Il devait ensuite cocher si oui ou non il avait réussi à cocher sa(ses) benzodiazépine(s) sans regarder l’ordonnance ou la boite de médicament.
Il était par la suite demandé, dans 2 questions ouvertes, depuis combien de temps et pour quel(s) motif(s) ce(s) médicament(s) avaient été prescrit initialement et si ce motif était toujours valable. Le patient devait répondre à la question de savoir s’il pensait que ce traitement traitait son (ses) problème(s), de citer au moins un effet indésirable de ce traitement, de savoir si pour le patient, ce traitement était temporaire ou à vie et s’il pouvait soulager ou guérir.
Ensuite, cinq questions permettaient de savoir si le patient avait déjà essayé d’arrêter ce traitement seul, s’il avait déjà pris une dose supérieure à ce qui était prescrit, s’il avait déjà oublié de prendre ce médicament, s’il avait déjà chuté ces derniers mois, et s’il avait remarqué une baisse de la qualité de son sommeil avec la prise de ce médicament.
Le patient devait ensuite noter la qualité de son sommeil sur une échelle allant de 1 à 10, et répondre aux questions de savoir si des thérapies non médicamenteuses avaient déjà été expérimentées (sophrologie, ostéopathie, acupuncture, hypnose, autre thérapie non médicamenteuse) et enfin de savoir s’il était intéressé pour se faire accompagner par son médecin ou pharmacien, afin de réduire sa consommation de médicaments.
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Table des matières
I. Généralités sur les benzodiazépines et molécules apparentées
A. Structure chimique
1) Classification chimique
2) Relation structure-activité
B. Mécanisme d’action
C. Indications
1) Anxiolytique
2) Hypnotique
3) Anticonvulsivante
4) Autres indications
D. Effets indésirables et précautions d’emploi
E. Précautions d’emploi et contre-indications
F. Modalités de prescription et législation
G. Données épidémiologiques en France [28]
1) Age et sexe
2) Classes de benzodiazépine
3) Initiation et durée d’utilisation
4) Benzodiazépines et COVID-19 [29]
II. Présentation et résultats de l’étude à l’officine
A. Matériels et méthodes
1) Critères d’inclusions et d’exclusions des patients
2) Déroulement de l’étude
3) Le questionnaire
B. Résultats
1) Informations personnelles du patient
2) État général du patient
3) Concernant le traitement
4) Questionnaire ECAB
5) Fiche d’informations
III. Analyse des résultats et perspective de prise en charge en officine
A. Analyse des résultats
B. Limites de l’étude
IV. Perspective d’amélioration : Guide d’accompagnement du patient traité par benzodiazépine, à l’officine
V. Conclusion
FIGURES ET TABLEAUX
ABREVATIONS
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
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