Les zones côtières ont toujours été des espaces convoités par les habitants. En effet plus de 70% de la population mondiale vivaient à moins de 200 km du littoral en 1950. Avec ce phénomène de littoralisation et cette forte densité, dont la moyenne est de 25.000 habitants au km2, la terre fait l’objet d’un bien précieux dû à la forte demande dans ces espaces. Le Sénégal est un pays côtier situé à l’extrémité ouest du continent africain, il est compris entre les latitudes 12º30’N – 16º30’N et 11º30’ – 17º30’de longitudes Ouest. Il a un littoral long de 700 km reliant le nord du pays de la région de Saint-Louis à celle naturelle de la Casamance. L’espace maritime national couvre une superficie d’environ 198.000km² (Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature – MEPN-, 1997). Elle se subdivise en trois parties à savoir la Grande Côte de Saint-Louis à Dakar, la Petite Côte et la Casamance. La petite côte s’étire sur environ 110 km de Bel-Air à la pointe de Sangomar. Cette zone se compose d’une vingtaine de villages et des zones urbaines comme Mbour et Joal. Située dans la Région de Dakar, la commune de Yene se trouve dans le département de Rufisque. Dans cette entité territoriale l’activité halieutique joue un rôle très important pour la vie quotidienne des populations et participe au développement du Sénégal. Ce village, jadis peu peuplé, avec une côte sablonneuse de 100 mètres de large en moyenne (Diop, 1986) et un paysage sauvage, a perdu sa physionomie d’antan en raison d’une occupation dense liée au développement de la pêche, à l’urbanisation et du tourisme dans un milieu côtier fragile.
La dynamique urbaine, motivée par l’essor des secteurs d’activités tels que le tourisme, la pêche et l’artisanat a modifié la configuration physique des quartiers de Yene. Contrairement à la pêche, le tourisme est relativement récent dans cette zone. Ainsi, la commune constitue aujourd’hui un pôle économique et un pouvoir d’attraction des populations venant des origines diverses. Le territoire de Yene avec ses fortes mutations socioéconomiques et spatiales a connu une expansion rapide, démographique et spatiale. Cet étalement du milieu est lié à la fois à plusieurs facteurs. Ce phénomène d’expansion entraine le système du foncier à devenir très complexe, l’accès à la terre devient également difficile et on assiste au développement du cadre du bâti.
Aussi, la consommation exponentielle du foncier par les activités touristiques a conduit à un processus d’urbanisation de l’espace. L’évolution spatiale de ce secteur s’est traduite par un empiétement sur les terres des populations autochtones de la zone. Cette croissance est devenue considérable à tel point que les autorités communales et administratives ont des problèmes à déterminer le périmètre communal. Il s’y ajoute, le développement du secteur touristique relativement rapide et souvent mal contrôlé, n’est pas sans provoquer des dommages sociaux et environnementaux. Toutefois, de nouveaux quartiers résidentiels organisés autour des résidences secondaires renforcent les logiques d’urbanisation dans ces espaces ruraux. Cette urbanisation incontrôlée se réalise au détriment des espaces traditionnels destinés à l’agriculture. En plus, ces mutations ont des effets multiformes. En outre, le constat général qui se dégage est que la mutation de cet espace est due à la croissance démographique. Cette situation est à l’origine de multiples impacts que le tourisme exerce sur l’économie, la société, l’espace et sur l’environnement des quartiers de Yene. Par ailleurs, le fait que Yene soit une zone très sollicitée constitue aussi un facteur d’urbanisation de son espace rural.
PROBLEMATIQUE
La commune de Yene appartient à l’arrondissement de Sangalkam, dans le département de Rufisque, dans la région de Dakar. Elle est située à 45 km de la ville de Dakar et à 23 km de la ville de Rufisque. Elle est limitée, au nord par la commune de Sangalkam, au sud par l’Océan Atlantique, à l’ouest par la commune de Sendou et à l’Est par la commune de Sébikotane. La commune de Yene couvre une superficie de 125 km² et compte 09 quartiers regroupés en deux zones : la zone littorale et celle du continent ou l’hinterland. A Yene le climat est donc de type sahélien, avec une alternance de la saison des pluies qui dure de 3 à 4 mois et la saison sèche assez longue qui dure de 4 à 9 mois. La pluviométrie dépasse rarement 500 mm par an. Une bonne partie de la commune est en contact direct avec l’Océan Atlantique, ce qui adoucit considérablement le climat pendant une grande partie de l’année. Les températures moyennes gravitent autour de 28°. Elles peuvent descendre jusqu’à 20-18°C pendant les périodes de froid.
Par ailleurs le potentiel écologique et socioéconomique fait que la commune de Yene est de plus en plus convoitée ce qui accentue l’occupation massive de son espace doublé de leur exploitation entrainant une forte croissance de l’espace. Appartenant à la petite côte, elle est marquée par une économie traditionnelle (pêche) qui est la principale activité économique de la commune et l’agriculture qui suit une mutation au profit du tourisme, de l’artisanat et du commerce qui bouleversent son organisation spatiale. La ruée vers la petite côte se manifeste à travers les activités de pêche, le commerce, l’immobilier et les activités les plus récentes inhérentes au développement du tourisme. En effet comme l’affirma DIOP (A) dans sa thèse de doctorat du 3ème cycle que les qualités des paysages du littoral de la petite côte sont remarquables et constituent un puissant attrait pour le développement touristique : disponibilité en plage, microclimat et pratiques balnéaires favorables. Cependant, l’émergence du tourisme engendre des transformations dans les activités socioéconomiques des populations de Yene et dans leur cadre de vie .
Le développement de plusieurs activités telles que la pêche, l’artisanat, le commerce, l’agriculture, le tourisme, l’immobilier et les loisirs favorise l’attraction humaine dans certaines parties de la commune. Ceci explique que Yene fait aujourd’hui l’objet d’une forte sollicitation. Appartenant au Département de Rufisque, la commune de Yene, naguère destinée à la production maraîchère, n’est pas épargnée par cette urbanisation galopante. D’ailleurs, le Plan Directeur d’Urbanisme (PDU) de Dakar « Horizon 2025 » prévoit que « les extensions urbaines s’appuient sur le département de Rufisque pour assurer la continuité régionale », après avoir constaté que « les développements… se font au détriment des cultures » (PUD Dakar Horizon 2025, 2004, p.35 et 36). Cette situation n’a pas manqué de remettre en cause la configuration naturelle et économique de la localité. De grands espaces font l’objet de spéculation foncière avec les floraisons de nouvelles cités et des lotissements à titre d’habitation. De ce fait la commune de Yene est caractérisée grâce à sa proximité avec la capitale du Sénégal Dakar et grâce à un dynamisme économique patent, par une croissante spatiale rapide entraînant un débordement de leurs limites communales. Cet étalement spatial est lié à un fort croît démographique. La zone connait aussi d’importants aménagements qui ignorent, dans la plupart des cas, les principes et les règles qui soutiennent les projections contenues dans les documents de planification urbaine. Malgré son éloignement relatif par rapport à la ville de Dakar, la commune de Yene subit directement les contrecoups de cette rurbanisation à travers son organisation spatiale mais surtout au niveau de ses aspects socioéconomiques et environnementaux.
ANALYSE CONCEPTUELLE ET THEORIQUE
Analyse conceptuelle
Mutation Spatiale
Le concept de mutation spatiale est constitué de plusieurs mots qui méritent un éclaircissement.
Mutation
Le mot mutation en tant que concept est très difficile à cerner sa signification varie selon les angles d’analyse. Le mot vient du latin « mutatis » qui désigne une transformation profonde et durable (Kane .A 2006). L’appropriation du sol, ses utilisations et les aménagements qui les accompagnent, évoluent de plus en plus rapidement, entraînant parfois des ruptures. Si de nouveaux équilibres sont trouvés aussitôt et que de nouveaux aménagements soient mis en place, il y’a seulement mutation. Une mutation peut être définie comme une évolution durable qui n’est pas relative aux changements volontaires. Elle résulte de l’adaptation à de nouveaux contexte ou de la pression des pouvoirs publics.
Il faut admettre qu’une mutation est synonyme d’un changement qui s’opère. Il y’a l’idée d’une modification, d’un état nouveau. Elle peut prendre plusieurs formes : structurelle (morphologique) ou fonctionnelle.
Mutation spatiale
Selon le dictionnaire le petit Larousse (1995), l’espace est « une étendue indéfinie qui contient et entoure les objets ». Le dictionnaire distingue l’espace mathématique, psychologique, l’espace comme volume, intervalle de temps, surface, milieu affecté à une activité, l’espace vital et enfin l’espace juridique. Dans l’étude de l’espace, il y a trois entrées en géographie qui sont la spatialité des sociétés, les régions et territoires et enfin, les relations/environnement. La structure des hypertextes se prête bien à ces entrées, car c’est un véritable réseau qui se forme.
Ce qui intéresse notre angle de recherche demeure la catégorie fondamentale de la pensée géographique. L’espace comme concept géographique, ce n’est pas une zone, ni une région du monde, ni un « un territoire ». Il se définit par la forme (type et structure des « distances », organisation des espacements, valeur des liens) que prennent les relations entre les lieux pour un individu, pour un groupe, ou pour une entité géographique à différentes échelles. Un espace a des relations, mais différent d’un territoire. L’espace géographique est une étendue terrestre utilisée et aménagée par les sociétés en vue de leur production selon Roger Brunet. C’est aussi un ensemble des lieux et de leurs relations. Au sens banal, c’est une portion définie de la surface de la terre (pas nécessairement une région, un territoire ou un système spatial) Toujours dans le même sillage, selon Maurice François Rouge, 1947, l’espace peut être l’organisation ou encore l’analyse de cet espace. On parle de la production de l’espace, c’est-à-dire ce qui relève de l’action et de son résultat. Quant à Ullman, 1954 propose de fonder l’explication des différenciations géographiques non plus sur les relations verticales entre les sociétés et leur environnement (notion de site, conditions locales de milieu) mais sur les relations horizontales établies par la circulation, les connexions et les interdépendances régionales qui en résultent.
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Table des matières
INTRODUCTION
PROBLEMATIQUE
PREMIERE PARTIE : ETUDE DU MILIEU PHYSIQUE ET HUMAIN
CHAPITRE I : PRESENTATION DU CADRE PHYSIQUE
CHAPITRE II : L’OCCUPATION HUMAINE
CHAPITRE III : LES ACTIVITES DE PRODUCTION
DEUXIEME PARTIE : LES FACTEURS IMPULSIFS DES MUTATIONS SPATIALES ET SOCIOECONOMIQUES DE LA COMMUNE DE YENNE
CHAPITRE I : LA POSITION GEOGRAPHIQUE DE LA COMMUNE DE YENE
CHAPITRE II : LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE
TROISIEME PARTIE : LES MANIFESTAIONS DES MUTATIONS SPAATIALES ET SOCIOECONOMIQUES DE LA COMMUNE DE YENE
CHAPITRE I : LES MANIFESTATIONS SPATIALES
CHAPITRE II : LES MANIFESTATIONS SOCIO-ECONOMIQUES
CHAPITRE III : LES EFFETS SOCIO-CULTURELS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE