La question de la femme a suscitรฉ des nombreuses discussions dans les discours philosophiques, politiques et sociaux, que ce soit du reste aux Comores ou partout ailleurs dans le monde. Le discours concernant la femme reste essentiellement dรฉvalorisant envers cette derniรจre depuis lโantiquitรฉ jusquโร nos jours, ร cause de la reprรฉsentation que lโon se fait de sa nature. La plupart des auteurs anciens et modernes semblent nโavoir bรขti leur philosophie que sur des prรฉjugรฉs populaires, ayant รฉtรฉ dโune grande ignorance dโeux-mรชmes. Platon, le pรจre de la philosophie, remerciait Dieu de ce quโil รฉtait nรฉ homme et non pas femme. Son disciple Aristote a mรชme voulu montrer que les femmes ne sont que des monstres. Qui ne le croirait en se fondant sur lโautoritรฉ dโun personnage si cรฉlรจbre ? Socrate, de mรชme, comparait la femme ร un temple bien apparent bรขti sur un colloque. Pour Nietzsche, ยซ La femme est un รชtre qui ne pense pas, car si la femme รฉtait une crรฉature pensante, aprรจs avoir cuisinรฉ pendant des millรฉnaires, elle aurait dรป dรฉcouvrir les faits physiques fondamentaux et annexer la mรฉdecine ร son domaine dโactivitรฉ. ยป .
Toutes ces qualifications nรฉgatives et ces jugements divers ont donnรฉ une vision pรฉjorative ร lโรฉgard de la femme tout au long de lโhistoire. Et par consรฉquent, la femme a toujours รฉtรฉ ยซ naturellement ยป considรฉrรฉe comme un รชtre infรฉrieur. Des siรจcles durant donc, les femmes ont รฉtรฉ rรฉduites au silence. Aujourdโhui, elles cherchent ร dรฉtrรดner les diffรฉrents mythes ร propos de la fรฉminitรฉ. Elles ont commencรฉ ร se percevoir elles-mรชmes dans leur dignitรฉ de personnes humaines, ร partir de leur implication qui devient toujours plus grande dans la vie de la sociรฉtรฉ. Et elle est dรฉsormais bien consciente que, pendant la pรฉriode antique et mรชme bien aprรจs, les hommes nโรฉcrivaient et ne pensaient quโeux-mรชmes, en leur faveur. Cโest ce qui a poussรฉ une auteure comme Benoรฎte Groult ร affirmer que ยซ tout ce qui a รฉtรฉ รฉcrit par les hommes doit รชtre suspect, car ils sont ร la fois juges et parties. ยป A la suite de cette prise de conscience, la femme doit maintenant prendre conscience quโelle nโest pas un รชtre infรฉrieur ร lโhomme malgrรฉ toutes ces qualifications quโon lui attribue.
Cโest la raison pour laquelle nous avons choisi de nous pencher sur ce thรจme de lโanalyse sur la situation actuelle de la femme comorienne. Cette derniรจre, dรจs sa naissance, se trouve trรจs souvent placรฉe sous la domination de son entourage, notamment familial. Elle a rarement la libertรฉ de choisir ce quโelle veut devenir, encore moins celle de chercher ร sโรฉmanciper, sans quโon lui reproche de vouloir sortir de sa condition. En ce sens, le premier devoir quโon lui impose est de rรฉpondre uniquement aux attentes de sa famille et aux exigences de la sociรฉtรฉ : une sociรฉtรฉ comorienne qui apparaรฎt dโabord et surtout comme lโenfer dโune sociรฉtรฉ masculine faite par les hommes et pour les hommes. Or, ce type dโexigences la prive fondamentalement de sa libertรฉ, alors quโun philosophe comme Paul Franรงois De Torquat, par exemple, a bien montrรฉ dans son ouvrage Lโappel ร la libertรฉ, que ยซlโenfer est le lieu oรน la libertรฉ est morte. ยป .
Cependant, la charte des Nations-Unies, dรจs sa crรฉation jusquโร nos jours, a toujours affirmรฉ inlassablement quโil est impรฉratif de promouvoir la libertรฉ, lโรฉgalitรฉ entre les humains, et de toujours lutter contre toute forme de discrimination sociale, religieuse ou raciale. De ce fait, il nous apparaรฎt clair que, en tant que pays adhรฉrant ร la charte des Nations-Unies puisquโil en est signataire, un รฉtat comme les Comores ne devrait pas hรฉsiter ร respecter et ร faire respecter la libertรฉ de la femme, mรชme simplement en tant que citoyenne. Nous avons constatรฉ que, sur le plan รฉlectoral et politique, les femmes reprรฉsentent aux Comores plus de la moitiรฉ de la population totale de lโarchipel. Mais elles comptent ร peine plus quโune poignรฉe de reprรฉsentantes dans la classe politique dirigeante .Actuellement le gouvernement comorien ne compte que deux femmes ministres Il y a dโailleurs peu dโaspects de la vie en sociรฉtรฉ oรน la domination des hommes se fait davantage sentir que dans le domaine politique.
Mรชme si, depuis peu de temps, la population fรฉminine parvient de plus en plus ร accรฉder ร des professions traditionnellement rรฉservรฉes aux hommes, une libertรฉ comme pourrait la concevoir la vie moderne lui reste pourtant inaccessible ร cause dโun certain nombre de contraintes : celles de la tradition, mais aussi celle dโune pression de la religion musulmane qui reste dans la sociรฉtรฉ comorienne la seule loi lรฉgifรฉrant la vie de tout Comorien et Comorienne. La femme comorienne ne bรฉnรฉficie pas de cette libertรฉ en tant que telle, quand son statut reconnu nโest que celui dโรชtre une parfaite maรฎtresse de maison, dโรชtre surtout celle qui engendre la descendance pour assurer la postรฉritรฉ de la famille. Son intรฉgration dans la communautรฉ de la population ne se fait quโร partir du rรดle quโelle joue, celui de mรจre, de femme obรฉissante et dโรฉducatrice des enfants. La religion musulmane nโaccorde pas dโautre importance ร la femme, et cette situation provient รฉgalement du comportement dโun certain nombre de prรชtres qui, ร notre avis, interprรจtent ce que dit le Coran dโune maniรจre trop รฉtroite. A partir de lร , la femme comorienne se trouve constamment dans une situation de sujรฉtion, quelle que soit sa personnalitรฉ, en raison dโun esprit quโon pourrait qualifier de phallocrate et qui domine cette sociรฉtรฉ oรน cette femme รฉvolue. Cโest pourquoi nous pensons quโil est juste dโinciter les femmes comoriennes ร chercher ร sโรฉmanciper, afin dโobtenir les mรชmes droits que lโhomme. Cet appel ร la libertรฉ ne signifie pas vouloir se dรฉtourner de la tradition ou de la culture comorienne, comme certains pourraient le croire, mais le dรฉsir dโune libรฉration.
MOTIVATIONS A PROPOS DU THEME DE RECHERCHEย
Le thรจme sur lequel porte notre รฉtude traite donc plus prรฉcisรฉment de la question du statut de la femme comorienne. La femme comorienne est une femme qui se trouve aliรฉnรฉe dรจs son jeune รขge par de multiples conditions de vie assez contraignantes. La femme se trouve toujours dans lโobligation de devoir rรฉpondre aux exigences de sa famille, mais aussi ร celles de la sociรฉtรฉ. Pour dire que, dรจs le dรฉpart, ces conditions de vie restent comme lโexpression de lois non inscrites et auxquelles elle ne peut que se conformer. Elle doit รชtre sous les ordres et elle nโa pas le droit de dire quelque chose contre ces lois ni de revendiquer quoi que ce soit. De ce fait, sa situation socio-familiale fait dโelle une victime, un bien qui est mis en danger et quโil faut prรฉserver. Elle doit se battre pour son avenir, mais aussi pour lโhonneur de toute la famille. Cependant, ce ne sont pas seulement les exigences de la sociรฉtรฉ quโelle a comme obligation de respecter ร tout prix, concernant lโimage que lโon attend dโelle, mais il y a aussi un problรจme majeur qui est celui que pose une certaine vision de la religion musulmane. En fait, aux Comores, il reste assez difficile de parvenir ร distinguer vรฉritablement ce qui relรจve de la religion et ce qui relรจve de la tradition. Dans notre archipel, les mลurs et les coutumes traditionnelles sont intimement liรฉes ร la religion musulmane. Une telle situation nous permet de dire ร cลur ouvert que les problรจmes qui touchent la femme comorienne sont les mรชmes problรจmes que rencontre la femme musulmane en gรฉnรฉral. A lโheure actuelle, le problรจme du statut de la femme dans lโislam prรฉoccupe beaucoup les instances internationales, mais il concerne aussi notre pays en particulier. Car nous voyons que beaucoup de femmes- musulmanes ainsi que bien dโautres qui ne sont pas – se lรจvent pour protester avec vรฉhรฉmence et rรฉclamer lโรฉgalitรฉ des droits entre lโhomme et la femme. Parce quโelles se sont persuadรฉes quโil subsiste beaucoup dโinjustices ร leur รฉgard. Cโest la raison pour laquelle nous pensons quโil est nรฉcessaire dโinciter les Comoriennes dโaujourdโhui ร oser sโexprimer dans les radios, ร la tรฉlรฉvision dans les journaux, dโรฉcrire partout oรน cโest possible donc, pour revendiquer un changement de la situation. Car cโest cela qui reste la condition premiรจre et le seul moyen de leur libรฉration. Il ne sโagit pas cependant de faire fi de ce que dit la loi musulmane, car cโest dans la loi qui doit รชtre comprise dans lโesprit dโun respect mutuel de la part de tous les croyants et croyantes que la femme musulmane aura peut รชtre des chances de recouvrer sa libertรฉ.
ANALYSE DES ASPECTS OBJECTIFS DU STATUT ACTUEL DE LA FEMME COMORIENNE
En faisant une premiรจre analyse au niveau social, nous constatons que les Comores prรฉsentent un cas de pluralisme juridique lรฉgal. Le droit comorien est un composรฉ de droit musulman, de droit occidental dโinspiration franรงaise et des rรจgles coutumiรจres. En effet, le code comorien concernant la famille prรฉvoit, par exemple, lโentrelacement nรฉcessaire du droit et des coutumes. Les droits fondamentaux sโinscrivent dans lโhistoire dโune sociรฉtรฉ placรฉe au carrefour des grandes routes maritimes, cette derniรจre comportant une importante communautรฉ de descendance arabe, mais qui est avant tout africaine. De ce fait, ce code est une sorte de rรฉceptacle, au niveau du droit, du pluralisme qui prospรจre aux Comores et qui se dรฉcline en trois branches : droit coutumier, charia et droit colonial franรงais et occidental postcolonial, ou encore selon un schรฉma qui cherche ร concilier ยซ modernitรฉ, religion et tradition ยป. Cependant, la derniรจre version du code comorien de la famille, adoptรฉe le 03juin 2005, dรฉtermine que les lรฉgislateurs doivent trouver un accord entre la tradition musulmane dominante et les coutumes, tout en tenant compte de la modernitรฉ de certaines mesures. Il faut admettre aussi cependant que lโislam est une source de droit constitutionalisรฉ. Le prรฉambule constitutionnel de lโunion des Comores stipule que
ยซ Le peuple comorien proclame solennellement sa volontรฉ de puiser dans lโislam,lโinspiration permanente des principes et rรจgles qui rรฉgissent lโEtat et les institutions. ยป
Cela explique par exemple le fait quโaux Comores lโacceptation explicite de la polygamie consacre clairement, selon nous, lโinรฉgalitรฉ de la condition de la femme. Et lโรฉgalitรฉ effective des droits et des devoirs nโexiste pas jusquโร maintenant. Bien quโaujourdโhui ce phรฉnomรจne paraisse en rรฉgression aux Comores, la polygamie nโest plus quโun facteur dโinstabilitรฉ familiale. Aux Comores, lโapplication ร la lettre des exigences de la loi musulmane se rรฉfรจre au verset qui stipule quโ ยซ il est permis dโรฉpouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais si vous craignez de nโรชtre pas justes avec celles-ci, alors une seule. ยป Le verset coranique explique ainsi que Dieu a autorisรฉ la polygamie. Toutefois, il est interdit, dans ce mรชme verset, de la pratiquer si lโhomme nโa pas les moyens ou sโil nโest pas en mesure de respecter ces conditions, afin de ne pas provoquer des sentiments de frustration ou dโinjustice ou dโaggraver les charges familiales. Or, sans mรชme mentionner que cela nous semble plus que difficile en ces pรฉriodes de crise รฉconomiques, il reste que de toutes les faรงons la femme nโa pas du tout son mot ร dire. Et nous rรฉitรฉrons sur ce point notre avis quโil convient de mettre les idรฉes en place, et de savoir en outre que chaque chose se passe en son temps. Cependant est-il รฉgalement possible dโaimer deux choses ou deux personnes dโรฉgale faรงon ? De ce fait, si le prophรจte avait contractรฉ trois ou quatre mariages, cโest pour des raisons dโordre politique et religieux : autrement dit, cโรฉtait pour propager lโislam, et le prophรจte vivait ร une toute autre รฉpoque que la nรดtre.
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE MOTIVATIONS A PROPOS DU THEME DE RECHERCHE ET PRESENTATION DU THEME
I.1 MOTIVATIONS A PROPOS DU THEME DE RECHERCHE
I.2 ANALYSE DES ASPECTS OBJECTIFS DU STATUT ACTUEL DE LA FEMME COMORIENNE
I.3 CE QUโIL EN EST DES DROITS ET DES DEVOIRS DANS LE STATUT DE LA FEMME COMORIENNE
I.4 VERS UN VRAI STATUT DE LA FEMME DANS LA COMMUNAUTE COMORIENNE
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE
II.1 APPROCHE METHODOLOGIQUE
II.2 APERCU GENERAL SUR LE FรMINISME
II.3 LโEMANCIPATION DE LA FEMME COMORIENNE
II-4 LIBERTE ET ENGAGEMENT DE LA FEMME COMORIENNE
TROISIEME PARTIE : PLAN PROVISOIRE DE LA FUTURE THESE, CONCEPTS CLES, BIBLIOGRAPHIE EN PARTIE COMMENTEE
III.1PLAN DE LA FUTURE THESE
III.2 DEFINITION DES CONCEPTS CLES
III.3 BIBLIOGRAPHIE EN PARTIE COMMENTEE
OUVRAGES CONSULTES POUR LE PRESENT TRAVAIL
SECTION DICTIONNAIRES
WEBOGRAPHIE
CONCLUSION