Analyse de l’échec des innovations dans un marché en émergence

Nous constatons des taux d‟échecs assez élevés des innovations commercialisés sur les marchés : ces taux peuvent atteindre les 70 à 80% (Le Nagard-Assayag et Manceau, 2005), voire avoisiner les 95% (Cf. TNS Sofres, 2013) selon la nature de l‟innovation. De fait, l‟incertitude de l‟environnement dans lequel nous évoluons rend la probabilité d‟échec des innovations plus grande. Par nature, l‟innovation est un processus risqué et incertain qui ne conduit pas toujours à l‟adoption de la solution nouvelle (Panne, Beers et Kleinknecht, 2003 ; Saatçioglu et Timurcanday Özmen, 2010). Cependant, ce sujet est peu étudié dans la littérature sur l‟innovation.

Ainsi, deux limites dans le champ de l‟innovation sont à souligner :
– le faible intérêt pour le rejet ou la résistance à l‟adoption de l‟innovation
– une littérature peu intégrée pour appréhender le phénomène de l‟innovation .

Premièrement, il est à constater que la plupart des travaux existants proposent principalement une analyse à posteriori des facteurs moteurs contribuant au succès d‟adoption des innovations sur le marché. Si la littérature s‟est intéressée de longue date à la figure du consommateur innovateur (celui qui adopte l‟innovation), ou à la participation favorable du consommateur à l‟innovation (lead user, leader d‟opinion) (Von Hippel, 1986 ; Rogers, 2003), ce n‟est que récemment qu‟elle a porté son regard sur les acteurs indifférents, réticents, résistants ou suspicieux à l‟égard de l‟innovation (Talke et Heidenreich, 2014).

Or, dans un contexte où le consommateur accède à plus de pouvoir d‟agir via les réseaux et les TIC, étudier le rôle du consommateur qui freine l‟innovation est prometteur pour comprendre l‟échec de l‟innovation. Pour ce faire, il est nécessaire d’appréhender l‟innovation comme un processus et non pas comme un résultat (Jörg et Akkaoui, 2013). L‟innovation est certes l‟idée nouvelle, mais c‟est également le processus permettant de transformer cette idée nouvelle en solution adoptable par le marché (Leković, 2013).

Ainsi, l’enchaînement des étapes qui permettent le passage de l’idée à un nouveau produit ou service commercialisé, peut rencontrer deux types de freins principaux : des barrières en amont dans le processus d‟innovation, et des freins en aval de ce processus.

LES PROCESSUS DE DIFFUSION ET DE L’ADOPTION DE L’INNOVATION CENTRES SUR L’INDIVIDU : LES APPROCHES LINEAIRES

L‟objectif du premier chapitre est de se saisir du rôle de l‟individu en tant que frein dans le processus d‟adoption et de diffusion de l‟innovation. Ce chapitre discute les apports et les limites des trois principales approches identifiées dans la littérature en marketing et sociologie de l‟innovation portant sur les processus d‟adoption et de diffusion de l‟innovation sous l‟angle de l‟individu : (1) l‟étude de la diffusion de l‟innovation selon une approche linéaire et mécaniste (Rogers, 2003) ; (2) l‟approche issue de la discipline des systèmes d‟informations (TAM, de Davis, 1989) ; (3) l‟approche de la résistance du consommateur à l‟innovation (Talke et Heidenreich, 2014).

En marketing de l‟innovation, les travaux de Rogers (1962 : 2003) font consensus et défendent une vision processuelle de la solution nouvelle. À cet égard, l‟innovation suit un processus qui comporte trois phases principales : le développement, l‟adoption et la diffusion de la solution nouvelle. Dans cette perspective, considérer l‟innovation comme un processus séquentiel régi par des étapes chronologiques qui s‟enchaînent traduit une vision linéaire de l‟innovation. Cette considération est fondamentale à la compréhension de ce qui fait l‟échec d‟une solution nouvelle.

Chacune de ces phases, qu‟il s‟agisse du développement, de l‟adoption ou de la diffusion de l‟innovation, est elle même régie par des étapes. Nous nous centrerons davantage dans ce chapitre sur le processus d‟innovation par l‟approche de l‟adoption et celle de la diffusion, qui représentent les concepts centraux de notre travail de recherche. Le choix de ne pas s‟attarder sur le concept de développement dans ce travail ne signifie pas qu‟il faille négliger l‟importance de la phase de développement dans le processus d‟innovation, qui a déjà fait l‟objet de nombreux travaux sur lesquels nous avons choisi de ne pas nous attarder. En effet, l‟ensemble des étapes du processus de développement de l‟innovation, qu‟il s‟agisse du développement d‟un nouveau service (Jallat, 1993, 1994 ; Abetti, 2000 ; Le Nagard Assayag et Manceau, 2005 ; Abramovici et Bancel-Charensol, 2006 ; Füller, Jawecki et Mühlbacher, 2007) ou d‟une nouvelle technologie (Xuereb, 1993), doivent être prises en compte en ce sens qu‟elles ont toutes un impact sur la performance de la solution (son adoption et sa diffusion). Une fois l‟innovation développée, il paraît difficile d‟entamer des améliorations en cas de problème. Les dépenses étant engagées, l‟éventualité d‟arrêter le processus doit être envisagée à chaque étape. Certaines entreprises ont cependant du mal à mettre fin à un projet, même si tous les indicateurs vont dans ce sens. Elles veulent poursuivre l‟escalade de l‟engagement à tout prix, au détriment de situations parfois catastrophiques (Le NagardAssayag et Manceau, 2005). En outre, certains chercheurs considèrent que les premières phases dans le développement d‟une innovation sont plus importantes que les phases finales (Cooper et Kleinschmidt, 1987, cité par Panne, Beers et Kleinknecht, 2003), contrairement à d‟autres (Schmidt, 1995 ; cité par Panne, Beers et Kleinknecht, 2003). Malgré ces avis controversés, nous accordons le même poids à chacune de ces phases, puisque leur interdépendance implique que si nous commettons des erreurs dans l‟une des étapes, les suivantes s‟en trouvent automatiquement impactées.

Une fois l‟innovation de service développée, elle est commercialisée. Sa réussite est conditionnée par sa rencontre avec le marché et son acceptation par ce dernier. Cela se traduit par l‟adoption de la solution nouvelle par les consommateurs dits innovateurs (c‟est-à-dire son utilisation régulière) dans un premier temps, puis par sa diffusion (c‟est-à-dire sa propagation) auprès des autres consommateurs dans un deuxième temps. A travers ce chapitre, nous montrons que finalement l‟approche par la diffusion, à travers ses étapes, englobe l‟approche par le développement et celle par l‟adoption. Le processus global d‟innovation est donc représenté par la diffusion. Les trois phases principales, à savoir développement, adoption et diffusion, bien qu‟elles soient distinctes et chronologiques, ont alors tendance à s‟enchevêtrer.

Cette vision linéaire soutient l‟existence de freins qui interviennent aux différentes phases du processus de construction de l‟innovation. Les freins au développement, à l‟adoption ou à la diffusion de l‟innovation ne sont pas les mêmes en fonction de la phase du processus global à laquelle nous nous situons. Pour rester en cohérence avec l‟approche processuelle de l‟innovation présentée ci-dessus, nous distinguons les freins qui interviennent en amont du processus (avant et pendant le développement de l‟innovation) et ceux qui interviennent en aval (suite à la commercialisation de l‟innovation, au moment de son adoption puis de sa diffusion). Par ailleurs, dans ce processus d‟innovation, à chaque étape, les freins peuvent être différents en fonction du degré d‟apprentissage et d‟expérimentation de l‟individu.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1. LE PROCESSUS D‟INNOVATION SELON LES APPROCHES DE L‟ADOPTION ET DE LA DIFFUSION
1.1. Le processus d‟innovation selon différentes approches linéaires
1.1.1. Le processus d’innovation selon l’approche de la diffusion
1.1.2. Le processus d‟innovation selon l‟approche de l‟adoption
1.2. Mobiliser les leaders d‟opinion pour faciliter l‟adoption
1.2.1. Le potentiel du bouche à oreille pour accélérer la diffusion et faciliter l‟adoption de l‟innovation
1.2.2. Le leader d‟opinion, vecteur de transmission du bouche à oreille aux adopteurs
1.3. Entre envie et refus d‟adopter : Les catégories d‟adopteurs
2. COMPRENDRE LE PROCESSUS D‟INNOVATION PAR L‟APPROCHE DE LA RESISTANCE
2.1. Le concept de résistance appliqué à l‟innovation
2.1.1. Qu‟est-ce que la résistance ?
2.1.2. Déterminants et manifestations comportementales de la résistance à l‟innovation
2.2. La résistance active à l‟innovation
2.2.1. L’impact de l’évaluation de l’innovation sur l’adoption
2.2.2. La résistance à la technologie selon l‟approche TAM
2.3. La résistance passive à l‟innovation
2.3.1. Les causes situationnelles
2.3.2. Les causes personnelles
2.3.3. Mise en perspective de la résistance passive par rapport aux catégories d‟adopteurs
3. LA RESISTANCE A L‟ADOPTION DE L‟INNOVATION RESPONSABLE
3.1. Le rationalisme économique
3.2. La dépendance gouvernementale
3.3. L‟appréhension des consommateurs envers les symboles associés à l‟éthique
CONCLUSION

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *