Les contraintes liées au régime foncier pastoral
Bien avant l’indépendance, les communautés pastorales appliquaient des systèmes et mécanismes coutumiers d’utilisation du foncier prenant en compte les autres acteurs, notamment les pêcheurs et les agriculteurs. Parmi ces droits coutumiers, la Dina de Sékou Amadou, Empereur Peuhl du Macina (5ème Région), a produit la forme la plus élaborée et la plus complète de la gestion du foncier en fonction du temps, des espaces, des acteurs et de leurs activités (Touré, 2010). Le Code domanial et foncier (notamment appelé droit positif) adopté en 2002 est resté silencieux sur les activités d’élevage, et ne définit ni ne décrit l’espace pastoral. La Charte Pastorale adoptée en 2001 consacre les droits essentiels des pasteurs en matière de mobilité du bétail et d’accès aux ressources pastorales. Bien que ces législations existent, les conditions d’élevage extensif et de l’exploitation des pâturages à travers la mobilité des animaux qui prédominent sont confrontées à l’occupation de l’espace pastorale et l’obstruction des passages d’animaux par les agriculteurs et les besoins d’habitat. Ce qui favorise les conflits fonciers entre agriculteurs et éleveurs qui risquent de perdurer.
Production de la viande bovine
La production de viande est occasionnée par les besoins d’alimentation des populations en protéines animales d’une part et par les besoins d’exportation d’autre part. Le Mali est situé dans la zone agro-climatique sahélienne, région en proie depuis plusieurs années, à la sécheresse et à la désertification, en raison des effets anthropiques et du changement climatique. L’élevage pastoral est la principale activité agricole capable de s’adapter dans cette zone aride confrontée à la dégradation des écosystèmes et plus généralement des ressources naturelles. Il représente la troisième source de recettes d’exportations pour le Mali ; fournit en moyenne 30 % des recettes agricoles (Kabore, 2010). L’effectif du cheptel bovin au Sahel et l’Afrique de l’Ouest est estimé en 2007 à 62 123 698 têtes. Ce bétail est concentré au Nigéria (plus d’un quart du cheptel régional), et dans les pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, Sénégal et Mauritanie) qui concentrent la moitié de l’effectif régional (Kagone, 2009). Selon le même auteur, la production de viande bovine de l’Afrique de l’Ouest contribue pour 23% à la production totale du continent. En 2005, elle était estimée à 919 500 tonnes, soit 3,17 kg/habitant. Elle a presque doublé depuis 1961 avec un taux de croissance annuelle moyen de 2%. Toutefois, elle ne représente que 2,13 kg/habitant, soit une production per capita inférieure à la moyenne régionale. On note ainsi un déphasage inquiétant entre l’évolution de la demande et de l’offre en produits animaux (qui n’est que de 2% par an) à l’échelle régionale (Kagone, 2010). Dans la chaîne de valeur bétail/viande au Mali, le maillon éleveur (producteurs) est fortement pénalisé. Il y a de nombreuses inefficiences (intermédiaire ; coût de transport élevé…) qui empêche la transmission d’un prix élevé jusqu’aux éleveurs. La pénalisation des producteurs découle largement de l’absence de politique gouvernementale pour améliorer l’efficience de la filière bétail/viande. (Santara et al., 2013). Au Mali le maillon production dans la chaîne de valeur bétail/viande subit l’influence du système d’élevage et de commercialisation du bétail (Mali, 2005).
Commerçants grossistes
Les grossistes représentent le chaînon principal de la chaîne de valeur bétail/ viande mais principaux fournisseurs des producteurs de la chaîne de valeur viande bovine. Ils disposent des plus larges ressources financières (ils prêtent également aux autres agents) et des plus importantes quantités d’animaux (Santara et al., 2013). Ils achètent sur les marchés de regroupement pour vendre sur les marchés terminaux voire sur les marchés extérieurs. Il achète généralement des animaux tout venants chez les mêmes collecteurs dont il s’attache les services sans un engagement formel. Il peut aussi acheter sur le marché avec des emboucheurs particuliers des animaux embouchés. Il peut arriver qu’il soit emboucheur lui-même. Il fonctionne sur fonds propres et il est généralement admis qu’il a une grande surface financière car il peut acquérir en un jour entre 30 et 60 bovins. Il est le fournisseur principal des chevillards et bouchers abattants. Les animaux sont le plus souvent fournis à crédit sans un engagement formel. Il s’agit plutôt de relations de confiance (Coulibaly et al., 2008). Le crédit informel joue un grand rôle dans les liens entre les acteurs mais aussi contribue à augmenter le niveau des prix tout le long de la filière (Duvergé, 2006).
Services de contrôle et de règlementation
Les opérations administratives d’inspection et de recouvrement fiscal sont tenues respectivement par :
la Direction Nationale des Services Vétérinaires, service de contrôle de l’application des textes règlementaires. Elle intervient dans la chaîne de valeurs à travers l’inspection de la viande à l’abattoir, le contrôle du respect des textes sanitaires portant sur la pratique de la profession de boucher, le contrôle des points de vente de la viande et ses produits dérivés. Dans le souci d’obtenir de la viande saine et compétitive, elle veille en amont de la chaîne à la couverture sanitaire des animaux, à la prévention des maladies et aux soins sanitaires.
la Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence, service chargé de la règlementation commerciale et assure la tutelle des bouchers, des transformateurs et distributeurs. Ces acteurs doivent être enregistrés au registre du commerce et sont soumis au payement de la patente.
la Direction nationale de la Douane est chargée de la réglementation douanière.
La réalisation de la carte de base de la chaîne de valeur
La carte de base d’une chaîne de valeur doit montrer le flux des produits, les acteurs clés et le processus de création de la valeur ajoutée. Pour cela, elle doit :
– déterminer le marché final servi par la chaîne de valeur en question;
– décrire les fonctions (activités économiques) de la chaîne de valeur; les fonctions basiques d’une chaîne de valeur partent de l’approvisionnement en intrant spécifique pour un produit particulier, passent par la production, la transformation, la commercialisation, et enfin la consommation finale ;
– assigner les fonctions identifiées aux catégories d’acteurs. Ce sont les opérateurs de la chaîne de valeur et doivent être placés exactement en dessous des fonctions, afin de montrer qui exécute qu’elle fonction. Il faut noter que le consommateur final fait partie de la chaîne de valeur ajouté, d’autant plus que c’est lui qui paye la valeur ajoutée et par conséquent le revenu de tous les opérateurs des prestataires de service dans la chaîne de valeur. Toutefois il n’est pas un opérateur de la chaîne et donc n’est pas représenté ;
– cartographier les liaisons de la chaîne et la gouvernance. La gouvernance d’une chaîne se rapporte à la manière dont la coordination de la chaîne de valeur est réalisée le long des étapes de la chaîne. Elle est représentée par les flèches entre les opérateurs de la carte de la chaîne de valeur. Cette relation peut être un échange du marché libre (Liens « à vue ») ou des contrats obligatoires établis au préalable.
Concept de chaîne de valeur
La chaîne de valeur est une séquence de combinaisons spécifiques de facteurs qui permet aux producteurs, transformateurs et distributeurs, d’ajouter progressivement de la valeur sur le produit au niveau de chaque maillon jusqu’à la consommation, dans un environnement socio-économique, institutionnel, législatif et règlementaire favorable.
Délimitation du concept de la chaîne de valeur viande bovine
Elle consiste à définir le produit étudié, délimiter sa hauteur et son épaisseur, afin d’éviter toute insuffisance, ou tout débordement.
La définition du produit : le produit est la viande bovine (fraîche) ; et les aspects étudiés sont : la quantité, les prix en gros; en détail et l’hygiène.
Sa hauteur : dans le cas de la présente étude, la chaîne de valeur viande bovine, intéresse le circuit mort de la chaîne de valeur bétail/viande, qui débute à l’abattoir et finit sur la table du boucher conformément au concept chaîne de valeur de l’Agence Nationale de la Sécurité Sanitaire des Aliments (ANSSA, 2007).
Son épaisseur : ici, les acteurs de la chaîne sont des professionnels ; ils tirent l’essentiel de leurs revenus de l’activité.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : SYNTHÈSE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : GÉNÉRALITÉS SUR L’ELEVAGE AU MALI
1.1. Présentation du Mali
1.1.1. Situation géographique
1.1.2. Répartition de la population
1.1.3. Ressources foncières
1.1.4. Données socio-économiques
1.2. Elevage au Mali
1.2.1. Systèmes d’élevage
1.2.2. Importance socio-économique de l’élevage
1.2.3. Contraintes et limitation au développement de l’élevage
1.2.3.1. Les contraintes liées au régime foncier pastoral
1.2.3.2. Les faiblesses des investissements publics et privés
1.2.3.3. Les insuffisances liées à l’alimentation du bétail
1.2.3.4. Les contraintes sanitaires et pathologiques
1.2.3.5. Les faibles performances des systèmes de commercialisation et de transformation des produits animaux
CHAPITRE II : ETAT DES LIEUX DE LA CHAÎNE DE VALEUR VIANDE BOVINE
2.1. Production de la viande bovine
2.1.1. Approvisionnement en animaux de boucherie
2.1.2. Abattages contrôlés
2.2. Transformation
2.3. Commercialisation
2.4. Consommation
2.5. Acteurs de la Chaîne
2.5.1. Fournisseurs d’intrants
2.5.1.1. Emboucheurs
2.5.1.2. Collecteurs de bétail
2.5.1.3. Commerçants grossistes
2.5.2. Producteurs de viande bovine
2.5.2.1. Chevillards
2.5.2.2. Bouchers abattants
2.5.3. Transformateurs
2.5.3.1. La découpe
2.5.3.2. Rôtisseurs
2.5.4. Distributeurs
2.5.5. Structures de financement
2.5.6. Acteurs Institutionnels
2.5.6.1. Services d’appui conseil
2.5.6.2. Services de contrôle et de règlementation
2.5.7. Chambres consulaires
2.5.8. Organisations socioprofessionnelles
2.6. Hygiène
2.7. Structuration du prix de la viande bovine
2.8. Gains économiques et financiers le long de la chaîne de valeurs
CHAPITRE III : MÉTHODE D’ANALYSE DE LA CHAÎNE DE VALEUR
3.1. Première étape : la sélection de la chaîne
3.2. Deuxième étape : la cartographie de la chaîne
3.3. Troisième étape : la mesure de la chaîne
3.4. Quatrième étape : identification des contraintes et opportunités pour le développement de la chaîne
3.5. Cinquième étape : analyse de la gouvernance de la chaîne
3.6. Sixième étape : amélioration et renforcement de capacité de la chaîne
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
CHAPITRE I : METHODOLOGIE
1.1. Concept de chaîne de valeur
1.2. Délimitation du concept de la chaîne de valeur viande bovine
1.3. Méthode d’analyse de la Chaîne
1.4. Période et zone d’étude
1.5. Collecte de données
1.5.1. Echantillonnage
1.5.2. Méthode de collecte des données
1.5.2.1. Enquête exploratrice
1.5.2.2. Enquête transversale ou ponctuelle
1.5.2.3. Discussions de groupes avec les acteurs de la chaîne
1.6. Analyse des données
CHAPITRE II: RÉSULTATS
2.1. Cartographie de la chaîne de valeur
2.1.1. Les acteurs de la chaîne de valeur
2.1.1.1. Les producteurs
2.1.1.2. Les transformateurs
2.1.1.3. Les distributeurs
2.1.1.4. Les supporteurs de la chaîne de valeur
2.1.1.5. Les facilitateurs de la chaîne de valeur
2.1.2. Les fonctions
2.1.3. Le produit
2.1.3.1. La viande fraîche
2.1.4. Performance
2.1.4.1. Le personnel
2.1.4.2. Infrastructures et équipements de distribution
2.1.4.3. L’hygiène
2.1.5. Le prix
2.1.6. Analyse économique de la chaîne
2.1.6.1. Analyse économique chez les chevillards
2.1.6.2. Analyse économique chez le boucher abattant
2.1.6.3. Analyse économique chez les bouchers détaillants
2.1.7. Identification des contraintes et opportunités
2.1.7.1. Les contraintes
2.1.7.2. Opportunités
2.1.8. Analyse de la gouvernance
CHAPITRE III : DISCUSSION
3.1. Limites de l’étude
3.2. Les acteurs
3.3. Performances
3.4. Prix et analyse économique
3.5. Propositions de stratégies en vue d’une réduction du prix de kg de viande
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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