La réduction de la pauvreté et le développement durable demeurent des priorités fondamentales à l’échelle de la planète. Un quart de la population des pays en développement a moins de 1,25 dollars par jour pour vivre. Un milliard d’êtres humains n’ont pas accès à l’eau potable ; 1,6 milliard n’ont pas l’électricité et 3 milliards ne bénéficient pas d’un assainissement adéquat. Un quart des enfants, à l’échelle des pays en développement, souffrent de malnutrition (Banque Mondiale, 2010). Répondre à ces besoins doit rester au cœur des priorités des pays en développement et des sources d’aide au développement — sachant que le développement deviendra plus difficile du fait du changement climatique. Autrement dit, le changement climatique ne fait qu’augmenter la complexité du problème.
D’après l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM), en 2013, le rythme décennal d’augmentation de la température à l’échelle du globe s’est accéléré entre 1971 et 2010, atteignant, en moyenne estimative, 0,17°C durant cette période, contre 0,062°C par décennie sur toute la période 1880-2010. En outre, l’augmentation de 0,21°C entre la température moyenne de la décennie 1991- 2000 et celle de la décennie 2001-2010 est plus marquée que celle qui a été constatée entre les décennies 1981-1990 et 1991-2000 (+0,14°C).
Les impacts du changement climatique sont multiples. Une augmentation de la fréquence et de l’intensité des sécheresses ou des inondations ; une hausse des températures extrêmes, mais aussi des changements plus lents comme l’acidification des océans, la montée du niveau des mers… sont déjà constatés. Ces changements à l’œuvre ont des impacts indirects majeurs comme la baisse des rendements agricoles ou de poissons disponibles, la hausse des prix des produits alimentaires et la baisse des possibilités d’autosuffisance alimentaire qui entrainent alors l’insécurité alimentaire, les conflits pour la terre et pour l’eau … Cette chaîne d’impacts peut se décliner dans différents secteurs mais une chose est sûre : à chaque fois, ce sont les plus pauvres et les plus vulnérables, pourtant les moins responsables des causes du changement climatique, qui subissent les conséquences les plus graves du changement climatique. Davantage exposés aux risques de catastrophes naturelles, dépendant directement de ressources elles mêmes soumises aux pressions des aléas météorologiques, et dotés d’une capacité d’adaptation limitée aux effets des changements climatiques, les femmes, enfants, et communautés marginales sont particulièrement vulnérables. Il s’agit d’une injustice mondiale. En effet, les experts anticipent que le changement climatique aggrave des situations déjà préoccupantes. Il pourrait y avoir par exemple 600 millions de personnes supplémentaires en situation d’insécurité alimentaire d’ici à 2080 (GIEC, 2014). Affectés par à peine 9 % des catastrophes mondiales, les pays à faibles revenus subissent près de la moitié du nombre total de décès provoqués par ces catastrophes (48%), et ce chiffre pourrait malheureusement augmenter. Pourtant, malgré les signes avant-coureurs annonçant l’intensification et l’installation à long terme du changement climatique, il y a de fortes chances pour que l’action internationale concertée ne soit pas suffisante pour s’attaquer au problème et limiter le dérèglement climatique. Selon le GIEC en 2007, le monde pourrait, d’ici 2100, connaître un réchauffement de 5 °C à 6 °C par rapport aux niveaux préindustriels, bien au-delà du seuil « de sécurité » recommandé par les scientifiques (+1,5 à 2° C).
Madagascar est le cinquième pays le plus vulnérable au changement climatique selon le classement Maplecroft (2012). En d’autres termes, Madagascar figure parmi les pays les plus exposés aux effets négatifs du changement climatique. Depuis quelques temps, les effets négatifs du changement climatique se font ressentir dans le pays. Le climat est de plus en plus sujet à de fortes variabilités ou à des changements selon des échelles de temps et d’analyse dont les conséquences restent néfastes pour le développement durable. Les observations depuis 1950 ont montré que la température de l’air de l’île a augmenté de façon continue et significative (entre 0,2 et 0,4 °C) jusqu’en 2012 (DGM, 2008). Une grande variabilité sur les précipitations a été observée tandis que le nombre de jour de pluie a été réduit entre 20 et 60 jours depuis ces derniers 45 ans. Depuis 1994, la fréquence des cyclones intenses (avec des vents supérieurs à 150 km/h) ayant touché terre a augmenté très significativement (DGM, 2008).
La forte pauvreté de la population couplée avec la récurrence des évènements climatiques extrêmes dans divers endroits (cyclones, inondations, sécheresses, tarissement des rivières,…) augmentent de plus en plus la vulnérabilité de la majorité de la population et diminuent sa capacité d’adaptation, aggravée par la destruction des ressources naturelles dont elle dépend. Déjà sujette aux variabilités climatiques, l’agriculture à l’instar de tous les autres secteurs est exposée au changement climatique. L’économie du pays repose essentiellement sur cette agriculture qui emploie 76,8% de la population active et contribue à près du tiers du Produit Intérieur Brut (PIB) (ENSOMD / INSTAT 2012-2013).
A Boeny, la majorité de la population active (66,6% des hommes et 61,6% des femmes) s’adonne aux activités agricoles (agriculture, élevage, pêche et artisanat), suivies de l’activité commerciale (19% des hommes et 12% des femmes). La Région Boeny est classée comme deuxième grenier à riz de Madagascar (CREAM, 2014). Malgré cette grande importance des activités agricoles pour la région, celles-ci connaissent des risques majeurs qui auront des impacts sur l’économie de la région. Dans ce contexte, le présent mémoire dont le thème est intitulé « Analyse comparative des risques climatiques pour les secteurs de production dans les trois écosystèmes de la région Boeny » pourra servir d’étude préalable dans le cadre de la conception et de la mise en œuvre des projets liés à ces secteurs de production et aussi aux projets d’adaptation au changement climatique à venir.
METHODOLOGIE
PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
Dans la région Boeny, le climat est de plus en plus sujet à de fortes variabilités ou à des changements selon des échelles de temps et d’analyse et dont les conséquences restent néfastes pour le développement durable. Depuis quelques années, des risques climatiques majeurs se sont observés pour les secteurs de production, qui engendrent des conséquences graves sur l’économie de la région voire même le mode de vie et bien être des ménages. Une diminution de la productivité agricole (c’est à dire de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche et des forêts) est constatée . Ceci est essentiellement dû au stress hydrique (eau pluviale insuffisante).
En outre, il est constaté que d’autres problèmes s’ajoutent à ceux liés au climat qui ne font qu’aggraver encore plus la situation. Les pressions sur les ressources naturelles, entre autres ne cessent de s’accentuer dues aux activités anthropiques que ce soit pour des raisons de subsistance ou commerciales ou tout simplement de vandalisme. La déforestation (forêts naturelles et mangroves), la culture sur brulis ou tavy, et les feux sont les pressions les plus fréquentes et les plus dévastatrices dans la région. Selon la plus récente analyse de l’évolution de la couverture forestière nationale, Madagascar a perdu 181 097 ha de forêt en 5 ans (ONE, 2013). En effet, les communautés riveraines dépendent fortement des ressources naturelles. De ce fait, ces ressources subissent une forte pression qui entraine leur disfonctionnement. Autrement dit, elles ne peuvent plus assurer leurs fonctions écologiques de protection et de régulation. En effet, la déforestation dénude le sol et le prive de végétation qui les protège des agressions de l’eau et du vent (Bazani, 2009).
La dernière analyse de la couverture forestière nationale révèle que la Région Boeny accuse un taux de déforestation la plus élevée (0,9%) comparée à la moyenne nationale (0,7%) (ONE, 2013). La situation devient alarmante car cette Région qui constitue le second grenier à riz de Madagascar est à l’heure actuelle menacée, entre autres par les conséquences de la dégradation forestière. Dans la grande exploitation rizicole de Marovoay, les riziculteurs connaissent de graves problèmes d’ensablement des rizières. Non seulement, ces matériaux colluvionnaires sont de nature sableux,défavorables à l’agriculture, mais aussi ils rehaussent le niveau des rizières en défavorisant l’irrigation (Razafimanantsoa, 2008). Il s’ensuit que la riziculture en saison sèche n’est plus pratiquée et la production rizicole diminue. Compte tenu que la sécurité alimentaire reste un problème persistant pour Madagascar, la diminution de la production rizicole ne fait qu’accentuer la pauvreté.
CADRE THEORIQUE
Concept de développement durable
Le Développement Durable est une forme de développement économique ayant pour objectif principal de concilier le progrès économique et social avec la préservation de l’environnement. Ce dernier étant considéré comme un patrimoine devant être transmis aux générations futures.
La Commission Mondiale pour l’Environnement et le Développement de l’ONU (WCED) dite Commission de Brundtland en a donné en 1987 la définition suivante: « Sustainable Development is development that meets the needs of the present without compromising the ability of future generations to meet their own needs ». « Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la possibilité, pour les générations à venir, de pouvoir répondre à leurs propres besoins ». Le développement durable est constitué de trois piliers qui sont :
• un pilier économique, qui vise des objectifs de croissance et d’efficacité économiques;
• un pilier social, qui vise à satisfaire les besoins humains et à répondre à des objectifs d’équité et de cohésion sociale. Il englobe notamment les questions de santé, de logement, de consommation, d’éducation, d’emploi, de culture
• un pilier environnemental, qui vise à préserver, améliorer et valoriser l’environnement et les ressources naturelles sur le long terme.
Le développement durable implique l’intégration harmonieuse d’une économie rationnelle et viable, d’une gouvernance responsable, de la responsabilisation des populations, de la cohésion sociale et de l’intégrité écologique.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1: METHODOLOGIE
1.1. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
1.2. CADRE THEORIQUE
1.2.1. Concept de développement durable
1.2.2. Concepts de risque
1.2.3. Différentes méthodes d’analyse des risques climatiques
1.2.4. Choix de la méthodologie à adopter
1.2.5. Importance de la considération de la communauté
1.3. ZONE D’ETUDE
1.3.1. Caractéristiques de la zone d’étude
1.3.2. Autres caractéristiques
1.4. ANALYSES DES RISQUES SELON AR5
1.4.1. Identification et analyse des Dangers
1.4.2. Evaluation de l’Exposition face aux dangers
1.4.3. Identification des Risques
1.4.4. Identification de la Vulnérabilité
1.4.5. Analyse des options d’adaptation
1.5. CAPITALISATION DES DONNEES EXISTANTES
1.5.1. Données spatiales
1.5.2. Données climatiques
1.5.3. Données socio-économiques
1.6. COLLECTE ET TRAITEMENT DES DONNEES ADDITIVES
1.6.1. Collecte de données sur terrain
1.6.2. Méthode d’analyse des données collectées sur terrain
1.7. OUTILS DE SAISIE ET LOGICIELS UTILISES
1.8. LIMITES DU TRAVAIL
1.9. CADRE OPERATOIRE
1.10. SYNTHESE METHODOLOGIQUE
CHAPITRE 2. RESULTATS
2.1. CARACTERISTIQUES DES MENAGES
2.2. ACTIVITES SOURCES DE REVENUS
2.2.1. Activités sources de revenus par écosystème
2.2.2. Agriculture et élevage
2.3. PERCEPTION PAYSANNE
2.3.1. Perception paysanne de l’évolution du climat
2.3.2. Impacts sur les activités économiques
2.4. ANALYSE DES RISQUES CLIMATIQUES
2.4.1. Dangers
2.4.2. Exposition
2.4.3. Risques climatiques
2.4.4. Vulnérabilité
2.4.5. Options d’adaptation
CHAPITRE 3. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
3.1. DISCUSSIONS
3.1.1. Méthodologie AR5
3.1.2. Données climatologiques utilisées
3.1.3. Interrelation entre risques climatiques et activités sources de revenus
3.1.4. Impacts socio-économiques sur les paysans
3.1.5. Vérification des hypothèses
3.2. RECOMMANDATIONS
3.2.1. Objectif
3.2.2. Plan d’action
CONCLUSION
Bibliographie
Annexe