AMOUR ET DESAMOUR ENTRE LE RELIGIEUX ET LE POLITIQUE

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Les tribulations dโ€™une enquรชte ยซ chez soi ยป

Lโ€™une des postures au fondement de la discipline anthropologique poussait le chercheur ร  se rendre en territoire inconnu pour รฉtudier une culture autre que la sienne. Ce dรฉpaysement lui permettait de porter un ยซ regard nouveau et neutre ยป, de sโ€™affranchir des รฉvidences, mais aussi de passer du temps ร  apprendre la langue locale.
Une ethnologie effectuรฉe par un รฉtranger infรจre plus dโ€™objectivitรฉ, pense-t-on, alors que lโ€™autochtone serait sujet ร  la subjectivitรฉ et au biais de la surinterprรฉtation. Pour lโ€™homme du cru, tout paraรฎtrait รฉvident et rien ne lโ€™รฉtonnerait. Cette supposition repose sur le postulat que ยซ Nous sommes tous en effet tributaires des conventions de notre รฉpoque, de notre culture et de notre milieu social ยป43. Cela nous empรชche de nous รฉtonner de lโ€™inattendu parce que tout va de soi pour nous dans notre propre culture. Cette dichotomie entre le chercheur รฉtranger et le chercheur du terroir repose la problรฉmatique de lโ€™ยซ ici ยป et de lโ€™ยซ ailleurs ยป, du ยซ nous ยป et du ยซ eux ยป44. On peut se demander si ce questionnement est toujours dโ€™actualitรฉ avec le brassage des cultures favorisรฉ par la mondialisation. Ce questionnement suppose aussi que tout individu appartient ร  une seule culture et que la pluriculture nโ€™existe pas. Mondher Kilani va plus loin en rรฉfutant lโ€™idรฉe selon laquelle lโ€™Autre existerait en soi.
Lโ€™altรฉritรฉ, รฉcrit Kilani, doit รชtre considรฉrรฉe comme une notion relative et conjecturelle : on est ยซ Autre ยป que dans le regard de quelquโ€™un. Lโ€™ยซ Indien ยป, le ยซ Sauvage ยป, lโ€™ยซ Oriental ยป, le ยซ Paysan ยป ou le ยซ Marginal ยป ne constituent des substances immuables. Ils nโ€™apparaissent tels que par la mise en relation quโ€™effectue le regard portรฉ par lโ€™Europe ou la sociรฉtรฉ moderne sur ces groupes ร  un certain moment de lโ€™histoire. Bref, la catรฉgorie de lโ€™ยซ Autre ยป ne relรจve pas dโ€™une dรฉfinition substantielle. Elle ne correspond pas ร  une entitรฉ autonome et repรฉrable positivement ; elle est au contraire toujours prise dans une relation, gรฉnรฉralement de domination-subordination45 ยป.
La pluriculturalitรฉ rรฉduit ce rapport de domination-subordination et met en place une relation quasi รฉgalitaire. Le regard ยซ autre ยป favorise une lecture plus large, une comparaison entre ce qui apparaรฎt ยซ ici ยป et qui est absent ou se manifeste autrement ยซ lร -bas ยป. Cโ€™est un regard qui ne domine pas autrui ni ne le chosifie, cโ€™est un regard qui sโ€™enrichit de la diffรฉrence. Du coup, la posture dโ€™une anthropologie de sa propre culture est possible surtout lorsque le chercheur a connu une culture autre que la sienne. Je partage lโ€™idรฉe de Franรงois Laplantine lorsquโ€™il รฉcrit que : La distance des sociรฉtรฉs qui ne sont pas les nรดtres nous permet de nous apercevoir de ce qui dans les nรดtres รฉtait jusquโ€™alors inaperรงu [โ€ฆ]. La connaissance anthropologique de notre culture passe inรฉluctablement par la connaissance des autres cultures et nous conduit notamment ร  reconnaรฎtre que nous sommes une culture possible parmi tant dโ€™autres, mais non la seule46 ยป.
Lorsque le terrain est un ยซ chez soi ยป, on a lโ€™avantage de pratiquer les langues locales. Je pouvais personnellement dโ€™un village ร  un autre ou dโ€™une ville ร  une autre entrer directement en contact avec les enquรชtรฉs. Je pouvais ainsi me passer des services dโ€™un interprรจte nรฉcessaire pour lโ€™anthropologue qui dรฉbarque dans un territoire inconnu. Lโ€™interprรจte permet de parer aux limites du chercheur dont lโ€™insuffisance de la maรฎtrise de la langue locale constitue un handicap ร  dialoguer avec la population รฉtudiรฉe. Mais lโ€™interprรจte est dโ€™abord un traducteur. Il ne peut traduire sans interprรฉter. Son interprรฉtation altรจre sans quโ€™il ne le fasse exprรจs la comprรฉhension du discours. De plus, il doit possรฉder une connaissance suffisante de la langue du chercheur et de sa propre langue pour optimiser son rรดle auprรจs du chercheur. Quelle que soit la compรฉtence quโ€™on pourrait lui accorder, la traduction des rรฉalitรฉs de son terroir demeure une trahison. Les chercheurs nationaux nโ€™รฉchappent pas entiรจrement ร  cette difficultรฉ.
Mon expรฉrience de terrain auprรจs des peuples de langue Gbe mโ€™a montrรฉ les avantages et les limites que procure la maรฎtrise de la langue du milieu investiguรฉ. Jโ€™ai quittรฉ ma famille peu avant mes treize ans et vรฉcu toute ma scolaritรฉ et mon parcours post bac avec des jeunes de mon รขge pratiquant des dialectes divers. Je peux tenir une conversation en Fษ”ngbe, en Xwlagbe et en Gษ›ngbe. Je comprends assez facilement mes locuteurs Saxuษ›, Aja et Xueda et Gun. Cependant, je ne pourrais prรฉtendre maรฎtriser assez bien les tournures idiomatiques ni le langage proverbial de ces parlers. Je ne savais pas, au dรฉbut de mes enquรชtes, quโ€™il รฉtait dรฉconseillรฉ, par exemple, dโ€™utiliser le terme courant ยซ azetษ”wo ยป pour dรฉsigner les sorciers.
Lโ€™ayant employรฉ naรฏvement, jโ€™ai รฉtรฉ repris par un Vodunษ”n : ยซ Nous, nous les appelons ยซ Mia Nษ”wo ยป. Je venais de faire une ยซ gaffe ยป sans mโ€™en rendre compte. En effet le premier terme รฉtait le plus usitรฉ. Appliquรฉ aux intรฉressรฉs, il devient insultant et mรฉprisant. Il renferme une connotation nรฉgative parce quโ€™il รฉvoque lโ€™aspect anthropophagique de la sorcellerie. Il se dรฉcompose en deux monรจmes : (a)ze, prendre, capter, capturer ; tษ” qui exprime la possession, la paternitรฉ et wo est la marque du pluriel. Les Azetษ” sont des personnes supposรฉes รชtre dotรฉes de pouvoirs capables de dรฉvorer les รขmes dโ€™autrui. Le second terme est plus appropriรฉ et acquiert lโ€™adhรฉsion des interlocuteurs parce quโ€™il est apparemment plus รฉlogieux. Il signifie littรฉralement ยซ nos mรจres ยป.

Dans les mailles des sorciers

Mon entourage familial lui-mรชme nโ€™a jamais apprรฉciรฉ que je travaille sur ce sujet de recherche. Il nโ€™allait pas jusquโ€™ร  me contrarier, mais il me mettait en garde contre la dangerositรฉ et la suspicion qui accompagnent une enquรชte sur la sorcellerie au pays du vodun. Les rรฉflexions les plus frรฉquentes se rรฉsumaient ร  ces deux questions : ยซ Nโ€™as-tu trouvรฉ rien dโ€™autre ร  รฉtudier ? ยป ou encore ยซ Es-tu sorcier pour frรฉquenter les sorciers ? ยป.
ce double questionnement, il faut ajouter le regard interrogateur ou la mine pรฉtrifiรฉe de ma famille dรจs que je faisais allusion ร  mes recherches.
Dans la rรฉgion de Houndjohoundji, jโ€™ai dรป renoncer ร  mes enquรชtes auprรจs dโ€™un phytothรฉrapeute. Les premiรจres rencontres ont รฉtรฉ sans accroc. Sur la petite table de son salon, รฉtaient disposรฉes une Bible et une croix. Plus loin, sur un meuble, il y avait une statue de la Vierge Marie. Un peu partout dans le salon, on voyait des bouteilles ainsi que des ingrรฉdients. Le phytothรฉrapeute avait รฉcrit sur un bout de papier scotchรฉ sur chacune des bouteilles, les maladies que soignait chaque potion embouteillรฉe. La mรฉthode de sโ€™informer sur les thรฉrapies fonctionna jusquโ€™au jour oรน tout bascula. Aprรจs plusieurs entrevues passรฉes, nous devions aborder la question de la sorcellerie. Mon enquรชtรฉ estima quโ€™il ne pouvait pas aborder la question sans lโ€™aide dโ€™un ami. Il appela son fils et lui demanda de me conduire dans le village voisin pour aller chercher cet ami qui avait un รขge certain. Le fils commit lโ€™erreur de se mรชler au dรฉbat sans y รชtre invitรฉ. Il dรฉclara sans autre forme de procรจs : ยซ Mon papa est sorcier mais lui ne fait pas de mal. ยป Jโ€™ai voulu sauter sur lโ€™occasion, mais mon interlocuteur mโ€™a fait comprendre que nous en reparlerions plus tard. Il nโ€™a cependant pas infirmรฉ ยซ lโ€™accusation ยป de son fils. Cette situation pousse ร  se poser plusieurs questions. Pourquoi le fils a-t-il rรฉvรฉlรฉ lโ€™identitรฉ sorciรจre de son pรจre ? Comment peut-il savoir que son pรจre est sorcier sโ€™il ne lโ€™est pas lui- mรชme ? Son intervention nโ€™insinue-t-elle pas quโ€™on peut รฉtablir une diffรฉrenciation fonctionnelle entre des sorciers de la mรชme corporation ?
Nous avons ramenรฉ son ami. Il mโ€™a parlรฉ de la vie du village, des arrestations organisรฉes contre les vodunษ”n pendant la rรฉvolution marxiste au Bรฉnin, mais de la sorcellerie ou du sorcier, il nโ€™en pipa mot. Rien non plus des plantes qui soignent. Je relanรงais lโ€™un ou lโ€™autre, mais personne ne rรฉpondait ร  mes questions. Je revins plusieurs fois voir les deux amis, nos discussions รฉtaient passionnรฉes sur la pรชche et la politique mais, les questions sur le vodun, la pharmacopรฉe, รฉtaient simplement esquivรฉes. Leur silence ne me dรฉcourageait pas. Jโ€™ai dรป mettre, cependant, fin ร  nos rencontres, parce que lors de mes quatre derniers passages, je repartais avec un pneu crevรฉ, puis deux, trois et le quatriรจme jour, mes quatre pneus ont รฉtรฉ crevรฉs. Ces crevaisons sont intervenues quelques semaines aprรจs un incident de dysfonctionnement du frein de ma voiture.
Le samedi 8 aoรปt 2015, je quittais la petite bourgade oรน je sรฉjournais pour me rendre dans un village, ร  une vingtaine de kilomรจtres plus loin, afin de rencontrer un informateur qui venait de mโ€™รชtre indiquรฉ. Je partis de chez moi aux environs de 9h, avec la voiture quโ€™un ami avait eu la dรฉlicatesse et la gentillesse de me prรชter. Elle รฉtait apparemment en bon รฉtat de marche. Je venais de parcourir les douze premiers kilomรจtres lorsque, ร  deux cents mรจtres dโ€™un poste de pรฉage, je remarquai que je ne pouvais plus freiner : ni le frein main ni la pรฉdale de frein ne fonctionnaient. Or, comme tous les samedis matin, cette route inter-รฉtat รฉtait trรจs frรฉquentรฉe et les voitures devant moi avaient dรฉjร  bien ralenti.
Malgrรฉ ma panique, jโ€™eus le rรฉflexe dโ€™utiliser mon frein moteur. Cette technique ne me permit pas non plus dโ€™immobiliser ร  temps la voiture.
Et comme je me rapprochais de plus en plus de la file de voitures dรฉjร  ร  lโ€™arrรชt, jโ€™eus juste le temps de dรฉvier mon vรฉhicule sur la bande rรฉservรฉe aux officiels, de peur dโ€™abรฎmer inรฉvitablement, non seulement la luxueuse voiture qui รฉtait devant la mienne mais aussi ma voiture de prรชt. Cโ€™est la barriรจre de sรฉcuritรฉ mise sur la rangรฉe des officiels pour รฉviter que les fraudeurs ne lโ€™empruntent qui, aprรจs lโ€™avoir percutรฉe, parvint ร  immobiliser lโ€™engin. Jโ€™avoue que je ne comprenais rien ร  ce qui mโ€™arrivait. Sur-le-champ, la gรชne dโ€™avoir endommagรฉ la voiture dโ€™autrui mโ€™embรชtait, mais elle fut quelque peu dissipรฉe par le rรฉconfort venu du propriรฉtaire lorsque je lโ€™eus informรฉ par tรฉlรฉphone. Ce dernier se chargea de mโ€™envoyer son mรฉcanicien. La voiture redรฉmarra normalement et curieusement le frein, sans aucune intervention du rรฉparateur, se remit ร  fonctionner normalement.
la joie dโ€™รชtre ponctuel ร  mon rendez-vous se mรชla la honte, et pourtant jโ€™avais dรฉjร  quinze ans dโ€™expรฉrience de conduite. Ce sentiment fut accentuรฉ lorsque mon compagnon dโ€™infortune me demanda depuis quand jโ€™avais mon permis et si jโ€™รฉtais habituรฉ conduire une voiture. Sans rรฉpondre ร  ces questions, je lโ€™ai priรฉ de prendre le volant sโ€™il nโ€™y trouvait pas dโ€™inconvรฉnient. Ce quโ€™il fit sans hรฉsitation. Mon entretien, heureusement, a รฉtรฉ conduit comme je lโ€™avais envisagรฉ. Le mรฉcanicien et moi avons repris le mรชme itinรฉraire pour rentrer. Contre toute attente, ร  quelques dizaines de mรจtres prรจs, aprรจs avoir passรฉ cette fois-ci le poste de pรฉage, le mรชme phรฉnomรจne se reproduisit. La rรฉpรฉtition de la panne en prรฉsence dโ€™un technicien mโ€™a soulagรฉ. Ce sentiment รฉtait mรชlรฉ dโ€™inquiรฉtude car la panne ร  rรฉpรฉtition pourrait รชtre due ร  un problรจme mรฉcanique qui pourrait constituer un obstacle pour mes dรฉplacements.
Le mรฉcanicien ouvrit le capot, examina le moteur et, ร  lโ€™aide de ses clefs, vรฉrifia la source de ce dysfonctionnement. Il revint vers moi dโ€™un air narquois. Je mโ€™attendais ร  ce quโ€™il mโ€™annonรงรขt une panne grave. Mais non. ยซ Je ne comprends pas ce qui se passe. Il y a de lโ€™huile ร  frein. Tout paraรฎt normal ยป, me dit-il. Je souris et puis je lui demande de remettre le moteur en marche. Nous sommes rentrรฉs avec la mรชme voiture et le freinage nโ€™a plus posรฉ aucune difficultรฉ alors quโ€™aucune rรฉparation nโ€™a รฉtรฉ faite. La voiture a รฉtรฉ examinรฉe au garage. La tรดlerie endommagรฉe a รฉtรฉ rรฉparรฉe, mais au niveau du frein aucune panne nโ€™a รฉtรฉ trouvรฉe. Mais pourquoi le mรชme phรฉnomรจne se produisit-il par deux fois au mรชme endroit, sans aucune explication apparente ? Erreur mรฉcanique ou dรฉfaut de montage ? Panne momentanรฉe ? Je ne disposais pas dโ€™indices pour rรฉpondre ร  ces questions.
Je me rรฉsolus cependant ร  attribuer cette mรฉsaventure ร  une erreur de montage sur cette sรฉrie de voitures, mรชme si je nโ€™avais pas connaissance dโ€™une panne aussi grave sur dโ€™autres vรฉhicules. Cet รฉpisode ne mโ€™aurait donc pas intriguรฉ et nโ€™aurait pas รฉtรฉ retenu dans cet รฉcrit sโ€™il nโ€™avait pas รฉtรฉ suivi dโ€™un autre fait plus insolite que le premier. Je logeais dans une grande maison avec deux autres colocataires. Nos chambres รฉtaient sรฉparรฉes par un couloir en forme de ยซ L ยป qui donnait sur un grand salon. Je nโ€™ai pas eu le courage de raconter mes dรฉconvenues aux deux autres lors de notre dรฎner le soir de lโ€™incident malencontreux. Je nโ€™avais pas envie de traรฎner ร  table ce soir-lร . Jโ€™envisageais de retranscrire au plus vite mon entretien de la matinรฉe et de passer une nuit reposante avant de rejoindre un autre informateur au petit matin pour continuer mon travail de terrain.
Je dormais quand je fus rรฉveillรฉ par un orage dโ€™une violence rare. Les coups de tonnerre รฉmettaient un bruit assourdissant. Je me suis levรฉ pour fermer les lamelles vitrรฉes de mes fenรชtres car lโ€™รฉclair du tonnerre me perturbait. Je me suis recouchรฉ mais il รฉtait impossible pour moi de me rendormir. Plus tard, dans la nuit, alors que je ne dormais pas, survint un รฉvรฉnement qui mโ€™a pรฉtrifiรฉ. Lโ€™รฉclair traversait ma chambre de part en part, allait dโ€™une fenรชtre ร  lโ€™autre et revenait ร  la premiรจre. Mais un รฉclair ne fait pas un va-et-vient, il part dโ€™un bout ร  un autre, pensai-je. La lenteur de son passage ne correspondait pas non plus ร  la vitesse dโ€™un รฉclair. Je ne sais pendant combien de temps jโ€™ai pu, pรฉtrifiรฉ dans mon lit, observer le phรฉnomรจne qui sโ€™animait sous mes yeux, comme si on mโ€™y maintenait, mโ€™obligeant ร  observer le spectacle. Je parvins, je ne sais pas au bout de combien de temps dโ€™inactivitรฉ ร  me dรฉgager et ร  rejoindre le couloir principal.
Jโ€™entendis le bruit de la fermeture des fenรชtres dans une chambre voisine, mais je nโ€™avais pas osรฉ frapper ร  la porte. Je ne me sentais pas dโ€™aplomb pour raconter le jeu de lumiรจre observรฉ, car je ne voulais pas dรฉranger. Je me disais surtout que mon voisin me tournerait en dรฉrision en arguant que mon dรฉtour par le pays du ยซ Blanc ยป me rendait dรฉsormais fragile et que jโ€™avais peur des coups de tonnerre. Je repris mon courage et regagnai ร  nouveau mon lit. Le mรชme phรฉnomรจne se reproduisit encore. Je sortis cette fois-ci et rรฉsolus de passer le reste de ma nuit sur une chaise au salon. Ni dans le couloir ni dans le salon, je nโ€™avais la vision de la chambre ร  coucher et pourtant lโ€™orientation des piรจces aurait produit le mรชme effet. La nuit fut trรจs longue pour moi et jโ€™ai dรป somnoler par moment sur ma chaise.
Au lever du jour, comme ร  lโ€™accoutumรฉe, jโ€™ai appelรฉ mon informateur de la veille pour le remercier du temps quโ€™il avait consacrรฉ ร  mes questions. Son insistance ร  me demander ร  maintes reprises comment jโ€™avais passรฉ ma nuit, me contraignit ร  lui narrer les faits. Il entrecoupait mon rรฉcit par des rigolades que je nโ€™apprรฉciais pas, sans oser le lui faire remarquer. Dรจs quโ€™il finissait de rire, il me relanรงait. Par politesse, je mโ€™exรฉcutais. Il finit lui-mรชme par achever dans le dรฉtail le rรฉcit que jโ€™avais entamรฉ. Il a รฉvoquรฉ le manque de freinage de la veille. Il attribuait tous ces faits ร  des agents intentionnels. Avant mรชme dโ€™avoir rรฉpondu ร  sa derniรจre question ยซ As-tu eu peur ? ยป, il ajouta aussitรดt : ยซ Ils ont voulu te tester, nโ€™aie pas peur ; rien de fรขcheux ne tโ€™arrivera. Ils ont voulu te tester parce que tu viens fouiner dans leur vie. ยป Jโ€™enchaรฎne ร  mon tour les questions qui me brรปlaient les lรจvres : ยซ Qui sont ceux qui ont voulu me tester ? ยป ; ยซ โ€œIlsโ€, cโ€™est qui ? ยป ;
Pourquoi cherchent-ils ร  me faire peur ? ยป, et surtout celle ร  laquelle je souhaitais avoir ร  prรฉsent une explication ยซ La difficultรฉ de ne pas pouvoir freiner ร  deux reprises la veille au mรชme endroit quโ€™en savait-il ? ยป. Ni cette derniรจre prรฉoccupation ni les prรฉcรฉdentesย  nโ€™eurent dโ€™autres rรฉponses que le silence. Par mes enquรชtes, jโ€™entrais dans les mailles des sorciers. Je dรฉrangeais.
Je change rรฉguliรจrement de domicile ร  mes diffรฉrents passages au Bรฉnin dans le cadre de mes enquรชtes. Comment cet informateur pouvait-il savoir mon lieu de rรฉsidence ? Mรชme sโ€™il lโ€™avait su, il nโ€™รฉtait pas tรฉmoin de lโ€™รฉpisode nocturne et pourtant, tout prรชte ร  penser quโ€™il en savait plus que moi-mรชme. Jโ€™รฉtais troublรฉ par tous ces รฉvรฉnements lorsque mes colocataires me rejoignirent pour le petit dรฉjeuner. Bercรฉs par la fraรฎcheur quโ€™avait apportรฉe nuitamment la pluie, ils avaient tous les deux passรฉ une excellente nuit. Lโ€™un me confirma quโ€™il sโ€™รฉtait rรฉveillรฉ pour fermer ses fenรชtres, mais lโ€™autre nโ€™avait mรชme pas su quโ€™il avait plu. Aucun des deux nโ€™avait entendu le bruit du tonnerre. Je leur ai racontรฉ lโ€™ambiance thรฉรขtrale de la nuit. Ils en ont bien ri. Lโ€™inquiรฉtude visible qui se lisait sur mon visage ne les a mรชme pas freinรฉs dans leur รฉlan dโ€™hilaritรฉ, au contraire, elle les y encourageait au-delร  de ce ร  quoi je mโ€™attendais. Au fou rire a succรฉdรฉ de la tristesse lorsque je leur ai finalement racontรฉ la conversation que je venais dโ€™avoir avec mon informateur. Jโ€™รฉtais, comme le dit Edgard Morin, un ยซ observateur observรฉ ยป, observรฉ sur mon terrain mais surtout observรฉ jusque dans mon intimitรฉ58.
Les champs dโ€™actions de la sorcellerie
Sorcellerie et parentรฉ
De nombreux chercheurs ont montrรฉ que la sorcellerie a un lien intrinsรจque avec la famille par la parentรฉ consanguine et lโ€™alliance. Par parentรฉ consanguine, on dรฉsigne les mรฉcanismes de la filiation, cโ€™est-ร -dire les relations รฉtablies entre gรฉnรฉrations au sein dโ€™un lignage, dโ€™un groupe de parents qui descendent dโ€™un ancรชtre commun. Plusieurs sociรฉtรฉs africaines sont rรฉgies par une filiation unilinรฉaire : la transmission et lโ€™appartenance est en rรฉfรฉrence ร  un seul parent, soit le pรจre, soit la mรจre. Tantรดt, la sorcellerie sโ€™hรฉrite en ligne agnatique dans le patrilignage, tantรดt en ligne utรฉrine dans le matrilignage. Dans certaines sociรฉtรฉs, lโ€™union matrimoniale a aussi une incidence sur le phรฉnomรจne sorcier. Ainsi, les places occupรฉes par les acteurs ne sont pas identiques quand on passe du patrilignage au matrilignage ou encore quand on se situe dans le cadre dโ€™une union par alliance.

La sorcellerie dans une parentรฉ patrilinรฉaire

On croit habituellement quโ€™en Afrique, dรจs quโ€™un malheur survient, on soupรงonne de sorcellerie puis on procรจde ร  des accusations. Il nโ€™en est pas toujours ainsi. La sorcellerie nโ€™est pas sujet ร  palabres ร  loisir dans toutes les sociรฉtรฉs.
Tout savoir ou tout dire sur la sorcellerie est dโ€™un poids tel quโ€™il fait peser le soupรงon sur qui le profรจre en temps normal, sโ€™il nโ€™รฉmane pas dโ€™un ensorceleur officiel, il ne peut que provenir dโ€™un sorcier ยป 77.
Telle est la remarque de lโ€™ethnologue Suzanne Lallemand aprรจs une enquรชte de terrain au Togo78. On a souvent entendu aussi quโ€™en Afrique, aucun malheur nโ€™est anodin et que sa provenance est souvent imputรฉe ร  autrui. Ce nโ€™est pas aussi simple. Certes, une accumulation de malheurs ou des dรฉconvenues successives et rรฉpรฉtitives – maladie, perte de biens, accident de la route, รฉchecs successifs, perte dโ€™emploi, stรฉrilitรฉ, mort de bรฉtail ou dโ€™un parent – qui frappent un individu le poussent ร  sโ€™interroger sur la signification de ce qui lui advient. Il cherche ร  situer la cause de ses infortunes hors de lui, ร  se sentir lโ€™objet de persรฉcutions intentionnelles de la part des sorciers, mais il nโ€™en parle pas au tout venant. Il garde le silence par rapport aux gens extรฉrieurs ร  sa famille. Celle-ci formule des soupรงons. Elle soupรงonne un ou plusieurs membres de la famille dรฉjร  reconnus comme sorcier. Elle rรฉserve le privilรจge des accusations de sorcellerie au dรฉsenvoรปteur. Cโ€™est lui qui atteste de la culpabilitรฉ ou de lโ€™innocence du prรฉsumรฉ. Lโ€™analyse du cas de Jumelle par Lallemand est trรจs รฉclairante.
Des conflits peu ouverts opposaient la petite รฉcoliรจre Jumelle ร  Adjara qui ne faisait pas partie ni de son cercle de consanguinitรฉ, ni de sa parentรฉ par alliance. Leurs rencontres รฉphรฉmรจres se sont limitรฉes ร  des transactions mercantiles qui se sont soldรฉes par des รฉchecs ร  trois reprises. Un jour, Adjara sโ€™introduisit subrepticement dans la maison des parents de la fille. Dรฉrogeant ร  toute rรจgle de civilitรฉ en usage dans la localitรฉ qui prescrit ร  tout nouvel arrivant de souscrire aux commoditรฉs de la salutation, elle va jusquโ€™ร  offrir une piรจce de 25 F CFA ร  Jumelle. Celle-ci rejette dโ€™abord le don, puis accepte par dรฉlicatesse lโ€™offre incongrue ร  tous รฉgards. Car pour lโ€™imaginaire social, tout don รฉmanant dโ€™un inconnu est rรฉputรฉ dangereux pour le rรฉcipiendaire, surtout si le donneur est une personne peu sympathique. Jumelle tombe malade, crie quโ€™on veut la dรฉvorer nuitamment. Adjara est aussitรดt suspectรฉe puis accusรฉe en prรฉsence de ses parents et du clairvoyant, sur la place du village par les anciens. Elle nie dโ€™abord ses mรฉfaits. Mais de rebondissements en rebondissements et coups de thรฉรขtre, elle avoue ses crimes devant la divinitรฉ du village. Elle cite les noms de ses associรฉs dont Jโ€™Achรจte-et-je-Pars79, un parent de la victime qui partage la mรชme chambre que cette derniรจre. La culpabilitรฉ de Jโ€™Achรจte-et-je-Pars ne surprend personne, pourtant elle nie ses agressions sorciรจres et souhaite boire lโ€™ordalie devant les gรฉnies du village pour prouver son innocence.
Cette ordalie consiste ร  boire une eau offerte par le prรชtre de la divinitรฉ Tandia. Les victimes de fausses accusations vomissent immรฉdiatement le liquide ; mais les coupables ressentent dans leur ventre le poids du liquide qui pรจse comme une pierre et en meurent le soir mรชme. Lโ€™ordalie est une contre-attaque quโ€™on porte directement sur le corps du prรฉsumรฉ sorcier et non sur un substitut. Cโ€™est un dรฉplacement de la violence : au lieu de le frapper, de le lapider ou de le mettre ร  mort directement, on lui fait boire le poison tout en lui laissant la possibilitรฉ de sโ€™innocenter en vomissant le liquide. ยซ On laisse ร  son corps un droit de rรฉponse que nโ€™a pas un bouc รฉmissaire et quโ€™il nโ€™aurait pas eu si tout le monde lui รฉtait tombรฉ dessus80 ยป.
Dans les sociรฉtรฉs oรน lโ€™ordalie a รฉtรฉ interdite, on fait boire le poison ร  un poulet et on observe ce qui va se passer. On substitue le corps du poulet au corps du prรฉsumรฉ coupable. On perรงoit alors ร  travers le poulet le double exact de lโ€™accusรฉ. A Jโ€™Achรจte-et-je-Pars, toute la population objecte : ยซ Si on te donne de lโ€™eau et que tu succombes, tous les gens que tu tiens entre tes mains vont mourir ยป. Acculรฉe de toute part, elle finit par confesser : ยซ les gens disent que je suis sorciรจre, les divinitรฉs aussiโ€ฆdonc je suis sorciรจre ยป. De son cรดtรฉ, Adjara, non seulement va implorer le gรฉnie de lโ€™aider ร  se dรฉbarrasser de sa sorcellerie mais encore elle coopรจrera avec Safiou, le clairvoyant, ร  dรฉsenvoรปter sa victime.
Partie ร  Sokodรจ pour complรฉter ses enquรชtes sur la parentรฉ, Suzanne Lallemand dรฉcouvrira dans la famille qui lโ€™hรฉberge le drame de la sorcellerie qui divise les familles. Elle sera invitรฉe ร  toutes les rencontres oรน se dรฉroulent, tel un procรจs, les plaidoiries qui dรฉbouchent sur des accusations en sorcellerie. Le mรฉrite de Lallemand est de nous montrer quโ€™il ne revient ร  la victime, ni de mettre un nom sur le mal dont elle souffre, ni de dรฉsigner son persรฉcuteur. Ce rรดle est dรฉvolu par la sociรฉtรฉ au clairvoyant. Seul le spรฉcialiste formule explicitement les accusations en sorcellerie quand on a recours ร  son service. Lโ€™auteure confirme le fait reconnu par la plupart des chercheurs : la sorcellerie naรฎt dans le cercle familial ; mais elle souligne quโ€™il peut y avoir des cas incongrus. Adjara nโ€™a aucune relation de parentรฉ avec Jumelle. Elle nโ€™aurait pu lโ€™ensorceler si son parent Jโ€™Achรจte-et-je-Pars nโ€™avait รฉtรฉ de mรจche avec elle. La nouveautรฉ de son apport est de montrer quโ€™en sorcellerie, les intrigues vont au-delร  de ce qui est รฉtabli et que, dans cette sociรฉtรฉ, on ne rรฉserve pas la peine capitale ร  la sorciรจre.
ร‰vincรฉe du Ghana, pour motif de sorcellerie, aucun parent nโ€™a voulu recueillir Adjara. Elle est certes mise ร  lโ€™รฉcart du village, au ban de la sociรฉtรฉ, rejetรฉe et mรชme lapidรฉe mais on ne touche pas ร  sa vie. Elle va habiter en dehors du village, isolรฉe de tous. Il faut mettre ร  distance cette force nuisible. La menace de lโ€™ordalie devant le gรฉnie a รฉtรฉ opรฉrationnelle pour amener Adjara ร  avouer ses mรฉfaits. On rรฉitรจre le mรชme procรฉdรฉ pour Jโ€™Achรจte-et-je-Pars. A la diffรฉrence de cette derniรจre, la sorciรจre de Jumelle sera utile au clairvoyant pour indiquer le remรจde, les rituels nรฉcessaires au dรฉsenvoรปtement. Elle coopรจrera donc ร  la confection de lโ€™amulette qui sera fixรฉe au pied de sa victime. Cette amulette vise ร  endiguer lโ€™emprise des esprits malรฉfiques sur Jumelle et ร  protรฉger la malade. ยซ Seule, celle qui passait pour avoir tissรฉ les sortilรจges รฉtait ร  mรชme de les dรฉfaire81. ยป
Tacitement la place du sorcier est revendiquรฉe et le mal transformรฉ en bien. Ce retournement de la sorciรจre lui รฉvite dโ€™รชtre continuellement prise ร  partie par la communautรฉ et/ou la personne. Nโ€™est-ce pas lร  une dรฉcouverte que Lallemand nโ€™a pas assez exploitรฉe et qui nous montre que la sorciรจre joue un rรดle ยซ pharmakologique ? La fonction pharmakologique ยป expliquรฉe par le Professeur Tarot ร  partir de lโ€™hypothรจse girardienne du bouc รฉmissaire comprend quatre traits. Il sโ€™agit premiรจrement des effets apotropaรฏques ยป qui consistent ร  รฉcarter le danger, ร  maintenir ร  distance une force nuisible ; deuxiรจmement de lโ€™effet ยซ cathartique ยป qui vise ร  pacifier la communautรฉ, ร  maintenir son รฉquilibre en lโ€™exorcisant du mรฉchant ou du mal qui la hante ; troisiรจmement, de lโ€™effet ยซ prophylactique ยป par lequel on sโ€™inspire de lโ€™efficience des dรฉmarches prรฉcรฉdentes pour les rรฉitรฉrer dans dโ€™autres cas ; quatriรจmement, de lโ€™effet pharmaceutique ยป qui consiste ร  transformer le mal en bien, la force inquiรฉtante en force positive pour le groupe. Ce quatriรจme รฉlรฉment structure les trois autres. Il est aussi ce qui manque en partie ร  la sorciรจre devenue coopรฉrante pour dรฉsenvoรปter sa victime82.
Adjara, la sorciรจre est gardรฉe en vie pour dรฉfaire les sortilรจges quโ€™elle a tissรฉs. Nรฉanmoins, malgrรฉ son intervention thรฉrapeutique, Adjara ne sera jamais vue, ni de son vivant, ni aprรจs sa mort comme le sauveur de son peuple. Selon Tarot, dans le Bocage, le sorcier ne devient jamais le ยซ dieu ยป de ses victimes. Cโ€™est seulement dans la religion selon le modรจle girardien que le bouc รฉmissaire devient le hรฉros idรฉalisรฉ par la communautรฉ. ร€ sa mort, ร  court ou ร  long terme, personne ne regrette le sorcier. Il passe dans lโ€™oubli. ร€ Sokodรจ, une fois lโ€™histoire de sorcellerie rรฉglรฉe, on รฉloigne dรฉfinitivement la sorciรจre, (effet ยซ apotropaรฏque ยป). Adjara va se rรฉfugier au Bรฉnin. On oublie jusquโ€™ร  son identitรฉ. Cet oubli volontaire รฉvacue complรจtement la force menaรงante de la rรฉalitรฉ sociale. Cโ€™est comme si se souvenir de la sorciรจre, cโ€™est faire advenir encore le malheur quโ€™elle avait perpรฉtrรฉ. Si on ne la tue pas physiquement, elle est pourtant morte socialement. La communautรฉ ne garde plus rien de son souvenir. On dรฉtruit tout jusquโ€™ร  la mรฉmoire de son nom. La personne et lโ€™image de la sorciรจre sont รฉvacuรฉes de la culture.
La sorcellerie dans une parentรฉ matrilatรฉrale
La filiation matrilinรฉaire est celle dans laquelle on reconnaรฎt que, seules les femmes transmettent lโ€™appartenance. Ainsi, les individus des deux sexes font partie du groupe de filiation de leur mรจre qui est le mรชme que leur grand-mรจre maternelle. Dans ce systรจme de filiation, les garรงons hรฉritent de leur oncle maternel. Cโ€™est autour de cet hรฉritage que se dรฉroulent les actes de sorcellerie. Nous comparerons le phรฉnomรจne sorcier dans deux villages voisins de lโ€™Afrique australe.
Au Soudan, les Mesakin et les Korongo84 sont deux sociรฉtรฉs matrilinรฉaires identiques du point de vue de leur organisation sociale, รฉconomique, politique et religieuse. Chacun de ces peuples dรฉtient sa langue propre, mais chacun comprend la langue de lโ€™autre. Lโ€™unique diffรฉrence est que la sorcellerie est omniprรฉsente chez les Mesakin et quasi absente chez leur voisin Korongo. La population masculine de part et dโ€™autre est structurรฉe par une division stricte en classes dโ€™รขge : de lโ€™enfance ร  la pubertรฉ, de la pubertรฉ ร  lโ€™adolescence et de lโ€™adolescence ร  lโ€™รขge adulte.
Chez les Mesakin, ร  chacune de ces trois classes, exceptรฉe la plus jeune, correspondent des activitรฉs sportives telles que des luttes au corps ร  corps et des combats au bรขton ou ร  la lance. La violence dans ces activitรฉs est graduรฉe en fonction des classes dโ€™รขge, de telle sorte que la fin de lโ€™adolescence est marquรฉe par les combats les plus rudes. Cโ€™est la pรฉriode pour le jeune-homme de prouver son agilitรฉ et sa virilitรฉ. La classe qui succรจde ร  celle des combats ร  la lance est le moment qui marque la fin des รฉpreuves pour le jeune-homme qui ne se sent plus valorisรฉ, qui entre dans le groupe des vieux ร  partir de lโ€™รขge de 25 ou 26 ans. Le moment le plus important pour le jeune homme dans ces deux sociรฉtรฉs est celui du premier combat le plus violent. A 15 ou 16 ans, il sert de rite de passage de la pubertรฉ ร  lโ€™adolescence. Au cours dโ€™une fรชte organisรฉe pour le pubertaire devenu adolescent, lโ€™oncle maternel offre ร  son neveu une tรชte de bรฉtail de son troupeau. Cโ€™est un don obligatoire dโ€™une ยซ importance symbolique considรฉrable ยป. Ce don est compris comme un ยซ hรฉritage anticipรฉ ยป puisque dans ce systรจme matrilinรฉaire le neveu hรฉrite de son oncle.
Pour le Mesakin, ce legs est ressenti, comme lโ€™annonce prochaine de sa mort. Il manifeste alors sa mauvaise volontรฉ ร  peine dissimulรฉe, par le report sans cesse renouvelรฉ de sa dette. Lโ€™adolescent manifeste de son cรดtรฉ son mรฉcontentement par une agressivitรฉ allant jusquโ€™ร  accuser son oncle, ร  chaque malheur qui le frappe lui-mรชme ou un membre de son matrilignage, de se venger par la sorcellerie. Chez les Korongo, au contraire, lโ€™oncle utรฉrin se plie de bonne grรขce ร  ยซ lโ€™hรฉritage anticipรฉ ยป. Sโ€™il lui arrive de diffรฉrer son don, le moment venu il comble son neveu au-delร  de ses attentes. Le nombre de classes est deux fois plus รฉlevรฉ chez les Korongo: de la pubertรฉ au mariage, on a trois classes, et du mariage ร  la vieillesse, on a les trois autres. Entre 13 et 26 ans les hommes sโ€™adonnent avec ardeur aux combats et mรจnent une vie sexuelle libre jusquโ€™au mariage. Lโ€™intensitรฉ des luttes dรฉcline progressivement jusquโ€™ร  disparaรฎtre une fois la cinquantaine passรฉe.
Les Mesakin vivent trรจs mal leur รฉviction prรฉcoce des combats ร  cause dโ€™un systรจme de classes trop rigide qui nโ€™accompagne pas lโ€™individu dans son dรฉveloppement physique et moral. Entre 25 et 30 ans, lโ€™individu perd tout ce qui faisait le charme de sa vie : la jeunesse et le combat. Les six classes chez les Korongo offrent, au contraire, un processus graduel de vieillissement. Chez lโ€™un, se soumettre ร  lโ€™arbitraire social et culturel alors que la vigueur juvรฉnile est encore intacte, se mue dans la violence des actes de sorcellerie alors que chez lโ€™autre, lโ€™individu sโ€™รฉpanouit ร  travers un systรจme de classes et se sent valorisรฉ jusquโ€™ร  ce que dรฉcline sa force physique. Dans cette sociรฉtรฉ matrilinรฉaire, ce sont les jeunes qui accusent les aรฎnรฉs de sorcellerie. Le champ dโ€™action de la sorcellerie est la relation entre neveux et oncles utรฉrins, entre parents matrilatรฉraux. Ici, ce nโ€™est plus la vieille femme qui est accusรฉe de sorcellerie mais lโ€™oncle qui est pourvu dโ€™un trรฉsor : le troupeau dont il est propriรฉtaire.
On retrouve un phรฉnomรจne analogue chez les Kokomba du Togo oรน les cadets qui envient le statut social ou les richesses de leurs aรฎnรฉs leur jettent un sort. Dans cette Afrique oรน la solidaritรฉ apparaรฎt le plus souvent comme une rรจgle dโ€™or, la sorcellerie vient comme pour niveler les conditions sociales de vie. La question qui se pose aussi est de savoir si la sorcellerie est toujours une main invisible qui agit pour rรฉguler ou dรฉrรฉguler lโ€™ordre social. Rรฉpondre par lโ€™affirmative, cโ€™est attribuer ร  la sorcellerie une finalitรฉ sociale. Or, on pense que le sorcier serait mauvais en soi et nโ€™a de mobile pour agir que son dรฉsir de dรฉtruire, de nuire. Ceux qui sont accusรฉs de sorcellerie ne sont pas des rebelles et encore moins des agents de subversion ayant pour but lโ€™instauration dโ€™un ordre nouveau excluant ou amoindrissant les inรฉgalitรฉs.
Je serai tentรฉ de dire que la sorcellerie, qui ne peut se dรฉfinir par sa nature antisociale puisque la sociรฉtรฉ doit sโ€™approprier ses pouvoirs pour la combattre est ร  situer originairement dans une dimension prรฉsociale [โ€ฆ] et quโ€™elle sโ€™attaque pour ainsi dire aux briques avec lesquelles lโ€™รฉdifice de la sociรฉtรฉ est construit ยป85.
Cโ€™est pour cette raison que la cible de la sorcellerie nโ€™est presque jamais lโ€™รฉtranger, lโ€™inconnu mais trรจs souvent un parent et surtout le parent le plus proche.
Le cas des Mandari est sans doute une exception. Les Mandari considรจrent que les menaces dโ€™une accusation en sorcellerie peuvent aussi peser sur les รฉtrangers intรฉgrรฉs ร  la vie du village. La nuptialitรฉ est un รฉlรฉment qui peut aussi entrer en jeu dans le phรฉnomรจne de la sorcellerie.
Des formes ยซ modernes ยป de sorcellerie
Le monde de la sorcellerie pousse ร  observer une mรฉfiance vis-ร -vis du pouvoir. Il relie toute forme de pouvoirs aux forces occultes qui sont perรงues comme indispensables au fonctionnement de la sociรฉtรฉ. Le discours de sorcellerie encourage lโ€™ambition personnelle. Il souligne, selon une opinion largement rรฉpandue, que lโ€™รฉlite dispose du soutien des sorciers et que les sorts constituent une forme dโ€™enrichissement rapide. La sorcellerie sโ€™adapte ร  lโ€™รจre de lโ€™internet, ร  la marchandisation avec son cortรจge de profit et dโ€™aliรฉnation, en un mot ร  la modernitรฉ.
Dans les annรฉes 1990, on voit apparaรฎtre en librairie une avalanche dโ€™ouvrages anthropologiques sur la modernitรฉ du phรฉnomรจne sorcier : Dozon109, Ashforth (2000)110, Gescchiere (2000)111, R. Shaw (1995)112, Camaroff (1993)113, M. Bastian (1993)114, Niehaus (1993)115. Ce nouveau thรจme de sorcellerie et modernitรฉ prend alors une place importante dans les รฉtudes africaines et africanistes. Aprรจs les indรฉpendances, parler ouvertement de la sorcellerie en Afrique, cโ€™รฉtait nier sa volontรฉ de modernisation et de progrรจs. Un revirement se produit dans les annรฉes 70 ; cette mutation nโ€™est perรงue et analysรฉe que dans les annรฉes 90. De nombreuses publications anthropologiques au cours de cette pรฉriode รฉtablirent donc un lien entre sorcellerie et modernitรฉ. Modernitรฉ est entendue dans le sens dโ€™un idรฉal sociรฉtal qui promeut lโ€™autonomie de lโ€™individu dans un monde oรน lโ€™accรจs ร  la technologie nouvelle et aux biens de consommation industriels, sont des รฉlรฉments rรฉcurrents. Il serait bon de revenir sur lโ€™รฉmergence de ce nouveau paradigme mais aussi sur les faits qui lโ€™ont fait advenir : la modernitรฉ africaine dans ses caractรจres propres.
Elle rรฉgit lโ€™รฉquilibre interne par les pertes des uns, compensรฉes par les gains des autres. Ainsi le couple perte/profit propre au marchรฉ รฉconomique trouve un รฉcho favorable dans le monde occulte mais sous le mode dโ€™un jeu ร  somme nulle : ce qui est gagnรฉ par les uns est nรฉcessairement perdu par les autres. Et cโ€™est ce qui fait la diffรฉrence avec lโ€™idรฉe moderne de marchรฉ รฉconomique fondรฉ, au contraire, sur le progrรจs et lโ€™ouverture de lโ€™รฉchange oรน tous les acteurs pourraient รชtre gagnants. Nous verrons plus loin que dans un autre contexte tous les acteurs de la sorcellerie sont engagรฉs dans un processus de gagnant-gagnant.
Sorcellerie comme asservissement des รขmes
Jadis propre aux campagnes, la sorcellerie se rรฉpand de nos jours dans les institutions de lโ€™Etat. Elle se manifeste de plus en plus dans lโ€™espace public : dans les nouvelles formes dโ€™enrichissement et dโ€™entreprise, dans le pouvoir politique, dans les diffรฉrents secteurs de lโ€™administration, dans les mass-mรฉdia. Les contre-sorciers ne se cachent plus, et font de la publicitรฉ pour leurs ยซ hรดpitaux ยป au moyen de grandes affiches ou panneaux vantant leur expertise. Dans de nombreux pays de lโ€™Afrique occidentale, on attribue ยซ lโ€™apparition de richesses nouvelles ยป ร  ยซ un nouveau type de sorciers ยป qui ne se livrent plus ร  la manducation de leur victime ยซ mais les transforment en sorte de zombies ยป quโ€™ils font travailler ร  leur compte. Cette nouvelle forme de sorcellerie est dรฉcrite par de nombreux anthropologues : au Gabon, on parle du Kong129 et au Cameroun elle est appelรฉe ยซ Ekong130 ยป (littรฉralement ยซ vendre quelquโ€™un ยป).
Au Cameroun, les dรฉtenteurs de cette sorcellerie, vont vendre les zombies sur le mont Kupe, lieu magique, lieu dโ€™enrichissement rapide dโ€™une petite รฉlite, symbole de lโ€™imaginaire de la richesse nouvelle. Chez les Douala, la forme traditionnelle de la sorcellerie sโ€™appelle lemba; cโ€™est la sorcellerie de lโ€™anthropophagie. Lโ€™Ekong est une nouvelle forme de sorcellerie. Elle est liรฉe ร  la ville. Elle prรฉexiste ร  la pรฉriode coloniale et reprรฉsentait la classe opulente : cโ€™est une association qui regroupait les chefs, les notables et les commerรงants. Cette association sโ€™est progressivement dรฉmocratisรฉe pour sโ€™รฉtendre aux couches populaires. Pour Rosny, lโ€™Ekong dispose de cette capacitรฉ ร  sโ€™adapter aux rรฉalitรฉs de lโ€™รฉconomie moderne par le biais du ยซ salariat et de la diffusion de lโ€™argent ยป.
Lโ€™รฉmergence dโ€™une nouvelle bourgeoisie est attribuรฉe ร  lโ€™Ekong ร  telle enseigne que, par mรฉtonymie, famla, lieu de rรฉsidence de la nouvelle classe des riches est devenu synonyme de lโ€™Ekong. Ce dernier, tout comme les anciennes formes de la sorcellerie, est toujours รฉtroitement liรฉ ร  la parentรฉ. Pour lโ€™acquรฉrir, lโ€™individu doit vendre un proche parent. Le processus de ce commerce est trรจs simple. Pour se sustenter, un indigent reรงoit dโ€™un รฉtranger en ville de quoi subvenir ร  sa faim et ร  sa soif. Une fois quโ€™il mange le repas et boit la boisson fournie, il est recrutรฉ dans le famla; ยซ il a contractรฉ une dette et ne pourra sโ€™acquitter quโ€™en vendant un proche parent ยป. Lโ€™indigent qui nโ€™honore pas ainsi sa dette, la paye de sa propre vie. La notion de dette nโ€™est pas une nouveautรฉ en sorcellerie, en lien avec le famla, elle acquiert des dimensions nouvelles dรฉterminรฉes par les ยซ nouveaux biens de consommation fournis par ยซ lโ€™รฉconomie du marchรฉ ยป131. On voit comment la notion de lโ€™accumulation de la dette en sorcellerie se combine bien avec la logique capitaliste. Il existe cependant des rites pour รฉchapper ร  la sorcellerie de lโ€™Ekong.

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Table des matiรจres

Notation phonรฉtique
PARTIE 1. APPROCHE EPISTEMOLOGIQUE ET METHODOLOGIQUE DE LA SORCELLERIE
CHAPITRE 1. UNE ENTREE PERSONNELLE EN SORCELLERIE
1. Retour sur le terrain
2. Les tribulations dโ€™une enquรชte ยซ chez soi ยป
3. Dans les mailles des sorciers
CHAPITRE 2. LES CHAMPS Dโ€™ACTIONS DE LA SORCELLERIE
1. Sorcellerie et parentรฉ
La sorcellerie dans une parentรฉ patrilinรฉaire
La sorcellerie dans une parentรฉ matrilatรฉrale
Sorcellerie et alliance
2. Sorcellerie et politique
La figure du roi sorcier
Pouvoirs du sorcier et du contre-sorcier
Sorcellerie et Justice
3. Des formes ยซ modernes ยป de sorcellerie
Enfants-sorciers
Sorcellerie comme insรฉcuritรฉ
Sorcellerie comme asservissement des รขmes
Du silence des annรฉes 1970 ร  lโ€™รฉveil des annรฉes 1990
CHAPITRE 3. AMOUR ET DESAMOUR ENTRE LE RELIGIEUX ET LE POLITIQUE
1. La malรฉdiction de lโ€™instabilitรฉ politique
Relations conflictuelles
2. La menace du politique
3. Lโ€™instrumentalisation des forces religieuses
CONCLUSION PARTIELLE
PARTIE 2. MAWU ET LES VODUN AMBIVALENTS
CHAPITRE 4. DE MAWU AUX VODUN
1. Mawu et Vodun, une asymรฉtrie
Mawu-Lisa, un couple divin
Mawu, Dieu suprรชme
Mawu, un vodun parmi les vodun
Mawu, un Dieu unique
Mawu, Dieu immanent
2. Actualitรฉ du vodun
Vodun, une religion en voie de disparition ?
Les catรฉgories de vodun
CHAPITRE 5. Lโ€™AMBIVALENCE DES VODUN
1. Ambivalence des vodun supraterrestres
Sakpata
Origine et appellation
La corporรฉitรฉ de Sakpata
Xษ›biษ›so
Rituel de purification aprรจs foudroiement
Ahuanzo, un dรฉploiement public des pouvoirs du Kpษ”nhintษ”
Edan et Mami
2. Ambivalence des Vodun sorciers
Kennษ›nsi
Le Kษ›nnษ›nsi en ses diffรฉrents sens
Les deux figures de Kษ›nnษ›nsi
Akpasu
Lansan
CHAPITRE 6. AFAN, PIVOT DU SYSTEME VODUN
1. Origine dโ€™Afan
2. Conjonction entre Afan et Vodun
Afan et Trษ”n
Afan et Lษ›gba
Afan et Sakpata
Afan et les Venavi
Afan, une religion
Afan, un art, une littรฉrature
Afan, un savoir
Afan, une technique
3. Afan, prescripteur des remรจdes de dรฉsenvoรปtement
Analyse de la lรฉgende
Offrandes aux sorciers
4. Afan, prescripteur de rituels vodun
CONCLUSION PARTIELLE : NI DIEUX NI OBJETS
PARTIE 3. PREVENIR LA MENACE SORCIERE
CHAPITRE 7. PRIERE ET DON
1. Eulogie vodun
Bรฉnรฉdictions/malรฉdictions : ษ–ษ›popo/ nudodo
Boissons fraรฎches et boissons chaudes
2. La priรจre, une relation asymรฉtrique
3. Eulogie par saara et vษ”sa
Saara, lโ€™obligation de recevoir
4. Vษ”sa, don aux รชtres mรฉta-empiriques
CHAPITRE 8. RITE AUTOUR DE LA NAISSANCE : VIฦ‰ETO
1. Des prรฉcautions prรฉventives ร  la naissance
Rites liรฉs au cordon ombilical
Rites liรฉs au placenta
Lโ€™enfermement symbolique
2. Des prรฉcautions prรฉventives au cours du rite dโ€™affiliation263
Rite de prรฉsentation du nouveau-nรฉ
Rites dโ€™eau et dโ€™imposition du nom de naissance
Rite de communion et des relevailles
3. Sens et portรฉe symbolique des rites
Rite intรฉgrateur
Double naissance
4. Prรฉmunition contre les forces malveillantes
Fonction pharmac/kologique du nom
Rites propitiatoires
CHAPITRE 9. VULNERABILITE ET DEFENSE DE LA PERSONNE CHEZ
LES GBE
1. La notion de la personne chez les Gbe
Le jษ”tษ”, lโ€™ancรชtre protecteur
La personnalitรฉ sous le prisme de la sorcellerie
2. Le concept du corps humain
3. Le symbolisme de certaines parties visibles du corps
Les reprรฉsentations symboliques de la tรชte
Les reprรฉsentations symboliques du ventre
Reprรฉsentations symboliques des yeux
4. Le symbolisme du corps matรฉriel invisible
5. Symbolisme du corps immatรฉriel invisible
Gbongbon
Yษ› ou vonvonli
Esษ›
6. Dimensions religieuses et mystiques du corps
Corps social
Corps sacrรฉ
Corps inerte
Corps mystique
CONCLUSION PARTIELLE
PARTIE 4. GUERIR LA MENACE SORCIERE
CHAPITRE 10. AFFINITES ENTRE MEDECINE ENDOGENE ET
SORCELLERIE
1. Sens et nature de la maladie au Bรฉnin
Appellations diverses
Tษ›gbษ›tษ›gbษ›tษ” : une maladie sans fin
Fondements institutionnels de la mรฉdecine endogรจne
2. Dรฉlivrances par les plantes
3. Dรฉlivrer des sorts
Dรฉlivrer des envoรปtements usuels
Prรฉvenir et dรฉlivrer des sorts bรฉnins
Prรฉvenir et dรฉlivrer des sorts cryptรฉs
Dรฉlivrer des maladies naturelles cryptรฉes par les sorts
Dรฉlivrer des sorts imparables
Dรฉsenvoรปtement aprรจs une faute grave
Dรฉsenvoรปtement aprรจs une faute gravissime
Ingrรฉdients
Description
4. Le long chemin de la mรฉdecine endogรจne et de la
biomรฉdecine
CHAPITRE 11. PORTRAITS DE THERAPEUTES
1. Les mรฉdecins endogรจnes
Thรฉrapeutes circonstanciels
Les guรฉrisseurs permanents
Maladie รฉlective
Lโ€™inspecteur des finances devenu prรชtre de Zangbetษ”
Hilla, le Kษ›nnษ›nsinษ”n
2. La dyspistologie des acteurs vodun
Visibilitรฉ des acteurs vodun
Sorciers, absents mais partout prรฉsents
Vodun, un evษ”ษ›nษ–i
Aze, un souffle
Lโ€™anthropophagie diffรฉrenciรฉe
Entre compromis et compromission
Une menace permanente
Un climat de mรฉfiance permanent
CHAPITRE 12. AUTRES FORMES Dโ€™EXORCISMES
1. Les prรฉrequis de lโ€™exorcisme catholique
2. Les thรฉrapeutes des religions chrรฉtiennes
La thรฉrapie des religions catholiques
Mathias, le Pape exorciste bรฉninois
De lโ€™รฉviction au rapprochement mitigรฉ
Les curรฉs-dรฉsenvoรปteurs
La thรฉrapie dans les religions aladura
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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