Effets des (AMA) sur les caractéristiques du béton
Les résultats obtenus par les différents auteurs à propos de l’effet des inhibiteurs à base d’AMA sur les propriétés du béton sont souvent contradictoires. Selon les travaux de (Brown 2001), la résistance à la compression du béton est augmenté de 20% lorsqu’il est adjuvanté de produits à base d’AMA. En revanche, les auteurs (De Schutter et coll. 2004), ont montré que la résistance à la compression en utilisant ces composés est diminuée de l’ordre de 10% à 3, 7 et 28 jours. En outre, lorsque un (AMA) est utilisé dans le béton sans d’autres adjuvants, les auteurs (Kern et coll. 2001) ont affirmé que les valeurs de la résistance à la compression restent similaires à celles des mélanges de référence. Selon ces mêmes auteurs, dans les premiers jours, la résistance à la compression augmente dans certains cas et diminue dans d’autres cas; et à partir de 7 jours, aucun changement significatif n’a été enregistré. Ces résultats ont été confirmés par (Selih et coll. 2000, Wombacher et coll. 2004).
En ce qui concerne la maniabilité, une augmentation dans l’affaissement a été enregistrée en utilisant les inhibiteurs à base d’AMA, soit 130 mm contre 75 mm pour un béton référence, selon (De Schutter et coll. 2004). Dans un autre travail, (Berke et coll. 1993) ont estimé une augmentation d’affaissement de 76 à 89 mm en ajoutant un inhibiteur à base d’AMA au béton frais.
D’autre part, les inhibiteurs à base d’AMA ont montré, une augmentation de la perméabilité à l’oxygène et à l’eau à tous les âges du béton selon (Cabrera et coll. 1997), soit près du double de celui des échantillons de référence. Cependant, selon (Cabrera et coll. 1997), un béton adjuvanté par ces inhibiteurs, a donné une même porosité ouverte dans des conditions de cure de (20°C et 65% HR). Ainsi, selon les auteurs (Jamil et coll. 2003, Ormellese et coll. 2011, Shi et coll. 2017), les inhibiteurs à base d’AMA interagissent probablement avec les constituants de la pâte du ciment en formant de sels insolubles qui hydrophobent les pores du béton. Cela conduit à réduire la perméabilité du béton.
Pénétrabilité des AMA à travers le béton
Ces composés solubles en phase aqueuse, sont soit utilisés au gâchage dans le béton frais, soit appliqués à la surface du béton et transportés par la phase aqueuse jusqu’aux armatures 50 (Nobel Pujol 2004). Néanmoins, les résultats rapportés à propos de la vitesse et la profondeur de la pénétration de ces inhibiteurs à travers le béton ne sont pas cohérents.
Une étude menée par (Jamil et coll. 2005), montre que l’inhibiteur de corrosion à base d’AMA utilisé pénètre dans le mortier au bout de quelques jours, entraînant la formation d’un film protecteur sur la surface de l’acier. La résistance de ce film protecteur augmente avec le temps, indépendamment de l’épaisseur du mortier à travers laquelle l’inhibiteur doit pénétrer. En outre, (Vedalakshmi et coll. 2009) ont pu constater que l’inhibiteur de corrosion migrateur à base d’AMA lorsqu’il est utilisé comme mélange au moment du malaxage peut s’avérer plus efficace que par pulvérisation sur la surface du béton durci. Selon ces auteurs, lorsque cet inhibiteur est pulvérisé sur une surface en béton durci, un minimum de 70 à 100 jours sera nécessaire pour la formation d’une couche passive sur les barres d’armature dans le béton. D’autre part, selon (Bolzoni et coll. 2014), ce type d’inhibiteurs peuvent pénétrer à travers le béton principalement par absorption capillaire, mais plus lentement que l’eau. La profondeur de pénétration de ces inhibiteurs est limitée à quelques millimètres (20 mm) après quatre mois d’exposition. Ce constat a été confirmé par (Ormellese et coll. 2011), qui supposent que les molécules de ces inhibiteurs interagissent avec les constituants de la pâte de ciment, en formant des dépôts de sels de calcium insolubles.
Cela conduit à une réduction de la porosité du béton, qui se traduit par une faible pénétration des molécules inhibitrices, mais également par une réduction de la diffusivité des agents agressifs, tels que les ions chlorures. Dans un autre travail plus récent, (Shi et coll. 2017) montrent ainsi que, malgré une certaine diffusion des molécules du DMEA à travers un mortier durci, l’augmentation de la résistance à la corrosion a été attribuée principalement au blocage des pores du mortier, plutôt qu’à la diffusion des molécules inhibitrice.
Discussion
En plus de la grande divergence des résultats constatée à propos de l’efficacité inhibitrice et des mécanismes du processus d’adsorption associés aux inhibiteurs à base d’AMA, ainsi que leurs effets sur les propriétés du béton; un manque important de données a été enregistré en ce qui concerne la valeur de la concentration optimale en inhibiteurs offrant le rendement maximal de ces composés (cf. tableau II-2). De plus, le comportement de ce type d’inhibiteurs à des températures élevées n’a pas été abordé malgré l’importance du sujet. En effet, la température a des conséquences fondamentales sur la dissolution d’un métal inhibé, et autant de changements peuvent se produire sur la surface métallique à cause de l’augmentation de la température, tels que la gravure rapide du métal, l’adsorption/désorption de l’inhibiteur, etc., (Hassan 2007, Andreani et coll. 2016). D’autre part, très peu d’études ont été menées sur l’effet de ces composés sur la concentration critique en chlorure (Ccrit), en vue d’augmenter la durabilité du béton armé face aux chlorures. En conséquence, il serait intéressant de consacrer une partie de ce travail de 51 recherche à l’étude d’un inhibiteur à base d’AMA, afin de confirmer et/ou compléter les résultats de la littérature.
Techniques de suivi de la corrosion
De nombreuses techniques ont été développées, tant pour étudier ou déterminer l’initiation de la corrosion des armatures dans le béton, que pour évaluer l’efficacité des inhibiteurs de corrosion. On peut classer ces techniques selon deux types :
o les techniques électrochimiques et électriques : tels que les mesures du potentiel de corrosion, mesures du courant macropile, résistance de polarisation, impédance électrochimique, résistivité électrique, etc.;
o autres méthodes : comme les essais de perte de masse ou gravimétriques, analyse de surface, analyse des solutions par spectroscopie, etc.
Les techniques employées dans de le cadre de la présente étude sont présentées dans les sous-sections suivantes.
Mesures gravimétriques (perte de masse)
La méthode gravimétrique se basant sur les mesures de perte de masse, demeurent une première approche d’évaluation de la corrosion d’un métal dans une solution électrolytique. C’est une technique simple, permettant d’évaluer la vitesse moyenne de la corrosion d’un échantillon pendant une durée d’immersion dans une solution d’étude. La perte de masse peut être déterminée en pesant l’échantillon du métal avant sa mise en place dans la solution électrolytique (m1) et après leur retrait (m2). Afin de pouvoir estimer de manière fiable la perte de masse associée à la corrosion, un certain degré de corrosion de l’armature doit être atteint.
Méthodes électrochimiques
Les techniques électrochimiques constituent une méthode plus complète puisqu’elles étudient la base même du phénomène de corrosion et du processus électrochimique. L’aspect quantitatif de ces techniques (courbes de polarisation, spectroscopie d’impédance électrochimique, etc.) permet d’accéder à des vitesses de réaction et de déterminer les différents paramètres physiques décrivant l’état du système électrochimique. Ces mesures ne nécessitent aucun degré de corrosion, elles sont alors applicables pour l’évaluation de la vitesse de corrosion et l’efficacité d’inhibiteurs de corrosion, ainsi que pour la détermination de l’initiation de la corrosion des armatures dans le béton.
Mesure du potentiel de corrosion
La mesure du potentiel de corrosion est l’une des techniques les plus usitées dans le domaine du contrôle non destructif de la corrosion en génie civil. Cette technique est couramment utilisée en laboratoire et sur site du fait sa rapidité et sa mise en oeuvre facile (Taché 1986). Elle consiste à mesurer sous très haute impédance, la différence du potentiel entre l’armature (électrode de travail) et une électrode de référence. Outre les aspects pratiques, cette méthode ne nécessite aucune polarisation de l’armature. De ce fait, il est possible de répéter cette mesure sans altérer les conditions d’équilibre du système électrochimique. Alors, la méthode de mesure du potentiel de corrosion est parfaitement adaptée lorsque l’on souhaite réaliser un suivi de l’état du métal au cours du temps.
La facilité de la mesure du potentiel de corrosion a conduit ainsi à normaliser cette méthode, au premier lieu par la norme ASTM C 876-91, (ASTM C 876 1991), puis par RILEM, (RILEM TC 154-EMC 2003). Dans les deux cas, le potentiel de corrosion (Ecorr) représente la différence du potentiel (ou voltage) entre la barre d’armature étudiée et une électrode de référence. Plusieurs types d’électrodes de référence existent sur le marché, néanmoins, trois d’entre elles sont utilisées; dont la plus stable étant celle au calomel saturé, (Vervisch 2009). Ces électrodes de référence ont un potentiel défini par rapport à l’électrode à hydrogène normal (EHN) à 20°C, (tableau II-4).
Cependant, le retour d’expérience sur un grand nombre de structures, ainsi que des considérations théoriques indiquent que la variation dans les lectures du potentiel ne sont pas tous synonymes d’une augmentation du risque de corrosion, (RILEM TC 154-EMC 2003). Plusieurs paramètres, tels que la teneur en oxygène, la quantité de chlorures, etc., ont une influence directe sur cette mesure, (Beaudoin 1998).
La corrosion est peut être considérée comme active lorsque la valeur du potentiel de corrosion (Ecorr) mesuré franchi une certaine « limite », associées à une probabilité de corrosion de 90% d’après la norme ASTM (ASTM C 876 1991), soit Ecorr ≤ -275 mV vs. ECS ou Ecorr ≤ -350 mV vs. ESC. Cette limite est utilisée pour la détermination de l’amorçage de la corrosion. Par ailleurs, les recommandations (RILEM TC 154-EMC 2003), et d’autres auteurs comme (Gusmano et coll. 1990, Abdel Aal et coll. 1995, Xu et coll. 2009, Linhua et coll. 2012, Garcia 2013), considèrent que l’initiation de la corrosion de l’acier correspond également à une chute brusque de la valeur du potentiel mesuré. D’après ces auteurs, cela se traduit par la destruction de la couche de passivation formée à la surface du métal.
Courbes de polarisation ou technique Tafel plots (TP)
Cette technique consiste à imposer un potentiel ou un courant à une électrode de travail et mesurer le courant ou le potentiel correspondant, (Soleymani et coll. 2004). Selon que l’on applique un balayage du potentiel ou du courant, la technique prend le nom de polarisation potentiodynamique ou galvanodynamique, respectivement. En pratique, trois électrodes sont nécessaires pour réaliser cette mesure : une électrode de travail, qui est la barre d’armature étudiée; une électrode de référence généralement en calomel saturé; et une contre-électrode qui peut être, en graphite, en platine ou en titane. Il s’agit en fait d’une méthode d’extrapolation basée sur l’équation : I(densité du courant) = f (E, potentiel). Si on représente la courbe de polarisation obtenue en coordonnées : log(I)=f(E), (figure II.4), l’intersection des droites (anodique et cathodique) de Tafel, extrapolées au potentiel de corrosion, donne la densité du courant de corrosion Icorr (μA/cm2).
Cette méthode peut être aisément mise en oeuvre en laboratoire (par l’utilisation d’un Potentiostat), mais elle présente un certain nombre de limitations :
o les intervalles du potentiels imposés à l’électrode de travail doivent être relativement importantes (généralement plus de 100 mV); il est donc probable qu’une modification appréciable de l’état de surface du métal et donc des valeurs de (Icorr) mesurées, se produise pendant le tracé de ces courbes;
o les courbes log (I) = f(E), doivent être linéaires sur au moins une décade en courant, ce qui ne peut pas toujours être vérifié à cause de la présence de dégagement gazeux ou d’un processus de polarisation par diffusion, (Ouchenane 2013).
La technique de Tafel plots (TP) est alors particulièrement appropriée pour l’évaluation de l’efficacité inhibitrice des composés inhibiteurs de corrosion. Cette efficacité (EI%) peut être déterminée à partir des valeurs des densités du courant de corrosion mesurées (Icorr), en utilisant la relation suivante :
On constate d’après ce tableau que la valeur du courant de corrosion (Icorr) augmente avec l’augmentation de la concentration en ions Cl¯. Cela suggère que la présence des chlorures en quantités plus élevées augmente le risque de la corrosion par piqures à la surface de l’acier (Ryu et coll. 2017). En outre, le courant de corrosion diminue en présence des produits inhibiteurs de corrosion, ce qui est peut être expliqué selon (Lee et coll. 2015, Ryu et coll. 2017), par l’adsorption des molécules inhibitrices sur la surface de l’acier, en le protégeant contre la corrosion.
Résistance de polarisation linéaire (LPR)
La mesure de la résistance de polarisation linéaire (LPR) est une méthode simple et rapide pour la détermination de la vitesse de corrosion. Cette technique dite ainsi méthode de Stern-Geary; consiste à perturber l’équilibre du potentiel dans un domaine faible compris entre 10 et 30 mV. Cette modification du potentiel autour du point d’équilibre peut être faite de façon potentiodynamique, en imposant un potentiel (ΔE) à une électrode de travail et en effectuant la mesure du courant correspondant (ΔI). Ou inversement, il est possible d’appliquer un courant fixe et de mesurer le changement relatif du potentiel (ΔE), (Soleymani et coll. 2004). La pente ainsi obtenue (figure II.5), représente la résistance à la polarisation (Rp) qui est inversement proportionnelle au courant de corrosion (Icorr) tel que montré par l’équation de Stern-Geary :
Spectroscopie d’impédance électrochimique (EIS)
Généralités
La spectrométrie d’impédance électrochimique (EIS) est une méthode transitoire, elle fait partie des mesures les plus utilisées pour décrire de manière plus complète un système électrochimique. Cette technique a été largement utilisée dans des recherches fondamentales en cinétique électrochimique afin d’étudier les mécanismes d’électro-cristallisation, les réactions d’oxydoréduction, la dissolution anodique et la passivation de métaux et d’alliages (Gabrielli et coll. 1974). Depuis une trentaine d’années, cette méthode est entrée en application pour caractériser la corrosion de l’acier dans les structures en béton armé (John et coll. 1981). Le principe de l’impédance électrochimique consiste à imposer à un potentiel constant E0, un potentiel sinusoïdal ΔE(t) de faible amplitude (afin de conserver la réponse linéaire du système) et d’enregistrer la réponse en courant du système électrochimique. Inversement, un courant sinusoïdal ΔI(t) peut être imposé au courant (I0), (Figure II.6). La réponse ainsi obtenue est fonction de la fréquence du signal d’excitation appliquée au potentiel (impédance potentiostatique), ou au courant (impédance galvanostatique).
Conclusion
Depuis quelques années, des produits inhibiteurs de corrosion sont proposés comme traitement préventif et/ou curatif contre la corrosion des armatures dans le béton exposé aux milieux agressifs. Ces composés peuvent être ajoutés dans le béton frais pendant le malaxage ou bien appliqués à la surface de ce dernier; dont le but est de lutter contre la corrosion de l’acier d’armature. Les composés à base d’amines ou d’alkanolamines (AMA), constituent un moyen récent d’inhibition de la corrosion, ils sont largement étudiés et proposés comme inhibiteurs de corrosion des métaux, notamment en raison de leur faible toxicité vis-à-vis de l’environnement. En revanche, l’efficacité de ces composés utilisés pour la protection des armatures dans le béton exposé aux chlorures n’est toujours pas prouvée, et de nombreuses interrogations restent en suspens, particulièrement, en ce qui concerne leurs concentrations optimales, leurs modes d’action, leurs effets sur la valeur de la (Ccrit) ainsi que sur les propriétés du béton, etc.
Dans cette optique, une partie de ce travail expérimental vise à approfondir les connaissances sur le comportement du N,N’-Dimethylaminoethanol « DMEA », un alkanolamine, utilisé comme inhibiteur de corrosion de l’acier de construction. Cette étude a été menée moyennant des essais gravimétriques associés aux techniques électrochimiques, dans une solution simulant la solution interstitielle du béton. Au départ, nous tentons de déterminer la concentration optimale en inhibiteur au pourtour des armatures pour assurer une meilleure efficacité. Ensuite, une caractérisation de ce produit et de son comportement vis-à-vis de la corrosion sera faite, de façon à pouvoir le classer parmi les différentes catégories d’inhibiteurs de corrosion.
Le mode d’action de ce composé, ainsi que sa capacité à pénétrer à travers le béton d’enrobage jusqu’aux armatures, seront également abordés. Subséquemment, l’accent sera mis sur l’effet de cet inhibiteur ainsi que deux autres produits à base de phosphate (Na3PO4 et K2HPO4), sur la concentration critique en chlorures requise pour l’amorçage de la corrosion localisée de l’acier d’armature. Cette partie d’étude sera effectuée en solution simulant la solution interstitielle du béton, ainsi que dans des éprouvettes en béton armé exposé aux chlorures pour mieux simuler les conditions réelles de l’acier de construction. Pareillement, il sera question de l’influence de ces composés (DMEA, Na3PO4 et K2HPO4) sur les propriétés du béton à l’état frais et durci. Dans le chapitre qui suit, nous allons décrire les différents matériaux et protocoles expérimentaux utilisés pour la présente recherche.
MATÉRIAUX ET PROTOCOLES EXPÉRIMENTAUX
Introduction
Dans le cadre de ce travail expérimental, une étude sur l’efficacité inhibitrice du N,N’-diméthylaminoéthanol (DMEA) considéré comme inhibiteur de corrosion, a été réalisée en utilisant des essais gravimétriques et des mesures électrochimiques. Cette étude a été effectuée sur des échantillons en acier au carbone immergés dans une solution alcaline chlorée simulant le béton contaminé par les chlorures contenant l’eau de mer méditerranée. Ensuite, une campagne d’essais électrochimiques a été réalisée dans le but d’étudier l’amorçage de la corrosion de l’acier immergé dans la solution alcaline, ainsi que, dans des éprouvettes en béton armé afin de mieux simuler les conditions réelles des ouvrages en béton armé exposés à l’environnement marin. L’effet de l’incorporation du DMEA et deux autres composés à base de phosphate (Na3PO4 et K2HPO4) sur la valeur de la concentration critique en chlorures (Ccrit) a été également examiné. Subséquemment, des essais de caractérisation du béton ont été menés afin d’évaluer l’impact de ces trois composés (DMEA, Na3PO4 et K2HPO4) sur les propriétés du béton à l’état frais et durci. En fin, la pénétrabilité du DMEA à travers le béton durci a été étudiée et discutée. L’objectif de ce chapitre est de décrire et présenter les différents matériaux, méthodes et protocoles expérimentaux retenues pour les diverses parties de ce projet. Celles-ci seront présentées dans l’ordre suivant : Une première partie sera consacrée à l’étude de l’inhibition de la corrosion de l’acier dans une solution simulant la solution interstitielle du béton contaminé par les chlorures.
Elle sera composée de :
o l’évaluation de l’efficacité inhibitrice du DMEA;
o la détermination de la concentration seuil en ions chlorures (Ccrit) requise pour initier la corrosion de l’acier au carbone, et effet du DMEA, Na3PO4 et K2HPO4;
La seconde partie sera dédiée à l’étude de l’inhibition de la corrosion de l’acier dans des échantillons en béton armé. Cette partie comprend :
o une caractérisation des bétons utilisés, dans le but d’étudier l’impact des inhibiteurs de corrosion testés dans cette étude sur les propriétés du béton à l’état frais et durci;
o l’étude de l’amorçage de la corrosion dans des échantillons en béton armé, et évaluation de l’effet du DMEA, Na3PO4 et K2HPO4 sur la valeur de la (Ccrit);
o l’étude de la pénétrabilité du DMEA à travers le béton durci.
Description des matériaux et milieux d’étude
Composition de l’acier étudié
L’acier étudié dans la présente recherche est un (XC38), couramment employé comme matériau constitutif des armatures métalliques dans les bétons de construction. La composition chimique de ce matériau a été effectuée par analyse spectrophotométrique sur une machine de type « SPECTRO Rp 212 » au laboratoire du contrôle qualité de l’usine ALFON-Oran, par L. Sail (Sail 2013) dans le cadre de sa thèse de doctorat. Cette composition chimique est illustrée dans le tableau III-1.
Milieux d’étude
Solution simulant le béton
Une solution saturée en hydroxyde de calcium Ca(OH)2 est couramment utilisée comme solution synthétique représentative de la solution interstitielle du béton afin d’étudier le comportement électrochimique des armatures métalliques (Monticelli et coll. 2000, Saremi et coll. 2002). Cependant, comme nous l’avons montré en chapitre I., cette solution synthétique devrait contenir également d’autres cations tels que le Na+ et K+, et des anions tel que le SO42-.
Afin de mieux représenter la solution des pores du béton lors de ce travail, l’ensemble des essais de corrosion ont été effectués en utilisant une solution composée de Ca(OH)2 à saturation, auquelle nous avons ajouté du NaOH, KOH et du CaSO42H2O pour atteindre un pH de 12,75. La composition de cette solution a été largement utilisée pour simuler la solution interstitielle du béton (Ghods et coll. 2009, Sail et coll. 2014, Figueira et coll. 2017). Les chlorures ont été ajoutés sous forme de NaCl, à raison de 0,5 mol/l.
Étude de l’inhibition de la corrosion d’acier en solution simulant le béton
Évaluation de l’efficacité inhibitrice du DMEA
Préparation des échantillons en acier
Les mesures gravimétriques ont été effectuées sur des échantillons d’acier usinés préalablement sous forme de disques de Ø 27 ± 2 mm et de 2 ± 0,2 mm d’épaisseur (figure III.4-a), dont la composition chimique est consignée dans le tableau III-1. Chaque pièce d’acier a été soumise à un polissage au papier abrasif de granulométrie décroissante allant jusqu’à 1000 grades, sous un faible jet d’eau à l’aide d’une polisseuse mécanique à une vitesse de 500 t/min (figure III.4-b). Ensuite, ces pièces ont été rincées à l’eau distillée, dégraissées à l’acétone et séchées à l’aide d’un séchoir électrique avant d’être utilisées pour les essais gravimétriques.
Procédure expérimentale, mesures électrochimiques
Les essais électrochimiques ont été effectués à l’aide d’un Potentiostat/Galvanostat de marque « Voltalab80, modèle PGZ402 », piloté par le logiciel « Voltamaster4 ». Le Potentiostat/Galvanostat est connecté à une cellule en verre contenant 200 ml de la solution d’étude, sans et avec l’incorporation de différentes concentrations en DMEA. Cette cellule est équipée d’un assemblage conventionnel à trois électrodes. Une électrode au calomel saturée (ECS) et une électrode en platine ont été utilisées comme électrodes de référence et auxiliaires, respectivement. L’électrode de travail est celle en acier représentée sur la (figure III.6). Le dispositif expérimental utilisé pour les mesures électrochimiques est illustré par la figure III.7.
Détermination de la Ccrit en solution simulant le béton
Électrode de travail
Pour cette partie expérimentale, des échantillons d’environ 100 mm de long ont été découpés à partir d’une barre d’acier (XC38) de Ø8 mm. Ces échantillons de forme cylindriques ont été brossés moyennant une brosse métallique afin d’éliminer toute la rouille formée à la surface. La section de l’acier au contact de la solution d’étude (surface active) est la section d’une extrémité du cylindre d’acier sur une longueur de 2 cm (soit une surface active de 5,53 cm2). Le reste de la barre d’acier a été enrobé dans une résine époxy. Le contact électrique avec la surface active est assuré par un fil de cuivre soudé sur la deuxième extrémité du cylindre (figure III.8). Avant chaque expérience, la surface active a été polie à l’aide d’une série de 78 papiers abrasifs de grade 400, 800 et 1000, dégraissée à l’acétone, rincée à l’eau distillée, puis introduite rapidement dans l’électrolyte pour éviter toute oxydation à l’air.
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Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE I. TRANSFERT DES CHLORURES ET AMORÇAGE DE LA CORROSION DANS LE BÉTON ARMÉ
I.1. Introduction
I.2. Le matériau béton
I.2.1. Composition du béton de ciment
I.2.2. Structure poreuse et distribution des tailles des pores dans le béton
I.2.3. Solution interstitielle d’un matériau cimentaire, milieu simulant le béton
I.3. Corrosion des armatures d’acier dans le béton
I.3.1. L’acier dans le béton
I.3.2. La corrosion de l’acier dans le béton: considération générales
I.3.3. Initiation et propagation de la corrosion dans le béton
I.3.4. Processus de la corrosion des armatures dans le béton
I.3.5. Passivation/dépassivation des aciers dans le béton exposé au chlorures
I.3.5.1. Passivation
I.3.5.2. Domaine de passivation
I.3.5.3. Dépassivation due à la pénétration des chlorures
I.4. Diffusion des ions chlorures dans le béton
I.4.1. Les ions chlorures dans les matériaux cimentaires
I.4.1.1. Chlorures libres
I.4.1.2. Chlorures fixés
I.4.1.3. Isothermes d’interaction
I.4.2. Transport des ions chlorures dans le béton
I.4.2.1. Transport par diffusion
I.4.2.2. Transport par convection (zones de marnage)
I.4.3. Concentration critique en chlorures (seuil d’amorçage)
I.4.3.1. Expressions de la valeur du seuil d’amorçage
I.4.3.2. Seuil d’amorçage de la corrosion en solution simulant le béton
I.4.3.3. Seuil de l’amorçage de la corrosion dans le béton durci
I.4.3.4. Discussion
I.5. Contexte normatif
I.6. Conclusion
CHAPITRE II. INHIBITION DE LA CORROSION DES ARMATURES DU BÉTON ET TECHNIQUES D’ÉVALUATION
II.1. Introduction
II.2. Techniques de protection contre la corrosion des armatures dans le béton
II.3. Inhibition de la corrosion dans le béton armé
II.3.1. Les inhibiteurs de corrosion
II.3.2. Classification des inhibiteurs de corrosion
II.3.2.1. Nature chimique des inhibiteurs de corrosion
II.3.2.2. Mécanismes d’interface
II.3.2.3. Mécanismes d’action électrochimique
II.3.2.4. Isothermes d’adsorption et paramètres thermodynamiques
II.3.3. Les inhibiteurs de corrosion utilisés dans le béton
II.3.4. Inhibiteurs organiques à base d’amines ou d’alkanolamines (AMA)
II.3.4.1. Efficacité et mode d’action d’AMA
II.3.4.2. Effets des (AMA) sur les caractéristiques du béton
II.3.4.3. Pénétrabilité des AMA à travers le béton
II.3.4.4. Discussion
II.4. Techniques de suivi de la corrosion
II.4.1. Mesures gravimétriques (perte de masse)
II.4.2. Méthodes électrochimiques
II.4.2.1. Mesure du potentiel de corrosion
II.4.2.2. Courbes de polarisation ou technique Tafel plots (TP)
II.4.2.3. Résistance de polarisation linéaire (LPR)
II.4.2.4. Spectroscopie d’impédance électrochimique (EIS)
II.5. Conclusion
CHAPITRE III. MATÉRIAUX ET PROTOCOLES EXPÉRIMENTAUX
III.1. Introduction
III.2. Description des matériaux et milieux d’étude
III.2.1. Composition de l’acier étudié
III.2.2. Inhibiteurs testés
III.2.3. Milieux d’étude
III.2.3.1. Solution simulant le béton
III.2.3.2. Bétons étudiés
III.3. Étude de l’inhibition de la corrosion d’acier en solution simulant le béton
III.3.1. Évaluation de l’efficacité inhibitrice du DMEA
III.3.1.1. Étude gravimétrique (mesures de perte de masse)
III.3.1.2. Mesures électrochimiques
III.3.2. Détermination de la Ccrit en solution simulant le béton
III.3.2.1. Électrode de travail
III.3.2.2. Procédure expérimentale, détermination de la Ccrit en solution alcaline
III.4. Étude de l’inhibition de la corrosion de l’acier dans le béton
III.4.1. Effets des inhibiteurs testés sur les propriétés du béton
III.4.1.1. Caractérisation à l’état frais
III.4.1.2. Caractérisation à l’état durci
III.4.2. Étude de l’amorçage de la corrosion d’acier dans le béton
III.4.2.1. Fabrication des corps d’épreuve
III.4.2.2. Procédure expérimentale, détermination de la Ccrit dans le béton
III.4.2.3. Détermination de la (Ccrit) en chlorures
III.4.3. Étude de la migration du DMEA à travers le béton
III.4.3.1. Préparation des corps d’épreuve
III.4.3.2. Procédure expérimentale, migration du DMEA
III.5. Conclusion
CHAPITRE IV. ÉTUDE DE L’INHIBITION DE LA CORROSION EN MILEIU SIMULANT LE BÉTON
IV.1. Introduction
IV.2. Étude de l’efficacité inhibitrice du DMEA
IV.2.1. Mesures gravimétriques
IV.2.1.1. Effets de la concentration de l’inhibiteur et du temps d’immersion
IV.2.1.2. Évolution du pH dans la solution d’étude
IV.2.1.3. Effets de la Température
IV.2.1.4. Isotherme d’interaction
IV.2.2. Mesures électrochimiques
IV.2.2.1. Polarisation potentiodynamique
IV.2.2.2. Spectroscopie d’impédance électrochimique (EIS)
IV.2.3. Comparaison des résultats obtenus
IV.3. Étude de l’amorçage de la corrosion et effet des inhibiteurs testés
IV.3.1. Détermination de la (Ccrit) et effet du DMEA
IV.3.2. Effet des inhibiteurs de corrosion à base de phosphate sur la (Ccrit)
IV.3.3. Récapitulation des résultats
IV.3.4. Prédiction de la durabilité d’une structure en béton armé, exemple
IV.4. Conclusion
CHAPITRE V. AMORÇAGE ET INHIBITION DE LA CORROSION DE L’ACIER DANS LE BÉTON
V.1. Introduction
V.2. Effets des inhibiteurs testés sur les propriétés du béton
V.2.1. Caractérisation à l’état frais
V.2.2. Caractérisation à l’état durci
V.2.2.1. Résistance à la compression et porosité accessible à l’eau
V.2.2.2. Coefficient de diffusion effectif (Deff)
V.2.2.3. Isothermes d’interaction
V.3. Amorçage de la corrosion de l’acier dans le béton armé, et effet des inhibiteurs testés
V.3.1. Évaluation du temps d’initiation de la corrosion
V.3.1.1. Mesures du potentiel de corrosion (Ecorr)
V.3.1.2. Mesures de la résistance de polarisation linéaire (RPL)
V.3.2. Détermination de la valeur de la concentration critique en chlorures « Ccrit »
V.4. Étude de la pénétrabilité du DMEA à travers le béton
V.4.1. Mesures du potentiel de corrosion (Ecorr)
V.4.2. Mesures de la résistance de polarisation linéaire (RPL)
V.4.3. Constats et discussion
V.5. Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE ET PERSPECTIVES
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ANNEXES
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