En France, depuis 40 ans, l’augmentation de la population mais surtout les changements de modes de vie et de consommation ont entraîné le doublement de la quantité de déchets (source ADEME 2015). La problématique des déchets est devenue un enjeu majeur dans la gestion de l’environnement, l’impact sanitaire, la préservation des ressources et plus largement le développement durable. Aussi, parallèlement, les réglementations européennes et françaises définissent depuis une vingtaine d’années, une politique de gestion des déchets de plus en plus exigeante et cadrée. Des normes, des objectifs et des priorités sont fixées par le pouvoir législatif tant sur le traitement que sur la limitation de ces déchets. L’objectif étant de réduire la part de l’élimination au strict minimum et d’augmenter celle de leur valorisation, que ce soit par le réemploi, le recyclage ou la valorisation énergétique. Les communes ont la responsabilité de l’élimination des déchets (Article L2224-13 du CGCT) et cette compétence est obligatoirement transférée aux Communautés de communes, Communautés d’agglomérations ou Communautés urbaines auxquelles appartiennent les communes. Elles se doivent aussi de mettre en place le programme local de préventions des déchets (articles R541-41-19 et suivants du code de l’environnement).
Améliorations de la gestion des déchets au sein des ERP de la Communauté de Communes (CC) du SudEst Manceau
La note de cadrage de la mission : un diagnostic des pratiques et une proposition de plan d’action
L’offre de stage émane de la CC du Sud Est Manceau (CC SEM), et elle a été proposée aux étudiants du Master 2 MIDEC par Karine Leroy, responsable du service environnement de la CC, service qui assure la compétence déchets du territoire. Ce service s’est consacré, depuis 1997, à l’amélioration du tri sélectif pour les particuliers et depuis 2019 une démarche d’EIT pour la collecte séparée des cartons des entreprises est en cours. Étant donné qu’aucune démarche particulière n’a été entreprise pour la gestion et en particulier le tri des déchets au sein des communes de la CC, Karine Leroy, qui est aussi habitante du territoire, percevait une perte de tri dans les collectivités, au niveau des complexes sportifs, des écoles…etc. Il lui semble essentiel, en terme d’exemplarité, que les communes et la CC soient représentatives en pratiques et en connaissances de tri.
C’est en connaissance de causes (environnementales et financières) que la CC doit s’assurer de capter tous les gisements de tri de son territoire. Elle a souhaité faire réaliser une étude très factuelle sur le terrain. L’objectif visé étant de présenter à l’ensemble des élus communautaires, une image précise de leur territoire : ce qui se fait, ce qui devrait se faire pour la gestion des déchets. Denis Herraux, VicePrésident de la CC, élu en charge de la commission Environnement, a soutenu le projet. Il était en effet convaincu des dysfonctionnements (par exemple, pas de tri sélectif au sein de la mairie dont il est un des conseillers municipaux), sans pouvoir appréhender avec exactitude, l’ampleur et les enjeux que cela représente.
Pour répondre à cette demande, la mission est de réaliser tout d’abord un état des lieux de la gestion des déchets en général, et du tri en particulier, tel qu’ils sont effectués dans tous les locaux de toutes les communes. L’objectif suivant est de proposer des pistes d’amélioration et un plan d’action pour atteindre une harmonisation, une amplification, ou une mise en place du tri sélectif, en étroite collaboration avec le personnel technique et les agentes d’entretien. Le diagnostic devra aussi permettre d’identifier les leviers possibles de réduction à la source de ces déchets. L’objectif final visé étant que les pratiques de tri deviennent optimales et en cohérence avec la politique menée auprès des usagers. Un tri optimisé devrait permettre aussi de diminuer le tonnage d’OMR, qui entraîne un coût financier pour la CC (incinération), et d’augmenter les recettes de la revente des matériaux valorisables aux REP (responsabilité élargie des producteurs) via le centre de tri Valor Pôle 72 du Mans.
Présentation synthétique des finalités stratégiques et opérationnelles de la mission:
Finalités opérationnelles
– Identifier les acteurs concernés par type de lieux,
– Benchmark,
– Réaliser un diagnostic des pratiques existantes par cible,
– Proposition d’un plan d’actions.
Finalités stratégiques
– Mise en place et/ou uniformisation des pratiques de tri,
– Fédérer les acteurs autour de cet enjeu,
– Améliorer les pratiques de tri déjà existantes,
– Réduction à la source des déchets.
Pour comprendre tous les enjeux de cette mission, il est important de la situer dans l’environnement juridique de la gestion des déchets. Ce contexte est en évolution continue depuis 20 ans. Il est de plus en plus ambitieux depuis 2015, en réponse à la prépondérance des déchets et plus largement à la crise environnementale.
Le contexte juridique de la mission
Le service public de gestion des déchets trouve son origine dans le pouvoir de police que détient le maire et qui a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté et la salubrité publique. Le maire fixe les modalités de la collecte des déchets par le biais du règlement de collecte. Les communes et leurs groupements ont la responsabilité d’assurer la gestion des déchets ménagers et assimilés. Il s’agit d’une compétence obligatoire . Nous allons voir comment depuis 1975, les lois relatives à la gestion des déchets définissent et encadrent le rôle des collectivités.
La loi de 1975 est la toute première loi qui organise la collecte, le transport et le traitement des déchets. Elle aborde les conditions des opérations de collecte, de transport et de traitement des déchets, qui doivent se faire dans des conditions propres afin d’éviter « tout risque pour l’environnement et pour la santé humaine ». Si elle instaure le principe fondateur de « pollueur-payeur » et vise aussi à «faciliter la récupération des matériaux, éléments ou formes d’énergie réutilisables », les communes organisent avant tout, à dater de son adoption, la collecte et l’élimination des déchets de façon réglementée.
La loi du 13 juillet 1992, ou loi Royal, marque de façon forte les modes de gestion de déchets. Elle vise en effet à renforcer les dispositifs de la loi de 1975 et modernise la gestion des déchets en imposant le recyclage. Les déchets sont dorénavant considérés comme de potentiels gisements d’énergie et de matières premières qu’il faut valoriser. Les entreprises et collectivités deviennent responsables de leurs déchets jusqu’à leur élimination ou valorisation finale. Ce principe s’est traduit par la création de filières dites REP, qui couvrent la majorité des gisements présentant un enjeu en matière de valorisation ou de traitement.
2004. La France met en place le Plan National d’actions de Prévention des Déchets (PNPD). Il s’articule autour de trois volets : mobiliser les acteurs, agir dans la durée, et suivre des actions. C’est un document unique de référence, présentant les mesures, les objectifs et les orientations législatives. Il permet une vision nationale d’ensemble, à la fois du système de gestion et de la politique nationale menée pour l’amélioration de la valorisation des déchets.
2008. La réglementation européenne (Directive 2008/98/CE sur les déchets) impose à tous ses États membres de mettre en place un plan similaire. En France, il sera relayé en août 2014 par le PNPD 2014-2020. (Voir annexe 1 : infographie du PNPD 2014-2020) .
La loi Grenelle 1, juillet 2009. En réponses aux enjeux environnementaux et suite au Grenelle de l’environnement, cette loi fixe pour la première fois des objectifs chiffrés de prévention et de réductions des déchets :
► Réduction de la production de déchets ménagers de 7% avant 2014,
► Augmentation du recyclage matière et organique pour atteindre un taux de valorisation de 35% en 2012 (puis de 45% en 2015),
► Diminution des quantités de déchets stockés et incinérés de 15%,
► Hausse programmée du taux de recyclage des déchets d’emballages ménagers de 75% en 3 ans.
La loi Grenelle 2, juillet 2010. Ce texte traduit le programme de la loi 1 en obligations, interdictions et permissions. Il prévoit la mise en œuvre opérationnelle des propositions d’actions, définit les échelles territoriales, les outils financiers pour la réalisation, et projette des solutions de recyclage approprié. Les collectivités territoriales doivent définir un programme local de prévention des déchets (PLPD) ménagers et assimilés indiquant les objectifs de réductions des quantités et les mesures pour les atteindre.
La Loi NOTRe 2015. (La Loi Nouvelle Organisation Territoriale de la République) : cette loi a renforcé de façon générale les compétences des régions et des Communautés de communes. En ce qui concerne la compétence déchets, elles ont dorénavant le devoir d’élaborer les plans régionaux de prévention et gestion des déchets, (déclinaison territoriale du PNPD), traduit en plan d’action par les collectivités (PLPDMA : programme local de prévention des déchets ménagers et assimilés).
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Table des matières
Introduction
1 Améliorations de la gestion des déchets au sein des ERP de la Communauté de Communes (CC) du Sud-Est Manceau
1.1 La note de cadrage de la mission : un diagnostic des pratiques et une proposition de plan d’action
1.2 Le contexte juridique de la mission
1.3 L’environnement territorial de la Communauté de Communes
1.4 La compétence déchets au sein de la CC
1.5 Le périmètre du diagnostic à réaliser
2 Mesurer pour mieux connaître : l’état des lieux
2.1 Une recherche de données qualitatives
2.2 Un état des lieux au plus près des acteurs dans un contexte de crise sanitaire
2.3 Un focus sur les pratiques et les représentations des agents des collectivités
3 Analyser pour comprendre
3.1 Des divergences de connaissances et de pratiques mais une motivation partagée
3.2 Focus par commune : les cailloux et les pépites
3.3 Analyse transversale et sectorielle : un travail commun pour une meilleure efficacité
3.4 Conclusion de l’analyse : une opportunité d’amélioration
4 Stratégie d’actions pour améliorer les pratiques : comment mobiliser ?
4.1 Mieux trier pour moins jeter
4.2 Réduire les déchets à la source : capitaliser et aller plus loin
4.3 Un plan d’action à l’échelle du mandat
5 Conclusion
6 Annexes
7 Liste des figures
8 Bibliographie