Amélioration des techniques d’estimation des perturbations conduites

La CEM : une contrainte supplémentaire du processus de conception

    La fabrication ainsi que la mise sur le marché de voitures électriques est un véritable challenge. En effet, l’électricité, l’électronique et l’électronique de puissance n’étaient jusqu’alors pas le cœur de métier des constructeurs. De plus, l’automobile et en particulier le véhicule hybride ou le véhicule électrique deviennent des environnements électromagnétiques de plus en plus complexes. Le nombre de systèmes électriques embarqués, qu’ils soient courants faibles (capteurs, circuits de commande, calculateurs, etc.) ou courants forts (actionneurs électriques, électronique de puissance, etc.) est en constante augmentation. Cette tendance ne peut que conduire à la densification des phénomènes électromagnétiques indésirables et évidemment à une augmentation du risque de défaillance. Pour le constructeur et ses équipementiers, ce risque n’est pas admissible et doit en amont être estimé pour valider ou non la mise sur le marché des équipements et in fine du véhicule. Cette étape de validation est régie par le respect de normes ou spécifications que l’on peut regrouper sous le terme de « contraintes CEM ». Il existe deux catégories de normes. La première, régie par la directive européenne 2009/19/EC, concerne l’interaction entre le véhicule et l’environnement extérieur (test en émission à 10 m sur la bande [30 MHz, 1 GHz] ; test en susceptibilité à un champ de 30 V/m sur la bande [20 MHz, 2 GHz]). La seconde concerne le bon fonctionnement interne du véhicule. Cet objectif est principalement atteint grâce aux normes que doivent respecter les équipementiers. Ces normes sont imposées par le constructeur et peuvent varier de l’un à l’autre (typiquement : en émission au pied d’antenne radio [150 kHz, 930 MHz] (CISPR25) et à 10 mètres [30 MHz, 1 GHz] (CISPR12), en susceptibilité par source de rayonnement externe (ISO 11451-2), par émetteur embarqué (ISO 11451-3) et par décharge électrostatique (ISO 10605)). Or, ces contraintes ne sont généralement prises en considération que lorsqu’un premier prototype voit le jour. La Figure I – 4 représente l’enchainement des principales étapes de conception d’un produit, du cahier des charges jusqu’à sa mise sur le marché. Afin de minimiser les temps et les coûts de développement, il est nécessaire de prendre en compte les contraintes CEM lors de la phase de prototypage virtuel au même titre que les contraintes fonctionnelles, thermiques, mécaniques… Pour ce faire, les constructeurs doivent disposer d’outils logiciels dédiés à la CEM ou à défaut de règles ou de techniques de conception spécifiques pertinentes. Ces outils se doivent d’être performants (précis et peu couteux en temps de calcul), mais aussi compatibles et interfaçables avec les outils usuels de conception déjà existants. Une fois un prototype réalisé, différents tests de validation sont réalisés dont les tests CEM. Ces derniers nécessitent des moyens d’essais spécifiques et coûteux. La Figure I – 5 montre une partie des équipements dont dispose Renault au Centre Technique d’Aubevoie. La première photo (A) montre une cage de Faraday qui permet de réaliser des tests d’immunité du véhicule. Alors que celui-ci est positionné sur quatre rouleaux permettant de reproduire les conditions réelles de fonctionnement, il est en même temps exposé à des ondes d’amplitude et de fréquence variables. La deuxième photo (B) montre une chambre semi-anéchoïque qui permet de mesurer les émissions intrinsèques du véhicule et notamment au niveau de l’antenne radio tout en s’affranchissant du bruit électromagnétique extérieur. La troisième photo (C) montre une chambre complètement anéchoïque de très grande dimension et recouverte d’absorbants pyramidaux de 1,5 mètre de hauteur. Le véhicule est placé sur un plateau tournant au centre de la chambre et surplombé par une arche de 12 mètres de diamètre. Cette arche accueille 31 sondes basses fréquences (75 MHz à 500 MHz) et 101 sondes hautes fréquences (400 MHz à 6 GHz). Ceci permet d’établir une véritable cartographie 3D des sources de rayonnement électromagnétiques du véhicule. L’investissement dans ce type de matériel jusqu’alors uniquement utilisé par les militaires, témoigne de l’importance que portent les constructeurs à la CEM.

Objectifs et apports des travaux

     L’ensemble des travaux de thèse a bénéficié d’une collaboration entre le laboratoire SATIE et l’entreprise Renault qui a fourni le support d’étude : un ensemble convertisseur machine synchrone dédié à la traction électrique. Ces travaux consistent en la modélisation des perturbations conduites de cette chaîne de traction. L’appréhension, la compréhension et la modélisation de ce système ont permis de mettre en place des modèles génériques ainsi que des techniques et méthodes novatrices. La démarche scientifique que nous avons adoptée pour appréhender chaque problématique s’inscrit dans un schéma Modélisation → Protocole de mesure
→ Validation du modèle. Dans cette optique, deux bancs de test expérimentaux que nous décrirons plus tard ont été réalisés durant la thèse. Ils permettent de valider la pertinence des modèles établis en confrontant les résultats théoriques à des résultats expérimentaux pour lesquels une attention particulière a été portée. Dans le chapitre suivant, nous dresserons un état de l’art sur les différentes techniques de modélisation et de simulation des perturbations conduites développées au court de ces dernières années. Nous examinerons les avantages et inconvénients de chacune et nous verrons quelle est la mieux adaptée pour un problème donné. Ceci nous permettra de tirer le meilleur parti de chacune et de proposer dans le Chapitre III une modélisation fine de la chaîne de traction ainsi qu’un protocole de mesure associé. Le modèle sera ensuite généralisé à une structure non-isolée composée de N cellules de commutation. Dans le Chapitre IV, nous nous focaliserons sur les perturbations de mode commun. Nous monterons qu’il est possible de calculer un courant de mode commun sur une large bande de fréquence en ne connaissant que la loi de commande des interrupteurs et en ne se focalisant que sur un intervalle de temps très court. Cette technique, alliant à la fois le domaine temporel et le domaine fréquentiel s’avère très intéressante puisqu’elle permet de réduire considérablement les temps de calcul. Enfin, dans le Chapitre V, nous nous intéresserons à la synthèse des sources de perturbation. Ce que nous définissons comme la synthèse des sources est un modèle ou plus généralement un outil capable de reproduire les formes d’ondes complexes des grandeurs perturbatrices. Nous proposerons une modélisation comportementale d’une cellule de commutation par fonctions des convolutions, où les grandeurs sont construites dans le domaine temporel et une approche par fonction de transfert pour une reconstruction directement dans le domaine fréquentiel.

Caractérisation type « boite noire » pour réseau de convertisseurs

    Ce type de modélisation n’a pas pour but de comprendre les mécanismes de perturbation d’un convertisseur seul mais de retranscrire le comportement de l’interconnexion de plusieurs structures sur un même réseau par une modélisation simple et générique de chacun. Ces travaux s’appuient sur une identification de type « boite noire » et un protocole de mesure adapté qui permet de renseigner un modèle composé de sources et d’impédances (Figure II – 6) [FOISSAC09]. Une fois renseigné, vu du bus continu d’alimentation et de la terre, le modèle se comporte comme la structure considérée et génère les mêmes perturbations de mode commun et de mode différentiel. Cependant, le modèle ne permet pas d’identifier quelles sont les sources de perturbations au sein de la structure. La simulation de plusieurs de ces modèles connectés sur un même réseau permet de l’étudier tant en immunité qu’en émission. Ce type de modélisation est un excellent outil d’analyse et permet une étude a posteriori d’un système global mais n’est pas adapté à la prédiction des perturbations intrinsèques à une structure et ne peut donc pas être exploité à l’étape de la conception.

Conclusion

    Dans ce chapitre, nous venons de proposer deux méthodes de synthèse d’une cellule de commutation permettant, à partir du signal de commande des interrupteurs, d’estimer la tension de sortie entre le point milieu et le bus continu. Nous avons réalisé une étude paramétrique sur la valeur de la résistance de grille qui nous a permis dans un premier temps de reconstruire cette tension dans le domaine temporel par fonction de convolution et dans le domaine fréquentiel par fonction de transfert. Finalement, ces deux approches sont assez proches dans la mesure où une fonction de transfert dans le domaine fréquentiel est une fonction de convolution dans le domaine temporel. Les fonctions de convolution comme les fonctions de transfert permettent de rendre compte du comportement de la cellule de commutation tout en s’affranchissant des non-linéarités intrinsèques aux semi-conducteurs. Les grandeurs sont directement calculées dans le domaine fréquentiel dans le cas des fonctions de transfert. De plus, puisque les fonctions de convolution sont établies de manière analytique, leur transformée de Fourier est facilement calculable. Il ressort de cette étude qu’il est possible de paramétrer ces fonctions par des paramètres caractéristiques des interrupteurs et de leur environnement. La valeur de ces éléments a été ajustée manuellement mais il serait intéressant de réfléchir à un protocole de mesure spécifique qui permettrait de les extraire directement. Il est encore prématuré de conclure sur la généralisation d’une telle méthode à n’importe quel type de structures. Cependant, à travers l’étude du cas réel que nous avons traité, nous avons montré la faisabilité des approches proposées et fourni les outils nécessaires aux études futures.

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Table des matières

CHAPITRE I : INTRODUCTION
I. Le véhicule électrique : enjeux industriel et environnemental
II. La CEM : une contrainte supplémentaire du processus de conception
III. La simulation des émissions d’un dispositif
III.1. Niveau d’approche d’un système
III.2.Distinction perturbations « conduites / rayonnées »
IV. Objectifs et apports des travaux
CHAPITRE II : ETAT DE L’ART SUR L’ANALYSE ET LA PREDICTION DES PERTURBATIONS CONDUITES
I. Simulation temporelle fonctionnelle exploitée en CEM
II. Simulations dédiées à la CEM
II.1. Caractérisation type « boite noire » pour réseau de convertisseurs
II.2. Modélisations par sources de MC et MD et impédances localisées
II.2.1. Localisation des sources et identification des chemins de propagation
II.2.2. Modélisation des chemins de propagation
II.2.3. Implantation et synthèse des sources de perturbation
II.3. Séparation des éléments parasites internes aux interrupteurs
III. Conclusion
CHAPITRE III : SYNTHESE D’UNE STRUCTURE NON-ISOLEE D’ELECTRONIQUE DE PUISSANCE : APPLICATION A UN ENSEMBLE CONVERTISSEUR MACHINE DEDIE A LA TRACTION ELECTRIQUE
I. Description du support d’étude et du banc de test expérimental
I.1. Description du support d’étude
I.2. Description du banc de test expérimental de la chaîne de traction
II. Modélisation en mode commun
II.1. Cas d’une cellule de commutation
II.1.1. Expression du courant de mode commun
II.1.2. Modèle équivalent dans le domaine fréquentiel
II.1.3. Application au hacheur série d’excitation
II.1.4. Validation expérimentale de la modélisation en MC de l’ensemble hacheur d’excitation / rotor
II.1.5. Réflexions sur le modèle établi
II.2. Généralisation à l’association de N cellules de commutation
II.3. Application du modèle à l’association de l’ensemble hacheur d’excitation – onduleur – machine synchrone
II.3.1. Modélisation en mode commun
II.3.2. Validation expérimentale
II.4. Utilisation du modèle dans une simulation circuit
III. Modélisation en mode différentiel
III.1. Cas d’une cellule de commutation
III.1.1. Expression du courant de mode différentiel
III.1.2. Intégration des perturbations de mode différentiel au modèle équivalent de mode commun
III.2. Généralisation à l’association de N cellules de commutation
III.3. Application à l’onduleur triphasé
IV. Conclusion
CHAPITRE IV : ANALYSE DES PERTURBATIONS DE MODE COMMUN : VERS UNE REDUCTION DE LA DUREE D’ANALYSE
I. Analyse d’un courant de mode commun
II. Cas d’un hacheur série
II.1. Description du banc de test
II.2. Décomposition de imc en fonction du signe de dV/dt
II.3. Elaboration d’une impulsion équivalente
II.4. Extraction d’une impulsion pertinente de la mesure
II.5. Reconstitution à partir des instants de commutation calculés
III. Cas d’un onduleur triphasé
III.1. Description du banc de test
III.2. Choix d’une impulsion par coefficient de corrélation
III.3. Reconstitution à partir d’une impulsion mesurée
IV. Cas d’impulsions très rapprochées dans le temps
IV.1. Description du support d’étude
IV.2. Reconstitution à partir d’une impulsion mesurée et des instants de commutation calculés
V. Application à la simulation de l’ensemble onduleur – hacheur – MS
VI. Conclusion et perspectives
CHAPITRE V : MODELATION ET SYNTHESE DES SOURCES DE PERTURBATIONS CONDUITES
I. Introduction
II. Banc de test
III. Reconstruction des fronts par fonction de convolution
III.1. Décomposition du signal de commande
III.2. Fonction de convolution associée à la fermeture du transistor (fcON)
III.3. Fonction de convolution associée à l’ouverture du transistor (fcOFF)
III.4. Reconstruction totale
IV. Reconstruction par fonctions de transfert
IV.1. Calcul des fonctions de transfert à partir des tensions mesurées
IV.2. Reconstruction des fonctions de transert
IV.3. Reconstruction des tensions à partir des FT élaborées
V. Conclusion
CHAPITRE VI : CONCLUSION & PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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