Le foncier : un volet de différenciation
Etant le support et la base même de toutes activités agricoles, le capital foncier constitue un signe de valeur selon l’importance accordée par les paysans pour chaque type de terrain. A titre légal, la majorité des exploitations paysannes ne possèdent pas de titres fonciers dus aux manques de moyens et de la méconnaissance des démarches administratives à effectuer auprès de la DDSF à Ambatondrazaka. A l’échelle du village, les terres sont vendues au sein des mêmes familles. Si le vendeur ne trouve pas preneur, la vente est ouverte à l’ensemble de la communauté merina du village. En dernier recours les terres sont vendues à des migrants d’origines ethniques différentes. La transmission des terres se fait par héritage, une partie au cours de l’installation des jeunes ménages, l’autre lors du décès des parents. Les terres sont vendues en cas de nécessité, de départ ou d’incapacité à se répartir l’héritage familial. Les transactions étaient relativement courantes jusqu’en 1996, il semble qu’il y ait aujourd’hui moins de terre à la vente. Il est beaucoup plus courant de les obtenir en faire-valoir indirect (métayage, location ou fermage). Les personnes cèdent leurs terres en métayage quand elles n’ont pas les moyens de les cultiver (insuffisance de moyens de paiement du travail à façon et/ou la main d’œuvre nécessaire) et en location si elles ont un besoin urgent d’argent liquide. Le contrat le plus fréquent est le métayage où le propriétaire apporte sa force de travail au moment de la récolte, du battage et du vannage du riz et la récolte est partagée en deux. La majorité des terrains qui procurent forte une valeur ajoutée sont en faire valoir direct. Sur les RBI et les Bas-fonds, le riz en donne l’exemple. Sur les planches de raccordement, la culture de brèdes est la plus pratiquée. La majorité des rizières sont en faire valoir direct. 87% des RBI sont en faire valoir direct contre 67,5% des RMME. En faire valoir indirect, les paysans préfèrent louer que de devenir métayers sur les RBI vu la valeur ajoutée dégagée. Sur les RMME, même si le fermage procure une plus forte valeur ajoutée à l’hectare par rapport au métayage, l’observation montre l’inverse. Sur tanety, le mode de faire valoir indirect gagne plus de poids par rapport aux autres types de terrains. En effet, la productivité à l’hectare obtenue sur le tanety est fonction de la pluie et surtout de la disponibilité en fumier du propriétaire. 57,5% des paysans exploitent eux-mêmes leur tanety contre 25,5% qui doivent pratiquer le métayage avec des gens qui peuvent se procurer du fumier. Par ailleurs, 17% des paysans peuvent louer des tanety pour cultiver du manioc parce que cette culture ne dépend pas de la pluviométrie et donne un rendement relativement stable. Ces derniers sont surtout les grands propriétaires de zébus. Sur le bas-fond, 90% des surfaces sont en faire valoir direct, compte tenu de la valeur ajoutée dégagée par la riziculture. Les 10% viennent du fait que le propriétaire a un besoin urgent d’argent liquide, donc, il cède son terrain en location. Sur le planche de raccordement, 80% des surfaces sont en faire valoir direct compte tenu de la valeur ajoutée dégagée par la culture de brèdes. Les 20% viennent du fait que le propriétaire ne dispose pas de temps pour réaliser les différents travaux, alors, il cède son terrain en métayage.
Une prédominance de l’intégration agriculture-élevage
Le village d’Anandrobe est reconnu parmi ceux du Lac à avoir une intégration de l’agriculture avec l’élevage.
L’élevage de zébus relève d’une importance capitale du fait qu’il constitue à la fois une force de travail indispensable à la production (traction, dépiquage,…) et un moyen de production à partir du fumier qu’il produit pour la mise en culture des tanety. Les zébus constituent aussi une épargne et une valeur réalisable20 pour les paysans. Actuellement, une amélioration génétique à partir de race laitière gagne du terrain dans le village, avec une performance laitière journalière de deux à trois litres. La ration alimentaire des zébus varie énormément suivant les capacités de chaque éleveur. Une partie est distribuée dans l’enclos et l’autre partie provient des pâturages. La période d’étiage fourrager s’étend de Janvier (début de repiquage) à fin Mars (récolte du riz pluvial). La ration à l’enclos se fait à la fin de la journée et varie selon l’époque et les moyens des propriétaires. Elle est généralement composée de manioc frais (0 à 5kg par zébus) et de pailles de riz (environ 4,5kg par zébu). Les pailles sont stockées en meules après chaque récolte tandis que la disponibilité en manioc conditionne l’assolement des cultures sur tanety. Les plus petits exploitants concentrent leur récolte de manioc sur la période d’étiage fourrager. Les plus aisés complètent la ration de cette période par du fourrage vert coupé quotidiennement sur les diguettes ou récolté dans les parcelles de brachiaria s’ils en possèdent. La charge à l’hectare des parcelles cultivées en manioc est relativement grande. De ce fait, pour satisfaire le besoin du cheptel en manioc, l’assolement sur tanety est fonction de sa disponibilité. Tandis que pour les pailles, un hectare de parcelle cultivée en riz ne peut satisfaire que 2 à 3 zébus par an. Donc, elles constituent une ressource rare dans le village et parfois, font l’objet de transaction. Les zébus sortent quotidiennement pour pâturer (vers 10h). Ceci conditionne l’arrêt des travaux attelés. Lorsque les rizières sont cultivées, la zone de pâturage se limite aux tanety et dans les taillis d’Eucalyptus. Pour éviter que les zébus ne maigrissent après les rudes travaux de labour des rizières et ensuite de pouvoir faire les travaux du mois d’Avril (dépiquage, labour des tanety,…), certains exploitants doivent acheter des pailles et/ou du manioc pour combler les besoins de ces troupeaux. Du point de vue sanitaire, la vaccination contre le charbon est obligatoire pour chaque zébu afin de faciliter leur vente au boucher. Le coût des autres traitements préventifs est relativement élevé et donc, réservé aux exploitants aisés. L’élevage de zébus présente un taux de mortalité moindre que les autres élevages dans le village.
L’élevage ovin vient en second lieu après les zébus. Néanmoins, sa fonction est comparable : source de fumure et de valeur réalisable. Il est capital pour les ménages qui ne possèdent pas de zébus. Les troupeaux de moutons sont conduits de la même manière que les zébus, ils sortent à la même heure et ont le même parcours que les zébus. La ration alimentaire est composée de manioc (0,2kg/jour) et de pailles chez les grands propriétaires terriens, alors que chez les petits, le pâturage constitue la totalité de l’alimentation. Malgré les différents traitements préventifs, le taux de mortalité enregistré au niveau du village s’élève à plus de 40%. Les maladies causées par les parasites ectodermiques dominent.
L’aviculture : est dominé principalement par l’élevage de poulets, les autres élevages comme l’élevage d’oies et de dindons sont peu nombreux dans le village. En effet, l’élevage de dindons demande beaucoup de surveillance, à cause des vols et des cultures à protéger. Par contre, l’élevage des poulets est très prisé pour la vente des œufs. Aucune dépense monétaire n’est engagée pour ce type d’élevage alors que ce système permet aux ménages agricoles d’avoir une liquidité immédiate. La quantité autoconsommée augmente proportionnellement selon le niveau de vie de chaque famille. Les problèmes de l’aviculture sont l’abondance des vols et un taux de mortalité important engendré par l’existence des pestes aviaires (appelé localement « moafy »). Les vaccins existent mais les paysans ont révélé l’inefficacité de ces derniers dus à une mauvaise conservation avec un coût relativement cher. De plus, les traitements doivent être faits en période de pointe de travail du mois de mai-juin (moisson, fabrication de meules, battage).
Les autres élevages: malgré l’existence des menaces de la peste porcine africaine, le cheptel porcin persiste et génère des liquidités pour certains ménages engraisseurs. Certains agriculteurs pratiquent aussi l’élevage de lapins et de cobaye mais le taux de survie de cette dernière est faible.
Diminution de la superficie disponible par actif
Face à la dynamique démographique actuelle et l’accroissement du nombre de bouche à nourrir par ménage dans la zone d’étude, la surface agricole disponible par actif familial tend à diminuer. Cette situation pousse les paysans à intensifier leur pratique sur tanety. Cette pression sur le tanety se traduit par la disparition progressive des couvertures forestières en amont et engendre la dégradation des bassins versants et la formation des lavaka. Cette détérioration du milieu a un impact sur les parties en aval, comme la destruction de bon nombre d’infrastructures hydro-agricoles, tout en fragilisant la qualité de maîtrise de l’eau sur les rizières. Définis dans l’engagement 4, défi 3 du « Madagascar Action Plan » ou MAP, il faut mobiliser toutes les parties prenantes (région, commune, les paysans bénéficiaires, les bailleurs de fonds,…) pour réhabiliter et entretenir le réseau hydro-agricole en amont de Manaingazipo afin de réduire la quantité de matériau que charrie le canal d’irrigation.
Influence de la qualité des rizières sur la tenure foncière
D’après le tableau n°2, 87% des RBI31 sont en faire valoir direct contre 67,5% des RMME32. Ceci s’explique par le fait qu’il y a moins de risque de mauvaise récolte sur les RBI que sur les RMME. En effet, avec l’irrégularité de la pluviométrie qui varie d’une année à l’autre, les RMME sont exposées à des risques de difficultés de drainage en cas d’abondance de pluie. Par contre, elles peuvent recevoir de l’eau tardivement en cas de déficit pluviométrique. Cette situation est conséquente sur le rendement, ainsi qu’au revenu obtenu par l’exploitant. De plus, les paysans préfèrent être métayers sur les RMME pour diminuer les risques que d’investir par la location. Ainsi, l’utilisation des variétés de riz poly-aptitudes SEBOTA est à recommander sur les rizières car elles poussent avec un minimum de pluie et elles peuvent résister à tous changements climatiques, avec un rendement supérieur par rapport aux autres variétés de riz. (Cf. annexe p.XLVII)
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Table des matières
INTRODUCTION
1- METHODOLOGIE
1-1 Synthèse bibliographique
1-2 Localisation de la zone d’étude
1-3 Collecte de données
1-3-1 Enquête exploratoire
1-3-2 Enquête formelle
1-4 Dépouillement et traitement de données
1-4-1 Enquête technique économique
1-4-2 Elaboration des cartes thématiques
1-5 Evaluation des résultats annuels des systèmes de productions
1-5-1 Analyse des résultats du système de production dans son ensemble
1-5-2 Modélisation des résultats par la combinaison du système de production
2- RESULTAT
2-1 Analyse – diagnostic du système agraire
2-1-1 Caractéristique et fonctionnement du système agraire local
2-1-2 Analyse du système de production
2-1-3 Modélisation des stratégies de groupe
2-2 Suivi et analyse cartographique de la diffusion du SCV
2-2-1 Etat de lieu de la diffusion
2-2-2 performance de la diffusion en termes de superficie allouée en SCV
2-2-3 Résultats généraux de l’évolution de la diffusion
3- DISCUSSION ET RECOMMANDATION
CONCLUSION
Liste des bases bibliographiques
Annexes
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