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La sociologie dynamique
Bien que notre investigation se focalise essentiellement sur la transformation sociale du monde moderne, celle qui est fondamentalement caractérisée et stimulée par le développement sans précédent des NTIC, nous ne pouvons pas ignorer le dynamisme de la société ; qui passe de l’état primitif vers l’état positif. D’ailleurs si nous avons l’intention de déduire à la fin du mémoire que l’époque actuelle est bien différente, avancée ou en régression, par rapport à la précédente, il nous est impossible de ne pas mener une réflexion diachronique du phénomène étudié. Pour cela, nous abondons dans le sens de BALANDIER qui a dit que « la sociologie devrait être sensible à la détection des temporalités propres aux différents segments d’une société comme elle devrait être attentive aux conjonctures particulières. Toute étude qui se veut « actuelle » se trouve contrainte de tenir compte à la fois des processus se déroulant sur une longue période et de leur complexité, des provocations issues du contexte social et politique, et des forces latentes qui se révéleront à l’occasion d’un conflit. L’approche dynamique qui a vocation de rendre compte des changements, des mobilités est nécessairement ouverte à la détection des moments, des conjonctures, malgré leur caractère partiellement fugace.
A l’opposé d’une sociologie des permanences, la sociologie dynamique tend beaucoup plus à souligner non seulement les transformations, mais, plus encore, le fait de l’inachèvement essentiel à tout agencement social.»13 En effet, nous sommes contraints de tenir compte de l’enchevêtrement de chaque époque ainsi que le contact progressif de la culture malgache avec celle des autres et qui influent indéniablement sur les manières d’agir, de sentir et de penser de notre population d’enquête. D’ailleurs, nous n’avons pas vu même un seul ouvrage qui met en exergue qu’il y avait de temps où la culture malgache restait dans son état pur. Il est certes dit que le phénomène d’acculturation remonte à des époques lointaines et au fil du temps, elle devient de plus en plus remarquable d’où nous avons beaucoup intérêt à en parler avec BASTIDE.
L’acculturation
Si nous nous alignons à la lecture symptomale de Balandier sur le dynamisme de la société, c’est parce que cette dernière forme un tout complexe dynamique dont chacune de ses variantes en l’occurrence du culturel, du social, etc. constitue une réalité vivante. Aussi, l’association de plusieurs disciplines permet-elle de saisir la complexité de cette totalité solidaire surtout qu’avec BASTIDE R., un de nos auteurs de référence, « le culturel ne peut pas s’étudier indépendamment du social »14. Cette interdépendance herméneutique devient une nécessité même académique en vue d’échapper à tout risque de réduction des faits culturels à des faits sociaux ou le sociologisme et l’inverse (le culturalisme). « Le socius qui est le compagnon, le même tandis que l’anthropos, c’est l’espèce dans sa diversité, les Autres » a distingué Bouvier dans l’introduction du Lien social. En effet, il a continué que « la socio anthropologie devient le croisement du même, de l’autre et des liens propres à ce qui définit l’existence contemporaine, dans toutes ses dimensions ». Dans le sillage de cette interdisciplinarité appliquée à l’analyse du surgissement des métissages culturels, nous nous référons à la typologie d’acculturation citée par BASTIDE. Pour lui, l’acculturation peut prendre une allure générale, politique et culturelle qui équivaut à :
-« acculturation spontanée, naturelle ou libre. Il s’agit d’une acculturation ni dirigée ni contrôlée. Dans ce cas, le changement est dû au simple jeu de contact et se fait, pour chacune des deux cultures en présence selon sa logique interne propre ». Cette première forme se rencontre dans le cas d’une cohabitation intergénérationnelle (beaux parents/beaux enfants), celle d’interethnique (les immigrants pakistanais/ malgaches ou autres). C’est la forme la plus ordinaire au point que rares sont les débats académiques ou populaires relatifs. Elle ne suscite pas autant d’interrogation que la seconde et la troisième allure ;
– « acculturation organisée, mais forcée au bénéfice d’un seul groupe comme dans le cas de l’esclavage ou de la colonisation. Il y a alors volonté de modifier à court terme la culture du groupe dominé pour le soumettre aux intérêts du groupe dominant ». Avec les exemples antérieurement évoqués par l’auteur et dans lesquels mêmes Madagascar a passé plus d’un siècle de son histoire, celle-ci s’avère très facile à comprendre et à appréhender aussi bien dans son fonctionnement que dans ses implications et enfin, il y a – « l’acculturation planifiée, contrôlée qui se veut systématiquement et vise le long terme. La planification se fait à partir de la connaissance supposée des déterminismes sociaux et culturels ». Cette troisième forme intéresse beaucoup notre réflexion. Elle se manifeste dans l’appropriation de la technologie qui est le sous bassement même de notre débat. Elle retient ainsi toute particulièrement notre attention. A reculons, l’intégration sociale et l’appropriation culturelle de l’internet relève, comme son nom l’indique, de deux modalités différentes mais complémentaires. La culture perçue comme le fondement et sur laquelle la réflexion sur les impacts de la consommation aveuglante de la technologie est cette fois-ci mise en relief. L’appropriation progressive pour l’ensemble mais assez brusque pour une certaine minorité traduit le basculement de la société vers la société numérique et de la culture vers celle des Occidents valorisant le fictif à la place du concret, le virtuel du réel, les outils du physique. D’ailleurs, nous assimilons la mondialisation de la technologie, autrement dit la libre circulation des NTIC, à prix imbattable, à l’échelle mondiale à une sorte de planification préméditée pour passer d’une imposition culturelle à la néo domination politico-économique des pays en développement comme Madagascar. Sans doute, le contrôle axiologique dont disposent les pays avancés envers ces derniers finit-il par leur faire accepter non seulement l’existence de la hiérarchie culturelle mais et surtout de la suprématie de la culture occidentale. D’où l’on constate la forte influençabilité de la culture locale vis-à-vis des leurs et ce jusqu’à la possibilité certaine de ce que nous désignons précédemment par la phagocytose culturelle.
Limites
Du mois de mars jusqu’à ce jour où nous présentons ce mémoire, des efforts ont été menés entre autres la documentation, l’observation, les enquêtes, le dépouillement ainsi que la rédaction. Nous essayons de le mener à bon terme et nous avons fait en sorte que le présent mémoire ait une allure plus scientifique et authentique. Il est pourtant absurde de notre part de ne pas reconnaître que ce fruit reste encore loin d’être parfait et impeccable. Des imperfections dues à l’insuffisance des revues documentaires puis la restriction du nombre des enquêtés pour de nombreuses raisons (notre période d’enquête coïncide avec celle de cours ; les gens sont difficiles à aborder et à questionner, cela peut être à cause du rythme quotidien qui rend les citadins à la fois toujours pressés et stressés) sont enregistrées. De plus, la notion des NTIC fait penser d’emblée à la catégorie sociale aisée, en effet, les réticents qu’ils soient moins instruits ou économiquement défavorisés, se sentent gênés pendant la conversation. C’est comme si notre étude remet encore en surface la dichotomie sociale qu’ils essaient de dissimuler par les apparences telles que le vêtement qui « efface des inégalités individuelles ; crée ou consacre et manifeste des égalités et des inégalités sociales 15».
Plan
Feront ainsi partie des éléments constitutifs et présentés successivement dans ce mémoire Madagascar en pleine transition numérique ? (première partie) ; puis le tremplin de la technologie de pointe vers la révolte des pronétariats16 (seconde partie) et l’approche prospective : vers le mariage culturel et une inculturation rationnelle (troisième partie).
MADAGASCAR EN PLEINE TRANSITION NUMÉRIQUE ?
Ces derniers temps, le terme « frontière » a connu une polémique controversant et revêt un double qualificatif aussi paradoxal que le simple usage du terme requiert un éclaircissement épistémologique. Cette dualité de sens rejoint à la description de GUERIN en 2004 sur l’existence d’une multitude de frontières dont la géographie invisible17. En réalité, il y a au moins deux sortes de frontières, l’une qui peut inspecter toute sorte de transaction matérielle ou humaine pour les soumettre à des droits ou à des taxes et l’autre dont l’affranchissement ignore presque totalement les limites géographiques. Tel est le cas avec la circulation des informations diffusées par les ondes de la radio, de la télévision et qui valent encore plus depuis l’’opérationalité de l’internet. Ainsi, the death of distance18, souvent reformulée par « la perméabilité de la frontière », « l’effacement des espaces physiques », etc. s’expose à de grandes confusions conceptuelles étant donné qu’aucune frontière géographique n’est annulée, au contraire elle est de plus en plus renforcée par des barbelées militaires,…Ce qui permet d’avancer que la distance réduite par l’omniprésence des NTIC figure parmi celles des « invisibles », cristallisées par les traditions, les patrimoines, la culture, etc.
C’est ainsi que nous avons intérêt à présenter en premier lieu cette notion de perméabilité culturelle à travers la présentation panoramique du terrain d’investigation suivie de celle de l’implantation des NTIC dans la société malgache après avoir détaillé la méthodologie d’étude.
APPAREILLAGE MÉTHODOLOGIQUE
De prime abord, cette première subdivision consiste en la présentation détaillée de la méthodologie de recherche adoptée. Il convient quand même de souligner que ce mémoire est le résultat de plusieurs étapes méthodologiques, entreprises pendant un laps de temps assez long. Elles seront regroupées en trois catégories interdépendantes et successives entre autres la documentation exploratoire combinée avec la pré-enquête, la descente sur terrain proprement dite et enfin le dépouillement post terrain.
La documentation exploratoire
En vue d’une mise au point épistémologique, nous sommes contraints à une exploration continue et à maintes reprises des travaux antérieurs ayant trait à notre inspiration thématique. En réalité, cette phase de documentation n’a pas connu une délimitation temporelle très précise étant donné qu’elle s’avère indispensable avant même le recueil des données, durant le traitement et cela jusqu’à la phase de rédaction. Tout au long de cette année universitaire, nous avons mené une documentation disant indicative et interprétative interminable. En ce qui concerne celle de l’exploration, elle est surtout mobilisée dans le cadre de la formulation de la problématique et des hypothèses. Pour ce, il faut noter que depuis le mois de Novembre 2013 Ŕavril 2014, nous sommes dans l’embarras de choix dans l’élaboration du canevas du projet par la diversité pragmatique puisée dans de différentes sources telles que les livres, les publications, les mémoires, etc. Honnêtement, le fait de nous conformer aux étapes d’une recherche prescrite par QUIVYetCAMPENHOUDT19 nous a beaucoup aidée durant cette phase préliminaire. Plus précisément cette première étape du travail s’est inspirée de la démarche numéro deux20 de BLANCHET, qui est celle de l’hypothético-déductive.
Cependant, l’ampleur de la lecture archivistique désignée par certains auteurs par le terme gloutonnerie livresque effectuée ne nous a pas épargné dans la difficulté du choix. Nous tenons ici à faire connaître que des va et vient thématique ont eu bien lieu ; il nous arrive de changer de temps à autre et ceci jusqu’à trois fois le sujet avant de le tenir. S’agissant du présent thème, il a été gardé après avoir recoupé les données documentaires avec celles de la pré-enquête.
La pré-enquête, « il s’agit de différentes techniques susceptibles d’être mises en œuvre pour déboucher sur la formulation des hypothèses de travail »21 vient simultanément avec la documentation. Cette étape qualifiant décisive dans l’élaboration préalable du projet s’étale de la fin du mois de mars jusqu’au mois de mai 2014 ; pendant laquelle nous avons interviewé librement quelques personnes ressources indiquées par le tableau n°1.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CONTEXTE GENERAL
CHOIX DU THEME
CHOIX DU TERRAIN
PROBLEMATIQUE
HYPOTHESES
OBJECTIF GLOBAL
OBJECTIFS SPECIFIQUES
APERÇU METHODOLOGIQUE ET THEORIQUE
ETHNOMETHODOLOGIE :
L’APPROCHE SYSTEMIQUE
LA SOCIOLOGIE DYNAMIQUE
L’ACCULTURATION
LIMITES
PLAN
PREMIERE PARTIE : MADAGASCAR EN PLEINE TRANSITION NUMÉRIQUE ?
CHAPITRE 1 : APPAREILLAGE MÉTHODOLOGIQUE
Section 1 : La documentation exploratoire
La méthode probabiliste :
Sondage par grappe
Section 2 : Le travail sur terrain
L’observation participante
L’entretien
TABLEAU N° 5 : SYNTHESE SUR LES ENQUETES
GRAPHE N°1 : ANNEAU SYNTHETIQUE DES ENQUETES
Section 3 : Le dépouillement des données recueillies
CHAPITRE 2 : AMBOHIPO : UN COSMOS HYPER VIRTUEL DE LA CAPITALE
Section 4 : Un micro village planétaire, caractérisée par une hétérogénéité populationnelle
TABLEAU N° 6: LIMITROPHE D’AMBOHIPO
TABLEAU N ° 7 :RECAPITULATIF DE LA SITUATION DEMOGRAPHIQUE
GRAPHE N°2 : AMBOHIPO EN GRAPHE
Section 5 : Une socialité submergée par l’informel
5 -Une galerie des pharmacies ambulantes
ILLUSTRATION N°1 : LES PERSONNES-PHARMACIES D’AMBOHIPO
TABLEAU N°8 : COMPARAISON DES ETUDES PUBLIEES EN 2010 ET EN 2013 SUR LE SOUS EMPLOI A MADAGASCAR.
Un micro-pôle technologique
ILLUSTRATION N° 2: AMBOHIPO, LE TECHNOPOLE EN IMAGE
CHAPITRE 3 : LES NTIC : L’INTRUSE DE LA SOCIETE CONTEMPORAINE
Section 6 : Quid sur les NTIC et l’internet
La télécommunication et son historique
8 -Historique de l’internet
Section 7 : La société malgache vis-à-vis des NTIC
TABLEAU N° 10 :RECAPITULATIF SUR LA PERCEPTION GENERALE DE L’INTERNET.
DEUXIEME PARTIE : DU TREMPLIN DE LA TECHNOLOGIE DE POINTE VERS LA REVOLTE DU PRONÉTARIAT
CHAPITRE 4 : LA CULTURE : UN DETERMINANT NATURELLEMENT RELATIF
Section 8 : Une inflation de définitions
9 -Diachronie de l’épistémologie
10-Différents essais de définition
Section 9 : La société malgache au boulevard de la bousculade culturelle
TABLEAU N° 15 : TYPOLOGIE DES RESIDUS CULTURELS MALGACHES
11-La langue :
12-Les arts.
13-Les patrimoines et les pratiques
TABLEAU N°16:TYPOLOGIE DU PATRIMOINE
CHAPITRE 5 : VERS UNE AUTRE CULTURE UNIVERSALISANTE
Section 10 : De l’explosion technologique vers la mutation des praxis
TABLEAU N° 17 : ETAT DE CONSOMMATION EN TECHNOLOGIE EN 2004
TABLEAU N°18 : FONCTIONS CONTEMPORAINES DE L’INTERNET
14-La communication :
15-Le divertissement :
TABLEAU N°19 : RECAPITULATIF DES OCCUPATIONS ET TYPOLOGIE DES ACTIVITES HEBDOMADAIRES DES ENQUETES PENDANT LES TEMPS LIBRES
16-La santé :
L’économie : le marché et les courses en ligne
L’agriculture :
18-L’éducation
Section 11 : Du déclin du lien social physique vers la création d’intimité virtuelle
19-Généralités
20-Formes du lien social contemporain
CHAPITRE 6 : INTERNET : UNE REALITE MYTHISEE ET/OU UN MYTHE REALISE
Section 12 : La connexion : entre mythe et réalité
Section 13 : Le virtuel comme un palace de déconstruction identitaire
21-La rencontre virtuelle
22-Mariage pour tous
MODELISATION N°1 : EVOLUTION PHILOSOPHIQUE PAR RAPPORT A L’EVOLUTION TECHNOLOGIQUE.
TROISIEME PARTIE : VERS UN MARIAGE CULTUREL ET UNE INCULTURATION RATIONNELLE
CHAPITRE 7 : LA SOCIETÉ CONTEMPORAINE DANS LA NOUVELLE GOUVERNANCE PLANÉTAIRE
Section 14 : De la phagocytose culturelle
Section 15 : …à la gouvernance de la NTICocratie : une nouvelle culture politique.
23-L’instantanéité :
La transparence.
25-Le prix
26-La compétence
MODELISATION N° 2 : DYNAMISME DES REGIMES POLITIQUES DANS LA SOCIETE
CHAPITRE 8 : ANALYSE PROSPECTIVE
Section 16 : Les limites du progrès technologique et la notion de la technophobie.
27-Généralisation de la technophobie
28-Les limites de l’internet
TABLEAU N°20 : INCONVENIENTS DE L’INTERNET SUR LA VIE SOCIOCULTURELLE LOCALE.
ILLUSTRATION N° 3 : TEMOIGNAGE D’UNE ARNAQUE
Section 17 : Vers le dialogue culturel malgacho-occidental
29-De l’inculturation rationnelle
30-Des recommandations polyphoniques
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
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