Ayant déjà fait des recherches en cycle 1 et 3 sur le classement d’animaux en master, j’ai choisi de poursuivre mon travail dans une classe de cycle 2 en m’intéressant plus particulièrement au concept d’algorithme et au rôle qu’il peut jouer dans un classement. Cette recherche est aussi une occasion pour expérimenter la mise en œuvre d’un enseignement sur un algorithme simple du type « si…, alors » au travers de l’étude d’un robot et d’observer ce que les élèves en gardent. En effet, au-delà de la réalisation d’un classement d’animaux, la conscientisation d’un algorithme pourrait peut-être servir dans d’autres apprentissages, je pense notamment à la résolution de problème en mathématiques où l’on demande régulièrement aux élèves d’expliquer leur démarche.
Cadre théorique
Les programmes
Depuis 2016, la compréhension et la réalisation d’algorithme figurent dans les programmes. Il est attendu des élèves de cycle 2 qu’ils programment les déplacements d’un robot ou ceux d’un personnage sur un écran. Pour cela, ils utilisent des repères spatiaux et prennent conscience des relations entre l’espace dans lequel on se déplace et ses représentations. En mathématiques, les élèves de CP et CE1 codent des déplacements à l’aide d’un logiciel de programmation adapté. Au CE2, ils consolident le codage des déplacements à l’aide d’un logiciel. Ils comprennent et produisent des algorithmes simples pour la programmation des déplacements d’un robot ou ceux d’un personnage sur un écran. Cette compréhension d’un algorithme peut donc passer par un robot ou un écran. Cela peut donc se travailler en lien étroit avec le domaine « questionner le monde », qui amène les élèves à se questionner sur le fonctionnement d’un objet technique (Qu’est-ce que c’est ? À quels besoins répond-il ? Comment fonctionne-t-il ?). Il s’agit de résoudre un problème sur le fonctionnement de l’objet présenté.
Toujours d’après les programmes, il est attendu des élèves de fin de cycle 3 qu’ils soient capables de classer quelques animaux en questionnant les critères utilisés. Ce travail permet ensuite de mettre en évidence l’aspect évolutif des espèces et les liens de parentés possibles entre eux.
Il est évident qu’au stade où en sont les élèves de cycle 2, notamment les élèves de CE1, âgés d’environ 7 ans, on ne peut attendre d’eux qu’ils construisent un classement trop complexe. De plus, le Ministère de l’Éducation Nationale précise dans ses documents d’application des programmes de 2002 que l’on n’attend pas des élèves qu’ils connaissent la classification phylogénétique par cœur. En effet, c’est le raisonnement des élèves qui importe.
S’il est attendu en cycle 3 que les élèves positionnent des êtres vivants dans une classification comportant un petit nombre d’ensembles emboîtés, il peut être intéressant de s’essayer à un classement simple par emboîtement dès le cycle 2, c’est-à-dire avec un seul emboîtement, ou autrement dit, avec des sous-groupes mais pas de sous-sousgroupes. Nous y reviendrons dans la partie méthodologie.
Mais qu’est-ce que classer ?
Différents termes utilisés dans notre langage portent à confusion. Françoise Drouard (2010) distingue trois unités de sens à ne pas confondre :
1-Ranger : c’est l’opération qui consiste à organiser ou à sérier des objets selon un ordre croissant ou décroissant à l’aide d’un critère continu (du plus petit au plus grand par exemple) ;
2-Trier : trier revient à déterminer des objets en fonction d’un critère binaire (le critère le plus simple étant “qui a/qui n’a pas”);
3-Classer : classer, c’est établir des regroupements entre des objets sur la base d’un critère donné, afin de former des ensembles qui reflètent une cause sous jacente. Autrement dit, on peut réaliser un regroupement selon un critère commun, mais on ne peut pas regrouper ensemble les éléments qui ne correspondraient pas à ce critère et qui n’auraient rien en commun. On doit alors rechercher un nouveau critère commun. Classer est en fait une succession de tris. C’est ce qui le distingue du terme « trier ». Françoise Drouard le précise dans son écrit : « Le résultat de tris successifs aboutit bien à des classes réelles », mais elle ajoute aussi que le terme classer regroupe une méthode descendante (celle-ci est dite naturelle et basée sur des tris successifs), et une méthode ascendante désignée par le terme grouper. Ce dernier signifie « qu’on établit un classement en procédant par la méthode ascendante en associant des éléments. C’est l’opération inverse de l’opération de tri où l’on partait d’un ensemble constitué qu’on cherchait à analyser en classes (au sens logique) pour finalement aboutir éventuellement aux éléments » (Drouard, 2010, p18).
Au cycle 1, j’ai réalisé un travail avec des élèves de GS en tentant d’élaborer un modèle précurseur, c’est-à-dire, un concept simplifié, adapté au destinataire, préparant les futurs apprentissages sur la classification. La contrainte de temps m’a menée à la construction d’un modèle relativement court ne permettant pas l’élaboration d’un classement par emboîtement, mais plutôt un tri ternaire où il fallait regrouper les animaux selon 3 critères (plumes, poils, écailles). Ainsi les élèves raisonnaient de la manière suivante : Il a … donc il est dans le groupe … . Si des élèves de cycle 1 ont été capables d’effectuer ce classement, c’est qu’ils savaient ce qu’étaient des plumes, des poils et des écailles. Un travail en amont avait donc permis de travailler le vocabulaire nécessaire à l’activité.
En cycle 2, on peut supposer que les élèves seront capables de classer des animaux en utilisant le raisonnement « Il a … donc il est dans le groupe … » à partir du moment où les critères ont bien été définis en amont. Or, si les élèves sont capables d’utiliser ce raisonnement, cela ne veut pas dire pour autant qu’ils ont conscience de la construction et de l’utilisation de celui-ci.
Pour classer, nous avons besoin de savoir catégoriser. Béatrice Maire Sardi (2016), nous explique que « la catégorisation est une compétence cruciale qui permet de regrouper des connaissances, des objets, des animaux, des formes entre eux en les subdivisant en catégories ». Elle justifie l’importance de conscientiser la démarche utilisée par l’élève pour catégoriser en expliquant que « les enfants parviennent à déplacer leur attention de la performance vers la procédure elle-même et ainsi réussissent à expliciter les processus efficaces […] Cette prise de conscience leur permet ensuite de transférer cette procédure à d’autres contextes ». En effet, la catégorisation est utilisée dans de nombreux domaines, dont la grammaire où il faut distinguer les déterminants des verbes, etc. Dans notre cas, apprendre à catégoriser dès le cycle 1 pourrait faciliter les procédures de classement. Or, on peut supposer que classer correspond au fait d’utiliser un algorithme du type « si… alors… ». Par exemple, si j’ai des animaux à classer selon leur régime alimentaire, je vais dire « Si tel animal mange des éléments d’origine végétale, alors il fait partie des végétariens. Si ce végétal est principalement du nectar, alors il fait partie du sous-groupe des nectarivores ». Mais cela suppose peut-être d’avoir d’abord les critères en tête. En effet, sans critère commun défini, on ne peut pas encore passer à l’étape du tri successif.
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Table des matières
Introduction
Cadre théorique
Les programmes
Mais qu’est-ce que classer ?
Définition d’un algorithme
L’obstacle épistémologique
Méthodologie
Panel
Deux séquences en classe
Données recueillies et analyse
Première séquence : Les apprentissages algorithmiques
Deuxième séquence : Classement et procédures de classement
Séance 1 : Le classement
Analyse des raisonnements personnels de chaque élève
Séance 2 : L’écriture de la procédure de classement
Partie 1 : Préparation à l’écriture de la procédure de classement
Partie 2 : L’écriture de l’algorithme par les élèves
Partie 3 : Confrontation des procédures écrites
Partie 4 : Construction d’un algorithme à deux étapes
Résultats et discussion
Les difficultés observées lors de la séquence 2
Les connaissances et compétences acquises par les élèves
Limites
Conclusion
Bibliographie