Aider tous les élèves à comprendre une consigne

La définition d’une consigne

                  Selon le dictionnaire Larousse, la consigne est une « Instruction formelle donnée à quelqu’un, qui est chargé de l’exécuter ». Cette définition implique deux acteurs : un émetteur et un destinataire. L’émetteur formule l’instruction, tandis que le destinataire doit l’exécuter. Cependant cette définition répond à la vie quotidienne, et même si un jour les élèves devront répondre à ce type de consignes au niveau professionnel, on s’intéressera dans cette étude aux consignes dîtes scolaires. On regarde alors comment les didacticiens définissent cette notion :
– Philippe Meirieu écrit dans la préface du livre de Jean-Michel Zakhartchouk que « les consignes constituent la pierre de touche de tout enseignement : elles en sont le mode privilégié de communication ».
– Jean-Michel Zakhartchouk lui-même, dit que la consigne correspond à « toute injonction donnée aux élèves à l’école pour effectuer telle ou telle tâche […]. La consigne s’appuie souvent sur un énoncé explicite, mais les données nécessaires pour l’effectuer sont parfois implicites, d’où la nécessité d’un décodage » (1999, page 18). Il écrit plus tard que « les consignes sont la porte d’entrée de l’apprentissage » (2004, page 95). Ainsi, par définition, la consigne introduit toute tâche scolaire et le professeur les utilise alors tous les jours de façon orale, écrite ou mixte. De plus, elles ne seront jamais utilisées de la même manière entre chaque émetteur, ce qui demande de la part des élèves une adaptation tout au long de la journée : certains vont les répéter ou les reformuler, alors que d’autres vont seulement les écrire au tableau. On peut également relever qu’à l’école les élèves sont confrontés aux consignes par le personnel d’éducation. De façon générale, ce sont bien toutes ces consignes qui régissent la vie scolaire de nos élèves. Par conséquent, pour préciser notre définition, il faut distinguer les consignes qui visent un apprentissage, à celles liées à la vie de la classe ( « Sortez vos cahiers », « Asseyez-vous », …). Dans cet écrit, on s’intéressera particulièrement au premier type de consignes, qui, comme l’énonce Jean-Michel Zakhartchouk, « ont pour objectif de faire apprendre, soit en incitant à la recherche soit en permettant de vérifier les connaissances acquises , soit en faisant s’entrainer, s’exercer les élèves » (2004, page 96). Par ailleurs, on peut observer la présence de l’apprentissage des consignes en mathématiques dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture du cycle 3, plus précisément dans le domaine 4 : « Reformuler en langage courant l’énoncé et les consignes du problème à résoudre ». Pour autant, son apprentissage est laissé de côté par les professeurs. Il semblerait donc intéressant de proposer un temps de travail sur cette notion à tous les élèves, avec pour objectif d’améliorer leur compréhension et de leur construire des outils qui leur permettent d’y répondre. Auparavant, la consigne pouvant avoir plusieurs fonctions ou formes, il revient alors au professeur lui-même de se renseigner sur cette dernière afin de construire des consignes adaptées à ses élèves, sans délaisser son objectif d’apprentissage.

La fonction d’une consigne

                  Pour conclure notre cadre théorique, on va se renseigner sur la fonction d’une consigne. Selon Jean-Michel Zakhartchouk « Toutes les consignes ne sont pas du même ordre. Il est bon pour l’enseignant de savoir les classer selon leur visée, pour ensuite y voir plus clair dans son choix de travaux dans ses évaluations, dans ses visées » (1999, page 32). On peut alors distinguer deux types de consignes qui visent un apprentissage de façon différente :
– La « consigne-but » fixe l’objectif final du travail, sans donner d’indication à l’élève. Il doit donc être capable de lui-même de comprendre le vocabulaire mathématique utilisé (droite, segment, carré,…), de repérer les propriétés apprises à mobiliser et le matériel à utiliser.
– La « consigne-procédure » a contrario précise le cheminement pour arriver à l’objectif final. En géométrie, ces deux types de consignes ont le même objectif de produire une figure, mais cette deuxième va davantage guider l’élève sur la réalisation. Elle est nécessaire en début d’apprentissage, mais limitant l’autonomie de l’élève, elle ne doit pas être systématique au risque de ne plus confronter l’élève à la réflexion. Ce principe s’applique également chez les élèves sourds. En effet, la « consigne-but » « demande aux élèves sourds de prendre des initiatives, d’essayer, de chercher, d’émettre des hypothèses… c’est-à-dire de développer leur autonomie et de s’investir dans une véritable démarche scientifique » (Isabelle Dirx, 2010, page 158). Ainsi, la consigne différera en fonction de l’objectif d’apprentissage. En effet, si ce dernier est de faire chercher l’élève, la consigne ne sera pas la même que si on évalue de façon sommative. Par conséquent, la « bonne consigne » n’existe pas, seuls certains critères peuvent être respectés afin de rendre cette dernière compréhensible. Ces critères peuvent se valider grâce à plusieurs questions :
– Est-ce que telle ou telle difficulté est utile dans la consigne ou peut-elle être éviter ?
– Quel est l’objectif de la consigne (mise en recherche, évaluation, …) ?
– Est-ce que la consigne est compréhensible afin de pouvoir évaluer la notion mathématique mise en jeu ou seule la compréhension de la consigne est évaluée ?
– Doit-elle être décomposée ou explicitée afin d’enlever une difficulté à l’élève ?
– La consigne donne-t-elle des indices sur la forme de la réponse ?
– Combien de temps de recherche doit-on laisser à l’élève et doit-on intervenir ?
Cette dernière question ouvre sur la mise en place de la consigne en classe. En effet, on a vu que l’adaptation des élèves face aux consignes est différente : certains élèves ne perçoivent pas l’objectif d’apprentissage et réalisent alors ce que leur demande la question par contrat didactique, parce que le professeur l’a demandé. D’autres vont se décourager et attendre une aide de la part du professeur. Il semble donc nécessaire de prévoir le déroulement d’une consigne en classe. Selon l’article de Jean-Michel Zakhartchouk, le professeur doit choisir entre des exigences contradictoires :
– soit il laisse l’élève seul face à une consigne complexe afin de permettre un investissement de celui-ci pour apprendre une notion, au risque de décourager certains.
– soit il s’autorise à aider certains élèves afin de leur permettre d’entrer dans la consigne, se donnant alors un rôle trop important dans l’apprentissage de l’élève.
On retrouve ici la notion d’étayage, qu’on peut définir comme l’ensemble des interactions d’assistance du professeur permettant à l’enfant d’apprendre à organiser ses actions afin de pouvoir résoudre seul un problème qu’il ne savait pas résoudre au départ. Cet auteur incite donc l’enseignant à rédiger la consigne en fonction de la tâche demandée. Par conséquent, toute mauvaise compréhension d’une consigne entraine un blocage au développement des compétences mathématiques de l’élève, qui peut alors perdre confiance en ses capacités face à une consigne incompréhensible, et dans le pire des cas se décourager et attendre que la réponse soit donnée lors de la correction. Il parait alors nécessaire que la compréhension des consignes soit un objectif d’apprentissage primordial, afin de pouvoir par la suite réussir les objectifs d’apprentissages liés aux mathématiques, grâce à l’investissement de l’élève dans la tâche demandée. Cette étude autour de la consigne a permis de relever les difficultés à éviter pour privilégier l’apprentissage des mathématiques, mais la rédaction d’une consigne ne peut pas être parfaite malgré la bonne volonté du professeur. Ce dernier pourra prendre en compte les différentes remarques qui ont été faite quant à la forme à privilégier au début des apprentissages, mais aussi concernant la fonction de la consigne. Cependant, une meilleure compréhension des consignes demande un travail du côté des élèves également. La partie suivante s’attache alors à présenter une expérimentation possible en trois étapes qui permet de débuter une réflexion sur l’outil qu’est la consigne avec les élèves.

Analyse a priori de l’activité

                Cette sensibilisation est réalisée au travers d’une activité s’intitulant « Écrire un programme de construction » (Annexe 4), elle-même réalisée lors du quatrième chapitre de l’année : « Utiliser et reconnaître les relations de perpendicularité ». Elle nécessite en prérequis que les élèves sachent reconnaître une relation de perpendicularité et connaissent le vocabulaire géométrique vu lors du deuxième chapitre de l’année. Ils ont par ailleurs la carte mentale de ce chapitre à leur disposition lors de la réalisation de cette activité. Son objectif est d’apprendre aux élèves à rédiger un programme de construction et à les sensibiliser sur l’enjeu d’une consigne. Elle met donc en avant deux compétences mathématiques : communiquer et représenter. Cette activité est basée sur le principe des « figures téléphonées » : au départ, chaque voisin de table possède une figure différente. Ils ont ensuite quinze minutes pour rédiger les consignes qui permettront à leur voisin de construire cette figure de façon identique. On précise dès le début qu’ils doivent « jouer le jeu » et ne pas essayer de regarder la figure de leur voisin, dont le but est justement de la reproduire à l’aide du programme de construction qu’ils rédigent. De plus, aucune communication orale entre voisins ne sera autorisée, et aucune aide ne sera apportée par le professeur. Cependant, cette rédaction étant leur première, l’activité détaille les étapes de construction et donne l’étape initiale (avec les premiers points placés). Cette activité demande donc aux élèves différentes adaptations :
– Ils doivent d’abord reconnaitre la relation de perpendicularité afin de donner cette instruction dans le programme de construction pour que son voisin reproduise la figure à l’identique.
– Les élèves doivent prendre en compte qu’il faut retranscrire les étapes visibles sur leur feuille dans leur programme de construction pour faciliter la lecture de leur voisin : on peut envisager qu’ils donnent une consigne linéaire, étant donné qu’ils préfèrent ce type de consigne d’après le sondage étudié dans la première partie de cet écrit.
– Enfin, il s’agit de leur première rédaction d’un programme de construction, ce qui peut provoquer un blocage chez certains élèves qui ne sauraient pas par quelle information commencer, ou comment construire un tel programme.
Ainsi, les élèves vont faire face à plusieurs difficultés lors de la rédaction du programme, mais aucune n’est induite par la consigne de l’exercice. A contrario, lors de la réalisation du programme, c’est bien la consigne qui peut être un obstacle à celleci. En effet, plusieurs erreurs sont possibles lors de la rédaction de ce programme :
– L’élève peut ne pas donner les étapes dans le bon ordre.
– L’élève peut rédiger son programme sans utiliser le vocabulaire géométrique correspondant. Ainsi, s’il écrit le mot « trait », son voisin ne s’aura pas s’il s’agit d’un segment ou d’une droite. Il y aura alors peu de chance d’obtenir une figure identique à l’originale.
– L’élève peut oublier une information concernant l’instruction qui demande de tracer la droite perpendiculaire. C’est lors de la confrontation de leur résultat qu’ils vont constater que leurs consignes ont pu être vagues. C’est à ce moment que le professeur fera la sensibilisation sur l’enjeu d’une consigne.

Conclusion : ouverture vers une recherche rigoureuse et scientifique

              Les lectures et les expérimentations, étant réalisées dans une seule classe accueillant des élèves sourds au cours de mon année de stage, ne permettent pas entièrement de répondre à la problématique posée au début de cet écrit :Quelle méthodologie développer dans le cadre de l’école inclusive, plus précisément avec des élèves sourds, pour une meilleure compréhension des consignes écrites en sixième ? En effet, on a pu voir que l’enseignement avec des élèves sourds demande une adaptation pour chaque élève en fonction du niveau de surdité, mais aussi en fonction de son environnement et de sa connaissance de la vie quotidienne. Il est donc difficile d’établir une unique méthodologie pour cette diversité de profils, mais une réflexion sur ce sujet semble importante pour appréhender celui-ci. Néanmoins, cet écrit présente des pistes sur l’enseignement des consignes trop souvent oublié dans les apprentissages du collège. On peut retenir que ce travail demande d’être réalisé dans la durée afin d’être efficace. Il nécessite également l’implication des élèves dans la compréhension, mais aussi de l’enseignant qui doit essayer d’éviter tout obstacle non justifié, qui pourrait empêcher l’apprentissage du savoir visé. En effet, la consigne est le moyen de communication entre les élèves et le professeur qui les amène aux savoirs. Il faut donc penser la consigne en fonction de son objectif pour qu’elle soit la plus fructueuse possible, tout en se rappelant que la consigne « parfaite » n’existe pas et qu’il faudra malgré tout accompagner certains élève en fonction de leur profil. Par ailleurs, cet objectif permet de choisir entre les exigences contradictoires qui sont de laisser l’élève seul face à une consigne complexe pour qu’il s’investisse, ou de s’autoriser à l’aider pour lui permettre de réaliser une production. Dans tous les cas, l’objectif semble être le maître mot de la méthode permettant une meilleure compréhension des consignes. Effectuer un travail rigoureux et scientifique demanderait de réaliser un travail dès le début de l’année, avec plusieurs classes incluant des élèves sourds, et à plusieurs niveaux afin de comparer chaque adaptation face aux consignes. De plus, ce travail doit être réalisé sur d’autres séquences que celles de géométrie, contrairement à cet écrit, car chaque chapitre de mathématiques dispose d’un vocabulaire précis et important à comprendre. Enfin, il manque à cet écrit une évaluation sommative qui permettrait d’évaluer la réflexion et l’évolution des élèves sur ce travail. Ce sujet reste donc un travail à réaliser en longueur, avec plus d’expériences professionnelles face aux élèves sourds.

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Table des matières

Engagement de non-plagiat
Remerciements
Introduction : Raison d’être du projet et intentions de l’étude
I – Les premiers constats
I.1. Présentation du contexte d’étude
I.2. L’accueil des enfants sourds en cours de mathématiques
I.3. La lecture des consignes : évaluation diagnostique
II – Le cadre théorique : la consigne
II.1. La définition d’une consigne
II.2. La forme d’une consigne
a) Les consignes écrites ou orales
b) Les consignes linéaires ou globales
c) Les consignes contextualisées
II.3. La fonction d’une consigne
III – Aider les élèves à comprendre la consigne 
III.1. Première expérimentation : l’enjeu d’une consigne
a) Analyse a priori de l’activité
b) Analyse des résultats
c) Conclusion
III.1. Deuxième expérimentation : la compréhension d’une consigne
III.1. Troisième expérimentation : La réponse d’une consigne
a) Analyse a priori de l’activité
b) Analyse des résultats
c) Conclusion
Conclusion : ouverture vers une recherche rigoureuse et scientifique
Bibliographie

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