Aérosols dans l’Arctique européen

Depuis plusieurs décennies, la communauté scientifique s’est mobilisée afin d’étudier et d’évaluer les impacts environnementaux des rejets de polluants dus aux activités humaines dans les différents compartiments de l’atmosphère. Parmi ces différents impacts, allant d’une échelle locale à un point de vue global, l’un des points les plus préoccupants concerne très certainement les possibles changements climatiques liés à l’effet de serre. En effet, les espèces émises ou leurs produits de réaction perturbent différentes composantes du bilan énergétique atmosphérique, aussi bien dans les courtes longueurs d’onde (rayonnement solaire) que dans les grandes longueurs d’onde (rayonnement IR terrestre). Ainsi, des modèles de forçage radiatif sont testés pour le prochain siècle selon divers scénarios d’augmentation des gaz à effet de serre et des aérosols. La communauté scientifique est assez unanime pour admettre que la balance radiative globale penche dans le sens d’un réchauffement planétaire [IPCC, 1996 ; 2000]. Le monde politique, s’appuyant sur ses simulations, essaie de trouver une adéquation entre développement et limitation de la consommation d’énergie comme en atteste la conférence de Kyoto (2000).

L’incertitude la plus importante dans la quantification de ce forçage radiatif est à relier avec les impacts directs et indirects des aérosols [IPCC, 1996 ; 2000]. En effet, d’une part les gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O,…), ayant un temps de vie long, sont répartis de manière quasi-homogène à la surface de la Terre. Les aérosols, au contraire, présentent de grandes hétérogénéités spatiales, temporelles de leur composition, expliquant la difficulté à établir une distribution géographique globale de leurs caractéristiques. D’autre part, les aérosols peuvent agir sur la balance radiative de la Terre soit de manière directe (rétrodiffusion des courtes longueurs d’onde) ou indirecte (changements de concentration des noyaux de condensation nuageuse) [Curry et al., 1996 ; Lohmann et Feichter, 1997 ; Chuang et al., 1997 ; Rotstayn, 1999 ; Williams et al., 2001] et les processus mis en jeu sont souvent mal connus. Finalement, la prise en compte de l’impact des aérosols nécessite la connaissance d’un grand nombre de paramètres. Par exemple, Jacobson [2001] a montré que le forçage radiatif dépendait très fortement de l’état de mélange du carbone suie (interne/externe), et qu’un mélange interne pouvait conduire à un forçage largement positif. Ce résultat va à l’encontre de nombreuses études de modélisation antérieures. Ainsi, une connaissance précise (1) des concentrations des différentes composantes de l’aérosol, (2) des états de mélange entre ces différentes composantes, (3) de leur distribution en taille, (4) de la fonction de grossissement en fonction de l’humidité relative et (5) des propriétés optiques de colonne (épaisseurs optiques) est donc nécessaire pour une modélisation fiable du forçage radiatif aux échelles régionales et globales.

Historique et structure du programme EAAS

La plupart des études menées précédemment à proximité du site de Sevettijärvi visaient à étudier l’impact des émissions de la péninsule de Kola sur la qualité de l’air et des précipitations dans les environs proches de cette région industrielle. Elles concernaient principalement des études d’impact pour une hypothétique défaillance de la centrale nucléaire [Saltbones et al., 2000], pour les émissions gazeuses [Tuovinen et al., 1993 ; Barcan et al., 2000], les émissions de métaux lourds et leur dépôt dans les neiges [Kelley et al., 1995 ; Gregurek et al., 1999] ou alors l’étude de la qualité des neiges dans les alentours de la péninsule de Kola [Reimann et al., 1997 ; De Caritat et al., 1998].

Des études plus poussées en terme de physico-chimie de l’atmosphère et en terme de compréhension des processus intéressant l’aérosol ont été menées par Virkkula et al. [1995 ; 1997 ; 1999]. Dans Virkkula et al. [1999], les auteurs proposent des bilans de masses assez précis de différents constituants de l’aérosol sur des suivis relativement longs (1 an et demi). Ces bilans ne prennent cependant pas en compte la matière carbonée, alors que l’on montrera qu’elle peut être majoritaire en terme de masse . Dans Virkkula et al. [1997], les auteurs ont étudié plus en détail la diffusion par les aérosols et l’ont reliée aux variations des régions sources et à quelques classes de taille des particules. Le programme EAAS se plaçait dans la continuité de ces programmes, avec des développements concernant :

1. le suivi des concentrations en matière carbonée, afin d’établir un bilan de masse plus complet,
2. des mesures détaillées sur les distributions en taille des différentes composantes chimiques de l’aérosol,
3. des suivis en parallèle des concentrations d’espèces gazeuses biogéniques ou non, et
4. des observations sur des propriétés optiques de colonne (épaisseurs optiques).

Ces mesures additionnelles devaient nous permettre de mieux appréhender les caractéristiques globales des aérosols, ainsi que les processus de formation ou de transformation mis en jeu.

Un programme plus ambitieux a été initialement présenté par R Hillamo (FMI, Helsinki, Finlande) en 1995 au 2ème appel d’offre du 4ème PRCD. Il incluait alors un volet supplémentaire de mesures par TDMA (Tandem Differential Mobility Analyser) pour étudier plus en détail les propriétés hygroscopiques des aérosols en fonction de l’humidité relative. Des études par gravimétrie associées aux analyses des espèces insolubles étaient aussi proposées, de même que des investigations plus détaillées sur les cycles du soufre (avec des suivis des concentrations de DMS) et des NOy. Ce programme n’a pas été soutenu par la communauté européenne. Une version réduite de la contribution française a été présentée par JL Jaffrezo à l’IFRTP à l’automne 1996 pour un financement national, avec un partenariat international plus restreint que celui de la version initiale. Ce programme a été financé sur 3 ans (programme 323 à l’IFRTP). Le PNCA (Programme National de Chimie de l’Atmosphère, CNRS, action ‘Impact Climatique des Aérosols’) a soutenu le programme EAAS sur les deux dernières années, en complément de l’IFRTP.

Moyens mis en œuvre durant le programme EAAS

Les mesures en continu 

Les prélèvements maintenus en continu pour caractériser la chimie atmosphérique comprenaient tout d’abord des collectes d’aérosols par impacteurs à deux étages pour la détermination des concentrations des espèces ioniques. Un pas de temps de prélèvement de 48 heures a été maintenu sur l’ensemble du programme . En parallèle, la matière carbonée particulaire (carbone total et carbone organique) était collectée par filtration totale selon un pas de temps de quatre jours (cf annexe 1). Un DOAS (Differential Optical Absorption Spectrometer ; OPSIS 500, [Virkkula, 1997]) permettait de mesurer les concentrations en SO2, H2Ov et ozone selon un pas de temps de 5 minutes [Virkkula et al., 1997]. Enfin, des mesures de 222Rn ont été maintenues sur une large partie du programme [Paatero et al., 1998] avec des pas de temps de 10 min.

Le suivi du nombre de particules en 3 classes de taille (Dp>14nm ; 0.3<Dp<0.5µm, Dp>0.5µm) a été réalisé avec des compteurs de particules CNC (Condensation Nuclei Counter ; CNC : TSI 3760/7610 pour les particules dont le diamètre est supérieur à 14 nm ) et LPC (Laser Particles Counter; LPC : TSI 7430 pour les particules dont le diamètre est supérieur à 0.3 µm) par pas de temps de 5 minutes. Des mesures de diffusion et rétrodiffusion à 450, 550 et 700 nm ont été obtenues par néphélométrie avec un appareil TSI 3653 (décrit en détail dans Bodhaine et al. [1991]) selon un pas de temps 10 min. La mise en place de ces appareillages et les résultats obtenus avant EAAS sont décrits dans Virkkula et al. [1997 ; 1999]. Finalement, des données d’absorption ont été mises en œuvre avec un aethalomètre (AE-10, Magge Scientific) avec un pas de temps d’intégration de 30 minutes [Ruellan, 2000]. Cependant, les données d’absorption décrites dans ce manuscrit ont été obtenues à l’aide des filtres totaux des prélèvements de la matière carbonée sur des pas de temps de 4 jours.

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Table des matières

Introduction
Chapitre I : Présentation du programme EAAS
I.1. Historique et structure du programme EAAS
I.2. Le site d’étude
I.2.1. Situation géographique
I.2.2. Station de prélèvements
I.2.3. Météorologie et circulation générale
I.2.3.1. Circulation générale
I.3.2.2. Principales caractéristiques météorologiques du site
I.3. Moyens mis en œuvre durant le programme EAAS
I.3.1. Les mesures en continu
I.3.2. Les campagnes de terrain
Chapitre II : Suivi des aérosols : des cycles saisonniers aux profils chimiques
Introduction
II.1. Comparaison avec d’autres sites arctiques
II.1.1. Les espèces ioniques majeures
II.1.2. Les acides organiques
II.2. Suivi continu des aérosols
II.2.1. Article 1.
II.2.2. Principaux résultats
II.3. Suivi annuel de l’aérosol submicronique et supermicronique
II.3.1. Répartitions moyennes mensuelles entre fractions sub- et super- microniques
II.3.1.1. Les espèces inorganiques
II.3.1.2. Les acides organiques
II.3.2. L’évolution mensuelle des répartitions en taille
II.3.2.1. Les espèces majoritairement submicroniques
II.3.2.2. Les autres espèces
II.4. Les épisodes de Kola
II.4.1. Les espèces inorganiques
II.4.2. Les espèces organiques
Conclusion
Chapitre III : Distributions en taille et caractéristiques physiques des composantes de l’aérosol
Introduction
III.1. Distributions en taille des espèces ioniques et élémentaires
III.1.1. Article 2.
III.1.2. Principaux résultats
III.2. Influence de la vapeur d’eau sur les distributions en taille
III.2.1. Article 3.
III.2.2. Principaux résultats
III.3. Exemple de mesures pas SMPS
III.3.1. Caractéristiques des mesures par SMPS
III.3.2. L’épisode de Kola du 5 août 1998
III.3.3. L’épisode « biogénique » du 14 Juillet 1998
III.3.4. Quelques observations concernant le carbone suie
Conclusion
Chapitre IV : Les espèces gazeuses et les équilibres entre gaz et aérosols
Introduction
IV.1. Prélèvements et analyses des espèces gazeuses
IV.1.1. Fonctionnement des chambres à brouillard et campagnes de mesures
IV.1.2. Limites de détection
IV.1.3. Efficacité des chambres à brouillard et calcul des concentrations
IV.2. Les partitions entre gaz et aérosols
IV.2.1. Recherche bibliographique sommaire : les sources des espèces gazeuses
IV.2.2. Niveaux de concentrations à Sevettijärvi
IV.2.3. Comparaison avec des études antérieures
IV.2.4. Répartitions moyennes des espèces dans les différentes phases
IV.2.5. Variabilité à court terme des répartitions des espèces entre phases
IV.2.5.1. Le chlore
IV.2.5.2. Le nitrate
IV.2.5.3. Les NHx
IV.2.5.4. Les SOx
IV.2.6. Modélisation des échanges entre phases : le modèle EQUISOLV II (Article 4)
IV.2.7. Principaux résultats
IV.3. Variations de concentrations et sources des espèces gazeuses
IV.3.1. Emissions de Kola
IV.3.2. Co-variations des espèces gazeuses
IV.3.3. Les cycles diurnes des espèces gazeuses
IV.3.4. Concentrations des gaz en fonction de la température et de l’ensoleillement
IV.3.4.1. Acides carboxyliques
IV.3.4.2. Les autres espèces gazeuses
Conclusion
Chapitre V : Propriétés optiques des aérosols : liens avec les caractéristiques physiques et chimiques
Introduction
V.1. Définitions de paramètres et mesures de terrain
V.1.1. Définition des paramètres utilisés dans la suite de ce chapitre
V.1.1.1. Paramètres locaux
V.1.1.2. Paramètres de colonne
V.1.2. Diffusion et rétrodiffusion
V.1.3. Absorption
V.1.4. Epaisseurs optiques
V.2. Moyennes des mesures effectuées sur deux ans
V.2.1. Diffusion et absorption
V.2.2. Comparaison avec des études antérieures
V.2.3. Paramètres secondaires
V.2.4. Epaisseurs optiques
V.2.5. Estimation du forçage radiatif
V.3. Relations entre les propriétés physico-chimiques des aérosols et les mesures
optiques
V.3.1. Relations entre mesures optiques et nombres de particules
V.3.2. Estimation des coefficients de diffusion massique
V.3.3. Comparaison des α calculés avec ceux de la littérature
V.3.4. Coefficient d’absorption massique du carbone suie
V.4. Profils optiques en fonction de l’origine des masses d’air et des saisons
V.4.1. Saisonnalité de la contribution de chaque composante à la diffusion totale
V.4.2. Variabilité des caractéristiques optiques en fonction du type de masse d’air
Conclusion
Table des matières
Conclusions générale

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