Adsorption des ÉTM dans les sols

Territoire d’étude

La région de l’Estrie en raison de son passé industriel et minier constitue un: lieu intéressant pour analyser le comportement des contaminants qui se trouvent encore enfermés dans les rives et les déblais miniers, notamment ceux laissés à l’abandon pendant plusieurs années en bordure de la rivière Massawippi, soit les anciennes mines du Complexe Albert-Capelton-Eustis (Berryman et al., 2003; Melanson, 2006). C’est dans ce cadre que le tronçon de la rivière Massawippi a été retenu pour analyser la dispersion des contaminants le long de l’axe fluvial de cette rivière. Après arrêt des activités minières en 1939, cette zone est restée contaminée par les déblais et les tas de résidus miniers, à potentiel acide, qui sont encore présents sur les sites des anciennes mines de cuivre (Ross, 1974). Les eaux de la rivière Massawippi et la faune benthique (Berryman et al. , 2003) ont aussi été affectées, à divers degrés, par cette pollution qui résulte de ce passé minier. Enfin, on trouve des sédiments contaminés le long des berges de la rivière Massawippi sur plusieurs kilomètres de distance, en particulier le long du tronçon qui longe les anciens sites miniers d’Eustis et Capelton (St-Laurent, 2006; Rahni, 2009; Saint-Laurent et al. , 2010).
Le territoire de l’étude fait partie du bassin versant de la rivière Massawippi (Figure 2.1) qui se trouve dans la zone appalachienne, majoritairement occupée par les zones forestières et agroforestières. Ces zones occupent 75 % du territoire. Les 25 % restants sont partagés entre les basses terres agricoles et les zones urbaines (Cogesaf, 2006).

La rivière Massawippi mesure moins de 15 km et prend sa source dans le lac du même nom et se jette dans la rivière Saint-François à la hauteur de Lennoxville. Elle est alimentée par les eaux de deux affluents, soit la rivière Coaticook à la hauteur de Capelton et celles de la rivière Moe juste en amont de Lennoxville (Berryman et al., 2003). La rivière reçoit également une quantité importante d’eau des ruisseaux Eustis et Capel qui sont eux aussi très contaminés par les métaux lourds (Berryman et al., 2003).
Cela contribue à augmenter le niveau de contamination de la rivière Massawippi. Le tronçon à l’étude comprend le cours inférieur de la rivière Massawippi et s’étend de la mine d’Eustis jusqu’à Lennoxville. Ses berges sont essentiellement composées de sédiments fluviaux (récents ou anciens; MFQ, 1993).

Matériels et méthodes

Choix et échantillonnage des sites contaminés

Les anciens sites miniers du complexe Albert-Capelton-Eustis sont situés près de la ville de Sherbrooke (secteur Lennoxville) dans la région de l’Estrie et ont abrité des activités d’exploitation minière sur une période de près de 70 ans, soit entre 1850 et 1939. Ces activités ont eu un impact majeur sur la dégradation de l’environnement, notamment les sols et la qualité de l’eau de la rivière. Les rapports ministériels sur la qualité des eaux du gouvernement du Québec mentionnent que les eaux de la rivière Massawippi ont subi une forte dégradation suite aux rejets industriels et agricoles (MDDEFP, 2012). En plus de cette contamination liée aux activités minières, d’autres sources polluantes induites par un ou plusieurs déversements accidentels de produits contenants des hydrocarbures sur le site d’Eustis contribuent aussi à cette contamination des berges (St-Laurent, 2006; Rahni, 2009; Saint-Laurent et al., 2010). Ce territoire représente donc un excellent cadre de référence pour analyser les concentrations des contaminants en (ÉTM) des berges, la variabilité spatiale des sédiments contaminés en zone alluviale, ainsi que la persistance de certains métaux lourds (ÉTM) dans les sols alluviaux de la rivière Massawippi.

Pour établir les limites des zones de récurrence d’inondation et nos sites d’échantillonnage, nous avons utilisé les cartes des risques d’inondation (Environnement Canada et MEF, 1982) et principalement des cartes à risques d’inondation de la MRC (Municipalité régionale de comté de Coaticook, 2000). Ces cartes proviennent du Ministère des Affaires municipales et régionales du Québec (MAMR, 2000). Comme la contamination des berges était en partie liée aux débordements périodiques de la rivière Massawippi, nous avons donc choisi les sites situés le long de la rivière en fonction des zones de récurrence d’inondation (intervalles 0-20 ans et 20-100 ans) pour l’échantillonna’ge des profils de sol, et cela sur une distance de plus 10 km, soit quelques kilomètres en amont du site d’Eustis jusqu’à Lennoxville.
Généralement dans les milieux pollués, les plaines alluviales constituent des environnements de stockage des contaminants transportés par les eaux des rivières. La variabilité des sols alluviaux a été caractérisée de façon systématique (morphologie, propriétés physico-chimiques, teneurs en éléments traces métalliques) dans les zones alluvionnaires actives (Saint-Laurent et al., 2010). La sélection des sites et le prélèvement des sols ont été réalisés à l’intérieur des différents milieux riverains préalablement identifiés à partir des cartes de risques d’inondation et des cartes municipales (Environnement Canada et MEF, 1982; Schéma d’aménagement de la MRC de Coaticook, 2007).

La collecte des échantillons de sol a été réalisée à l’intérieur de quadrats d’une superficie de 10 m par 20 m et suivant les différentes zones de récurrence d’inondation et la zone extérieure. Au total, 91 échantillons de sol ont été prélevés: 47 pour les zones de récurrence de 0-20 ans, 21 pour les zones de récurrence 20-100 ans et 23 pour les zones extérieures. Deux sites localisés en bordure de la rivière Saint-François à la hauteur de East-Angus ont été pris comme sites témoins. Dans chaque quadrat, les coordonnées géographiques (UTM) ont été prises par un GPS (Global Positioning System) de type Garmin 60CSx et le prélèvement des échantillons a été effectué à l’intérieur de chacun des quadrats et à des profondeurs situées entre 0 et 100 cm.

D’autres caractéristiques ont été notées dans le quadrat, dont l’épaisseur de la biomasse au sol (litière), la présence ou l’absence d’horizon organo-minéral (Ah), le drainage, la pente, etc. Tous les échantillons de sol ont ensuite été placés dans des sacs en plastique, et identifiés en utilisant une numération par quadrat et en fonction de la profondeur du sol.

Traitements et analyse des échantillons

Traitement des échantillons

Les techniques de traitement des échantillons du sol et les analyses physicochimiques qui ont été utilisées suivent les procédures décrites dans les manuels du Groupe de travail sur la classification des sols (SCCS, 2002) et les normes gouvernementales des guides et manuels d’échantillonnage et d’analyse des sites contaminés (CCME, 1993). Les études antérieures et les critères génériques des guides ont servi pour différencier les niveaux de contamination en fonction du fond géochimique naturel (FGN) (MDDEP, 2004).
Tous les échantillons ont d’abord été placés dans des assiettes en aluminium, séchés à l’air libre pendant deux semaines. Par la suite ils ont été tamisés avec des tamis métalliques (Mckeague, 1978) dans le laboratoire de géomorphologie de l’UQTR.

Chaque échantillon de sol a subi un passage au tamis pour obtenir la granulométrie désirée « 2 mm) pour effectuer les analyses physico-chimiques. Les analyses texturales fmes ont été réalisées à l’aide d’un granulomètre de haute précision (Laser Diffraction Particle Size Analyser) en suivant les classes granulométriques du Système canadien de classification des sols (SCCS, 2002). Pour les teneurs en ÉTM, les analyses ont été effectuées dans un laboratoire externe (Maxxam Analytiques lnc). Celui-ci est spécialisé et équipé d’appareillages de haute précision (ex. spectromètre de masse à source ionisante – lCP-MS). Les données physico-chimiques (COT, CEC, pH, % argiles, etc.) des sols échantillonnés ont été couplées aux données des ÉTM (Cd, Cu, Ni, Pb, Zn). La biomasse au sol (litière) a été mesurée sur le terrain. Les concentrations de matière organique (C.O.%) et le pH des sols ont été faits au Laboratoire des sols de l’Université de Laval. Les analyses granulométriques ont servi pour comparer les différences texturales des horizons du sol en lien avec les concentrations des contaminants (ÉTM).

Analyses statistiques

Les tests d’analyse de la variance (ANOVA), de Student et de Mann-Whitney ont été effectués pour comparer les moyennes des profondeurs et des zones de récurrence des différents secteurs. L’ intervalle de confiance utilisée pour évaluer le degré de précision statistique est de 95 %.
Dans le cas du test Student, nous avons cherché à montrer que la concentration des métaux pouvait être plus élevée dans une zone par rapport à une autre zone (ex. métaux plus concentrés dans la zone de récurrence de 0-20 ans que celle de 20-100 ans). Ainsi, nous posons une hypothèse contradictoire, soit qu’en moyenne, les deux zones contiennent la même quantité de métaux, et que nous allons tenter de rejeter comme hypothèse. Cette analyse statistique se fait en comparant un couple de métal à la fois (ex. cuivre vs plomb). Autrement dit, pour chaque métal étudié, nous confrontons ces hypothèses

Résultats

Les propriétés physiques

Les observations de terrain et l’ analysegranulométrique des sols des berges de la rivière Massawippi montrent que ceux-ci sont composés en grande partie de sédiments fms, tels que le limon et le sable fm ou très fm, avec assez peu d’argile. Dans les horizons de surface du solum, le limon et le sable sont les proportions texturales dominantes (Tableaux 2.1 à 2.3). Dans les couches de surface du sol (0-20 ans), leur pourcentage est respectivement de 64 et 30 % (Tableau 2.1) et dans les couches plus profondes (20-40 cm et 80-100 cm), les pourcentages sont pratiquement identiques, même pour les zones de récurrence de 0-20 ans et de 20-100 ans (Tableau 2.3). En somme, les sols alluviaux de la rivière Massawippi sont composés essentiellement de sédiments fms (sable limoneux ou de limons sableux fins à très fms) avec des matrices relativement homogènes sur l’ensemble des profils examinés. Il faut souligner, toutefois, qu’on observe des matériaux plus grossiers dans les zones extérieures des plaines inondables, notamment des graviers, des sables grossiers, et parfois des pierres qui ont des origines soit glaciaires (tills) ou proviennent d’affleurements rocheux situés à proximité.

La biomasse au sol était relativement faible ou quasi absente dans les zones à forte récurrence d’inondation (intervalle de 0-20 ans), ce qui peut s’expliquer par l’enlèvement de ce matériel organique (litière à la surface) lors des crues, surtout si les courants sont forts (par exemple lors des crues printanières). On note une quantité non négligeable de la biomasse au sol dans les zones de récurrence de 20-100 ans, mais surtout des accumulations nettement supérieures dans la zone extérieure des plaines inondables (Tableau 2.4). Les plaines alluviales soumises à des crues fréquentes se caractérisent donc par une perte de la matière organique au sol qui est vraisemblablement entraînée par les courants lors des crues successives.

Les propriétés chimiques

D’une manière générale, le pH des sols est acide dans toutes les zones de récurrence d’inondation avec une moyenne de 4,3 pour les horizons de surface (Tableau 2.1). Cependant, dans la zone affectée par les inondations fréquentes (intervalle de 0-20 ans), les résultats affichent des valeurs légèrement plus élevées (sols moins acides) avec un maximum de 5,6 et 5,8, et ce, pour les horizons de surface (0-20 cm) (Tableaux 2.1 et 2.2). À titre d’exemple, on note des différences plus marquées en surface. Le caractère plus acide des sols en zones inondées (intervalle de 20-100 ans) et surtout à l’extérieur des plaines alluviales s’explique possiblement par la présence de la litière plus épaisse (surtout dans les zones extérieures) qui entraîne une acidification du sol avec la décomposition de la matière organique. On sait que lors de la décomposition et la minéralisation de la matière organique, les composés organiques libèrent des produits acidifiants (ex. acides fulviques et humiques) qui peuvent contribuer à acidifier le sol de surface (Saint-Laurent et al., 2013a, 2013b; Gervais-Beaulac et al., 2013; Tang et al., 2014).

Les résultats indiquent des faibles taux de carbone organique (C.O.%) et d’azote (N%) des sols alluviaux lorsque nous comparons l’ensemble des données (Tableaux 2.1 à 2.3). Il en est de même dans les couches inférieures (20-40 cm et en profondeur), en particulier dans la zone de forte récurrence d’inondation (Tableaux 2.2 et 2.3). Les faibles taux de carbone organique et d’azote observés en surface ne favorisent pas le développement pédogénétique des sols alluviaux et réduisent leur fertilité. Ce qui se traduit par l’absence d’horizons bien définis, dont les horizons organo-minéral (Lavoie et al., 2006 et Lavoie, 2005).

Distribution verticale

Le test de Mann- Whitney réalisé sur les propriétés des sols et les concentrations des métaux, suivant les différentes profondeurs du profil, a permis de constater des différences marquées entre ces variables (Tableaux 2.5 à 2.8). L’analyse effectuée sur les propriétés granulométriques des différents horizons du sol (0-20 cm, 20-40 cm et 80-100 cm) fournit des valeurs de p=O,998 et p=O,960 pour l’argile et le limon des horizons de surface (0-20 cm), et des valeurs quasi similaires pour les horizons à des profondeurs de 20-40 cm et 80-100 cm, ce qui signifie que les classes texturales de ces horizons sont comparables entre elles, sauf exception (Tableau 2.5). On note, par exemple, des différences entre les horizons de surface (0-20 cm) et les horizons plus profonds (80-100 cm) quant à la proportion des sables.
Pour ce qui est de l’acidité des sols, les valeurs obtenues avec l’analyse statistique n’indiquent pas de seuils significatifs, bien qu’on note une plus forte acidité des sols dans la zone extérieure des plaines alluviales de manière générale.

Pour ce qui est de la concentration des métaux (ÉTM) dans les profils du sol, on note une plus forte abondance dans la première couche de surface. Les valeurs obtenues indiquent que les horizons de surface (0-20 cm) contiennent généralement des concentrations plus élevées en métaux que les horizons inférieurs (20-40 cm et 80-100 cm), à l’exception du plomb et du chrome qui sont plus présents dans les couches inférieures (Tableau 2.6). Toutefois, pour plusieurs métaux, tels que le cadmium, le cuivre et le zinc, les variations des concentrations entre les différentes couches du sol ne sont pas significatives sur le plan statistique (Tableau 2.6).

Distribution horizontale

Le tableau 2.8 montre que le pH est plus élevé (moins acide) dans la zone de récurrence 0-20 ans. Les zones de récurrence 20-100 ans et les zones extérieures affichent cependant des valeurs acides (Tableau 2.8).
En comparant la concentration des métaux dans les différentes zones de récurrence, nous avons fait les constats suivants: la zone de récurrence de 0-20 ans et 20-100 ans n’ont pas de différences considérables en ce qui concerne la quantité moyenne du cadmium, du cuivre, du plomb et du zinc (Tableau 2.8; Figures 2.2 à 2.3).
Le même constat s’applique avec le test de Student et l’analyse ANOVA (Tableau 2.9).

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Table des matières

CHAPITRE 1
INTRODUCTION GENERALE
1.1 Problématique
1.2 Territoire d’étude
1.3 Revue de la littérature
1.3.1 Les éléments traces métalliques
1.3.2 Les sols
1.3.3 Éléments traces dans les sols
1.3.4 Le transport des contaminants
1.3.5 Adsorption des ÉTM dans les sols
1.3.6 La caractérisation et la réhabilitation des terrains contaminés
1.4 Objectifs du projet de recherche
1.4.1 Objectif principal
1.4.2 Objectifs spécifiques
1.5 Approches méthodologiques
1.5.1 Méthodes
1.5.2 Statistiques
1.6 Conclusion
CHAPITRE II
ANALYSE DE LA DISTRIBUTION SPATIALE ET COMPARAISON DE  LA TENEUR EN ÉLÉMENTS TRACES MÉTALLIQUES (ÉTM) DES SOLS ALLUVIAUX DU TRONÇON FLUVIAL DE LA RIVIÈRE MASSA WIPPI, SECTEUR DES MINES D’ALBERT -CAPELTON-EUSTIS (QUEBEC, CANADA)
2.1 Résumé
2.2 Introduction
2.2.1 Territoire d’étude
2.3 Matériels et méthodes
2.3.1 Choix et échantillonnage des sites contaminé
2.3.2 Traitements et analyse des échantillons
2.3.2.1 Traitement des échantillons
2.3.2.2 Analyses statistiques
2.4 Résultats
2.4.1 Les propriétés physiques
2.4.2 Les propriétés chimiques
2.5 Discussion
2.6 Conclusion
2.7 Références
REFERENCES BIBLIOGRAPIDQUES

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