Adhérence médicamenteuse
Adhérence médicamenteuse
L’adhérence à la médication, que l’on peut définir comme la prise de médicaments au bon moment selon le nombre de doses prescrites (Dunbar-Jacob, Bohachick, Mortimer, Sereika, & Foley, 2003) est un facteur important dans le traitement des MCV (Lappé et al., 2004). En effet, de nombreuses études ont fait état des conséquences associées directement au respect ou non de l’adhérence à la médication cardiaque chez les patients présentant une MCV. Une recension des écrits effectuée par McDermott, Schmitt et Wallner (1997) visant à déterminer l’impact de l’adhérence médicamenteuse sur la morbidité et la mortalité de patients à risque ou souffrant déjà d’insuffisance cardiaque congestive ou d’une maladie coronarienne a révélé des résultats significatifs quant à l’impact associé à la prise de médicaments. Des sept études retenues (parmi les 21 études rencontrant les critères d’inclusion), quatre études ont démontré un impact significatif de l’adhérence médicamenteuse sur la survie (McDermott et al., 1997).
Parmi les six études retenues ayant comparé les taux d’admissions en service hospitalier entre les patients adhérents et non adhérents, trois études ont démontré un impact significatif de l’adhérence sur les taux de réadmissions (McDermott et al.).
Hortwitz et al. (1990), dans une autre étude visant à déterminer la relation entre l’adhérence au traitement médicamenteux et la mortalité un an après un infarctus du myocarde, ont identifié la présence d’une différence entre les taux d’adhérence et la mortalité à un an. Les patients qui présentaient une moins bonne adhérence à leur régime médicamenteux (le régime médicamenteux représentant l’ensemble des médicaments qui devaient être pris par les patients selon les intervalles prescrits) étaient 2,6 fois plus susceptibles de mourir durant l’année de suivi que ceux qui présentaient une meilleure adhérence (Hortwitz et al.).
La théorie de l’autodétermination
Tendance innée de développement:
La théorie de l’autodétermination (TAD) présume que tous les individus sont dotés d’une tendance innée, naturelle et constructive à se développer un sentiment d’être (un « self») unifié et élaboré (Deci & Ryan, 2002). En fait, selon la TAD, les individus tendent naturellement, dans cette optique de développement, à établir des connections entre les éléments de leur propre psyché de même qu’avec les individus de leur environnement social.
Facteurs environnementaux:
Les facteurs environnementaux joueraient un rôle déterminant dans la croissance de l’individu. D’après la TAD, les facteurs environnementaux pourraient influencer la tendance innée de croissance de l’individu. En fait, ce serait par leur capacité de soutenir certains besoins psychologiques identifiés comme fondamentaux que les facteurs environnementaux exerceraient leurs influences sur l’individu. Les facteurs environnementaux pourraient soit soutenir, soit entraver les efforts d’intégration de l’individu de ses expériences d’une façon cohérente à ce qu’il est (à son « self») (Deci & Ryan, 2002).
Besoins psychologiques fondamentaux:
La TAD identifie trois besoins psychologiques fondamentaux : les besoins de compétence, d’autodétermination (ou d’autonomie) et d’affiliation. La notion de compétence fait référence au sentiment que possède un individu en regard de sa capacité et de son habilité à réaliser une action. La notion d’autodétermination fait allusion au sentiment que possède un individu lorsqu’il agit selon ses propres intérêts et ses valeurs.
Enfin, la notion d’affiliation réfère au sentiment que possède l’individu d’être relié aux autres et à sa collectivité (Deci & Ryan, 2002).
Appliqué au domaine de la santé, il est possible de définir ces différents concepts de la façon suivante. Le besoin pour le patient de comprendre comment il peut atteindre certains buts fixés pour sa santé et sentir qu’il est en mesure d’effectuer les actions nécessaires pour y arriver ferait référence à la notion de compétence. Le besoin du patient de sentir qu’il a le choix dans les décisions concernant sa santé et qu’il peut agir selon son propre gré à l’égard des buts qui y sont reliés ferait référence à la notion d’autodétermination (ou d’autonomie). Enfin, le besoin du patient de se sentir respecté et apprécié de son médecin et des individus qui lui sont significatifs ferait référence au concept d’affiliation (Sheldon, Williams, & Joiner, 2003).
En résumé, selon la TAD, le soutien des besoins psychologiques fondamentaux de compétence, d’autodétermination (ou d’autonomie) et d’affiliation (assuré par les facteurs environnementaux) serait essentiel pour supporter la croissance unifiée de l’individu (tendance innée à se développer un sentiment d’être unifié et élaboré) et assurer son bien-être. Ces besoins psychologiques fondamentaux peuvent être également soutenus chez des patients souffrant de problématique de santé.
Concept de motivation et types de motivation
En plus de permettre la croissance et le bien-être des individus, le soutien des besoins psychologiques interviendrait à un autre niveau chez l’individu. En fait, la TAD suppose que le soutien des besoins psychologiques influencerait la motivation des individus à l’égard des comportements qu’ils adoptent (incluant les comportements de santé) (Deci & Ryan, 2002; Sheldon et al., 2003). En effet, selon la TAD, c’est le soutien des besoins psychologiques par l’environnement qui déterminerait la qualité de la motivation d’un individu à l’égard de ses comportements.
La motivation, telle que définie par Deci et Ryan (2008), fait référence à ce qui incite les gens à agir, penser et à se développer. La TAD a défini six types de motivation, chacun de ces types faisant référence à un degré d’accord et de cohérence avec les intérêts et les valeurs de l’individu (autodétermination) : l’amotivation, les motivations extrinsèques (quatre types : par régulation externe, par régulation introjectée, par régulation identifiée, par régulation intégrée) et la motivation intrinsèque. D’après la TAD, seulement la motivation extrinsèque par régulation identifiée, la motivation extrinsèque par régulation intégrée et la motivation intrinsèque peuvent vraiment être qualifiées d’autodéterminée
Le continuum d’autodétermination
Comme il a été mentionné précédemment, les six types de motivation font chacun référence à un degré d’accord et de cohérence avec les intérêts et les valeurs de l’individu. En fait, chacun de ces types pourrait être situé sur un continuum. Selon la TAD, les six types de motivation, référant à un certain degré d’autodétermination, peuvent se situer sur un continuum. (Deci, Vallerand, Pelletier & Ryan, 1991; Ryan & Connell, 1989). Sur ce continuum, l’amotivation fait référence au type le moins autodéterminé de motivation (l’individu n’a pas de motivation à effectuer un comportement donné). À l’autre bout du continuum, se trouve la motivation intrinsèque, forme la plus autodéterminée de motivation (l’individu effectue le comportement uniquement pour le plaisir que ce dernier procure). Les autres formes de motivation, que l’on qualifie de motivation extrinsèque par régulation externe, par régulation introjectée, par régulation identifiée et par régulation intégrée se situeraient entre l’amotivation et la motivation intrinsèque sur le continuum. Chacun de ces types de motivation extrinsèque représenterait dans l’ordre et respectivement un degré d’autodétermination de plus en plus élevé.
La validation de ce continuum a été supportée par plusieurs études (voir Vaîlerand,1997, pour une recension complète). Ces études, effectuées dans des domaines particuliers, ont permis de supporter la validité de ce continuum : dans les domaines du sport (Pelletier, Portier et al., 1995), de l’éducation (Ryan & Connell, 1989 ; Vallerand et al., 1993) et des loisirs (Pelletier, Vallerand, Green-Demers, Brière, & Biais, 1995).
La régulation du comportement
La TAD suppose également que différents processus de régulation, reflétant différentes raisons de se comporter et accompagnés d’expériences distinctes, seraient à l’origine des comportements davantage contrôlés et de ceux de nature plus autodéterminée (Williams, Deci, & Ryan, 1998). Les comportements contrôlés et autodéterminés seraient régulés par des processus différents.
Le comportement contrôlé serait régulé par un processus de conformité. L’individu ne ressentirait aucun choix en regard de l’exécution du comportement. Sous l’influence de forces interpersonnelles (p. ex. : opinion des autres) ou intrapersonnelles (p. ex. :conflit générant de l’anxiété) exerçant des pressions sur lui, l’individu aurait le sentiment qu’il doit adopter le comportement.
Le comportement autodéterminé serait régulé par un processus de choix. L’individu s’engagerait alors dans l’action parce qu’il considère cette dernière importante ou qu’elle rejoint ses intérêts (Williams, Deci, & Ryan, 1998). C’est avec enthousiasme et en totale approbation avec cette action que l’individu s’engagerait dans cette dernière.
Bref, c’est la capacité de choisir qui serait à l’origine des comportements de nature plus autodéterminée. Lorsque l’individu a l’impression qu’il n’a pas le choix d’adopter des comportements, ces comportements adoptés seraient de nature davantage contrôlée.
Le soutien aux besoins, dont le besoin d’autonomie, dans l’intégration de la régulation
du comportement, entre autres, dans le domaine de la santé
Le soutien aux besoins, dont le besoin d’autonomie, dans l’intégration de la régulation du comportement, entre autres, dans le domaine de la santé Tel qu’il a été mentionné précédemment, le soutien des besoins psychologiques de base chez l’individu influence sa croissance, son bien-être et sa motivation à l’égard des comportements qu’il adopte. Selon la TAD, le soutien des besoins influencerait également l’intériorisation de la source du contrôle du comportement de même que l’intégration du comportement à la représentation que l’individu se fait de lui-même (Deci & Ryan, 2002). Le sentiment d’être relié aux autres (soutien du besoin d’affiliation) est considéré comme important pour l’intériorisation de la source du contrôle du comportement. Le sentiment que possède un individu à l’égard de sa capacité à réaliser une action (soutien du besoin de compétence) contribuerait également à cette même intériorisation de même qu’à l’auto-régulation ultérieure du comportement (Deci & Ryan). Enfin, le sentiment que possède l’individu d’agir par choix, selon ses intérêts et ses valeurs (soutien du besoin d’autodétermination ou d’autonomie) serait très important pour l’intériorisation et l’intégration du comportement.
La TAD avance que le soutien à l’autonomie (à l’autodétermination) serait une variable critique pour déterminer si l’intériorisation, supportée par le soutien des besoins d’affiliation et de compétence, sera partielle (motivation extrinsèque par régulation introjectée ou identifiée) ou plus complète (motivation extrinsèque par régulation intégrée) (Deci & Ryan, 2002).
Dans le domaine de la santé, îe soutien à l’autonomie a été reconnu comme pouvant être l’élément le plus crucial à considérer par les cliniciens lors de l’adoption de programmes thérapeutiques avec leurs patients (Sheldon et al., 2003). La pratique d’une approche basée sur le soutien à l’autonomie de la part des cliniciens permettrait aux patients de sentir qu’ils sont les agents autonomes de leurs comportements tout en leur permettant de se sentir reliés de façon significative à leur clinicien. Dans un tel contexte, les patients seraient plus susceptibles de fournir des efforts soutenus et de s’engager dans des comportements de santé, conduites nécessaires à l’expérimentation d’un sentiment de compétence à l’égard de ces comportements. Les patients seraient également plus en mesure d’intérioriser graduellement les comportements de santé à prime abord « non plaisants », bref, de s’approprier davantage les motivations extrinsèques (Sheldon et al.).
Plusieurs études, présentées ci-dessous, ont permis de supporter le rôle du soutien à l’autonomie, de la motivation autodéterminée et du sentiment de compétence dans la susceptibilité des patients d’adhérer à différents comportements de santé à long terme.
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Table des matières
introduction
Contexte théorique
Adhérence médicamenteuse
Définition et conséquences associées
Variables associées à l’adhérence médicamenteuse
Variables sociodémographiques
Variables relatives au traitement médicamenteux
Variables relatives à la maladie cardiovasculaire
Variables relatives au donneur de soins
Variables psychologiques
Variables physiologiques et psychosociales
Variables autres et diverses
La théorie de l’autodétermination
Tendance innée de développement
Facteurs environnementaux
Besoins psychologiques fondamentaux
Concept de motivation et types de motivation
L’amotivation
La motivation extrinsèque par régulation externe
La motivation extrinsèque par régulation introjectée
La motivation extrinsèque par régulation identifiée
La motivation extrinsèque par régulation intégrée
La motivation intrinsèque
Le continuum d’autodétermination
La régulation du comportement
Le soutien aux besoins, dont le besoin d’autonomie, dans l’intégration de la régulation du comportement, entre autres, dans le domaine de la santé
Études dans le domaine de la santé et la théorie de l’autodétermination
Les comportements alimentaires
Le contrôle du diabète
La cessation tabagique
L’adhérence à un programme de traitement pour la dépendance
L’adhérence au traitement médicamenteux
Résumé de la problématique de recherche : La théorie de l’autodétermination et l’adhérence au traitement médicamenteux chez une population souffrant d’une maladie cardiovasculaire
Objectifs de recherche
Hypothèses de recherche
Méthode
Participants
Instruments de mesure
Questionnaire
Informations démographiques
Historique médical et cardiovasculaire
Le soutien de votre entourage
Sentiments de compétence à la prise de médicaments
Motivation spécifique(autodéterminée) à la prise de médicaments
Adhérence à la médication
Déroulement de la collecte de données
Stratégies d’analyses envisagées
Résultats
Analyses préliminaires
Analyses principales
Discussion
Bref rappel des objectifs de recherche
Présentation sommaire des résultats
Discussion des hypothèses de recherche et des autres résultats
Première hypothèse
Deuxième hypothèse
Troisième hypothèse
Quatrième et cinquième hypothèses
Autres résultats
Forces et limites de l’étude
Implications de l’étude et recherches futures
Conclusion
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