Le travail de mémoire fait partie des exigences de certification de la formation d’enseignants de la HEP-BEJUNE. J’ai décidé de profiter de cette opportunité pour étudier un sujet qui me serait utile dans ma vie professionnelle. Rapidement, j’ai eu l’envie de m’intéresser aux élèves présentant une dyslexie. J’ai choisi ce thème, car lors de mes stages pratiques, l’étiquette « dyslexique » était fréquemment utilisée par les enseignants dès qu’un enfant présentait quelques problèmes de lecture ou d’orthographe. Il me semblait nécessaire d’approfondir ce que ce terme englobait précisément. De plus, j’apprécie beaucoup la didactique du français et, plus particulièrement, celle de l’apprentissage de la lecture, qui relève d’un défi primordial dans l’enseignement quand on apprend que 10 % des adultes suisses ont des difficultés à lire et à comprendre un texte de la vie de tous les jours (« La Suisse compterait 800 000 illettrés », 2014). Tous ces éléments de réflexion mis bout à bout m’ont convaincue d’étudier de plus près la problématique de la dyslexie.
Aujourd’hui, malgré une littérature abondante sur ce trouble, il me semble qu’il reste toujours des confusions entre les différentes appellations « dys ». Il y a aussi une tendance à parler de dyslexie alors que le diagnostic n’est pas toujours posé. En effet, certaines difficultés liées au cheminement de l’apprentissage de la lecture pouvant susciter le doute, ne sont parfois que de simples difficultés d’apprentissages normales du cheminement vers la lecture.
L’estime de soi est un aspect important dans le développement de l’être humain. Or, certains élèves confrontés à leurs difficultés perdent totalement confiance en eux, comme j’ai pu le remarquer lors de mes stages. J’ai donc l’espoir qu’en comprenant mieux la problématique de la dyslexie, en clarifiant les différents aspects de la prise en charge de celle-ci, je serai plus à même de proposer un encadrement propice à l’épanouissement de chaque élève, par une attitude empathique et créative ainsi que par la mise en place d’une différenciation pédagogique adéquate et individualisée.
Un bref historique ainsi qu’une définition de la dyslexie me paraît opportun avant d’entrer dans le vif du sujet. En 1865, des études sur les troubles du langage menées par Broca en France et par Wernicke en Allemagne en 1874, ont permis d’établir que le langage dépendait de zones spécifiques de l’hémisphère gauche du cerveau (Sprenger-Charolles, 2003). En 1887, le terme dyslexie est inventé par Rudolf Berlin (Macaluso, 2013). En 1892, un neurologue français du nom de Dejerine parle lui, de « cécité verbale congénitale » pour décrire les troubles de la lecture survenant chez l’adulte à la suite d’une lésion cérébrale (Sprenger-Charolles). En 1896, W. Pringle-Morgan a étudié le premier cas d’un enfant avec dyslexie appelé Percy (Duvillié, 2004). Cet enfant avait 14 ans et aurait pu, selon son professeur, être le meilleur élève de sa classe s’il n’y avait eu que de l’oral. Ce garçon présentait tous les symptômes de la dyslexie (Duvillié, 2004). D’autres cas du même type ont également été répertoriés à la fin du XIXe siècle par J. Hinshelwood, qui parlait d’une mémoire visuelle faible des lettres et des mots (Mandal). A partir du XXe siècle, les études sur la dyslexie se sont développées et généralisées en Europe et aux Etats-Unis. Dans les années 30, c’est au Danemark que le premier centre de diagnostic et d’enseignement pour dyslexiques a été créé (Sprenger-Charolles, 2003). Dans les années 1990, en Suisse romande, une association pour la reconnaissance des troubles dys s’est créée. Ce groupement « Association dyslexie suisse-romande » (ADSR) a été constitué suite à l’initiative de parents d’enfants souffrant de troubles « dys ». Sa mobilisation et son travail sur plusieurs années ont sans doute eu une influence non négligeable sur la mise en place de l’arrêté cantonal du canton de Neuchâtel qui a vu le jour en 2014 (Woringer & Bauwens, 2010).
Explication de l’arrêté
Selon l’arrêté du Conseil d’Etat de la République et Canton de Neuchâtel (2014) relatif aux adaptations à mettre en place pour les élèves à besoins éducatifs particuliers (BEP), les enseignants doivent intégrer dans leur pratique pédagogique des aménagements personnalisés et différenciés. En d’autres termes, ils doivent mettre en place de nouveaux éléments afin d’aider au mieux les écoliers en difficulté d’apprentissage .
Cet arrêté me sert donc de point d’ancrage pour mieux comprendre ces processus d’aménagements auxquels sont soumis les professionnels. Il me permet d’élaborer ma recherche qui s’intéresse plus spécifiquement aux adaptations proposées pour les enfants présentant une dyslexie dans les degrés de 5 et 6H. J’espère découvrir des ressources pédagogiques innovantes sur lesquelles je pourrai m’appuyer dans mon futur emploi.
Définition de la différenciation pédagogique, des adaptations, des ajustements et des aides pédagogiques
Il s’agit ici de préciser le lexique de ces quatre termes afin d’en clarifier la compréhension et de permettre au lecteur de savoir exactement de quoi on parle. La différenciation pédagogique se définit comme le : Résultat des efforts déployés par les enseignants ou d’autres acteurs scolaires pour tenir compte des diverses caractéristiques des apprenants en salle de classe (volonté, intérêts, profil d’apprentissage, etc.). La différenciation peut porter sur quatre aspects principalement : 1) le contenu d’apprentissage, 2) le processus d’apprentissage, 3) la production escomptée de la part de l’élève et 4) l’environnement d’apprentissage (Massé, 2001, cité par Rousseau, 2010, p. 452) En d’autres mots, « différencier un enseignement, c’est offrir des projets différents, des objectifs appropriés et des itinéraires diversifiés à des sujets les plus divers, pour leur permettre l’accès à l’autonomie intellectuelle » (Danvers, 1992, p. 80).
Il existe deux types de différenciation pédagogique décrits par Gillig (1999) : la différenciation successive ou alternative et la différenciation simultanée. La première « consiste à faire alterner différentes situations d’apprentissage correspondant aux capacités des apprenants sans modifier fondamentalement le déroulement de la classe et dans le cadre d’une séance commune à tous » (Gillig, 1999, p. 60). Les consignes, les supports utilisés, les outils, etc. varieront. L’enseignant reste maître des opérations. En effet, « le pédagogue conserve la direction du processus pédagogique, mais introduit la flexibilité dans son déroulement, faisant alterner les démarches correspondant au mieux aux capacités de chaque apprenant » (Gillig, 1999, p. 60). Avec cette méthode de différenciation, les objectifs sont les mêmes mais les chemins pour y parvenir sont différents pour chaque individu.
La seconde façon de différencier est dite simultanée. « L’idée est plus complexe. L’idée de simultanéité signifie qu’au même moment les élèves sont occupés à des tâches différentes […] » (Gillig, 1999, p. 61). L’idée de cette différenciation est que chaque élève a en sa possession un plan de travail individualisé, dans lequel il avance à son rythme, et coche les activités réalisées. Dans cette manière de procéder, les mises en situation, les démarches et les objectifs sont différents pour chaque élève. Il est important de savoir que les deux types de différenciation peuvent être utilisés en alternance.
Les adaptations, quant à elles, sont des modifications apportées à l’enseignement pour certains élèves : elles représentent « l’ensemble des modifications requises pour harmoniser les finalités, buts, objectifs, processus, produits, caractéristiques individuelles, en vue de favoriser le développement optimal du potentiel humain » (Legendre, 1993, p.20). Les ajustements consistent en plusieurs éléments mis ensemble. En d’autres mots, on parle d’ajustements lorsque plusieurs adaptations sont fournies (Legendre, 1993). Tout cela est accompagné d’aides pédagogiques. Celles-ci comprennent « tous les moyens matériels, les outils, les supports qu’un formateur peut utiliser » (Legendre, 1993, p. 32).
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Table des matières
CHAPITRE 1. PROBLEMATIQUE
1.1 DEFINITION ET IMPORTANCE DE L’OBJET DE RECHERCHE
1.1.1 Historique
1.1.2 Explication de l’arrêté
1.2 ETAT DE LA QUESTION
1.2.1 Définition de la différenciation pédagogique, des adaptations, des ajustements et des aides pédagogiques
1.2.2 Concept et définition de la dyslexie
1.2.3 Les trois sortes de dyslexie
1.2.4 L’enseignement différencié
1.2.5 Les procédures de lecture
1.2.6 La conceptualisation verbale et non verbale
1.2.7 Les méthodes d’apprentissage en français
1.2.8 Reconnaissance et compréhension des mots en lecture
1.2.9 Les difficultés des élèves dyslexiques en 5 et 6H
1.2.10 Les stratégies de compensation mises en place par un élève avec dyslexie
1.2.11 L’effet domino
1.2.12 Les domaines scolaires touchés par la dyslexie
1.2.13 Quelques mesures d’interventions pédagogiques en lien avec la dyslexie
1.3 QUESTIONS ET OBJECTIFS DE RECHERCHE
CHAPITRE 2. METHODOLOGIE
2.1 LES FONDEMENTS METHODOLOGIQUES
2.1.1 Type de recherche
2.1.2 Type d’approche
2.2 LA NATURE DU CORPUS
2.2.1 Récolte de données
2.2.2 Type de démarche
2.2.3 Protocole de recherche
2.2.4 Le guide d’entretien
2.2.5 Le déroulement de l’entretien
2.2.6 L’échantillonnage
2.3 LES METHODES ET/OU TECHNIQUES D’ANALYSE DES DONNEES
2.3.1 Transcription et traitement des données
2.3.2 Méthodes et analyse
CHAPITRE 3. L’ANALYSE ET L’INTERPRETATION DES RESULTATS
3.1 PRESENTATION ET ANALYSE DES DONNEES RECUEILLIES
3.1.1 Choix du support de présentation
3.1.2 Sensibilisation à la dyslexie
3.1.3 Connaissance de la dyslexie liée à la présentation d’un élève avec dyslexie
3.1.4 Les difficultés dans les autres branches
3.1.5 Faut-il donner le même enseignement à tous les élèves?
3.1.6 L’enseignement de la lecture
3.1.7 La différenciation
3.1.8 Les évaluations
3.1.9 Les aides, les adaptations mises en place par les enseignants
3.1.10 Le ressenti des enseignants face à leurs adaptations
3.1.11 Commentaires sur les résultats
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