Activité d’un insecticide organophosphoré (Actara)

A’ujourd’hui plus que jamais, la protection de la santé et le respect de l’environnement font parti des préoccupations de l’homme qui est confronté chaque jour à de nouveaux dangers. Le développement de l’activité humaine a été accompagné par une altération des ressources naturelles et une perturbation des différents écosystèmes. Compte tenu de son statut de réceptacle final, le milieu aquatique regroupe les écosystèmes les plus touchés, directement ou indirectement, par les effets délétères des polluants. La pollution des milieux aquatiques s’est amplifiée dans la seconde moitié du XXème siècle avec notamment une urbanisation croissante et le développement des activités industrielles et agricoles. Les pollutions occasionnées par les activités agricoles induisent généralement une diminution de la biodiversité, une banalisation du milieu, voire même la destruction de certains maillons des écosystèmes. Depuis la révolution verte qui a débuté dans les années 60, les pesticides font partie intégrante du système agricole. Ils sont devenus le principal moyen de lutte contre les organismes nuisibles. Leurs utilisations abusives ont entraîné des effets néfastes sur la faune et la flore. Les insecticides organophosphorés (POS) sont des pesticides de seconde génération. Bien que moins persistants que les organochlorés, ils sont cependant beaucoup plus toxiques. Ces dérivés de l’acide phosphorique sont neurotoxiques et regroupent les pesticides les plus toxiques pour les mammifères (Regnault & Roger, 2005). Les organophosphorés agissent en perturbant la transmission de l’influx nerveux ; ils ont comme cible les synapses où ils inactivent l’enzyme acétylcholinestérase et empêchent ainsi la dégradation de l’acétylcholine (Regnault & Roger, 2005). Ce neurotransmetteur s’accumule donc dans les synapses et provoque une hyperexcitation qui conduit à la mort. La persistance couplée au caractère lipophile des organophosphorés a contribué à leur bioaccumulation dans la faune à travers la chaîne alimentaire (Wiberg et al., 2000). La détection de ces insecticides au niveau de plusieurs écosystèmes a été rapportée par plusieurs études récentes (Xue et al., 2005 ; Connor et al., 2007).

L’étude des polluants et de leurs effets sur les écosystèmes a donné naissance à une discipline récente qu’est l’écotoxicologie dont le développement est consécutif à l’augmentation des rejets et des accidents dus à l’intensification des activités anthropogéniques (Valavanidis et al., 2006). De nombreuses études ont été réalisées dans notre laboratoire concernant l’impact de ces composés toxiques sur plusieurs organismes visés, spécialement, sur des insectes à intérêt agronomique, tels que Tenebrio molitor et Ephestia kuehniella (Soltani et al., 2002 ; Taïbi et al., 2003; Amrani et al., 2004; Soltani-Mazouni et al., 2004; Aribi et al., 2006; Chebira et al., 2006; Berghiche et al., 2008; Khebbeb et al., 2008), Apis mellifera (Achou & Soltani, 1997; Barour et al., 2005 ; Loucif-Ayad et al., 2008) et Lymantria dispar (Ouakid et al., 2005); à intérêt médical, chez la blatte germanique Blattella germanica (Habes et al., 2006; Kilani-Morakchi et al., 2006, 2009), les moustiques du genre Culex (Rehimi & Soltani, 1999; Boudjelida et al., 2006; Tine-Djebbar & Soltani, 2008 ; Alouani et al., 2009; Bouaziz et al., 2011 ; Rehimi et al., 2011), ainsi que sur des espèces non visées telles que le myriapode Eupolybothrus nudicornis (Daas et al., 1996, 2007), le poisson Gambusia affinis (Drardja-Beldi & Soltani, 2003 ; Soltani et al., 2008 ; Chouahda & Soltani, 2009, 2010 ; Chouahda et al., 2007, 2010; Zaidi & Soltani, 2010, 2011), la crevette Penaeus kerathurus (Soltani & Bezzazel, 2002 ; Morsli & Soltani, 2003 ; Lechekhab & Soltani, 2009).

Aujourd’hui, deux approches complémentaires sont utilisées comme indicateurs de pollution : les biomarqueurs et les bioindicateurs (Valavanidis et al., 2006). Les biomarqueurs permettent de détecter les pressions environnementales dans un milieu donné avant même que les effets néfastes se fassent sentir au niveau des organismes (Den Besten et al., 2001). Les cholinestérases (ChEs) et la glutathion S transférase (GST) ont été largement utilisées comme biomarqueurs environnementaux chez différentes espèces (Payne et al., 1996 ; Flammarion et al., 2002 ; Corsi et al., 2003). L’AChE constitue en effet la cible privilégiée de certains insecticides (organophosphorés, carbamates), herbicides et autres molécules neurotoxiques dont les métaux lourds, surtout utilisée en milieu marin (Galgani & Bocquené, 1998), l’inhibition de l’activité de l’AChE s’est également révélée intéressante dans le cadre d’étude de la qualité des milieux aquatiques continentaux (Payne et al., 1996 ; Flammarion et al., 1998 ; Sturm et al., 1999 ; Barra et al., 2001). L’activité de l’AChE peut également être modulée par la température du milieu, et certains facteurs intrinsèques, tels que la taille des organismes, peuvent être à l’origine des différences d’activités observées (Flammarion et al., 2002).

Les GSTs sont des enzymes de métabolisation de phase II sont plus particulièrement impliquées dans les créations de conjugaison avec l’ion glutathion fournissant aux xénobiotiques un caractère plus hydrophile qui facilite leur élimination hors de l’organisme (Haubruge & Amichot, 1998). Ces enzymes sont présentes sous plusieurs isoforme dont certaines sont inductibles par les contaminants qu’elles détoxiquent. Cette particularité en fait une activité intéressante en tant que biomarqueurs de contamination par des molécules de type HAP, PCB et pesticides (Narbonne et al., 1991). Le glutathion réduit (GSH) intervient notamment dans la détoxification des xénobiotiques en neutralisant divers produits du stress oxydant grâce à son potentiel réducteur mais également dans la prolifération cellulaire et la régulation de l’apoptose (Sies, 1999; Dringen, 2000). Une baisse du taux de GSH peut être considérée comme un indicateur de toxicité via l’induction d’un stress oxydant. Le GSH fonctionne comme un antioxydant en bloquant les radicaux donnant l’oxydation du GSH en glutathion disulfide (GSSG).

Plusieurs espèces sont utilisées en prenant en compte les différents niveaux trophiques. Ces espèces sentinelles doivent en outre être sélectionnées au sein de communautés biocénotiques sur la base de leur pertinence vis-à-vis des types de biomarqueurs choisi ainsi que leur praticité expérimentale (Suter, 2005). De nombreuses espèces de poissons répondent a ces deux critères, dans l’optique d’une évaluation de la qualité des écosystèmes (Van Der Oost et al., 2003). Parmi eux, Gambusia affinis (Baird & Girard, 1853) (Cyprinodontiforme : Poeciliidae) est un poisson larvivore d’eau douce ; il est d’après Wilson (1965) et Garcia (1983) le prédateur naturel des moustiques le plus répandu et utilisé pour cela dans la lutte antipaludéenne (Farley & Younce, 1979; Lichtenberg & Getz, 1985 ; Zaidi & Soltani, 2011). C’est un modèle très utilisé dans les études éco-toxicologiques pour évaluer les risques environnementaux des xénobiotiques (Mulvey et al., 1995; Dréze et al., 2000; Tatara et al., 2002). Ainsi, des insecticides organophosphorés ont été testes sur des enzymes cibles chez G. affinis afin d’expliquer leur différence de toxicité (Chouahda et al., 2010) .

Matériel et Méthodes

Présentation de l’espèce utilisée

Gambusia affinis (Baird & Girard, 1853) est un poisson ovovivipare, originaire des eaux douces du Sud-Est des États-Unis d’Amérique ; il s’est implantée en région méditerranéenne suite à des introductions pour lutter contre les larves de moustique vecteurs du paludisme (Allardi & Keith, 1991), capable d’éradiquer les moustiques du fait qu’il consomme de 42 à 167% de son poids par jour (Chipps & Wahl, 2004). Son régime comporte des petits crustacés, du zooplancton, divers mollusques et arthropodes aquatiques, des débris, des juvéniles de poissons (y compris de sa propre espèce), et des moustiques gobés surtout au moment de l’émergence de l’imago (Fraval, 2002).

Selon Cadwallader & Backhouse (1983), le corps de la gambusie est petit et trapu, le dos un peu arqué en avant de la nageoire dorsale, la tête est grande avec une surface supérieure aplatie. Une bouche petite, tournée vers le haut, avec une bande de petites dents sur les deux lèvres. Les yeux sont larges et positionnés prés du profil dorsal, la nageoire dorsale a des petites taches noires, et la nageoire caudale possède plusieurs lignes indistinctes de croix noires, la nageoire anale est très différente entre les femelles et les mâles. Les gambusies sont capables de changer de couleur en changeant le niveau d’agrégation des pigments de mélanine dans les chromatophores pour s’adapter à la couleur de son environnement (Pyke, 2005) .

Sa position systématique, selon Grasse (1958) est la suivante :

Embranchement : Vertébrés
Classe : Poissons
Sous classe : Téléostomes
Super ordre : Téléostéens
Ordre : Cyprinodontiformes
Famille : Poeciliidae
Genre : Gambusia
espèce : affinis (Baird & Girard, 1853)

Ce poison non-migrateur vit en eau douce et saumâtre, avec une gamme de pH de 6,0 à 8,0 et le plus souvent à des températures entre 12 à 29° C (FishBase, 2003). Il est relativement robuste et résistant aux changements environnementaux (Daradja-Beldi, 1993), survivant dans les eaux avec peu d’oxygène, dans des salinités élevées et des températures allant jusqu’à 42° C pour de courtes périodes (Mc Cullough, 1998). Les gambusies sont plus abondantes dans la partie inférieure des cours d’eau. Lors d’expériences en laboratoire, il a été montré que les variables d’habitat les plus importantes pour la gambusie sont l’eau calme et un couvert végétal immergé assez dense (Pyke, 2005).

La gambusie possède un dimorphisme sexuel se caractérisant par une différance de taille très nette à l’état mature (Fig.1). Les mâles croissent à 40mm de longueur, tandis que les femelles atteignent 70mm de long (FishBase, 2003). Lorsque le mâle arrive à la maturité sexuelle, les rayons de la nageoire anale s’enroule et se transforme en organe copulateurs : le gonopode (Fig.1), il est utilisé lors de l’accouplement pour une fertilisation interne (Turner, 1941) ; par contre, chez la femelle, la nageoire anale reste inchangée et est de forme arrondie.

Leur mode de reproduction est ovovivipare, la femelle est reconnue par la tâche noire sombre au-dessus du corps et qui correspond à l’ovaire (Chambolle, 1970). La fécondation est interne et associée à une gestation intra-folliculaire au sein de l’ovaire (Constantz, 1989). La durée de la gestation est assez variable, elle varie entre 25 et 35 jours (Dradja-Beldi 1993). Les femelles ont la capacité de stocker le sperme dans le repli de l’épithélium ovarien et de le disperser pour une nouvelle fécondation sans l’implication des mâles (Robbins et al., 1987 ; Haynes, 1993 ; Chambolle, 1970). Leur survie est très longue puis qu’une femelle peut être l’objet de 4 à 5 gestations successives sans nouvelle insémination (Chambolle, 1973). La taille des portées est généralement autour de 60 jeunes, mais les femelles peuvent transporter plus de 300 alevins (McDowall, 2000).

Les adultes mâles atteignent la maturité sexuelle au bout de quatre semaines, par contre six semaines pour les adultes femelles (McDowall, 2000). Wurtsbaugh & Cech. (1983) ont observé chez G. affinis une relation linéaire croissante entre la température de l’eau et la croissance jusqu’ à 30°C. Au dessus de 35°C, la croissance est ralentie. Aussi, l’augmentation de la densité des poissons semble freiner la croissance (Busack & Gall, 1983).

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Table des matières

1. Introduction
2. Matériel et Méthodes
2.1. Présentations de l’espace utilisée
2.2. Technique d’élevage
2.3. Insecticide et traitement
2.4. Tests de toxicité
2.5. Prélèvement des organes
2.6. Techniques biométrique
2.7. Activités enzymatiques
2.7.1. Dosage du glutathion
2.7.2. Dosage de l’acétylcholinestérase
2.8. Extractions et dosage des acides nucléiques
2.8.1. Dosage de l’ADN
2.8.2. Dosage de l’ARN
2.9. Extractions et dosage des protéines
2.10. Analyses statistiques
3. Résultats
3.1. Toxicité aigüe de l’Actara
3.2. Effet de l’actara sur les indices métriques
3.3. Effet de l’actara sur les biomarqueurs
3.4. Effet de l’actara sur la reproduction
4. Discussion
4.1. Toxicité de l’actara
4.2. Effet sur les indices métriques
4.3. Dosage des biomarqueurs
4.4. Effet sur les acides nucléiques et les protéines
5. Conclusion et perspectives
6. Résumes
7. Références bibliographiques

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