ACFA : étiologies et prise en charge

ACFA : étiologies et prise en charge

L’arythmie complète par fibrillation auriculaire (ACFA) est une arythmie cardiaque supraventriculaire, caractérisée par une activité électrique anarchique et totalement désynchronisée des myocytes atriaux. Elle constitue l’arythmie la plus fréquente en pratique clinique et sa prévalence augmente avec l’âge. Le diagnostic positif de cette arythmie est relativement facile mais sa prise en charge reste complexe. L’ACFA peut être à l’origine de complications graves hémodynamiques et thromboemboliques. La prise en charge de l’ACFA vise sa réduction ou le ralentissement de la fréquence cardiaque, la recherche d’une étiologie curable et la prévention des complications thromboemboliques. De nombreux travaux ont été réalisés, des guides de bonne pratique ont été publiés afin de codifier la prise en charge de l’ACFA. Ce travail de thèse développe une réflexion sur l’applicabilité de ces recommandations à la population marocaine en prenant en compte les limites du terrain.

Electrocardiogramme :

– Les tracés de l’électrocardiogramme (ECG) réalisés sont caractérisés par une activité atriale rapide et irrégulière. Cette activité atriale est représentée par les ondes F ; qui sont des trémulations de la ligne isoélectrique qui remplacent les ondes P. La forme, l’amplitude et la régularité de ces ondes F varient d’un patient à l’autre.
– Dans 3% des cas une activité organisée de type Flutter a été notée avec des ondes F de grande amplitude en dents de scie à environ 270 cycle/min.
– La moyenne de la fréquence cardiaque est de 113 bat/min avec des extrêmes de 50 et 175 bat/min.
– L’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) est retrouvée chez 22% (n=22) des patients.
– Dix pourcent (n=10) de nos patients ont une hypertrophie ventriculaire droite (HVD) sur l’ECG.
– Un trouble de repolarisation est retrouvé chez 10% des cas. les anomalies de repolarisation détectées sur les tracés d’ECG réalisés correspondent à des cardiopathies ischémiques : 6% des patients ont un sous décalage du segment ST, 4% présentent une surélévation du segment ST et des ondes T négatives sont trouvées chez 3% de cas.
– Dans 3% des cas, on note la présence de l’onde Q de nécrose d’un infarctus de myocarde (IDM) inféro-latéral ancien.
– Un trouble de conduction est retrouvé chez 16% des cas, réparti entre 9% de bloc de branche gauche complet, 8% de bloc de branche droit.

Traitement anti thrombotique :

La stratégie suivie dans le choix du traitement anti thrombotique dépend initialement du type de l’ACFA : valvulaire ou non valvulaire.

a. ACFA valvulaire : Les patients qui présentent une fibrillation auriculaire valvulaire constituent 35% de l’échantillon étudié. Tous les patients ont été mis sous anti vitamine K (AVK) au long cours avec une valeur International Normalized Ratio (INR) cible incluse entre (2 – 3) et entre (3 – 4) pour les porteurs des prothèses valvulaires. Des mesures hygièno – diététiques ont été indiquées à ces patients :
• Respecter la régularité et l’horaire fixe de la prise de l’anti vitamine K.
• Ne jamais augmenter ou diminuer la dose sans avis médical.
• Avoir une alimentation à teneur faible en vitamine K.
• Eviter toute autre prise médicamenteuse sans avis médical.

b. ACFA non valvulaire : Dans notre étude, 65% des malades ont une fibrillation auriculaire non valvulaire. Le choix du traitement anti thrombotique dépend de la stratification du risque thromboembolique et du risque hémorragique .

La prévalence et l’âge

De nombreuses études présentent des données concordantes que ce soit aux Etats-Unis,en Europe ou en Australie : la prévalence globale de l’arythmie complète par fibrillation auriculaire est de l’ordre de 1% de la population. On estime que 2,2 millions de personnes aux Etats-Unis et 4,5 millions personnes en Europe sont atteintes de fibrillation auriculaire [2]. Ces vingt dernières années ont été marquées par une élévation estimée à 66% des admissions hospitalières pour l’ACFA. Cette arythmie représente presque le tiers de toutes les hospitalisations pour un trouble du rythme cardiaque [3]. La prévalence de cette arythmie est fortement dépendante de l’âge. Ainsi, chez les patients de moins de 55 ans, elle est inférieure à 0,1% et passe à 8% chez les patients de plus de 80 ans [4].Dans notre travail, l’arythmie complète par fibrillation auriculaire est retrouvée chez 10,8% des patients hospitalisés au service de cardiologie à l’hôpital militaire Avicenne de Marrakech.

La tranche d’âge la plus touchée par cette arythmie est 65-75 ans, elle constitue presque le tiers de l’échantillon étudié. En tenant compte de la croissance démographique et des données de l’étude ATRIA et Olmsted County, une projection de la prévalence de cette pathologie a été effectuée et qui montre une multiplication d’au moins 2,5 fois jusqu’en 2050 (Figure23) [4-5]. Cette augmentation de la prévalence se fera principalement sur la tranche des plus de 80 ans comme ce que montre le tableau ci-dessous (Tableau XII).

Electrocardiogramme :

L’électrocardiogramme de surface est un outil important dans l’étude de la fibrillation auriculaire. Il permet de détecter cette arythmie et d’apporter une vision globale sur l’activité électrique cardiaque. Parmi les avantages offerts par l’ECG, on peut citer la non-invasivité de la technique et la possibilité de réaliser des enregistrements de longue durée grâce à des dispositifs portables. Les anomalies notables sur le tracé d’ECG d’un patient en fibrillation auriculaires varient en fonction du type de la fibrillation. A la forme persistante ou permanente on note une disparition des ondes P sinusales qui sont remplacées par une ligne de base instable, oscillante, rapide entre 350 à 600 par minute, formant des ondes irrégulières appelées ondes F (Figure 27-28). Ces ondes de fibrillation sont variables en forme et en amplitude : on assiste à une activité microvoltée et la fibrillation est à « petites mailles » ou bien une activité macrovoltée et la fibrillation auriculaire est à « grosses mailles ».

Échocardiographie :

a. Echocardiographie trans-thoracique : L’échocardiographie trans-thoracique est un examen indispensable chez tout patient présentant une fibrillation auriculaire. Elle permet d’étudier les valves cardiaques, de mesurer la taille des oreillettes, d’analyser le ventricule gauche et apprécier le retentissement sur sa fonction afin d’éliminer une cardiopathie organique. La performance du fonctionnement ventriculaire gauche permet de guider la prescription des antiarythmiques et du traitement antithrombotique [25-26]. L’ETT met rarement en évidence un thrombus de l’oreillette gauche.

b. Echocardiographie trans-oesophagienne : L’échocardiographie trans-oesophagienne ne fait pas partie des examens de routine chez un malade en fibrillation auriculaire. La technique est basée sur l’introduction en intraoesophagien d’une ultrasonde à haute fréquence. Grace à cette localisation très proche du cœur, l’ETO fournit des images claires et plus précises [27]. Elle constitue la méthode la plus sensitive et spécifique dans la détection évènements thrombotiques intracavitaires (thrombus dans l’auricule gauche : sensibilité 93% ; spécificité 99%) [28].

L’ETO permet de mettre en évidence un contraste spontané, un thrombus de l’auricule gauche ou une plaque d’athérome aortique. Elle permet également d’évaluer le risque d’avoir un accident vasculaire cérébral et de guider la cardioversion. Selon Leung DY et al, l’ETO des patients en fibrillation auriculaire peut trouver un thrombus de l’auricule gauche dans 5 à 15% des cas [29]. Ainsi dans notre série, 5 patients ont présenté un thrombus de l’OG (5% de l’échantillon étudié).

L’étude physiologique :

Elle est rarement nécessaire pour diagnostiquer la fibrillation auriculaire. Cependant, elle peut être utile pour déterminer le mécanisme d’un accident ischémique en recherchant les signes de vulnérabilité atriale augmentée. Ces derniers associent trois données électrophysiologiques :
• Période réfractaire auriculaire effective courte (< 200 ms) et s’adaptant mal au raccourcissement des cycles ;
• Allongement du temps de conduction intra-auriculaire et activité atriale fragmentée qui peuvent s’accentuer lors de la stimulation auriculaire ;
• Déclenchement d’une fibrillation auriculaire de plus de 1 minute. Ainsi la mesure de la longueur d’onde, qui est le produit de la vitesse de l’influx par la durée de la période réfractaire a été proposée : plus la période réfractaire est courte et la vitesse de conduction est ralentie, plus la longueur d’onde est abaissée et le sujet a un risque de passer en fibrillation auriculaire [32].

Néanmoins, l’ensemble des données électrophysiologiques restent difficilement interprétables car les signes de vulnérabilité atriale augmentée sont fréquemment retrouvés (50%), sans que le suivi ne démontre la survenue d’une fibrillation auriculaire [33].

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Table des matières

INTRODUCTION
PATIENTS ET MÉTHODES
I. Patients
1. Lieu du travail
2. Sélection des patients
II. Méthodologie
RÉSULTATS
I. Épidémiologie
1. Fréquence
2. Age
3. Sexe
4. Origine
5. Facteurs du risque cardiovasculaire
6. Antécédents pathologiques
II. Circonstances de découverte
III. Examen clinique
IV. Electrocardiogramme
V. Classification
VI. Echocardiographie trans-thoracique
1. Dimensions des cavités
2. Fonction systolique du ventricule gauche
3. Pressions de remplissage
4. Valves cardiaques
VII. Echographie transoesophagienne
VIII. Bilan biologique
IX. Etiologies
X. Scores de stratification
1. Score de CHAR2RDSR2R-VASc
2. Score HAS-BLED
3. Traitement
XII. Évolution à long terme
DISCUSSION
I. Enquête clinique
1. Données épidémiologiques
2. Données clinique
3. Étude paraclinique
II. Diagnostic étiologique
1. Valvulopathies rhumatismales
2. Etiologies non valvulaires
III. Complications
1. Mortalité
2. Démence
3. Insuffisance cardiaque
4. Complications thromboemboliques
IV. Prise en charge thérapeutique
1. Traitement pharmacologique
2. Traitement non pharmacologique
CONCLUSION
ANNEXES
RÉSUMÉS
BIBLIOGRAPHIE

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