Accueil des traumatisés sévères en salle d’accueil des urgences vitales

La prise en charge d’un traumatisé sévère (TS) dans un établissement de santé nécessite un plateau technique adapté et la disponibilité permanente d’une équipe pluridisciplinaire entrainée (1). Comme cela existe déjà dans d’autres pays, la France structure progressivement ses réseaux régionaux de traumatologie pour accueillir dans des filières dédiées les patients répondants aux critères de Vittel définis en 2002 (2–4). Les centres de traumatologie (CT) recevant ces patients sont classés en différents niveaux selon leurs capacités d’accueil. Dans la région Provence-Alpes Côte d’Azur (PACA), une filière de traumatologie s’est structurée en 2014 sous l’égide de l’Agence Régionale de Santé (ARS) (5). Ainsi au 1er mars 2014, 4 établissements de la région ont été reconnus centre de traumatologie (CT) de niveau1. Ce niveau est le plus élevé et est dédié en priorité aux patients les plus graves. Les TS les plus graves ont une meilleure survie lorsqu’ils sont pris en charge dans un CT de niveau 1 (6). L’Hôpital d’Instruction des Armées (HIA) Sainte Anne de Toulon est le seul CT de niveau 1 du Var. Dans ce cadre, il s’est inscrit dès 2013 dans une démarche d’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) visant notamment à vérifier la pertinence et la bonne application de son protocole d’accueil des traumatisés sévères en salle d’accueil des urgences vitales (SAUV). L’objectif principal de cette étude était d’évaluer le taux de compliance au protocole d’accueil avant et après la  en place de sessions de formation. A l’instar d’autres équipes (7), nous avons fait le choix de mettre à profit l’objectivité de l’outil vidéo pour réaliser cette EPP afin d’identifier nos dysfonctionnements et d’optimiser notre organisation .

Patients et méthodes 

Méthodologie et objectifs de l’étude :
Il s’agit d’une étude prospective observationnelle réalisée en deux phases distinctes. Tout d’abord, une étude préliminaire de février à octobre 2013 a permis d’identifier les points perfectibles de notre protocole d’accueil. Secondairement a débuté la démarche d’EPP avec une analyse de deux séries de 30 patients sur deux périodes (de décembre 2013 à février 2014 puis d’octobre 2014 à décembre 2014). Les dossiers analysés ont été choisis au hasard par tirage au sort et n’ont concerné que des patients adultes, victimes de traumatismes fermés, et arrivés directement dans notre centre sans passage antérieur dans un autre établissement de santé.

Modalités de l’enregistrement vidéo :
Chacune de nos deux SAUV est pourvue d’une caméra fixe de vidéosurveillance grand angle à enregistrement visuel continu mais sans enregistrement sonore. Les images obtenues étaient automatiquement sauvegardées en temps réel sur un serveur sécurisé par mot de passe. Leur délai de conservation était de 6 jours avant effacement automatique et définitif. Le visionnage de ces bandes n’a été rendu possible par le service informatique de notre hôpital qu’à partir d’un seul poste informatique, et l’accès aux bandes vidéo se faisait par mot de passe connu uniquement des deux seuls évaluateurs des vidéos de cette étude.

Modalités de l’analyse vidéo et critères évalués :
Au cours des différentes périodes de l’étude, l’analyse vidéo s’est faite par un seul binôme référent composé d’un médecin urgentiste et d’un médecin anesthésiste-réanimateur (MAR) afin d’en garantir la reproductibilité. Notre protocole d’accueil des traumatisés sévères en SAUV prévoit qu’une équipe pluridisciplinaire accueille le patient en appliquant de façon systématique et standardisée une stratégie diagnostique et thérapeutique ciblée sur les détresses vitales et notamment les hémorragies. Pour réaliser l’étude préliminaire, une fiche de recueil des données a été établie permettant un horodatage précis de la chronologie des actions réalisées. Trois catégories de critères ont été déterminées pour évaluer notre protocole et la performance des équipes :
– Critères liés à l’équipe d’accueil en SAUV : présence de l’équipe complète (anesthésisteréanimateur, médecin urgentiste, chirurgien, IADE, infirmier des urgences, manipulateur d’électroradiologie), port d’une tenue adaptée (surblouse, masque, calot, gants), et trauma leader identifié par une chasuble dédiée.
– Critères liés aux examens d’imagerie en SAUV (dans le cadre d’un traumatisme non pénétrant) : réalisation systématique d’une radiographie du thorax, d’une radiographie du bassin, et d’une échographie type e-FAST (extended Focused Assessment with Sonography for Traumas).
– Critères liés à la stratégie médicale : respect de l’algorithme de prise en charge et de sa chronologie, orientation appropriée du patient en sortie de SAUV, et temps moyen passé en SAUV. Cette étude préliminaire nous a permis de définir 15 critères d’analyse pour l’EPP :
– Préparation de la SAUV avec réalisation d’une check-list datée et signée
– Trauma leader étant un anesthésiste-réanimateur sénior
– Présence du manipulateur d’électroradiologie à l’arrivée du patient
– Présence d’un IADE à l’arrivée du patient
– Port de la tenue complète par tous les intervenants
– Identification visuelle du trauma leader par une chasuble
– e-FAST
– Radiographie du thorax
– Radiographie du bassin
– Deux radiographies vues par le trauma leader avant de quitter la SAUV
– Ordre chronologique du protocole respecté
– Administration d’acide tranexamique réalisée en préhospitalier ou en SAUV
– Examen systématique du plan postérieur
– Lutte active contre l’hypothermie
– Bon choix d’orientation du patient après la SAUV .

Pour chaque critère, la cible de conformité à atteindre a été fixée à 80% qui est le seuil habituel préconisé pour les indicateurs de qualité et de sécurité des soins (8). La première période de l’EPP a permis de déterminer les critères n’atteignant pas ce seuil. Un cycle global de formation continue de l’ensemble des personnels impliqués en SAUV a été mis en place avant la seconde phase d’étude de l’EPP.

Aspects éthiques et réglementaires :
Concernant les aspects éthiques, l’ensemble de cette étude a fait l’objet d’un avis favorable du comité d’éthique et des expérimentations cliniques de l’établissement le 12 février 2013. Le comité de pilotage des EPP de l’établissement a également donné son accord le 27 septembre 2013. Les données des patients inclus ont été extraites du registre prospectif et anonymisé des traumatisés sévères de l’HIA Sainte Anne enregistré à la Commission Nationale Informatique et Libertés (MR-001 n°1578624V0). Le consentement éclairé des patients ou de leurs familles n’a pas été requis du fait d’une reconnaissance impossible des patients et notamment de leur visage sur les vidéos. Concernant les personnels de l’hôpital, une information sur la vidéosurveillance était affichée dans le service dans le respect de la réglementation.

Analyse statistique :
Les données qualitatives sont exprimées sous la forme nombre (%) et les données paramétriques sous la forme moyenne ± écart type.

Discussion

La prise en charge des TS impose la mise en œuvre de stratégies diagnostiques et thérapeutiques efficaces en un temps contraint. Plusieurs actions sont entreprises par différents intervenants (IDE, MAR, urgentiste, manipulateur de radiologie, etc.) de façon simultanée. L’expertise des CT de niveau 1 repose sur plusieurs éléments : le volume d’activité, la formation permanente de leurs personnels grâce notamment à l’utilisation de la simulation médicale reconnue comme facteur d’amélioration des pratiques professionnelles (9–11). L’évaluation régulière de la performance des équipes s’inscrit dans une démarche constante d’amélioration (6,12). C’est dans ce cadre qu’une EPP a été mise en place dans notre centre. Une des problématiques résidait dans le choix d’une méthode fiable et reproductible pour conduire l’analyse. L’outil vidéo est couramment utilisé en pratique clinique dans les services d’urgence (3,13–16), au bloc opératoire (17) ou en urgence pédiatrique (18), comme en simulation (9,19) pour évaluer avec objectivité les actions menées. Une équipe hollandaise (3) a rapporté en 2009 son expérience de l’utilisation de l’analyse vidéo pour évaluer le fonctionnement de son équipe de traumatologie. Les auteurs ont montré que la vidéo était un outil performant pour mesurer les écarts de protocole. Les actions étant réalisées de façon simultanée, l‘outil vidéo nous a permis de visionner plusieurs fois les situations afin de réduire le biais d’observation. Lors de la période de formation, les formateurs ont pu insister sur des situations précises qu’ils ont pu repérer lors des visionnages. En 1993, Townsend et al. (20) concluaient déjà que la réanimation des traumatisés pouvait être améliorée par le visionnage d’un enregistrement vidéo. Les principaux bénéfices retenus de cette étude avaient été une meilleure utilisation du temps, la correction d’erreurs de stratégie ou techniques et l’amélioration de la survie. Rogers et al. (21) ont également montré que la revue vidéo est une bonne méthode pour améliorer la qualité de la prise en charge et de la formation. D’autres études ont également utilisé la vidéo pour évaluer le respect de protocoles et la qualité de prise en charge (13,22,23). A l’inverse, certains auteurs n’ont pas retrouvé de plus-value à l’utilisation de la vidéo dans le débriefing de simulation de la gestion de situation de crise (24).

Analyse des résultats :
A l’échelle de notre centre, les résultats obtenus ont mis en exergue le problème de disponibilité de certaines catégories de personnels pour les accueils de traumatisés. Entre les 2 périodes ont été menées des actions d’amélioration par la formation des nouveaux arrivants, la formation continue de l’ensemble des intervenants et l’organisation de soirées de formation médicale continue en traumatologie. La disponibilité de certaines catégories de personnels reste à améliorer ou la composition de l’équipe doit être mieux adaptée à la gravité annoncée du patient. La prise en charge médicale est globalement conforme au protocole. Godier et al. (25) ont objectivé que le respect des recommandations en traumatologie améliorait de façon significative la survie à 24h et à 30 jours. L’examen du plan postérieur doit être plus systématique. L’utilisation de la vidéo nous a également permis d’améliorer l’organisation spatiale et l’ergonomie de nos SAUV.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Travail de thèse
Résumé
Introduction
Patients et Méthodes
Résultats
Discussion
Conclusion
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES 
Figure 1 : Résultats de l’EPP sur les 15 critères retenus
Tableau 1 : Résultats des deux périodes d’évaluation
ABREVIATIONS
SERMENT D’HIPPOCRATE

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *