ACCEPTABILITÉ SOCIALE DES PROJETS D’EXPLORATION MINIÈRE : COMPARAISON DES PARTIES PRENANTES
PROBLÉMATIQUE
Les entreprises d’exploration minière font face à plusieurs défis. Elles dépendent, pour la plupart, des marchés financiers pour financer leurs opérations, du fait qu’elles ne dégagent pas de revenus de production et qu’elles ne disposent pas d’actifs qui pourraient servir de garantie pour des emprunts bancaires (Prospectors and Developers Association of Canada, 201 0). Avant d’accorder du financement, certains investisseurs évaluent l’engagement de l’entreprise envers le respect de l’environnement et des populations (Bouslah, M’zali, Kooli et al., 2006; Hamilton, 1995). Dans de nombreux pays, le cadre règlementaire est insuffisant et le suivi inadéquat pour satisfaire les attentes locales, et l’autorisation d’explorer accordée par le gouvernement ne donne pas nécessairement les garanties que l ‘ exploration pourra se faire sans opposition (Joyce et Thomson, 2000; Prno et Slocombe, 2012; Thomson et Boutilier, 2011). L’industrie minièr e est confrontée à l’opposition sociale qui résulte d’une perception générale qu’elle est intrinsèquement destructrice (Joyce et Thomson, 2000; Miranda et al. 2005). L’image des mines abandonnées et des amas de rejets miniers a une résonance auprès du public. De ce fait, une entreprise d’exploration peut rencontrer de l’opposition car les populations locales voient dans l’acceptation de l’exploration, l’acceptation de facto de l’exploitation éventuelle d’une mine dans le secteur (Laurence, 2011; Luning, 2012; Prno et Slocombe, 2012).
Pour éviter d’éventuels conflits, l’approbation et l’acceptation continue des projets par les communautés sont souhaitables (Azapagic, 2004; Bridge, 2004; Mutti et al., 2012; Thomson et Boutilier, 2011; Thomson et Joyce, 2006; Ranangen et Zobel, 2014). Les entreprises cherchent de plus en plus à augmenter le niveau d’acceptabilité sociale des projets d’exploration afin de favoriser le déroulement harmonieux des travaux et, le moment venu, faciliter la vente des titres miniers aux entreprises d’exploitation (Prno et Slocombe, 2012). Par conséquent, il est indispensable pour les entreprises d’exploration de développer de bonnes relations avec les communautés locales, et ce, dès le début des activités d’exploration (Hilson et Murck, 2000; Joyce et Thomson, 2000; Luning, 2012; Prno, 2013; Prno et Slocombe, 2012). Certains projets ont été suspendus parce que les attentes des communautés n’étaient pas satisfaites (Prno et Slocombe, 2012). Au Pérou par exemple, la pression des groupes environnementaux a empêché l’expansion d’une mine (Deshaies, 2011).
En Ontario, la communauté autochtone de Kitchenuhmaykoosib a causé l’arrêt d’un projet d’exploration parce qu’elle considérait qu’il était en contradiction avec ses droits ancestraux (Lapointe, 201 0). Certaines entreprises ont vu leur valeur en bourse se déprécier de plusieurs millions de dollars en raison d’échecs dans leurs relations avec les communautés. C’est le cas par exemple de Manhattan Minerais au Pérou, de Meridian Goid en Argentine et de Northgate Minerais au Canada (Réseau, Entreprise et Développement Durable, 2013).
Les communautés locales, à cause de leur proximité avec les projets d’exploration, sont les premières touchées par les impacts positifs ou négatifs des activités. Ainsi, un projet qui satisfait les attentes des communautés locales est plus acceptable (Mzembe et Downs, 2014; Thomson et Boutilier, 2011). Dans plusieurs pays, des guides et des normes de bonnes pratiques ont été mis en place pour encourager les entreprises à respecter les principes du développement durable et favoriser l’acceptabilité sociale de leurs projets (Caron, 2014). En dépit de cela, des conflits existent entre les communautés d’ accueil et les entreprises (Batellier, 2015; Harvey, 2014; Kemp, Owen, Gotzmann et al. , 2011; Owen et Kemp, 2014b). L’existence de conflits pourrait être liée aux écarts entre les attentes des parties concernées par les activités minières et celles que les entreprises minières pourraient satisfaire.
En outre, les attentes des communautés affectées par l’industrie minière sont de plus en plus documentées (Joyce et Thomson, 2000; Kemp et Owen, 2013; Mason et al., 2014; Moffat et Zhang, 2014; Mutti, Yakovleva, Vazquez-Brust et al., 2012; Zhang et Moffat, 2015). Toutefois, ces attentes portent principalement sur l’exploitation minière et elles restent imprécises. Elles ne sont pas déclinées en indicateurs, ce qui permettrait de mesurer si elles sont satisfaites (Azapagic, 2004; Chamaret, 2007; Mendoza et Prabhu, 2000). Lorsque des experts représentant les gouvernements, les PPA et les PPI ont été interrogés pour identifier les critères pertinents pour une norme de certification en développement durable pour l’ exploration minière, un consensus a été établi autour de 27 critères à considérer (Caron, 2014). Des différences pourraient toutefoi s surgir entre les PP A et les PPI concernant les indicateurs qui permettraient de mesurer le respect de ces critères, et surtout en ce qui a trait aux cibles à atteindre, c’est-à-dire aux niveaux d’exigence préconisés.
Exploration minière
Les activités d’exploration minière se divisent en deux grandes étapes. La première concerne les activités d’exploration proprement dites. Elles regroupent les travaux de prospection, les levés géochimiques, l’ évaluation des réserves géologiques, les forages et tranchées visant à chercher des gisements et à en déterminer l’emplacement (Peres Menezes, 2004). Cette étape dure au moins deux ans. La seconde étape est la mise en valeur et peut s’étendre sur environ huit ans (Ressources naturelles Québec, 2013). Les activités de mise en valeur comprennent toutes les activités en lien avec l’ étude de faisabilité jusqu’à la prise de décision de mise en production (Ressources naturelles Québec, 2011). La recherche de zones d’exploration et le prélèvement d’échantillons dans les zones qm semblent avoir un potentiel minier sont les premiers pas de la prospection et de l’exploration minière (Jébrak et Marcoux, 2008; Ressources naturelles Canada, 2014). À cette étape, un équipement spécialisé est utilisé pour évaluer les propriétés magnétiques ou électriques des formations rocheuses en superficie et dans le sous-sol. Si un élément inhabituel est signalé à certains endroits de la zone de levé, un levé de sol est effectué (Ressources naturelles Canada, 2011). Les échantillons sont prélevés dans le but d’effectuer des analyses afin de vérifier chaque anomalie, de déceler et d’évaluer la présence de métaux communs et précieux (J ébrak et Marcoux, 2008).
Lorsqu’un élément de valeur est décelé, l’exploration avancée commence afin de déterminer s’il s’agit d’un gisement ayant un intérêt économique (Ressources naturelles Canada, 2013a). Des activités de plus grande incidence sont alors menées, comme le décapage et l’excavation, les levés géophysiques au sol supplémentaires, l’échantillonnage en rainures, l’échantillonnage de tranchées et le carottage (Jébrak et Marcoux, 2008; Ressources naturelles Canada, 2011). Le gîte minier ou gisement devient un site minier quand l ‘exploration conduit à l ‘exploitation (Institut de la statistique du Québec, 2012). Pour ce mémoire, les travaux d’exploration ont été divisés en trois stades afin de distinguer l’intensité et la durée des impacts de ces travaux. Le stade A comprend la télédétection, les levés géophysiques aéroportés ainsi que de courtes présences sur le terrain (sans machinerie) pour recueillir des échantillons ou faire des tests. Le stade B comprend la réalisation de tranchées, d’échantillonnages et de forages. Cela implique l’utilisation de machinerie, principalement de foreuses, sur de courtes périodes. Le stade C s’étend sur de plus longues périodes et comprend, en plus des activités associées au stade B, des travaux de décapage, d’échantillonnage en vrac, des tests sur le site et dans l’environnement.
Il est important de souligner que très peu de projets conduisent à l’ouverture d’une mine (Laurence, 2011; Miranda et al., 2005). Généralement, un gîte minier sur dix mille devient un site minier (Ressources naturelles Canada, 2011). Les entreprises d’exploration sont classées en trois catégories : les entreprises d’exploration minière JUmors, maJeures et publiques. Les entreprises juniors font généralement de l’exploration et de la mise en valeur. Les entreprises majeures, en plus des activités d’exploration, peuvent exploiter une mine (Institut de la statistique du Québec, 2012). Les entreprises publiques font aussi de l’exploration. I1 s’agit notamment de la SOQUEM et ses filiales, de la Société de développement de la Baie James et des fonds miniers dont le financement est assuré par le gouvernement du Québec (Institut de la statistique du Québec, 2012)
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Table des matières
RÉSUMÉ
REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIÈRES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
INTRODUCTION
CHAPITRE I PROBLÉMATIQUE
2.1. Objectif de la recherche
2.2. Pertinence de la recherche
CHAPITRE II CADRE THÉORIQUE
2.1 Exploration nrinière
2.2 Acceptabilité sociale
2.2.1 Facteurs d’influence de l’acceptabilité sociale
2.2.2 Parties prenantes
2.3 Attentes des parties potentiellement affectées
2.3.1 Principe Qualité de vie
2.3.2 Principe Investissement local
2.3.3 Principe Qualité de l’environnement
CHAPITRE III MÉTHODOLOGIE
3.1 Instrument de collecte de données
3.2 Modes de collecte de données
3.3 Recrutement des participants
3.3.1 Parties potentiellement affectées
3.3.2 Parties impliquées dans l’exploration nrinière
3.4 Analyse des données
3.5 Considérations éthiques
CHAPITRE IV RÉSULTATS
4.1 Participants
4.2 Principe Qualité de vie
4.2.1 Critère Reconnaissance des préoccupations et accommodement des parties potentiellement affectées
4.2.2 Critère Santé et sécurité des parties potentiellement affectées
4.2.3 Critère Qualité de l’environnement sonore et sensoriel
4.2.4 Critère Qualité de l’environnement visuel
4.2.5 Critère Respect du patrimoine culturel
4.2.6 Critère Consentement libre, préalable et éclairé
4.3 Principe Investissement local
4.3.1 Critère Sélection de la main-d’oeuvre locale
4.3.2 Critère Sélection des fournisseurs locaux
4.4 Autres comparaisons
CHAPITRE V DISCUSSION
5.1 Différences entre les parties potentiellement affectées et les parties prenantes impliquées
5.1.1 Participation et accommodement des PPA
5.1.2 Compensations et ententes
5 .1. 3 Qualité de l’environnement sonore
5.1.4 Principe Investissement local
5.1.5 Critère Consentement libre, préalable et éclairé
5.1.6 Identification des parties prenantes
5.2 Position des investisseurs
5.3 Exigences des communautés autochtones
5.4 Différences au sein des parties prenantes impliquées
5.5 Différences selon le niveau de scolarité
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
Annexe 1 : Liste des principes et critères de développement durable spécifiques à l’exploration minière
Annexe 2 : Questionnaire
Annexe 3 : Document explicatif accessible aux répondants sur Internet
Annexe 4 : Entente de recherche avec la communauté de Pikogan
Annexe 5 : Invitation postale envoyée aux résidents de quartiers ciblés
Annexe 6 : Formulaire de consentement
Annexe 7 :Pourcentage des répondants des PPI et des PPA en faveur de l’introduction des indicateurs relatifs au principe Qualité de vie
Annexe 8 : Résultats des tests de Khi-deux et du V de Cramer concernant les comparaisons entre les réponses des PPI et des PP A pour le principe Qualité de vie
Annexe 9 :Pourcentage des répondants des PPI et des PPA en faveur de l’introduction des indicateurs relatifs au principe Investissement local
Annexe 10: Résultats des tests de Khi-deux et du V de Cramer concernant les comparaisons entre les réponses des PPI et des PP A pour le principe
Investissement local
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