1-cocycles pour les n-tresses fermées dans le tore solide qui sont des nœuds et algorithmes de calculs

La théorie des noeuds est un domaine vaste et constamment en expansion. Les premiers travaux remontent au XIXème siècle avec des études de Sir William Thomson (Lord Kelvin) et sa théorie des « vortex atomiques » ([31]) ou encore ceux de Carl Friedrich Gauss ([15]). Aujourd’hui, la théorie des noeuds est rattachée à la topologie et à l’algèbre et possède de nombreuses applications en mathématiques, en physique théorique et en biologie (ADN, etc…). Un des objectifs de la théorie des noeuds est de classer les noeuds par familles. Et pour ce faire, un des principaux outils utilisés est l’invariant. Ou plutôt, les invariants. Car ils peuvent prendre diverses formes : des polynômes (le polynôme d’Alexander (1928) [3], le polynôme de Jones (1984) [19] ou encore le polynôme HOMFLY [13]), des nombres entiers (les invariants de type fini définis par Vassiliev [32]) et on peut également citer l’intégrale de Kontsevich ([23]) qui est un invariant complet. A partir du XXème siècle, la puissance de calcul des ordinateurs a permis d’informatiser ces invariants afin de classer de nombreux noeuds. Le travail de cette thèse s’inscrit dans cet héritage en fournissant un programme en Sagemath qui permet de calculer, pour des 4-tresses fermées qui sont des noeuds dans le tore solide, une nouvelle famille d’invariants dont la construction repose sur la théorie des singularités. Le programme, abondamment commenté, traite les différentes étapes du calcul de cette famille d’invariants : de la génération automatique des invariants au calcul détaillé pour une 4-tresse donnée de ces invariants. De plus, ces invariants peuvent être généralisés à des n-tresses qui sont des noeuds dans le tore solide pour n > 4. Ainsi, ce manuscrit se situe au croisement entre la théorie des singularités, la théorie des noeuds et l’informatique. Un lien est également fait entre notre nouvelle famille d’invariants et les invariants de type fini dans le tore solide.

Groupe de tresse

Les tresses sont une famille d’objets noués introduite en 1925 par Artin dans [5]. Elle sert de modèle-jouet (toy model en anglais) en théorie des noeuds. Il existe de nombreuses manières de définir des tresses. Pour ce manuscrit, nous avons choisi de les définir de la même façon que dans [14] qui propose une introduction claire et concise des tresses. Nous nous inspirerons donc essentiellement de la structure de [14] dans cette section mais nous avons choisi de prendre la définition de [27] car elle est plus pertinente pour ce travail.

Soit n ≥ 1 un entier et soit P1, …, Pn n points distincts du plan R² (on pourra supposer Pk = (k, 0), ∀1 ≤ k ≤ n).

Définition 1.3.1. Une tresse à n brins ou n-tresse est un n-tuple β = (b1, …, bn) de chemins, bk : [0, 1] → R² tels que :

— bk(0) = Pk pour tout 1 ≤ k ≤ n ;
— il existe une permutation χ = θ(β) ∈ Symn telle que bk(1) = Pχ(k) pour tout 1≤k≤n
— bk(t) 6= bl(t), ∀k 6= l, ∀t ∈ [0, 1]

Définition 1.3.2. On dit alors que deux tresses α et β sont homotopes s’il existe une famille continue {γs}s∈[0,1] de tresses telles que γ0 = α et γ1 = β.

On remarque que θ(α) = θ(β) (permutations) si α et β sont homotopes. Dans la suite, ce qui va nous intéresser, ce sont plutôt les classes d’homotopie de tresses.

Définition 1.3.3. Soit Ik une copie de l’intervalle [0, 1]. Pour une tresse β = (b1, …, bn), on définit la tresse géométrique :

βg : I1 t …. t In → R × [0, 1]

par βg(t) = (bk(t), t)∀t ∈ Ik, ∀1 ≤ k ≤ n

On considère alors la projection proj : R² × [0, 1] → R × [0, 1] définie par proj(x, y, t)= (x, t). Alors, à homotopie près, on peut supposer que proj ◦ βg est une immersion lisse avec un nombre fini de points doubles transversaux : ce sont les croisements de la tresse (on précisera quel brin passe au dessus de l’autre).

Diagrammes de Gauss

Les diagrammes de Gauss sont un outil permettant de formaliser les diagrammes de noeuds. Ils sont particulièrement utiles lorsque l’on veut coder informatiquement un diagramme de noeuds. On peut également citer [8] qui utilise les diagrammes de Gauss afin, entre autre, de donner une autre manière de calculer le polynôme de HOMFLY-PT.

Définition 1.4.1. Un diagramme de Gauss est un cercle S1 avec un ensemble de flèches signées dont les extrémités appartiennent au cercle.

Remarque. Habituellement, un diagramme de Gauss sera représenté avec les flèches « à l’intérieur du cercle ».

On peut relier cette notion à la notion de diagramme de noeud : sachant qu’un noeud K est un plongement de S1 , le cercle correspond à S1 , les flèches correspondent aux croisements de K et les signes des flèches sont naturellement les signes des croisements qu’elles représentent. On choisit la convention suivante: le pied de la flèche correspond au sous-croisement et la tête de flèche au sur-croisement.

Remarque. Pour faciliter la traduction d’un diagramme de noeud en diagramme de Gauss, on numérote les croisements. Informatiquement, c’est ce qui est fait. Ainsi, pour générer un diagramme de Gauss, l’algorithme se fixe arbitrairement un point de départ (nommé le point de base et symbolisé par ∗) et parcourt le noeud dans le sens de son orientation. On commence par une liste vide [] à laquelle on va rajouter les croisements au fur et à mesure du parcours. Si l’algorithme passe par le croisement numéroté i en empruntant le brin du dessus, on rajoute −i à la liste. Si c’est par le brin du dessous, on rajoute i. La liste finale obtenue permet de tracer le diagramme de Gauss. Il suffit de tracer un cercle, de placer les différents i et −i dans l’ordre de la liste puis de les relier par un segment. −i correspond alors à la tête de flèche et i à un pied de flèche.

Remarque. Tout noeud (et plus généralement, tout entrelacs) se traduit en un diagramme de Gauss (pour un entrelacs, le diagramme de Gauss sera composé d’autant de cercles qu’il aura de composantes). Cependant, un diagramme de Gauss ne correspond pas forcément à un noeud (ou un entrelacs). La notion qui permet d’obtenir une équivalence parfaite entre diagrammes de Gauss et noeuds est la notion de noeuds virtuels que nous ne traitons pas dans ce manuscrit.

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Table des matières

INTRODUCTION
1 Prérequis
1.1 Introduction à la théorie des noeuds
1.2 Invariants de type fini
1.3 Groupe de tresse
1.4 Diagrammes de Gauss
1.5 Notions dans le cadre du tore solide
1.6 Théorie des noeuds à un paramètre
1.6.1 Le lacet rot
1.6.2 Mouvement de Reidemeister III et diagrammes de Gauss
2 Les 1-cocycles
2.1 1-cocycles de degré de Gauss 0
2.2 1-cocycles de degré de Gauss 1
2.2.1 Les différents mouvements de flèches
2.2.2 Poids des 1-cocycles
2.2.3 Invariance et 1-cocycles de degré 1
3 Améliorations et résultats pour n = 4
3.1 Améliorations des invariants
3.1.1 Amélioration des poids
3.1.2 Une nouvelle forme pour les 1-cocycles
3.2 Invariants de type fini
3.2.1 L’espace des formules de Gauss homogènes à 2 flèches
3.2.2 Etude de la dimension de I2
3.2.3 Etude des 1-cocycles combinatoires
3.3 Perspectives et questionnement
3.3.1 Tresses non inversibles
3.3.2 Degré supérieur
3.3.3 Avec des 1-cocycles améliorés ?
3.3.4 Généralisation à des n-tresses ?
4 Explications des algorithmes
4.1 Evaluer un 1-cocycle pour une tresse fermée
4.1.1 Diagramme de Gauss pour les tresses fermées dans le tore solide
4.1.2 Le lacet canonique rot
4.1.3 Détecter un sous-diagramme correspondant à une configuration
4.2 Générer tous les 1-cocycles de degré m
4.2.1 Configurations autorisées
4.2.2 Générer une combinaison linéaire invariante de configurations à partir d’une configuration M
CONCLUSION
Annexes

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